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 Les chroniques d'une Belette

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Sujet: Les chroniques d'une Belette Les chroniques d'une Belette EmptyMar 19 Aoû - 14:19


Découvrez Evanescence!



    Prelude : In my field of paper floWers...



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Une agréable brise estivale soulevait mes longues mèches noir de jais aux envoûtants reflets vert foncé. Elle venait caresser mon visage offert à l'éther bleu parsemé de nuages moutonneux. A mes pieds, l'herbe verte et douce chatouillait mes chevilles, balayée par le vent qui la faisait onduler comme la mer par temps calme. Le soleil réchauffait doucement ma peau devenue propre depuis que je vivais ici, sur cette petite colline surplombant le paysage champêtre. Derrière moi se dressait une petite maison blanche au toit de toit rouge, dotée d'une jolie porte bleue. Un grand chêne centenaire à côté de la charmante bâtisse étendait ses branches au dessus d'une table dressée dans le jardin. Une balançoire était accrochée à l'une d'elle, et mon petit frère s'y balançait en riant aux éclats. En guise de musique de son, nous avions le droit au chants des oiseaux et au murmure d'un ruisseau sautillant. Je dévalai la colline, étendant les bras, comme si je prenais mon envol. Le vent sifflait à mes oreilles, je fermai les yeux, et me laissai porter par l'intense bonheur qui me submergeait. Je trébuchai et finis ma course au bas du tertre en roulant. Allongé sur le dos, aveuglé par le soleil éclatant, je riais. Un rire pur, sincère et carillonnant. L'herbe me chatouillait agréablement. Soudain, une voix douce m'appela. Maman ! Je me relevai d'un bond et remontai la colline en courant joyeusement, bondissant parmi les touffes vertes.

    « Wilde ! Wilde ! »


La voix mélodieuse et chantante se transforma peu à peu en un beuglement disgracieux. Mon euphorie retomba d'un coup, laissant place à la peur et à l'incompréhension. Maman ? Je continuais à courir, mais l'ascension de la colline me paraissait interminable.

    « Wilde ! Wilde ! »


J'accélérai le pas. Au bout d'une éternité, je parvins à gagner le sommet du tertre. Tout était noir et seul une lueur rouge et malsaine éclairait la scène de désolation : la maison était en feu, le jardin aussi, River, mon petit frère, hurlait sans que je puisse le localiser, les oiseaux ne chantaient plus, l'air ambiant me piquait et me brûlait la peau.

    « Wilde ! Wilde ! »
    « Maman ! River ! Maman ! ... River ! »


Soudain, un horrible main griffue en putréfaction me broya l'épaule. Je hurlai.

~ ~ ~


Je me redressai en hurlant à la mort, en sueur. A côté de moi, River me regardait avec de grands yeux effrayés. A quelques pas, un garçon sale et mal habillé semblait s'être reculé d'un bond. J'haletai, regardant autour de moi. J'étais dans les égouts puants de Londres, assit sur le tas de chiffons et de journaux qui nous servait de lit à moi et mon frère. Le garçon rit nerveusement et bégaya :

    « Hé bé, Wilde. Gueule pas comme ça, on dirait un pourceau qu'on égorge, vieux ! Je v'nais juste pour... »


Pour toute réponse, mon visage se tordit en une grimace furieuse et, faisant mine de me lever, menaçant, je crachai :

    « Va t'faire foutre ! »


Le garçon prit peur et il détala comme un lapin. Je m'apprêtai à le poursuivre quand un petite main me tira doucement en arrière : River. Il me fixa de ses grands yeux bleu nuit et murmura, inquiet :

    « Grand frère... ? »


Je soupirai et serrai ma seule famille contre mon torse, miné par le dépit. Tout ceci n'était qu'un rêve, jamais je ne pourrais vivre dans cette maison à la campagne. Tous les jours qui me restaient à vivre, je les passerais à pourrir ici, dans les égouts malodorant, couvert d'une épaisse couche de crasse.
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Invité
Sujet: Re: Les chroniques d'une Belette Les chroniques d'une Belette EmptyVen 22 Aoû - 10:12

    Chapter one : Day of the River.


Les chroniques d'une Belette Avatar165fj8 Les chroniques d'une Belette Th368669pp9 Les chroniques d'une Belette Th9240804ze6



    « Celles du super marché c'est les mieux, j'te dis ! »
    « Peuh ! T'y connais rien, c'est celles d'un resto les meilleures ! »
    « Ta gueule, idiot ! Dans celles du super marché, y'a des produits empaquetés auquel personne n'a touché ! »
    « Ouais mais dans celles d'un resto, la bouffe est plus raffinée ! »
    « N'importe quoi ! Tu peux très bien tomber sur une carcasse de poisson dégueulasse avec des brocolis pourris ! Tandis qu'avec le super marché, t'as plus de nourriture et moins de mauvaises surprises ! »
    « ... »
    « Voilà, j'ai raison ! »
    « Nan ! J'étais juste assommé par ta connerie ! »
    « Ben voyooons ! »


Je m'engueulais joyeusement avec Lekku, un garçon de la bande, sur la délicate question des poubelles à piller. Ne croyez-vous pas que j'ai raison ? Tous les pauvres vraiment désespérés se fournissent dans les poubelles des super marchés ! Sérieux, entre des restes broyés dans un sac avec les mégots de cigarettes et le croque-monsieur sous vide périmé depuis la veille, je préfère largement le croque-monsieur ! Vous n'êtes pas d'accord ? Et bien ce con soutenait le contraire. De toute façon, je fis en sorte de gagner l'argumentation à coups de poings dans la tronche. Bien vite, il se rangea à mes arguments et nous filâmes dans la rue derrière le super marché le plus proche. C'était une ruelle calme, déserte, où l'on pouvait se servir sans crainte de représailles. Bien évidemment, nous n'étions pas les seuls à avoir eu cette idée, et l'on devait se battre pour obtenir quelques conserves, deux pizzas surgelées et trois paquets de pâtes. Nous négociâmes donc notre ration comme il se doit, et tant pis pour la petite vieille teigneuse qui avait tenté de m'arracher mon steak haché des mains ! Elle l'a cherché, la conne. Au final, Lekku et moi avions assez de nourriture pour survivre trois jours en nourrissant dix-huit enfants et adolescents affamés. En économisant un peu, certes, et en combinant notre butin avec celui des autres : le dimanche matin, c'était jour de pêche à la bouffe ! Et tout le monde devait ramener quelque chose, sinon c'était privé de repas pendant un jour. Naméo, c'était quoi ces manières d'attendre que tout tombe la bouche ouverte ?

Alors que nous reprenions notre chemin vers la bouche d'égout que nous avions ouvert afin de regagner notre repaire dans les profondeurs de Londres, des sanglots étouffés attirèrent mon attention. Je m'approchai, curieux, gardant jalousement mes trésors de guerre contre le torse. Lekku m'interpella :


    « Mais kestu fous ? ! C'est pas par là, la planque ! »
    « Je sais, tu m'prends pour un con ? » sifflai-je, agacé. « Et la ferme, j'ai entendu quelque chose. »


Mon compagnon, avide de savoir ce qui se tramait, me suivit. Les sanglots s'arrêtèrent et pendant quelques secondes, je n'entendis plus rien. Puis, un gémissement sourd se fit entendre, derrière une rangée de sacs poubelles éventrés. Je les contournai et aperçu enfin l'auteur des ces bruits : un petit garçon. Il ne devait avoir guère plus de quatre ans. Ses cheveux mi-longs en bataille étaient noirs comme du charbon, et ses yeux rouges embués de larmes étaient grands et bleu nuit. Ses lèvres pâles tremblaient alors qu'il levait vers moi un regard paniqué. Il était sale, égratigné de partout, ses habits étaient déchirés, et une balafre sanglante lui déchirait le bras droit. Je grimaçai. Non pas de dégoût, mais de compassion. De pitié aussi. Il devait souffrir atrocement, et j'étais bien placé pour savoir à quel point il était douloureux d'être seul, blessé et abandonné dans la rue. Je m'accroupis devant lui, mais l'enfant recula en tremblant, se traînant tant bien que mal. Lekku arriva sur ces entre faits et émit un petit hoquet méprisant.

    « Peuh ! Un gamin ! Il a du se paumer, comme un con. »
    « Je n'pense pas. » répondis-je, un peu énervé par le ton de mon confrère. « T'as vu l'état dans l'quel il est ? Il a du lui arriver que'que chose de plus grave. On dirait qu'il a était prit dans un effondrement ou quelque chose dans l'genre... »


Je tendis doucement une main vers la petite créature terrorisée, mais elle couina et se tassa contre le mur. Cette réaction arracha un grognement à Lekku, qui râla de plus belle.

    « Rah ! Mais on s'en balance de c'mioche ! On n'est pas l'secours catholique, là ! »
    « Ferme la benne à ordures qui t'sert de gueule, Lekku ! Tu veux que j'te recasse ton nez d'fouine ? ! »


Par réflexe, le jeune homme porta la main à son nez tordu. Je le lui avait déjà cassé une fois : je pouvais très bien recommencer. N'empêche que cela le calma et il cessa de grommeler. D'ailleurs, il préféra s'éloigner, histoire de me maudir sans que je l'entende. De mon côté, j'ouvris une boîte de petits beurres qui faisaient partie de notre butin, et lui en tendis un. Il me l'arracha des mains et le dévora. J'esquissai un sourire attendri : il était mignon avec ses miettes autour de la bouche, son air paumé et ses cheveux ébouriffés. Je lui en tendis un autre, qu'il s'empressa de manger. Au bout du cinquième, l'enfant parut s'être un peu calmé et il avait arrêté de pleurer. Je pus donc le toucher sans craindre de lui faire peur, et posa donc une main sur sa tête. Je demandais doucement :

    « T'es tout seul ? Où sont tes parents ? »


Pour toute réponse, le garçon fondit en larmes, encore. Pour moi, c'était une réponse satisfaisante : il était seul, comme moi. Comme nous. Je lui donnai un paquet entier de biscuits et l'attrapa doucement pour le prendre dans mes bras. Instinctivement, il serra ses petits bras, de même que ses jambes, autour de mon cou. Les pleurs de l'enfant se calmèrent à nouveau, se contentant de renifler bruyamment. Je retournai vers Lekku, qui fit un bond :

    « De quoi ? ! Tu vas pas l'embarquer quand même ? ! »
    « Bah si. Tu croyais que j'allais l'laisser crever ? »
    « Et ses vieux, alors ? ! S'ils lancent un avis d'recherche, hein ? ! On aura les flics au cul, voilà ! A cause de toi ! »
    « Il a pas d'parents. »
    « T'en sais quoi ? ! T'es devin, p't'être ? ! » gueula t'il.
    « Juste, la ferme. »
    « Non, pas la ferme ! T'es vraiment qu'un... Hé ! » s'exclama t'il en remarquant le paquet de gâteau que l'enfant serrait dans sa main. « Tu lui as donné NOS réserves de bouffe, ma parole ! »
    « C'est bon ! C'pas la pénurie non plus ! C'est pas trois biscuits qui vont nous faire sombrer dans une famine profonde ! »
    « C'est pas trois biscuits ! C'est... » Il compta mentalement. « C'est deux paquets d'quatre, donc huit p'tits beurres en moins, bordel à cul ! » s'excita t'il.


Ses cris et ses gesticulations firent peur au petit qui se remit à pleurer.


    « Voilà ! Bravo ! » râlai-je, en le berçant maladroitement. « Tu l'as fais chialer ! »
    « Il sait faire qu'ça d'façon ! »


Je coupai court à la conversation en m'éloignant à grands pas, tapotant dans le dos du gamin. Lekku jura et retourna chercher la nourriture que j'avais laissé dans la ruelle. Il grommela un truc sur le fait que c'était la boniche puis se tut. Le garçon finit par poser sa tête sur mon épaule et s'endormi.

Ah ! Je ne me suis même pas présenté... Je suis Wilde Thivish, 9 ans, orphelin. Je n'ai jamais connu mes parents, c'est des ado du groupe qui m'ont recueilli, alors que je n'étais qu'un bébé de quelques semaines, enveloppé dans une couverture, dans un nid de papier journal. N'empêche que j'avais quand même une famille, une grande famille composée de dix-huit copains ! C'est pas cool ça ? Nous étions âgés de trois à vingt-et-un ans, nous nous occupions des uns et des autres, sans pour autant appliquer le régime totalitaire propre aux parents. On élisait trois chefs qui prenaient le commandement, afin d'éviter la « dictature ». Certes, il y avait toujours un leader sur les trois ( qui changeait sans cesse ), mais bon... On faisait de notre mieux pour ne pas sombrer dans la monarchie. Moi, j'étais un de ces chefs, m'étant fait remarquer grâce à mes très nombreuses qualités ( vous ne me croyez pas ? ) comme l'intelligence, la ruse, la force, l'agilité et la détermination, entre autres. Les autres chefs étaient Roy ( le plus âgé ), et Agyness ( une jolie jeune fille de 14 ans avec un caractère bien trempé ). Actuellement, le plus influent des chefs, c'était Agyness, qui avait instauré la règle du « qui ne ramène rien, ne mange rien ». Personnellement, je trouve cette décision très juste. Ca apprendra à ce j'en foutre de Seon à glander, en attendant qu'on vienne tout lui servir sur un plateau.
Bref, au lieu de parler de ce petit con prétentieux, parlons plutôt de moi. A cette époque, j'avais les cheveux plus courts ( globalement au niveau des épaules, mes mèches étant de longueurs inégales ) et davantage désorganisés ( je n'avais pas de bandeau pour les retenir ). Ils étaient plus sales aussi... En effet, ma douche, je la prenais toutes les deux semaines environ. Oui, oui, je vous vois arriver avec vos « Eurk ! C'est crade ! » mais je pouvais pas faire autrement alors vos gueules ! Au pire, j'ai toujours le canal des eaux usées à proximité mais c'est pas le must quoi... Du coup, on se partageait les eaux de pluie. Un système instauré par Roy cette fois. Le but, c'était de récupérer l'eau de pluie, de la stocker, et de passer à la douche par groupe de deux ou trois qui se partageait l'eau. Ca fait que, le temps que les dix-huit ( dix-neuf maintenant qu'on a un nouveau ) passent à tour de rôle, on ne peut pas se laver avant deux semaines. Parfois une semaine s'il pleut beaucoup. Sinon, à l'époque, bien que musclé, j'étais beaucoup plus maigre. Ma peau était plus sale aussi, et mes vêtements en mauvais état, pour ne pas dire carrément destroy. Par contre, mes yeux aux pupilles verticales étaient toujours aussi violets ! Mais je n'avais pas encore mon tatouage sur la cuisse. En bref, disons que je ne me portais pas trop mal, mais pas très bien non plus.

Arrivé au camp, dans un coin assez grand des égouts de Londres, je déposai l'enfant sur un fauteuil défoncé. Alors qu'il se réveillait doucement, tous les autres membres du clan se rassemblèrent autour du nouveau, curieux. Roy et Agyness se frayèrent un chemin jusqu'au premier rang. Moi, j'étais à côté de mon jeune protégé. Notre aîné s'avança vers l'intrus et l'examina sous toutes les coutures, très concentré. Agyness, quant à elle, observait de loin, ses yeux noisettes perçants fixés sur le petit. Pendant que les deux autres chefs mûrissaient leur verdict, les autres enfants des rues s'étaient mit à nous bombarder de questions, moi et le gosse.


    « Dis, Wilde. » demanda Raven, une rouquine de 7 ans aux idées noires. « C'est ça ta part de nourriture ? On va le manger ? »
    « Oh oui ! » surenchérit Heather, sa fausse jumelle blonde. « Il à l'air tout mignon, tout bon ! »


Le concerné, apeuré, se tassa sur son fauteuil. Une jeune femme de seize an au regard bleu et rêveur intervint :

    « Mais non, voyons ! On ne peut pas le manger, nous ne sommes pas des cannibales. »
    « Pourquoi pas, Clow ? » siffla Raven.
    « Parce que c'est contre nature, c'est tout. »
    « C'est un nouveau copain ? Hein, dis, Wilde ! » lança Al, un garçon brun doté d'oreilles de chat.
    « Oh oui ! Un copain ! » s'exclama Lewis, un petit garçon aux joues roses.
    « Hé mais il saigne ! » s'écria Shade, une jeune femme sensuelle. « Regardez son bras ! »
    « Putain d'merde ! » jura un faux blond surexcité. « Il va crever ! Il va attraper la grande graine ! »
    « On dit la « gangrène », Lin. » soupira Nat, un élégant brun ténébreux, blasé.
    « Mais il faut le soigner alors ! » gueula Windy, une grande jeune fille au fort caractère. « Clow ! Va chercher de quoi s'occuper de lui ! »
    « J'y vais ! » obéit la pseudo infirmière et s'éclipsant.
    « Tss... Il a pas l'air très solide... » marmonna Hell, jeune fille de 15 ans désenchantée.
    « C'est sûr. » susurra Seon. « Il va clamser ! »
    « Si c'est pas la grande graine, c'est la prêtre qui va l'emporter ! » hulula Lin, paniqué.
    « Mince, Lin ! » gronda Nat. « On dit « gangrène » et « lèpre » ! »
    « Oh toi, Mr Parfait, on t'as pas sonné ! » grogna Ily, petite brune rebelle.
    « Ouais d'abord ! Ta gueule, Nat ! » lança John, un mini caïd.
    « Non, mais il a raison ! Lin a qu'à pas être demeuré aussi ! » siffla Ed, jeune homme renfrogné.
    « C'est pas un demeuré ! » protesta Al. « Il est dyslexique ! »
    « C'est bien ce que j'ai dis. » ricana Ed. « Il est demeuré. »
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Invité
Sujet: Re: Les chroniques d'une Belette Les chroniques d'une Belette EmptyVen 22 Aoû - 10:12

S'ensuivit un brouhaha indigné, où chacun prenait son parti : celui de Nat ou de Lin. Dans tous les cas, une dispute éclata. La voix autoritaire de Roy éclata, sévère :

    « Ho ! Vos gueules les mouettes ! »


Aussitôt, le silence se fit. A ce moment, Clow revint avec la trousse de secours, timide, et commença à soigné le pauvre petit garçon apeuré. Agyness prit la parole, solennel :

    « Bien, je ne vois pas d'inconvénient à ce qu'on le garde, Roy non plus. Comme c'est Wilde qui l'a ramené, je suppose qu'il est d'accord avec nous. Cet enfant fait donc partie des notre désormais. Wilde, tu en as la responsabilité. »
    « 'Kay, miss ! » chantonnai-je.


Une intense discussion accueillit cette décision. Pour ma part, je pris le gamin dans mes bras, m'emparai du matériel des premiers soins, et m'installai dans un coin tranquille, ma « chambre », avec lui. Tout en versant de la vodka sur un chiffon propre ( pour désinfecter ), je l'interrogeai :


    « Comment tu t'appelles ? »
    « ... Je sais pas. » souffla l'enfant.
    « T'as quel âge ? »
    « Je sais pas... » murmura t'il d'une voix de plus en plus étouffée.
    « Tu viens d'où ? »
    « Je... Je sais pas... » commença t'il à sangloter.


Je le regardai sans rien dire, alors que de grosses larmes commençaient à couler sur ses joues crasseuses. Amnésique ? Peut-être... Sans doute que l'accident qui avait causé sa blessure au bras l'avait choqué au point de lui faire perdre la mémoire. Ses parents étaient-ils morts dans l'accident ? Probable. Je le prévins :


    « Attention ça va piquer un peu. Serre les dents. »


Je lui empoignai fermement le bras, sous sa blessure, et appuyai le chiffon gorgé d'alcool sur la plaie. Comme je m'y attendais, le gamin hurla tant sa douleur était grande. Je le serrai contre moi pour tenter de l'appaiser alors qu'il se débattait. Il planta ses ongles dans ma chair. Je ne bronchai pas. Pour l'avoir testé maintes et maintes fois, je savais combien cette méthode de désinfection faisait mal. Cependant, c'était ça ou l'infection grave. Mieux vallait souffrir un peu que de se faire amputer.

    « Voilà, c'est finit. » murmurai-je.


Je bandai consciencieusement sa plaie alors qu'il se défoulait sur mon pauvre bras. Grr... Il me labourait la peau ce sauvageon ! Nonobstant, je ne fis aucune remarque et encaissai en silence. Une fois son pansement achevé, je repoussais ses mains qui me faisaient mal, saisit son petit visage crasseux entre mes mains et plongea mes améthystes dans ses saphirs.

    « Si tu n'as pas de nom, c'est moi qui vais te nommer. Tu t'appelleras River. »
    « P-pourq-quoi ? » hoqueta t'il.
    « Parce que tu pleures tellement que tu rivalises avec la Tamise ! »


River baissa les yeux, penaud. Je poursuivis :

    « Tu seras né vers fin Mars 1998, tu auras donc quatre ans dans deux mois. Tu choisiras la date exacte. Tu pourras même changer d'une année sur l'autre si tu veux. Pourquoi en Mars ? A cause des giboulées : ces pluies brèves mais violentes qui alternent avec le soleil. Ca te va bien, non ? »


Je lui souris. Timidement, il me sourit à son tour et se blottit dans mes bras. Le flot de ses larmes s'était tarit. Je murmurai à son oreille, tendrement :

    « Dis, River, tu veux bien être mon petit frère ? »
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