Il faisait gris, il pleuvait fort, j’avais une veste noire, la capuche rabattu sur ma tête, fermeture éclaire remontée, écouteur blanc aux oreilles, mon baladeur à la pomme à fond, et je courrai, courrai sans m’arrêter. J’adore la pluie, je suis de mauvaise humeur faute de punching-ball je cours. Je ne sais pas pourquoi, je me suis réveillé comme ça…
Serait-ce dû à un mauvais rêve ? Je ne sais pas, sûrement. En tout cas j’étais de mauvaise humeur, triste, en colère, je m’en voulais, j’en voulais à la terre entière. Aurai-je besoin d’un câlin, je ne sais pas, aurai-je besoin de me battre contre un boulet qui arrive au mauvais endroit au mauvais moment ? Je ne sais pas non plus. Ce que je ne sais pas non plus c’est pourquoi je cours comme un dératé depuis plus d’une demi-heure sous une pluie torrentielle.
Le sol est glissant, je manque de me casser la gueule et quand je me casse la gueule, dans l’élan je me rattrape avec une main au sol pour amortir le choc, un glissement sur l’épaule puis un roulement le long du dos pour atterrir sur mes jambes prendre appuie et accélérer.
Peut-être que courir comme un dératé m’aidait à ne plus penser à rien. Je n’en sais rien, mais la musique n’était pas assez forte, je m’entendais toujours penser, dans l’espoir que cela cesse j’hurlais. Pas des cris de pucelle en détresse, non, je suis le Doctor… Bref, ça n’allait pas… Vraiment pas, c’est rare que je sois dans cet état, en temps normal, je suis blasé, inexpressif, indifférent, ou souriant pour faire chier mon interlocuteur, cynique, méfiant, froid, distant, gentil et doux avec les rares élus. Mais en colère et refusant de m’écouter penser. Ça recommence, j’hurle de nouveau. Bordel faut que ça cesse.

Je n’ai jamais maîtrisé mes pensées, ça fusent, ça parle sans cesse, un flot ininterrompu de paroles. Des fois ce sont des choses immondes et je m’effraie à m’entendre penser des choses de la sorte, d’autre fois ce sont des niaiseries. Mais la plus part du temps ce sont des choses froides, noires, négatives et aussi des paroles… insultes de ma mère, piquant une énième crise de nerf parce que je suis plus brillant qu’elle alors que je n’avais que 8 ans. « NON CE N’EST PAS POSSIBLE, FERME LA MERDE FERME LA ! » Et elle ponctuait chaque mot de coup.
Je manque de glisser et de me casser méchamment la gueule en me remémorant les crises de folie de ma mère. Ah et aussi mon père, quand il rentrait saoul et qu’il me voyait, il me donnait des surnoms assez affectueux « Sale merdeux » ou « Petit con » et je vous passe les plus charmants.
Je continue de courir, et il pleut encore plus fort. Je manque de me casser la gueule une fois de plus, je ne sais plus combien de tour j’ai fais, l’album que j’écoutais au départ vient de recommencer depuis le début, je cours depuis une heure et dix minutes, c’est le Best-of d’ELLEGARDEN, l’un de mes groupes préférés, normal que je connaisse la durée par-cœur… Non je ne suis pas une groupie.
Je continue de courir, je n’ai toujours pas trouvé pourquoi, j’aurai pu m’enfermer dans la salle de musique et jouer du piano pendant des heures… Non… Il pleut j’adore ça, il pleut toujours aussi fort depuis une heure, ce n’est pas croyable. Je n’ai pas trouvé d’autre moyen pour me défouler, je continuerai jusqu’à ramper, jusqu’à être calmer où jusqu’avoir trouvé quelqu’un pour me consoler de ne je ne sais pas quoi.

Je ne vais pas bien je l’admets, l’inébranlable Doctor a un instant de faiblesse, je rabattais ma capuche qui allait tomber en arrière et laisser mon visage trahissant ma mauvaise humeur qui lui supplie de la cacher et j’accélérais encore. Qui sait ? Si je déprime le jour du marathon, j’aurai mes chances non ? Si je ne bois pas deux litres d’eau et je ne m’étire pas pendant un bon quart d’heure je serai recouvert de courbature. Mais ça je m’en fous, pour le moment je cherche un moyen pour me calmer. Je cours, et je ne suis pas résolu de m’arrêter, tout comme la pluie qui augmente son débit, j’ai l’impression de recevoir des coups à chaque gouttes.
C’est tant mieux, ça s’accorde avec les cris de ma mère qui tentent de dépasser le niveau sonore de Migite ou Right Hand d’ELLEGARDEN. Je continue de courir, un énième tour de fini, je distinguais une silhouette sous un parapluie qui s’approchait peu à peu du terrain, je ne me laissais pas perturber et je continuais de courir. Après tout, qui pourrait bien chercher après moi ?

Je me réveille en sueur. Encore une fois ce rêve.
Les flammes toujours et ces mots moqueurs qui volent autours de moi. Je suis assise au milieu de tout ça, impossible de bouger. Les craquements effroyables de la toiture me donnent froid dans le dos. Je regarde à droite, à gauche. En haut de l’escalier il y a Ada et Lies. Elles hurlent « Linda, sort, sort ! » Je regarde vers la porte. Je pourrais y aller. L’escalier est impossible à traverser. Papa hurle paniqué à la recherche de maman. Les craquements cessent. Puis un énorme et dernier craquement se fait entendre. La toiture s’effondre. J’entends mes sœurs crier et me réveille en sursaut. Je meurs de chaud. Il faut que j’évacue ça. Que je cours pour oublier.
Je me lève de mon lit, enfile un survêtement ample. Je regarde par la fenêtre. Il pleut à grosses goutes. Parfait. De quoi me rafraichir. Je chope un parapluie et enfile des baskets. Je regarde le lit de BM. Il est tôt, elle dort encore.
En boule dans son lit, elle ressemble à un chaton.
Je sors dans le couloir.
Je marche sans vraiment me diriger mais sais que j’arriverais à la sortie à un moment. Mes pieds mémorisent mieux que moi. Ils vont errer un peut et je me retrouverais dehors sans m’en apercevoir.

Je ne comprends pas ce rêve. Je n’étais pas là. Je fais ce rêve depuis le jour de l’incendie. Psychologique qu’ils disent. Surement. Mais ce qui me gave c’est que jme réveille toujours en sueur et énervée. Impossible de me calmer sans me dépenser. Alors je cours. Avant d’arriver ici, le matin de ces rêves (presque tous les jours), Ludwig venait courir avec moi.
Par ce qu’un matin il m’avait croisée dans le couloir, paniquée, en jogging, cherchant la sortie la plus proche. Alors sans un mot pour une fois il était venu courir. On avait couru des heures. Puis on était rentrés pour le déjeuné. J’avais aimé ce moment. Et depuis on avait couru tout les matins ensemble.
Je ne comptais donc pas abandonner ce rituel. Courir me libérait. Seul moment où j’étais calme.

Alors ce matin je vais courir. Je sens l’air frai fouetter ma joue et la pluie me tremper. J’ouvre mon parapluie et me dirige vers le state. Je commencerais surement par ça pour le moment. J’irais ensuite explorer les alentours pour changer de paysage.
Je parcoure le chemin assez vite. J’ai vraiment besoin de me dégourdir les jambes.
J’aperçoit un garçon en train de courir. A fond. Il courre, en braillant comme un âne, les écouteurs sur les oreilles. Lui aussi va mal ?
Bah, peut être pas, tout le monde ne va pas mal. Bon c’est qu’a gueuler comme ça on ne peut pas aller bien. Je me dirige vers la piste et se met en plein milieu. Histoire que des qu’il arrive là, il me voit.
Je braille.

- BON ! Toi, tu fous quoi là ? Y pleut, t’as pas vu ? Hé cause !

Je fais un signe de la main désinvolte, voir si il me calculait. Bon, j’ai l’air tarte, mais pas tant que lui.
Il compte s’arrêter oui ?!

Ah, il s’arrête enfin. Il est vraiment essoufflé.
Il se penche en avant, les mains appuyées sur les genoux, tentant de reprendre son souffle. Ca lui prends quelques minutes quand même, il a du beaucoup courir.
Il enlève sa capuche. Je suis surprise de reconnaitre Doctor. Mais qu’est ce qu’il fout là par un temps pareil ?!

Il s’approche et s’abrite sous mon parapluie. Je le lève, histoire qu’il s’y tienne à peu près droit.
Il est détrempé, genre dégoulinant. Je me demande si c’est plutôt à base d’eau ou de sueur. Peut être à cinquante pour cent des deux… Oui, je me pose de drôles de questions.

- Salut Leïn, je cours, je pensais que ça se voyait, autant que la pluie, d’ailleurs… Et toi que fais-tu ? Il est assez tôt, et il pleut fort.

Non mais quoi ? BIEN SUR que j’ai vu qu’il pleut ! Et son état ne peut que me le confirmer (à moins qu’il ne transpire vraiment énormément) Et puis pourquoi j’aurais un parapluie sinon ?
Non franchement, même pour rire, c’est débile de dire ça. Autant que de m’informer qu’il était en train de courir.
Oui, « se déplacer en effectuant un mouvement successif et accéléré des jambes », c’est ça !
Ce que je veux savoir c’est pourquoi, la question est plutôt implicite, je suis d’accord mais quand même …
Moi, j’ai une raison, il en a surement une. Surtout courir en gueulant !
Franchement, je n’ai pas compris un traitre mot de ce qu’il a hurlé. Ou peut être beuglé.
En tout cas, il y mettait toute sa voix. Je me demande comme il peut ne pas avoir la gorge déchirée l’intérieur, et mal pour parler, vu la force avec laquelle il a braillé !

Il m’observe un moment. Je dois avoir l’air a moitié réveillée, les cheveux trempés de sueur, pas coiffé, fringuée a la va-vite …

- Dis… Quelque chose ne va pas Leïn ?

Rah ! LA question inévitable.. Je crois que je rougis. Peut être de l’absurdité de la situation ? En général, je suis très ouverte, pas timide pour un sous, et cause a qui veut bien m’entendre. J’ai l’habitude de parler sans arrêt, qu’on me coupe car je parle trop. Je comble les blancs, en fait il n’y en a jamais.
Je suis à l’aise à l’oral, devant une personne comme devant 30, aussi bien avec des filles que des garçons (c’est pratique, c’être garçon manqué, on est « acceptés » dans tout les milieux !).

Mais là je bloque. Je ne sais pas pourquoi.
Peut être par ce que ces moments appartiennent au passé, que Ludwig n’est pas là et que Doctor se tien où il aurait dû être.
Je lève les yeux, tente a sourire (je ne suis pas sûre qu’il est convainquant, tant pis)

- Oh … euh, j’ai pas très bien dormi … Alors que je suis sortie prendre l’air, il fait frais, je crève de chaud à l’intérieur. Et toi ? Tu fais quoi là ? Il pleut beaucoup, t’es trempé ! Tu cours de puis combien de temps ? Et pourquoi tu criais ?

Encore une fois je me stop. Les mots ont débordé.
[Hrp > Pas graaaave x) su coup jsuis encore plus impatiente de lire ta réponse o/ ]

Faux sourire, pas très crédible, et une hésitation dans le début de sa phrase, elle ment… Pas très bien dormi, crève de chaud… Sûrement vrai, mais il y a quelque chose de personnel qui la tracasse… Et naturellement elle me retournait la question, je commençais à fatiguer, je suis sorti sans avoir prit de petit-déjeuner, et je me donne à fond, j’ai de léger vertige, je suis stupide j’aurais dû manger avant de sortir et courir, sous la pluie en plus, je vais tomber malade à coup sûr…
Moi qui ait les docteurs, et les médicaments, et puis je tombe malade une ou deux fois par an et encore. Quand je le suis, je suis cloué au lit pour la semaine, et Ember profite de la situation, raison de plus pour ne pas aimer tomber malade. Bref, elle me retourna la question et une autre indiscrète en suivit. Je la regardais, et fit un petit sourire gêné, je suis un comédien, j’ai longuement travaillé ça, je peux vous improvisé un mensonge sans avoir à réfléchir. Juste après qu’elle ait posé sa question, je lui répondis naturellement.

• Boarf, je suis là depuis une heure et quart, et j’adore la pluie, donc ce n’est pas gênant… Et puis j’ai un peu honte, mais je criais parce que j’ai choppé une vilaine crampe dans le creux du genou, c’est très douloureux surtout quand on court.

Je criais, et ça se voyait que je ne souffrais pas physiquement mais moralement, deux options s’offrait à moi, soit elle gobe mon mensonge gros comme pas possible, soit elle comprend que je ne veux pas lui dire la vérité.
Ce n’est pas contre elle, je parle de moi à personne, je n’y arrive pas, je n’en vois pas l’utilité et puis je bloque pour dire ce qui me tracasse, ou ce qui ne va pas. J’arrêtais de sourire, et la regardais l’air sérieux. Ça trouble plus d’une demoiselle, mais là n’était pas le but.

• Trêve de mensonge et faux sourires, si quelque chose ne va pas, tu peux m’en parler hein…

Je lui souriais de nouveau. Je préfère jouer carte sur table, et je n’étais pas d’humeur à jouer aux devinettes, je n’aime pas ça non plus. J’ai les oreilles qui bourdonnent, ça commence à aller mal… Un bon chocolat chaud ne serait pas de refus… La pluie ne stoppait pas, au contraire, j’avais l’impression qu’elle gagnait en intensité, on ferait mieux d’aller s’abriter…

• Je pense qu’on ferait mieux de se poser dans un endroit calme, ça risque d’empirer et de virer à l’orage…

Je passais ma main dans les cheveux pour les éponger un peu, j’étais plus trempé qu’en sueur, par chance, mes cheveux ne frisent pas sous l’eau, je serais beaucoup moins crédible avec de jolies bouclettes, et tellement plus drôle… Heureusement qu’ils ne frisent pas sous la pluie… Oui je viens de vous parler de mes cheveux pendant une petite minute… Je crains parfois…

Je ne crois pas que ma réponse est convaincante … Tant pis.
Pui j’attends qu’il me dise vraiment ce qu’il y a. Si je ne vais pas bien, lui non plus et ça se voit. Comment peut-on hurler comme ça et aller bien ?

- Boarf, je suis là depuis une heure et quart, et j’adore la pluie, donc ce n’est pas gênant… Et puis j’ai un peu honte, mais je criais parce que j’ai choppé une vilaine crampe dans le creux du genou, c’est très douloureux surtout quand on court.

Une crampe ?! Non mais il se fiche de moi ? Mais oui, courir avec une énorme crampe et en hurlant, quoi de plus crédible ?
Soit il se paye ma tête, en espérant que je ne pose pas plus de questions soit il est vraiment débile au point que ça soit vrai.
J’opter pour la première réponse. Je ne peux pas concevoir qu’il soit débile a ce point. D’ailleurs il ne serait pas ici si c’était le cas … Enfin je crois.
On peut venir ici en étant un total abrutit EXTREMENT fort en une seule chose ?
Juste … Quelqu’un fort en maths par exemple. Puis simplet comme tout. Naïf. Qui sait juste la valeur de Pi deux cents chiffres après la virgule. Mais incapable de parler au gens. De retenir une date, un poème, un nom ou un visage. Juste un mathématicien surdoué des chiffres mais handicapé des mots !
Des gens comme ça, ils doivent être marrants.
Je ne vivrais pas sans mes mots. Sans mes livres je ne suis rien. Sans mes poèmes et mes textes, je déprimerais tout le temps. Sans les gens que je colle je serais seule.
Oui, évidement que ce que je dis coule de source, mais ça fait bizarre quand même, de se dire ça !
Et voila, je divague !

- Trêve de mensonge et faux sourires, si quelque chose ne va pas, tu peux m’en parler hein…

Mensonges ? Oh, je crois qu’il peut parler lui, avec sa crampe démesurée !
Je lui dis quoi ? Que je me suis réveillée en pleurs et en sueur, comme tous les matins ou presque, à cause d’un cauchemar grotesque mais des plus réalistes ? C’est aussi stupide que d’avoir peur … peur d’une fleur. Qui partirait en courant à la vue d’une pâquerette ?
Hé bien moi je pars courir à la vue de ce qui aurait du arriver …
Je me sens ridicule.
La seule personne à m’avoir vue comme ça ne m’a jamais posé de questions. Je ne sais pas faire face a ce genre de situation …

- Je pense qu’on ferait mieux de se poser dans un endroit calme, ça risque d’empirer et de virer à l’orage…

Il n’a pas tord… J’avise un endroit où nous abriter.
Je le chope par la mains et cours vers l’abri que j’ai repéré de loin …

- Aller, dépêche toi alors !

Elle m’attrapa la main et me tira vers un abri qu’elle avait remarqué au loin. Je fus surpris par le fait qu’elle m’ait attrapé la main, mais je me contentais de la suivre, sa peau était chaude et douce. Nous nous abritâmes et je repris mon souffle, je m’asseyais, m’adossant au mur. Et je tentais de reprendre ma respiration.

• Je sens que l’on va être coincé un long moment ici… Autant discuter non ? Aller assied-toi à côté de moi…

Je tentais de lui sourire, ouais je suis d’un peu meilleure humeur… Elle m’a tiré de mes mauvais souvenirs, et rêves… J’ôtai ma veste trempée, mais mon t-shirt était également trempé… La poisse, je vais tomber malade à coup sûr… Bref je l’ai invité à discuter mais je ne sais pas de quoi parler, je crains un peu sur ce coup-là…
De quoi pouvons-nous bien parler ? Pas de cours, ça revient à parler de la pluie et du beau temps, aucun intérêt à parler de ça, et en plus il pleut comme pas possible... « Hé alors les cours ça se passe ? » On a tous un QI supérieur à je ne sais pas combien, c’est une question aussi stupide que « As-tu vu la pluie ? C’est dingue non ? »… Bref je pense que vous l’avez compris, je ne sais pas vraiment démarrer une conversation, tout ce que je suis en train de faire c’est de la regarder comme un con sans ne rien dire. Ça doit faire peur non ? Se faire fixer par un mec trempé et muet. Je ne sais pas, tiens si je lui posais la question ?! Autant lui demander de me filer une claque… Bon faut que je me lance…

• Tu viens souvent ici ? Enfin, est-ce une sorte d’habitude ou de rituel pour toi que de courir ?

Soit je passe pour un psychopathe ou alors j’ai su démarrer la discussion du mieux que j’ai pu. C’est dingue de se torturer autant l’esprit pour si peu… Je suis comme ça faut croire…
Bref ce n’est pas tout mais je commence à avoir un peu froid, je renifle un peu, et voilà que j’éternue sans crier garde, une deuxième fois, et une troisième fois… Zut j’ai attrapé un méchant coup de froid, heureusement que je n’ai pas le nez qui coule, c’est mon égo qui aurait pris un sacré coup…

Je tiens sa main jusqu'à ce qu’on arrive à l’abri. Il s’assoit, dos contre le mur et j’égoutte mon parapluie avant de le fermer.
Finalement je n’aurais même pas couru … C’est dommage, ça me détend en général. Courir au point d’avoir le souffle court et ne plus penser à rien, se vider la tête. C’est ça dont j’ai besoin pour me changer les idées. Bah, tant pis, ça sera pour une prochaine fois.

- Je sens que l’on va être coincé un long moment ici… Autant discuter non ? Aller assied-toi à côté de moi…

Il sourit. Il n’a pas l’air fâché que je l’ai dérangé ni que je l’ai entrainé sans son avis vers cet abri.
Il veut parler donc.
Bien, mais de quoi ? En temps normal, je suis très bavarde, mais je dois avouer que là, je ne sais pas trop quoi dire. Ca m’énerve, quand même, je ne comprends pas pourquoi à ce moment là les mots restent coincés, a former un gros bloc indéchiffrable. Ils ne veulent pas prendre forme comme d’habitude.
D’habitude j’assomme les gens de questions, leur demandant tout et n’importe quoi. Surtout n’importe quoi. D’habitude les mots sortent sans difficulté, sans même me demander mon avis et se jettent dans le vide. Ils franchissent mes lèvres sans difficultés.
Mais ce matin non. Je ne sais pas si c’est l’heure ou par ce que je suis intimidée ou perdue…

- Tu viens souvent ici ? Enfin, est-ce une sorte d’habitude ou de rituel pour toi que de courir ?

Et voila ! La question que je voulais éviter. Pas que ça me gène mais … En fait je me trouve débile, de courir comme ça pour me vider l’esprit. La seule personne qui ne m’ai jamais vue dans cette situation ne m’a jamais posé de question sur les raisons de mon sport matinal.
BON : Allez, tant pis, je me lance, et s’il en rit, je rirais avec lui de bon cœur.

- Euh … Une habitude oui… Un moyen de me vider la tête quoi. Je ne dors pas très bien alors j’oublie en courant. C’est toujours mieux que de boire pour oublier !

Je me laisse glisser contre le mur et m’assoit à coté de lui.

-Mais, et toi ? C’était quand même impressionnant ! Tu criais assez fort. Et puis t’es bien trempé, t’es là depuis longtemps ? Tu dois avoir froid.

Voila, le moulin à parole est relancé. Mais disons que pour une fois je suis plutôt modérée niveau débit.
J'attend sa réponse mais en résulte un concert d'éternuement. Je le regarde pendant deux secondes sans bouger puis rit. Je ne sais pas pourquoi, ça n'a rien de très comique mais ... Bah, rions de bon coeur !

Erf, je ne voulais pas qu’elle me retourne la question, car personne ne sait rien sur les circonstances de mon arrivée ici. Elle me répondit que c’était une habitude que de courir pour se vider la tête, et qu’elle avait des problèmes pour dormir. Souvenirs douloureux peut-être ? Tout comme moi je suppose… Je ne pense pas être le seul à avoir vécu quelque chose de dur. En général les gens ont peur de ce qui est différent ou plus intelligent qu’eux, et ne chercher qu’à le détruire, par crainte ou par jalousie, mais qu’importe la raison, le résultat est toujours le même, la destruction.

• Tu n’es pas la seule à mal dormir si cela peut te consoler…

Elle se posa à côté de moi, et me retourna la question. Je la regardais puis je fixai mes mains et je soupirai longuement. Je peux lui répondre honnêtement sans lui déballer ma vie, après tout, je ne suis pas obliger de mentir, et je n’aime pas mentir, comme ça c’est régler. Elle éternua avant que je ne puisse répondre, je riais avec elle, je ne sais pas pourquoi, peut-être est-ce sa présence qui me met de bonne humeur ?

• Je tentais de me vider la tête aussi, chasser quelques fantômes qui font de temps en temps surface. Et je ne te cache pas que je commence à avoir froid. Et qu…

J’éternuais, et renifla. Un frisson parcouru mon corps. Brrr, comme prévu, je vais tomber malade je le sens. Je n’aime pas être malade, je suis rarement malade. Je vais rester au lit quelques jours supporter les moqueries d’Ember et puis sortir en pleine forme et avec un peu de chance j’aurais rendu Ember malade aussi.

• Je ne serais pas surpris d’avoir attrapé froid…

Je riais, encore, pourtant éternuer n’a rien de drôle. Un éclair se fit entendre. Brrr ça durera encore un moment. Je n’ai jamais eu peur des orages, ou autre. J’adore la pluie, sa douce mélodie, il m’arrive de me réveiller pour entrouvrir la fenêtre par nuit pluvieuse pour entendre la mélodie, ce qui a le don d’énerver mon co-piaule.

• On est coincé ici pour un moment je le crains, bien que ta compagnie ne me déplaise pas. J’aurais sûrement tout le temps de sécher. J’espère que tu as de quoi faire la discussion, je suis bon pour écouter, mais pour nourrir une conversation, ou trouver un sujet, ce n’est pas vraiment mon fort…

Je lui lançais un regard et je souriais. Je commence à bien l’aimer.

• Tu n’es pas la seule à mal dormir si cela peut te consoler…

Voilà ce qu’il me lance pendant que je m’assois à ses cotés. Bah, je ne pense pas que ça puisse consoler grand monde. Mais on se sent moins seul. On se dit que ça arrive n’arrive pas qu’à nous. C’est … Gentil.
Il m’explique que c’est pour se vider la tête, pour se calmer. Un peu comme moi en fait. Un moyen de chasser les idées noires. Un moyen de faire le vide, de ne plus penser un rien. Chasser le mal par le vide. La fin de sa phrase s’étouffe dans un éternuement. Je retiens un rire, ça n’est pas très gentil de se moquer des gens de cette manière. Et puis, s’il éternue, ça n’est pas sa faute, c’était surtout à cause du mauvais temps. Il me semblât qu’il frissonnait, il avait vraiment froid … Vu comment ses affaires étaient trempées, ça n’était pas étonnant.

• Je ne serais pas surpris d’avoir attrapé froid…

Il se mit à rire. Je joins le mien, et nous rions de concert. Ça n’a rien de drôle mais rire nous détend. C’est bizarre, mais tant pis. Un éclair retentit, je sursaute, un peu surprise. Je ne m’y attendais pas. C’est stupide, il pleut, il y a de l’orage. Mais la discussion m’en a distrait, et j’ai oublié un peu les alentours. Je me relève, enlève ma veste de sweat.

• On est coincé ici pour un moment je le crains, bien que ta compagnie ne me déplaise pas. J’aurais sûrement tout le temps de sécher. J’espère que tu as de quoi faire la discussion, je suis bon pour écouter, mais pour nourrir une conversation, ou trouver un sujet, ce n’est pas vraiment mon fort…

Il me sourit en me regardant. Je lui rends son sourire, lui tend mon sweat. Histoire qu’il se réchauffe. Je ne sais pas s’il va l’accepter. Mais il est bien sec au moins. Lui, son pull et son t-shirt sont trempés. Je ne sais pas non plus si ça va lui aller. Je ne suis pas bien grande non plus et ma carrure n’est pas celle d’un homme, loin de là. Mais il est grand, même trop. Je m’y sens bien à l’aise, c’est un sweat homme. Alors même si c’est du S il y a peut être une chance que ça lui aille. J’espère.

• Tiens, prend ça. Enlève ton pull et enfile ça. Ça te séchera un peu, j’espère. On peut mettre ton pull à sécher à coter. Attrapes pas froid, t’as l’air déjà bien enrhumé.

Haha. J’ai l’air malin. Et je lui donne des ordres en plus. M’enfin, vu son état, il ferait bien de se réchauffer. Il va finir congelé ou un truc comme ça. Je me rassois à coté de lui, espérant de ne pas l’avoir froissé avec tout mes ordres.