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 Une chanson douce [Libre]

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Invité
Sujet: Une chanson douce [Libre] Une chanson douce [Libre] EmptyLun 3 Nov - 13:01

Il faisait froid dehors. Très froid. Il y en avait pas beaucoup qui sortait dehors, mais bien sûr dans le lot il y avait Sky. Parce que le ciel se couvrait, justement. Parce que le ciel était triste aujourd’hui. Alors elle avait prit son manteau, dévalé les escaliers et avait courut sous l’œil de son aimé, parce qu’elle était toujours là pour lui.

« Une chanson douce, »

Elle avait appris la chanson aujourd’hui, enfin juste le refrain. Elle avait entendu quelqu’un la chanter à un enfant. Et elle l’avait retenue. C’était amusant les chansons pour enfants.


« Que me chantait ma maman. »

C’était idiot, doux et efficace. Beaucoup plus compréhensible que ces autres Autres, si étranges. Oui, les enfants étaient de loin les plus simples.

« En suçant mon pouce, »

Plus aucune forme dans le ciel, juste une couverture sombre qui recouvrait l’espace.


« J’l’écoutais en m’endormant. »

Elle voulait faire plaisir au ciel. Elle voulait qu’il soit de nouveau bleu joyeux. Elle voulait que sa chanson, que sa présence, que sa vie puisse alléger l’immensité. Mais comment pouvait-elle faire cela ? Comment pourrait-elle faire pour effleurer l’immortalité ? Elle n’en savait rien. Alors elle essayait, chaque jour, chaque minute, chaque seconde, elle essayait désespérément d’être utile.

Il pleuvait.
Il pleurait.

Comme toujours elle n’avait put empêcher l’inévitable. Les gouttes se posant sur le monde en firent jaillirent d’autres. Pluie de larmes dévalant la cascade des joues, l’inutilité ne pouvait qu’accompagner l’être aimé.

Elle recommença à bouger lorsque sa première larme toucha l’herbe. Son éclat de rire perça l’air, soudain, lumineux, joyeux. Dérisoire. Elle courut. Elle n’allait nulle part, elle courait juste, elle volait juste, même en sachant qu’elle ne pouvait défier la gravité elle courait en priant que le vent la fasse s’élever. Elle pleurait, elle riait, elle courait. Et voilà qu’à présent elle sautait. Elle sautait de la joie, elle sautait pour conjurer le sort, elle sautait pour s’approcher de lui. Elle essaya de faire une roulade, une roue, n’importe quoi. Mais son manteau l’entravait dans chacun de ses mouvements, le froid la paralysait, la pluie la frigorifiait.

Après tout, qu’importait ? D’un geste elle jeta son manteau à terre, lança son écharpe au vent et commença sa course contre la douleur. Elle n’était plus que mouvements, elle n’était plus que vie, elle n’était plus que joie désespérée. Ses agissements ne voulaient rien dire en soit, elle n’avait aucune chorégraphie, aucune suite, rien de ce qui faisait les professionnels. Elle ne voulait pas être professionnelle, elle voulait juste faire comprendre un peu au ciel qu’elle était là pour lui, qu’elle était heureuse et joyeuse. Il pouvait reporter un peu de sa peine sur elle, au moins un petit peu, elle n’attendait que cela après tout.

Comme une flèche dans le cœur.

L’oiseau stoppe son envol pour s’écrouler au sol. Le sol ignoble, qui la contraint à être loin de lui. Auparavant ses larmes étaient accompagnements, imitation, peine discrète. A présent elle n’était plus qu’une plaie béante, une douleur incommensurable, un cri. Bientôt elle fut silencieuse, frigorifiée mais les larmes continuaient de couleur. Elles continueraient jusqu’à ce que la dernière goutte de pluie touche le sol.

Plus personne ne prêtait attention à ce drôle de manège qui durait depuis son arrivée. Après tout ce lieu en était rempli, de gens échappant au normal.
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Invité
Sujet: Re: Une chanson douce [Libre] Une chanson douce [Libre] EmptyLun 3 Nov - 20:48

" I want to live..."

Quoique... Vouloir vivre... Mais c'était quoi vivre, au fond? Avoir un cœur qui bat sous l'impulsion d'ordre électriques imperceptibles envoyés par des milliards de milliers de neurones au delà de toute compréhension humaine? C'était ça? Alors peut-être qu'il en avait pas envie... Beuh... Ça semblait pas trés attirant, de ce point de vue...


" ... In paradise"

Le paradis n'existait pas c'était bien connu, pas mal de gens y croyaient, d'autre non. Haze ne connaissait pas sa réelle opinion, agnostique, il se foutait de l'existence d'un supérieur, il ne s'en connaissait pas si ce n'était des humains et savait que si une quelconque entité supérieure devait régner sur le monde, elle serait d'origine humaine, ceci étant...
Haze croyait à l'enfer.

Même rythmé par sa chanson, même apaisé par la douce voix d'Emilie Simon, il pensait à l'Ombre... L'Ombre... Le Monde... Les autres, Tout... Tout... TOUT!!!
Haze remonta son col en y pensant, geste familier, intime, habituel qu'il avait l'habitude de réaliser à chaque fois que l'objet de ses pensées entrait dans sa tête, sa peur absolue, l'Ombre, l'Ombre qui le poursuivait toutes les nuits, l'ombres qui l'avait traqué dans la forêt... L'ombre partout...

Le garçon sortit, poussant d'une main, d'un geste presque impérial, contrastant avec son humeur, les lourds battants de bois de la wammy's House, beaucoup de gens sortaient à ses cotés, il aurait presque pu attendre qu'on lui ouvre au lieu de s'embêter à le faire tout seul et à gacher sa précieuse énergie...
A cette pensée, il sortit un flacon de couleur ambré et en sortit un comprimé qu'il avala calmement, de la dopamine. Sinon, il allait s'endormir encore... On l'aurait presque cru narcoleptique... Pourquoi pas? Il faudrait qu'il aille faire le test, un de ces quatre, mais pas today... Trop la flemme...

Il regarda autour de lui, il faisait froid... Très froid, pourquoi il y avait tant de monde qui sortait?
Fous... Ils étaient tous fous... Encore plus que lui... Mais être fou comme eux, ça devait être agréable, ne pas être... ne pas avoir peur tout le temps... Ne pas redouter la nuit... Il avait même entendu dire que certains attendaient la nuit avec impatience, ils se balladaient la nuit, même! Ils étaient fous! Ils ne craignaient pas l'Ombre, eux...
Et lui, n'était-il pas fou? Il sortait comme eux remarque, mais alors qu'à cet instant, une tornade aux cheveux blonds le bouscula, l'envoyant valser dans l'herbe et reprit sa course sans s'en soucier plus que d'une pierre que sa chaussure aurait heurté (c'était limite si il se souciait pas du pli créé sur sa veste par le choc... Le tout petit choc), lui sortait la tête basse, la tête pleine de pensées noires...

Il se releva maladroitement, sans tremblements mais se répandant en effort pour se remettre droit, il releva la tête vers son monde monochrome, cherchant quelques couleurs pour attirer son regard... Une autre tornade qui ne l'aurait pas encore frappé?

Il aperçu la fille.
Elle semblait bouger. Seulement bouger. Bouger partout, bouger, pas pour aller quelque part.
Enfin, peut-être quelque part où elle ne voulait pas aller, alors pour compenser, elle allait partout...
Son mouvement ressemblait à une danse sans en être une, on aurait pu y voir de schéma précis et un prof dans cette matière se serait évanoui sur le champ en voyant cette harmonie enfantine que seule elle semblait comprendre...

Haze leva un sourcil et s'avança vers elle, se faufilant doucement et sans précipitation entre les autres qui ne le remarquaient pas, pourquoi l'auraient-ils remarqué? Il n'était rien, il était insignifiant.
Un fois arrivé pas trop loin d'elle, il resta là, au milieu de la foule qui se retournait parfois sans s'arrêter pour observer le curieux spectacle, immobile, personne ne le heurtait cette fois-ci, étrange...
Et il regarda, du début à la fin, absorbé, fasciné comme un enfant devant un papillon.

Puis, soudain, tout s'arrêta.

Foudroyé en plein vol, le papillon tomba, dans une chute d'une grâce ultime, tomber comme un Dieu, n'est ce pas mieux que de se tenir comme un homme? Haze ne bougea pas.

Elle hurla. Quelques personnes se retournèrent et lui demandèrent de loin si elle allait bien, puis continuèrent leur chemin dans leur maelström ludique qu'elles s'étaient construites...
Il ne bougea pas
Il observa.

Elle pleura. Plus personne ne se retournait.
Il avança un peu vers elle, pas trop près quand même, il pencha la tête, une expression indifférente, de la pitié peut-être... De la compassion, plutot... "Quoiqu'il t'afflige, j'aimerai compatir..."
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Invité
Sujet: Re: Une chanson douce [Libre] Une chanson douce [Libre] EmptyMar 4 Nov - 19:29

Les gouttes tombaient. Les larmes coulaient.

Derrière le voile de ses larmes elle fixait le nuage sortant de ses lèvres frigorifiées. Ses mains étaient rouges. Tout son corps tremblait, mais plus sous le coup des larmes. Elle s’étaient calmées d’ailleurs, sans s’arrêter bien sûr. Elle avaient juste recommencées à mouiller doucement et silencieusement le visage de la jeune fille. Elles ne s’arrêteraient qu’avec le ciel. C’était tout ce qu’elle pouvait continuer de faire. Un instant elle se demanda si à un moment ses larmes allaient devenir glace. Non, sûrement pas. Certes il faisait froid mais pas assez. Après tout elle était sans manteau et écharpe, trempée, immobile, à terre. C’était mieux en été, même s’il pleuvait elle avait moins froid. Dire qu’ils n’étaient pas encore en hiver. Bientôt elle devrait pleurer sous la neige de février. Combien de fois avait-on dut venir la chercher alors qu’elle n’avait plus la force de bouger ? Combien de fois avait-on dut batailler pour la faire rentrer, alors qu’elle allait presque mourir en restant dehors à pleurer ? Plus personne ne comptait, ou plutôt personne n’avait commencé. Elle s’en souvenait très de ces :

« Tu veux crever ou quoi ? »

A ces moments-là elle se taisait, parce qu’elle avait trop froid et que les sanglots rendaient sa voix trop laide. Mais elle avait tellement envie de leur cracher au visage qu’elle pourrait mourir juste pour le ciel ! Oui ! Parfaitement ! Ces pauvres Autres ne pouvaient comprendre l’importance d’être là, à pleurer sous la pluie, juste pour lui. Ils ne pouvaient rien comprendre ces sales immondices !

Elle releva la tête et remarqua un Autre qui s’était démarqué du tas, l’observant. Elle reconnut à peine Haze, le confondant même un instant avec un autre. Le voile des larmes et son esprit ailleurs l’empêchait de vraiment résonner et observer comme d’habitude. Par contre elle lut très bien la lueur de pitié dans le regard du spectateur. Pitié, compassion, c’était la même chose pour elle : une notion qu’elle ressentait tellement souvent pour les Autres. Mais jamais pour elle. Jamais.

Le bruit de la claque ne fit se retourner que quelques visages.


« Ordure. »

Le bruit de son murmure, lui, ne fit se retourner personne.

Elle s’était levée en un instant malgré le froid et la fatigue, avait parcourut la distance qui les séparait à grands pas et avait frappé, aussi vite et aussi fort que possible. Certes elle était fatiguée, certes ses mains étaient endolories et froides. Mais elle savait que cette gifle avait fait mal à l’Autre, et c’était tout ce qui comptait. Ses yeux pleurant toujours étaient à présent emplis de colère, son visage encore mouillé affichait à présent un rictus haineux et sa voix s’éleva de nouveau, sèche.


« Je t’interdis de me prendre en pitié alors que tu n’es qu’un monstre qui ne connaît rien de la Vérité. C’est toi qui devrais être pris en pitié ! C’est toi ! Toi qui ne comprends rien à rien ! Toi qui ne sait même pas regarder le ciel ! Toi qui ne pourra jamais vraiment parler d’amour ! Toi qui est cloué à ton sol, à ta vérité, à tous ces trucs immondes qui font des Autres des êtres affreux ! Ne viens pas me prendre en pitié, ne vient pas m’exprimer ta compassion alors que tu n’es rien ! Absolument rien ! Rien qu'un sale porc ! »


Sa voix au début sèche et dure s’était rapidement élevée, son regard avait vite prit une lueur de détresse, son visage s’était ouvert à son dégoût profond. A la fin elle hurlait sous certains regards de ceux qui s’intéressaient encore aux idioties qu’elle lâchait si souvent. Quand ses paroles furent dites, lorsque sa dernière injure s’éteignit, elle resta un court instant immobile, se demandant quoi faire. Mais son corps agit sans rien lui demander. Ses larmes coulèrent plus fort tandis que ses sanglots s’intensifiaient.

Pauvre, pauvre petite créature. Pauvre petite poupée désarticulée. Pauvre petite poupée abandonnée. Pauvre petite poupée qui ne peut pas bouger puisque son seul maître ne l’a même pas remarqué.
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Invité
Sujet: Re: Une chanson douce [Libre] Une chanson douce [Libre] EmptyJeu 6 Nov - 12:39

N'est pas mort ce qui semble à jamais gésir et au travers des temps, la mort peut même mourir

Elle se relevait, lentement... Elle aurait pu rester là, à choir dans l'herbe, on l'aurait presque cru heureuse, à pleurer comme ça... Pourtant, sa peine était presque palpable, quel personnage ambivalent, vraiment... Pourquoi pleurait-elle, pourquoi être triste alors qu'elle semblait la plus heureuse des gosses il y avait quelques secondes...? Haze ne détourna pas le regard, dans un état de semi-transe, fasciné et endormi à la fois, ses yeux embués (il n'avait jamais aussi bien porté son nom) fixés sur elle... Il se souvenait l'avoir parfois observé, c'était souvent le même manège, mais souvent, les autres la regardaient et les gens arrivaient au bout de quelques dizaines de minutes pour la rentrer avec moults représailles verbales qui auraient donné envie à n'importe qui (et qui lui donnaient sans doute trés envie à elle) de leur faire rentrer leur longueur dans leur largeur à l'instant. il avait souvent vu ça, depuis la baie vitrée de la Common Room ou même depuis la place qu'il occupait aujourd'hui, personne ne s'en souciait jamais de lui, l'embrumé, le fantome de l'école... Et c'était tant mieux, quand il voyait ce qu'on faisait aux gens dont on se souciait, quand on voyait Aphrodite...

Perdu dans ses pensées, la vue de Sky qui se relevait ne le frappa pas... Pas autant que sa main, l'instant d'après du moins...
Sa main et sa joue claquèrent ensemble, secs et nets, faisant se retourner quelques curieux qui se demandaient sans doute quelles obscénité cet étrange jeune homme aux cheveux bleus avait bien pu proférer pour mériter tel traitement.
Quelques rires discrets retentirent, il n'y prêta pas attention, elle non plus, probablement...
Il avait sans doute proféré bien plus qu'une obscénité, pour elle.


« Ordure. »


Évidemment, si elle ne dit pas "pervers", ce n'est plus drôles. Les rares arrivants repartirent, la mine déçue ou bien joyeuse, de nouveau accaparé par quelque activité ludique ou bien démonstrative qui se passait à quelque mètres d'ici... Une dispute de plus ou de moins n'était intéressante pour personne si la dimension scabreuse en était absente...
La tête du garçon partit brusquement, mais docilement vers la droite sous l'impulsion du coup, faible mais fort, rageux, de la jeune fille... La douleur, elle n'était rien à l'extérieur, mais une gifle fait toujours mal.

Au coeur.

Mais qu'avait-il donc fait?


« Je t’interdis de me prendre en pitié alors que tu n’es qu’un monstre qui ne connaît rien de la Vérité. C’est toi qui devrais être pris en pitié ! C’est toi ! Toi qui ne comprends rien à rien ! Toi qui ne sait même pas regarder le ciel ! Toi qui ne pourra jamais vraiment parler d’amour ! Toi qui est cloué à ton sol, à ta vérité, à tous ces trucs immondes qui font des Autres des êtres affreux ! Ne viens pas me prendre en pitié, ne vient pas m’exprimer ta compassion alors que tu n’es rien ! Absolument rien ! Rien qu'un sale porc ! »


Il écouta la tirade sans broncher, sans même penser à retourner la tête vers elle, en gardant les yeux plongés dans le vague, vers la droite, vers la forêt, on aurait pu le prendre pour un parfait je-m'en-foutiste, pourtant il écoutait, il ne faisait rien tant que l'écouter. Elle avait sans doute raison sur tout... Ce n'était pas elle qu'il fallait prendre en pitié, mais qui se soucierait de celui qu'elle pleurait et puis, qui se soucierait de le prendre en pitié LUI? On recevait souvent ce dont on avait pas besoin, rarement l'inverse...
La tirade sur la vérité et l'amour lui fit un peu plus mal. Un peu, parce que quelqu'un de triste se fait plus de mal à lui même qu'à un autre, un peu mal parce qu'à travers ces cris, ces cris barbares et désordonnées, se trouvait une vérité. Une inacceptable vérité qu'elle énonçait peut-être même sans en avoir conscience. Oui, il était cloué au sol, oui, lui aussi aurait voulu être ailleurs et connaitre ce qui rendait tout le monde heureux. Lui aussi, il aurait voulu échapper à l'Ombre, à la Terre et au monde... Accéder à la Vérité, à l'Amour... Une utopie inaccessible... Pourquoi?
Son expression ne se modifia pas, mais une lueur d'amertume passa sans doute dans ses yeux, alors qu'il scrutait l'horizon, se refusant toujours à retourner la tête vers elle, donnant presque un effet de ralenti.

Elle hurlait à la fin, quelques visages se retournèrent sans doute... Qui par curiosité de voir ce qu'il se passait ici, qui par amusement de voir une dispute sans doute conjugale, qui étonné de voir deux tourtereaux s'engueuler en public, qui stupéfié de voir qu'Haze avait ENFIN trouvé quelqu'un qui s'interesse à lui...
Tous avaient tort, évidemment (sauf le premier, peut-être, celui qui était juste curieux...), leur regard était poussière autours d'eux, autours de lui car il se foutait d'eux, autours d'elle car elle les méprisait. Ils n'étaient que deux, et bientot, même lui aurait sans doute disparu, quand elle le quitterait, sans doute bientot... On ne restait pas avec ceux qu'on haïssait, si?

Ce furent les derniers mots qui le tuèrent. Une fois de plus, ce n'était pas grave. Mais ça faisait quand même mal... Il n'était rien... Rien... La fin de la phrase lui échappa, ou plutôt, lui passa au-dessus, ou-en dessous, qui sait? Il n'était rien, oui, tout le monde se tuait à tenter de le lui faire comprendre, en ne lui parlant pas, en ne faisant pas attention à lui, en ne le regardant pas... Tant et si bien qu'il en était arrivé à se croire différent d'eux, une ombre parmis les lumières, un fantome... Rien.
Étrange comme des mots peuvent vous frapper, quand il se font si rare... Etrange qu'il se foute de tout, à l'habitude, et que ceux-ci lui fassent aussi mal... Peut-être qu'elle savait ce qu'il était, qu'elle savait ce qu'il ressentait... Mais non, impossible, puisqu'elle l'insultait... Elle le savait, mais ne le ressentait pas...

Cependant, ses yeux se rallumèrent étrangement, il ne cligna pas et, sans tourner la tête, planta ses yeux dans les siens. Comme un soldat au cœur transpercé qui voit son meurtrier contempler son agonie.

" Et alors?"


Une voix venimeuse, ce n'était pas la sienne, ce n'était pas lui... C'était toute la colère de son monde qui était la dedans, calme, froide, venimeuse et désespérée.
Deux mots sans aucune signification. Et alors? Et alors quoi? Qu'est ce que ça pouvait lui faire qu'il ne soit rien? Rien ne pouvait rien faire dans ce monde, rien ne pouvait rien dire? Qui se permettait d'attaquer "rien"?


* Et si je ne suis rien, pourquoi me parles-tu?*
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Invité
Sujet: Re: Une chanson douce [Libre] Une chanson douce [Libre] EmptyMar 25 Nov - 20:25

[HRP : Finalement je te cogne pas. Mais j'ai vraiment l'impression que mon perso par en live... Remarque, c'est Sky =D]

Et alors ?

Il n’est rien ! Rien qu’un Autre, un pourri, une ordure, un déchet ! Une erreur de la Nature ! Elle le déteste, le haït. Les haïssent ! Ces insectes sans regard, ces humains… Humains. Oui voilà ! Sale humain ! Sale être ! Sale existence ! Sale vie ! Les plus beaux sont morts ! Les plus beaux sont éternité !

Et alors ?

Elle le lui avait dit si souvent. Elle lui avait si souvent appris la leçon. Elle avait si bien appris. Que les hommes sont ignobles, qu’elle ne doit pas s’approcher d’eux, qu’ils la feront souffrir, qu’ils la piétineront. Mensonges ! Ils ne sont pas ignobles, ils ne sont rien ! Peu importe qu’ils s’approchent d’elle ! Ils ne la font pas souffrir, ils sont trop faibles pour cela ! Ils ne la piétinent pas, c’est elle qui les enterraient !

Et alors ?

Elle les enterraient ! Elle les déteste ! Elle les jettera par la fenêtre ! Elle les regardera s’écraser sur la sol ! Elle les observe, avec leurs couleurs grotesques, leurs sourires pourris, leur joie fictive, leurs problèmes dérisoires. Ces Autres ! Cet Autre ! Ce petit bébé si joli, si innocent, si pur, si coloré, si mort. Elle les haït ! Elle les jalouse !

Et alors ?

Elle les jalouse de leur ignorance, de leur bêtise, de n’être que légèreté par rapport à elle.

Et alors ?

Pour elle il n’y a que le ciel qui compte. Pas un Dieu. Non, pire. Sa vie.

Et alors ?

Elle ne pourra jamais se séparer de lui. Elle ne pourra jamais s’arrêter de pleurer pour lui. Elle ne pourra jamais ne plus espérer qu’il la voie. Elle ne pourra jamais l’oublier. Elle ne pourra jamais vivre.

Et alors ?

Et alors ?! Mais qu’est-ce que je m’en fous de tes ‘‘Et alors ?’’ ! Je m’en fous que tu t’en foutes ! Je n’ai pas besoin de toi !

Et alors ?

Tais-toi ! Tais-toi ! Disparais ! Tais-toi ! Tu me fais mal, tu me fais bien trop mal….

Et alors ?

Je veux que tu meures.


« Et alors ? »

Elle l’a murmuré, cette sentence, cette affreuse phrase. Elle le regarde, cet Autre… Elle pleure, encore, mais plus seulement à cause du ciel.

Elle recule d’un pas, puis de deux, sans le quitter du regard. Elle a peur. Une terreur atroce habite ses yeux. Peur de deux mots, de deux simples mots. D’une intonation interrogative et d’un regard haineux, détruit et embué.

Elle brise le lien affreux qui les reliait un instant. Instinctivement, elle regarde autour d’elle, cherchant quelque chose. Quoi ? Mystère. Mais elle regarde partout, ignorant les badauds. Comme un passage secret, un échappatoire, un sauveur, quelqu’un… N’importe quoi ! Sa respiration se fait plus forte, elle porte sa main à son cou. Elle l’attrape par le côté, elle passe sa main derrière, elle revient un peu, elle serre… Son stress, sa peur passe par ce geste et par ce regard désespéré si souvent tourné vers le ciel.

Les secondes s’écoulent lentement. Très lentement. Trop lentement. Sa respiration s’accélère encore. Affolée, elle regarde de nouveau le monstre. Presque par erreur. Elle recule encore d’un pas, choquée. C’est tellement laid un Autre ! Dire que son cœur leur ressemble ! Un hoquet lui échappe. Un vertige la traverse. Elle se retrouve à quatre pattes.

Tête tournée vers le sol, comme pour se prosterner, elle déverse tout ce qu’elle peut sur cette écorce terrestre, malédiction de sa vie. Tout son dégoût, toute sa peur, toute sa haine y passe. Elle a un goût écoeurant dans la bouche. Des cris des Autres se font entendre, mais elle s’en moque. Elle s’en moque depuis bien longtemps. Finalement elle se redresse, de nouveau assise sur le sol, sur les genoux. Elle lève le regard vers l’Autre.

Plus de peur, plus de haine, plus de dégoût, plus rien. C’est à elle de n’être rien. Ses yeux vides le regardent, elle respire fort. Elle pleure encore.

Son sourire est bancal, seul un côté se lève. Son regard est vide et fou. Non, il change. Il devient mépris, détachement, il devient… rien.

Son rire est en vérité un ricanement. Un faible ricanement, si fort en haine !

Sa voix est rauque, laide mais haute.


« Et alors ? Et alors ? Hein ? Et alors ? Tu es content et alors ? Tu es fier et alors ? Tu es fier, hein ? Je te hais, je te hais, tu ne mérites rien.»

Pause.

Cri.


« Mensonges ! »


Dernière édition par Sky le Mar 25 Nov - 21:23, édité 1 fois (Raison : Passage au présent.)
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Invité
Sujet: Re: Une chanson douce [Libre] Une chanson douce [Libre] EmptyMer 26 Nov - 16:26


[mais fallait pas te gêner enfiiiiiin... Haze est touuuuut à toi. On l'aime, Sky!]


Et alors? Une affreuse malédiction, murmurée en rêve des dizaines, des centaines, des milliers de fois... Des milliers de fois, il l'avait pensé, des milliers de fois, il s'était éloigné de la destinée des autres, et alors? Qu'est ce qu'il y pouvait, qu'est ce qu'il y voulait faire, ici? Qu'est ce que ça aurait pu lui faire?
Et alors? La phrase aurait laissé n'importe qui perplexe.


« Et alors ? »


Mais les sanglots redoublèrent, elle avait répété la phrase, comme pour mieux s'imprégner de sa dévastatrice signification, de son sens si léger et pourtant... Elle semblait comprendre, comprendre ce qu'il avait dit. Elle sembla lui vouloir du mal, tout le mal du monde réuni dans un regard, dans un corps, toute la haine et l'impuissance face au malheur même, elle ressentait ce qu'il ressentait face à l'ombre.
Ses mains se tendirent, tordues, dans une tentative désespérée de faire du mal. A n'importe qui, à elle même, pourquoi?

Elle s'étrangle, se tue en voulant tuer l'autre, ressentir la douleur en pensant que l'autre la ressentira aussi... Haze baisse la regarde, indifférence dans les yeux, une tristesse infinie dans l'âme.
Levant les yeux dans une dernière supplique à celui qu'elle semble chérir comme sa vie, elle baisse les yeux, vers lui. Comme affrontant une abominable réalité, elle recule, horrifiée... Une flèche dans le cœur du garçon... C'était si prévisible.
Tristesse dans ses yeux...

Il aurait aimé s'avancer, s'expliquer, s'excuser peut-être, la réconforter... Il aurait aimé aimer faire tout ça... Mais il ne pouvait pas. Il ne ressentait que tristesse pour elle, compassion impossible à extérioriser, il la regardait, une étincelle de peine sur le visage, une seule le comprenait. Et elle le haïssait... Peut-être était-ce l'ordre des choses.

Elle tomba à genoux, vaincu par l'horreur et succomba à l'écœurement et au désarroi, la pauvre... haze baissa les yeux, pitié, maintenant. Il aurait tant voulu l'aider, tant voulu...
Autour d'eux, les cris dégoutés retentirent, une fille au cri strident, un garçon qui rit en disant que c'était face à sa gueule, un autre qui se demande si elle va bien, aussitot rassuré par ses 5 autres camarades qui lui disent que quelqu'un s'en occupera bien, ils repartent tous ensemble vers la forêt.
Et le flot de la foule continue de passer, on les aurait cru invisible tant la masse les ignorait parfaitement. Une ou deux poussières ses détachant d'elle les remarquaient parfois, avant de replonger dans le tas humanoïde grouillant, entrant et sortant de l'orphelinat. Un voile les séparait, l'un ne voyait pas l'autre et l'autre ne voyait pas l'un. Ils n'avaient pas d'importance.
Pas plus que lui n'en avait.

Toute son humanité jetée au sol, la fille se redresse, dans un élan d'existence, sinon de vie. Elle l'observe et il croit faire face à un miroir, leur regard se rencontrent. La tristesse est peut-être toujours présente dans l'esprit de Haze. Le pitié a disparu. Elle a comprit.
Elle rit sans joie, elle sourit mais elle grimace, elle ne comprend pas qu'elle a comprit. Mais oui, au final...

« Et alors ? Et alors ? Hein ? Et alors ? Tu es content et alors ? Tu es fier et alors ? Tu es fier, hein ? Je te hais, je te hais, tu ne mérites rien.»


On aurait dit qu'elle l'appelait par sa phrase, par sa peine et sa souffrance, qu'elle lui attribuait son nom... Pourquoi serait-il fier? Quel fierté retirer de l'abandon? Quel bonheur retirer de la solitude? De la non-existence fantomatique qu'il menait? Qu'elle le haïsse, qu'elle le haïsse, il ne méritait rien, elle avait raison. Il ne méritait pas la haine, il ne méritait pas l'amour... Qui l'aurait mérité? Qui aurait mérité ces deux choses, plus horribles l'une que l'autre et pourtant si douces...
Qui les aurait mérité?

Quelques visages se retournèrent, mais se lassèrent vite des cris, ils n'avaient plus d'intérêt, pour eux, une fille trahie criait son désespoir sur feu son petit ami... Et c'était tout.
Le temps se suspendit quelques secondes dans leur bulle, pas un mouvement, pas un battement de cil, seul la peine stagnant dans l'air, passant d'un être à l'autre.

« Mensonges ! »

Mensonge... Un cri. Un hurlement, qu'avait-il dit qui puisse mentir, et elle? avait-elle menti?
Refusait-elle la vérité? Ou en connaissait-elle une autre inconnue à ses yeux embrumés?
Une autre vérité? Haze la regarda. Intensément. Si autre vérité il y avait, l'espoir pouvait être envisagé, le monde n'était-il donc pas qu'indifférence? Il ne pouvait l'accepter...
Il tendit la main, elle le frapperait, le huerait, pleurerait, peut-être... Il tendit la main, vers le bas.
Vers elle.
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Invité
Sujet: Re: Une chanson douce [Libre] Une chanson douce [Libre] EmptySam 6 Déc - 14:32

    Mensonges…

    Qui ment ? Elle-même, sa mère, cet homme censé être son père, le bébé, les Autres, lui, sa main ?
    Le ciel ? Non ! Pas lui ! Tout le monde mais pas lui… L’existence même peut mentir, la Terre peut mentir, la Vérité peut mentir, le Ciel, lui, ne le pourra jamais. Ne le ferra jamais. N’osera jamais. Pour lui, ni vérité ni mensonge, juste existence, ainsi, il ne pourra jamais la trahir. Puisque son existence est pleurs et beauté, vie et mort, instant et éternité, alors personne ne peut le battre, le dominer, même essayer. Même lui ne peut se rabaisser.

    Ainsi est la sublime malédiction, car l’éternité ne peut s’approcher de l’éphémère. L’éternité sera toujours là, mais jamais pour elle. Alors qu’elle sera toujours là, juste pour lui. Pourquoi déjà ? Pourquoi cette promesse ? Pourquoi cet accord ? Quand, quand l’a-t-elle rencontré pour la première fois ?

    Ce fut la seule fois où elle pleura alors que le ciel était bleu. Justement parce que le ciel était bleu, parce qu’il était là, tandis qu’ailleurs il n’y avait personne. Ce fut sa naissance et tout comme un nouveau-né elle cria et pleura. Elle était encore un peu plongée dans le monde qu’on lui avait créé, encore ignorante du monde, croyant profondément que tout était peuplé de monstres effrayants, de rites impies et que tout le monde y mentait. Mais, à cet instant où elle ne savait pas que les humains avaient un corps et lui ressemblaient tous, elle avait vu le ciel et avait su. Automatiquement. Elle avait souris au milieu de ses larmes de douleur, comme lorsque le monde se déchire : son Apocalypse.

    Un séisme gigantesque, faisant tomber les poupées et détruisant les petites maisons, des explosions un peu partout et pleins de choses qui apparaissaient au beau milieu de nulle part, sans prévenir. On ne lui avait rien dit ! Elle n’avait jamais vécut ! Et alors qu’on ne lui avait jamais dit la vérité, sa vie avait enfin débuté. En ce jour atroce, en ce jour joyeux, en ce jour parfait elle avait juré fidélité au ciel. Car, la pauvre enfant, la pauvre poupée, ce petit jouet abandonné avait besoin de l’éternité et de l’immuable pour survivre. Sinon, à quoi se raccrocher ?

    A cette main ? Cette main tendue vers elle ? Ce mensonge ? Ce geste d’un Autre ? Un Autre qui faisait particulièrement mal, un Autre particulièrement Autre ? Jamais !

    Jamais ! Vous m’entendez ? Jamais ! Elle ne se laissera jamais avoir par vos illusions, vos mots, vos gestes ! Elle avait une présence à jamais près d’elle, que demander de plus ? Hein ? Elle avait tout ce dont elle avait besoin. Le malheur, le bonheur, les larmes, la connaissance, au fond, peu importait. Elle vivait pour lui. Elle l’aimait, donc elle existait. Cette dépendance plus forte que toute drogue, que tout besoin naturel, que toute imagination.

    Elle pleure. Elle pleure pour le ciel mais aussi pour autre chose. Elle ne sait pas pourquoi. Elle pleure et elle a mal, un trou dans son cœur, ou une bosse. Quelque chose en trop ? En moins ? Un besoin inépuisable, une envie impossible à combler. Elle est immensément triste, profondément désespérée.

    Laissez-la être faible, encore un petit peu. Laissez-la, un instant, un court instant, pleurer pour elle et non pour lui.

    Elle avance sa main, touchant celle de l’Autre. Il a froid, mais moins qu’elle, il est mouillé, mais moins qu’elle. Elle sent une chaleur dans cette main, une existence. Sans vraiment la saisir elle l’observe et l’effleure, comme un mirage. Au milieu de la tristesse une esquisse de sourire s’ébauche, comme de l’émerveillement, comme de l’intérêt sincère pour cette sensation fascinante. Elle croise le regard de l’Autre, pour une fois ses yeux sont doux, infiniment doux, comme caressant le reste. Elle sourit, encore un peu, mêlant étrangement tristesse et joie.


    « Les Autres mentent toujours. Car même ce qui est vrai à ce moment devient faux avec le temps. C’est laid et affreux. C’est pour cela que j’ai choisit l’éternité. Mais alors pourqu… »

    Ciel bleu.

    Un moment elle n’avait pas regardé le ciel. A un moment, elle s’était posée une question, au lieu d’en poser une aux Autres. Petite erreur, petit écart. Vite effacé par un sourire. Infini.

    Elle se lève, ignorant à présent la main, ignorant l’Autre. Éclat de rire blanc d‘enfant. Comme au début, elle saute en riant. Elle ne chante pas. Elle crie. Mélange du chant du loup, des hurlements Indiens et de bonheur simple. Elle court, saute, fait une galipette, en parfaite symbiose avec l’extase et le ciel. Pourquoi ne s’envole-t-elle pas ? Comment se fait-il que ses sauts n’atteignent pas le ciel ? Il est presque illogique qu’elle soit encore au sol.


    « Hé, Haze ! »

    Voilà qu’elle revient près de lui, lumineuse, semblant avoir oublié tout ce qu’il s’est passé auparavant. Oublié le froid aussi. Oublié ses tremblements. Oublié son manteau et son écharpe, bien loin à présent. Oublié ses larmes. Oublié sa haine.

    « J’ai super faim ! Pas toi ? »

    Elle ne pleure plus.
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Invité
Sujet: Re: Une chanson douce [Libre] Une chanson douce [Libre] EmptyMer 10 Déc - 14:30

Pourquoi être triste, pourquoi s'ennuyer, pourquoi s'abimer dans la peine alors que d'autres sont heureux? Oui, heureux... On aurait pu voir autre chose que des immondices rampantes et affreuses dans cette masse grisâtre qu'ils constituaient quand ils ne lui parlaient pas... Ils auraient pu être autre chose, ils auraient pu se démarquer, comme cette fille qui pleurait à terre, comme cette étrangère, elle semblait haïr. Quel plaisir que celui de haïr... Semblable à celui qu'on a lorsqu'on aime, n'est-ce pas? Mais peut-être ne haïssait-elle pas tout car la haine pure ne réchauffe pas telle une flamme mais brûle et consume comme un incendie. Peut-être aimait-elle? Mais qui aurait-elle pu aimer? Elle qui haïssait tout le monde.

Qu'aurait-il pu éprouver pour elle? Compassion, pitié? Sentiments occultés par autre chose... De la jalousie, peut-être... Il est jaloux, comme il est jaloux de l'insouciance, comme il est jaloux de la haine, comme il est jaloux de l'amour, comme le reste, il jalouse la vie. c'est peut-être pour ne grapiller, ne serait-ce qu'un soupçon de cette existence qu'il tend cette main. Elle a raison, au fond... Un mensonge.

Après tout, peut-être n'est-il pas si différent des autres, de cette masse grise qui rit et qui pleure, qui aime et qui hait... Peut-être qu'il n'est pas si différent d'eux, juste loin...
Il la regarde, encore et encore, pleurer toute les larmes de son âme, est-ce que ça soulage de pleurer?
Est-ce que c'est si bon de laisser libre cours à sa peine? Aidez-là, aidez-là, ne la laissez pas prendre son pied dans les larmes ainsi... Ne la laisser pas le narguer ainsi, c'est insupportable.

Soudain, d'un coup, il sent, un froid sur sa main. Un contact, c'était si rare, chaque parcelle de son corps devait être devenue hypersensible, hurlant leur besoin de toucher autre chose que du plastique, du bois ou du tissus. une chaleur, un peu plus froide que lui, mais chaude quand même, ses yeux sortent du vague et croisent les siens, regard d'une douceur infinie, sourire. La respiration de Haze s'accélère. Qu'a t-il fait? Qu'à t-il fait pour qu'on l'empêche de la haïr? Pour qu'on l'empêche de la jalouser? Qu'à t-il fait pour qu'on lui fasse vraiment ressentir de la compassion pour elle, de l'affection, peut-être même? Etait-il si faible? Pourtant, sa peine disparait, elle aussi, elle disparait quand elle sourit.


« Les Autres mentent toujours. Car même ce qui est vrai à ce moment devient faux avec le temps. C’est laid et affreux. C’est pour cela que j’ai choisit l’éternité. Mais alors pourqu… »


Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase, elle sembla s'envoler à nouveau, se lève et son sourire se transforme. Se transforme en une joie éternelle et enfantine, une joie qui aurait été contagieuse, elle rit comme il n'a jamais entendu rire, elle danse à nouveau dans ce ballet désordonné, aléatoire, sautant, sautillant, tournoyant sans jamais toucher personne, tant et si bien qu'on aurait cru à un miracle. De nouveau, quelques spectateurs tournent la tête, qui sourit, qui la prend pour une folle, qui rit... Haze baisse la main et observe, la suivant des yeux comme on suit un vol d'oiseaux, avec curiosité, une lueur d'émerveillement dans les yeux, sans que son visage en garde la moindre trace.
C'était beau...


« Hé, Haze ! »

Le cri la fit revenir à la réalité, il fallait croire qu'il n'était pas habitué à être ainsi mandé. En général, c'était plutot un "qui es-tu" ou bien une tape sur l'épaule. Comment connaissait-elle son nom, au juste?
Il la vit avec amusement, presque avec joie, revenir vers lui en courant comme une gamine. Un sourire vint animer ses traits stoïques et blasés, un petit sourire, pas très lumineux, pas très étudié comme ceux des pubs, mais un sourire. Tout petit.
Ses larmes avaient disparues, où étaient-elles?

« J’ai super faim ! Pas toi ? »


Il leva un sourcil sans s'arrêter de sourire, faim? Remarquez que c'était pas étonnant, après pareil exercice... Mais était-elle bipolaire ou bien s'était-il passé quelque chose? Comment était-elle si heureuse? Comment...?
D'un coup, Haze remarqua que quelque chose avait changé dans le paysage, comme si son esprit avait voulu répondre à sa question, il sentit qu'il s'était arrêté de pleuvoir et un rayon de soleil se posa sur sa main, s'élargissant encore et encore, nimba l'orphelinat dans une douce chaleur régénérante.
Son sourire s'aggrandit et il secoua un instant la tête en regardant (un peu bêtement) sa main. Il releva les yeux vers la jeune fille, rayonnante.


" J'ai la dalle... On y va?"


Une conversation anodine... Bête et gentille, ne pouvait-il pas se laisser aller à parler, s'abandonner à l'amitié, pour une fois? Croire en la sincérité d'un bon sentiment? Laisser ses pensées noires s'évaporer, les laisser partir comme les larmes de la fille s'étaient échappées...?
Dans ce ciel bleu magnifique...
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