Feuille de personnage Wammys: H / A Double Compte: Âge: seize ans / vingt-quatre ans
Sujet: Gentiment — Carthage Sam 12 Oct - 18:57
Je suis fatigué de prétendre que le monde a tort pour justifier mon propre comportement.
Vingt isoloirs, deux casques. Pitié. Tant pis, j'y suis, j'y reste. J'attrape un casque et l'enfile rapidement sur ma tête. De toute façon, je suis trop énervée, il faut que je me défoule. Je viens de courir pendant une heure, et j'ai encore les poings refermés. Je remonte la fermeture éclair de ma veste en cuir noir, j'étire les bras. Je fais rouler mes chevilles sur le sol, et j'entre dans un isoloir libre. Putain d'école de merde.
La raison de ma fureur? Un sale type à la cantine. Un enfoiré de— je ne sais même pas à quel groupe il appartient, mais certainement pas celui des Shapes. Pas assez fort, assez dur pour ça. On reconnaît immédiatement un Shape. Pas forcément à sa musculature, mais on ressent toujours ce sentiment de puissance physique et mentale. À juste titre. Ce type était là et j'ai tout de suite deviné ce qu'il me voulait.
Le fait est que je m'installais souvent à la même table que lui et son groupe d'amis, sans m'en approcher davantage.
Entre le yaourt nature et la pomme, il a fait volte-face et j'étais juste derrière lui. Il m'a dévisagée assez longtemps pour que je m'en agace.
Aston — Qu'est-ce que tu veux? Et dans ma tête je pensais très fort, “bouffon”.
Garçon emmerdant — Tu t'appelles Aston, c'est ça?
Non, je m'appelle Afton Tempel mon gars. J'ai simplement haussé les épaules, je voyais très bien où il allait arriver et j'avais pas spécialement envie de l'écouter déblatérer plus longtemps, me retenant malgré moi, en vain.
Garçon emmerdant — Ça nous dérange pas que tu manges avec nous, mais c'est que tu participes jamais, c'est un peu étrange.
Et moi qui pensais que les surdoués comprenaient les différences et les problèmes de socialisation mieux que personne... Au lieu de lui fourrer mon plateau là où je pense, j'ai encore haussé les épaules. Je commençais à mordre la peau tendre à l'intérieur de la joue et je me demandais combien de temps encore il allait me tenir la jambe comme ça. J'avais pas que ça à faire.
Fille nulle n°1 — Laisse, elle pense être trop bien pour nous. La petite nouvelle pense que ses problèmes sont plus importants que ceux du reste du monde, lança une petite blonde, bien trop bavarde à mon goût. Là, je ne pensais même plus à jeter mon plateau, mais à répondre avec mes poings.
Fille nulle n°2 — Je l'ai jamais vue parler gentiment avec quelqu'un depuis qu'elle est là, rajoute une autre petite, brune cette fois.
J'ai reposé sèchement le yaourt que j'avais pris avant de me dire que c'était trop d'effort de ranger mon plateau inutilisé. Alors je les ai laissé en plan, comme ça, entre le yaourt et la pomme, avec leur air con. Je me sentais fière, dans un autre contexte, je les aurais frappé jusqu'au dernier moment.
J'ai zappé le déjeuner, je suis allée courir à m'en faire tourner la tête et comme la rage ne partait toujours pas, je me suis dit que j'allais écrabouiller des silhouettes en papier en pensant très fort à leurs figures, surtout la petite blonde insupportable.
Dernière édition par Aston le Lun 21 Oct - 22:22, édité 1 fois
Carthage
Sujet: Re: Gentiment — Carthage Dim 20 Oct - 19:26
Carthage aimait le son des balles. Lorsque la violence t'est interdite, lorsqu'elle t'est interdite mais que tu vibres d'énergie et de revendications, il faut trouver ailleurs ce que tu aurais trouvé dans la violence. Carthage retrouvait cette impossible brutalité dans son monde sensoriel, dans les sons : elle vivait pour parler et revendiquer dans cette parole ce qu'elle ne pouvait posséder en acte. La musique était pour elle un échappatoire plus que réel, un moyen de plus pour étaler sa présence au monde. Les écouteurs était chez elle bannis : elle aimait faire partager de force ce qu'elle écoutait avec son entourage. Les bruits de la salle de tir étaient pour elle exutoires, libérateurs. Elle savourait de voir les autres accomplir en violence ce qu'elle aurait aimé faire. Sans sa maladie elle aurait été Shape. Elle aurait été racaille. Elle aurait été bagarreuse. Elle aurait enfin pu se taire peut-être.
Aujourd'hui encore Carthage est dans la salle de tir, cachée sous la table d'une cabine de tir. Elle écoute ceux qui s'entraînent, ayant prétexté un besoin d'aller à l'infirmerie pour quitter son groupe d'amis à la cafétéria. Il y avait ces moments où elle avait besoin de ce son-là, net, brutal, plutôt que le brouhaha et le stress de la cafétéria bondée.
Quelqu'un ouvre la porte. C'est Aston. Et merde. Cette meuf était trop sérieuse, trop coincée, trop putain d'hystéro-succeptible. C'était peut-être parce qu'elle n'était pas de bonne humeur à la base, mais Carthage lui trouva tout à coup cent fois plus de défauts qu'à l'accoutumée. Elle décrocha finalement la mâchoire, absurdement assise en tailleur sous la table de tir, absurdement souriante.
« Hey Aston ! Ne te gêne pas, tu peux t'installer. J'étais juste là pour écouter. »
Quelques secondes d'observation de la jeune fille, l'analyse de l'heure et de la pièce la firent ajouter :
« Journée de merde pour toi aussi ? »
Et en disant cela, un sourire amer lui traversa le visage.
Aston
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Sujet: Re: Gentiment — Carthage Lun 21 Oct - 22:21
Peu importe que le chat soir gris ou noir pourvu qu'il attrape les souris
Moriarty — ... interdit de bousculer miss Carthage de quelque façon que ce soit.
Blondinette au sourire grimaçant, aux mimiques tête-à-claque. Nous sommes quatre nouveaux arrivants, ce qui paraît énorme dans ce tout petit établissement. On nous a fait venir dans cette salle spacieuse, pour nous donner nos effets, confisquer ce qu'il avait à confisquer et pour nous expliquer les règles de cet endroit.
Maintenant, on a droit au petit laïus sur les élèves fragiles, avec présentation des élèves en question à l'appui. Je me rends compte qu'il y a des gamins ici qui sont là depuis des années. Orphelins depuis des années... Ça me fait un peu peur. Je ne me sens pas plus orpheline que surdouée. Je me sens autant à ma place ici qu'un rat dans un vivarium. Je tire sur le col de ma chemise blanche, j'étouffe.
••
Carthage — Hey Aston! Ne te gêne pas–
Je n'écoute plus. J'en ai juste marre de tous ces gens en permanence, je voudrais pouvoir fermer la porte et me retrouver vraiment seule. Mais ici, quand on ferme une porte, on se contente juste d'en ouvrir une autre. Avec plus de monde encore, si c'est possible. Voilà pourquoi une immense lassitude s'empare de moi et que je coupe les écoutilles, hasta la vista baby, je ne t'écoute plus, je ne t'entends plus. Ferme ta gueule, par pitié.
Je pose l'arme sur le comptoir. J'appuie sur le bouton. La barre mécanique s'avance, j'installe la silhouette, c'est à peine si je devine la présence de la blonde maxi-ondes.
Carthage — Journée de merde pour toi aussi?
Je lui lance un regard à peine équivoque. Elle est assise juste sous un pistolet qui pourrait éparpiller son cerveau sur tous les murs de la cabine, je n'ai qu'à appuyer sur la détente tout contre sa tempe. Il faut vraiment que je me calme. Mais c'est impossible avec une présence quasi-constante près de soi. On n'est jamais seul ici, merde.
Aston — Tu devrais porter un casque.
Je désigne celui posé sur mes oreilles avec mes index. Une petite précision s'impose.
Aston — T'es peut-être venue ici pour écouter, je suis pas sûre que tu veuilles en ressortir sourde.
Je sors de la cabine un dixième de seconde. Je la laisse avec l'arme, parce que je devine que le simple fait de tirer briserait son épaule en mille morceaux. Y a aucune chance que Carthage fasse du mal à quelqu'un d'autre qu'à elle-même.
••
Gros con — On dirait une foire aux monstres.
Il chuchote contre mon oreille et ses postillons m'éclaboussent.
Aston — Ta gueule gros con.
Après tout, cette nana est autant un monstre que nous, pas vrai? Tous autant que nous sommes, nous ne sommes que des bêtes de foire, entassés dans un seul endroit avant d'être dévoilés au monde, l'empreinte indélébile de la Maison tatouée juste là, au-dessus des sourcils, bien visible. Cette fille aux os fragiles, elle serait bien chanceuse de n'avoir que ses os qui déconnent.
••
Aston — Tiens, et sors de sous cette putain de table, on dirait un croque-mitaine c'est flippant.
Je lui tends un casque. De toute façon, c'était censé être une journée de merde, n'est-ce pas?
Carthage
Sujet: Re: Gentiment — Carthage Sam 30 Nov - 14:08
« Tu devrais porter un casque. »
Un sourire tord le visage de Carthage. Un casque ? Vraiment ? Ce truc pesant et effrayant qui la rendait encore plus handicapée qu'à son habitude ? Hors de question.
« C'est gentil Aston, mais tu n'as pas à t'inquiéter pour moi. Je vais juste changer de cachette. »
Même si tout le monde, toujours, était obligé de s'inquiéter pour elle. Sur ces mots elle sortit de sous la table pour se mettre debout, avec cette prudente lenteur qui la poursuivait où qu'elle aille. Le temps qu'elle soit debout, Aston avait déjà déguerpi. En silence, Carthage la suivit hors de la salle, sans même un regard pour l'arme abandonnée. Seul le son l'intéressait, l'arme la dégoûtait plus qu'autre chose.
Hors de la cabine, elle suivit Aston du regard avant que, une énième fois, elle lui adresse la parole.
« Ca fait un bail que t'es là nan ? Trois semaines ? Alors, ça fait quoi d'être toujours orpheline ? »
Carthage aimait provoquer Aston. Elle pouvait sentir que derrière le calme de la jeune fille, il y avait une rage bouillonnante qui manquait chaque jour de se déverser sur la face du monde. Carthage aimait bien voir les gens déverser leur rage, c'est ce qu'elle faisait très souvent d'ailleurs. Mais il y avait toujours quelque chose de rafraîchissant dans la colère des autres, quelque chose de fondamentalement différent de ses crises de cris et de larmes qui suivaient ses caprices. Dans la rage d'Aston il y avait une certaine noblesse, une dignité. Une incroyable futilité, aussi.
Aston
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Sujet: Re: Gentiment — Carthage Sam 11 Jan - 14:14
Where does the good go
Pendant une dizaine de minutes, je n'ai plus que l'arme en tête. Elle est inconsciente, putain, à laisser un calibre – pas le plus gros, mais puissant néanmoins – sans surveillance. OK, il va pas s'enfuir, il va pas se mettre à courir, mais il y a tellement de types pas normaux ici: des suicidaires et des moins suicidaires. Tous assez timbrés, traumatisés pour avoir l'irresponsabilité d'appuyer la détente.
Et puis mes bouchons d'oreilles anti-Carthage ont du tomber parce que je me suis mise à la réentendre.
Carthage — Ça fait un bail que t'es là nan? Trois semaines? Alors, ça fait quoi d'être toujours orpheline?
Pourriture. Mes dents se serrent et mon sourire se crispe. On dirait un moucheron, un insecte que tu écrases, peu importe qu'il te gêne ou non, qu'il te soit nuisible ou pas. C'est dans ta nature de l'écraser, alors tu l'écrases. Je comprends qu'elle soit aussi chiante, qu'elle cherche autant à mettre les nerfs – parce que je suis certaine que je ne suis pas la seule cible, ce serait trop d'honneurs –, après tout, elle ne peut pas se battre, et, heureusement pour elle, elle ne peut pas non plus se faire battre. Elle serre les poings par la pensée, parce qu'elle se briserait sûrement les phalanges si elle le faisait réellement.
Quand Carthage fait de moi sa target, je passe en mode pitié. Son cas la rend pathétique, elle me peine. Je sais que ça ne peut pas lui faire plaisir, mais ça me fait aussi plaisir qu'elle lorsqu'elle m'accule contre le mur de ma résistance morale.
Aston — Je ne sais pas, tu pourrais me donner des cours? Tu les enchaînes en plus: une orpheline avec une maladie orpheline, ça fait de toi un maître de conférence tu ne penses pas?
À ce moment, j'ai tellement envie de lui attraper son frêle poignet, de regarder sa réaction au fond de ses yeux quand je serrerai un peu plus à chaque pression. Et que je m'arrêterai juste à temps.
Au lieu de ça, je presse la détente sur la cible. Et la balle creuse un trou à l'endroit exact de la main de Carthage, si elle s'était tenue devant le carton.