Je ne suis pas née comme les autres meufs. Non, je suis née avec tout un tas de complications au niveau de ce qui sert à procréer. Autant prononcer le mot qui fait si mal à la femme que je suis, que je deviens : je suis née stérile. Je suis incapable de porter un enfant, et de donner la vie. Voyons les côtés positifs de la chose : je n'ai jamais eu mes règles, et je n'ai pas à m'emmerder avec la contraception.
Mais personne ne peut comprendre. Ce fardeau me tire un peu plus chaque jour vers le bas, ce secret que je n'ose révéler à personne de peur d'être sévèrement raillé me hante. Je ne veux pas que l'on sache qu'Arpège, la féminine et sauvage accro au cul ne peut même pas ovuler. Ça me suivrait jusqu'à ce que je quitte ces lieux. Et encore.
Ovariectomie. Je ne suis pas Expert, je n'ai pas su ce que ça voulait dire quand le médecin de l'orphelinat l'a prononcé. Je l'ai regardé, d'un air désinvolte, en mâchant mon chewing-gum, contrariée d'être encore convoquée ici. Je n'avais pas conscience que ce terme scientifique signifiait la fin totale de ma féminité.
J'ai reçu comme une balle dans la poitrine, et comme une conne j'ai chialé devant le médecin. On allait devoir me retirer les ovaires, qui encouraient un bien trop haut risque de cancer. Pour mon bien et ma santé, qu'on m'a dit. Comme si ça allait changer quelque chose.
J'ai voulu y aller seule, me faire opérer. Je ne voulais personne à mes côtés pour s'apitoyer sur mon sort, me regarder avec pitié, et savoir mon secret.
J'ai tout simplement réalisé que je n'étais pas assez forte pour surmonter cette épreuve seule. Parfois, il faut savoir reconnaître les propres limites de son mental. J'ai su réaliser que j'avait besoin d'une main tendue, et que cette fois-ci je ne pourrai pas tout encaisser et me taire. Encore une fois.
End n'a pas hésité une seconde quand je lui ai expliqué la situation. Même si ça avait été pour une ridicule séance de shopping dans Londres il aurait accepté, de toute façon. Car End est le meilleur ami que j'ai jamais eu, sans déconner. Sans mots, on se comprend. On se sait. Comme ils disent dans Avatar : on se "voit". On a cette connexion assez rare qu'on parfois les animaux - et notamment les êtres humains. On s'aime d'un amour fraternel et puissant, un truc invincible et éternel, plus fort que l'amour, la honte, la haine et toutes ces conneries.
Je dois l'avouer, ce fut un moment assez gênant. Dans le taxi et dans la chambre d'hôpital, j'ai tenté de grotesques vannes et blagues débiles. Je cherchais à détendre l'atmosphère, car j'avais honte d'entraîner mon ami dans cet endroit glauque qu'aucun des orphelins de la WH n'aime. J'avais honte de me mettre à nue devant lui, de lui dire "je souffre et j'ai besoin de toi", d'avouer tout simplement mes faiblesses.
••• Rédaction en cours •••