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 GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset)

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Sujet: GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) EmptyDim 30 Oct - 21:27



SO I RUN AND HIDE AND TEAR MYSELF UP START AGAIN WITH A BRAND NEW NAME
GABRIELGuillaume Ethan Valauney
    Né un dix-sept novembre mille-neuf cent quatre-vingt dix, Guillaume est aujourd'hui âgé de 21 ans. Il fait partie des adultes en tant qu'assistant bibliothécaire et n'est pas principalement là pour son QI comme tous les orphelins présents ; néanmoins, en tant que bon employé de la Wammy's House, il est doté d'un QI de 189. Son nom étant Valauney, on comprend facilement qu'il est en fait d'origine française malgré le fait qu'il soit né en Irlande. Il est arrivé dans l'établissement cette année, venant d'achever ses études littéraires. Il fait donc ainsi son entrée dans le monde du travail au sein de cet orphelinat.


WITHOUT MY WINGS, I FEEL SO SMALL
GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) 111030060648489885

Gabriel n'a pas un physique particulier ; les cheveux roux (ou rouge version anime), des yeux verts aux tendances bleues selon la lumière, une taille fine et allongée. Ni trop grand ni trop petit le gringalet, de taille moyenne (1m80), sans être vraiment musclé. Il a une peau plutôt claire en somme, sans tâches de rousseur. Il est doté d'une minuscule hirondelle noire comme tatouage sur le poignet, sous ses quelques bracelets brésiliens, symbolisant, comme sa mère d'origine française le pensait, la chance (croyance française, venant en vérité de la Lorraine).


TU MENS COMME UN ENFANT
GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) 111030033649403982

humain brutal
généreux nympho sur les bords
ambitieux excessif
idéaliste contestataire
sentimental buté


    Quel petit passionné nous avons là. Passionné non pas de la vie mais de ses idées. Car en effet, lorsque Guillaume a quelque chose en tête, il ne lâche pas. Entêté et tenace, il sera dur de lui faire avaler autre chose que ses pensées. Convaincu qu'il est par celles-ci, il sera à l'écoute des vôtres mais vous aurez du mal à lui faire avaler si tel est votre but. A côté de ça, le garçon est plutôt quelqu'un de calme et raisonné d'une certaine façon. Ses heures perdues, il les passe dans les livres, ou journaux. C'est quelqu'un d'énormément cultivé de ce point de vue là, et qui a beaucoup de références. Ne vous détrompez pas ; il ne vit pas que pour les livres. Il s'y perd simplement. Ce qu'il aime le plus, oh oui, ce sont les femmes. L'amour, plus généralement. Il ne montre aucune pointe d'intérêt à première vue, il évite les émotions et sentiments, afin de ne pas être blessé. Et rares seront les personnes à qui il tient sincèrement — car, c'est un fait, le garçon est quelqu'un de plutôt hypocrite dans ses relations. Mais, lorsqu'il aime réellement, Gabriel est authentique et passionné. Du moins ... Il a sa façon bien à lui d'aimer. Enfin, ça, vous le découvrirez tôt ou tard. En apparence, sinon, il est calme et posé. Un peu trop franc pour certaines personnes, dit-on. Mais il a vécu des choses qui font qu'aujourd'hui, même sans le vouloir, il est cru et brutal dans ses paroles. Il ne se préoccupe pas vraiment des conséquences. Donc, malgré son air posé, parfois indifférent, c'est quelqu'un de vraiment sensible au fond. Mais n'associez pas à sa personne l'adjectif de niais ; ce serait absolument faux. Il est donc plutôt posé et placide, mais peut rapidement s'emporter et même devenir violent ; nerveux en somme. Mais ce ne sera pas non plus très récurrent. C'est quelqu'un de bon, et humain, même si certaines personnes vous diront le contraire. Peut-être pas la meilleure rencontre que l'on puisse faire car, craignant d'être blessé il blesse à son tour ; mais il reste quelqu'un de foncièrement bon.


MY THOUGHTS YOU CAN'T DECODE
Définissez-vous en une phrase.
    Non.


Vous offrirez quoi à Noël à votre meilleur ennemi ?
    Une corde.


Parmi ces livres ci-dessous, lequel serait le plus susceptible d'être votre livre de chevet ?
    Totem et Tabou de Sigmund Freud.


Ce que vous devez impérativement arrêter de dire. Sérieusement.
    « Je comprends ce que tu ressens... »


La petite manie dont vous vous passerez bien ?
    Caser des citations partout.


Il y a forcément quelque chose que vous auriez dû faire depuis longtemps et n'avez toujours pas fait.
    Ranger ma chambre si je trouve un jour le temps.

    (Je sais pas trop si je dois le faire vu que c'est un adulte mais bon x) ...)


SI LA VIE EST FACILE C'EST QUE TU T'Y PRENDS MAL
La joueuse derrière l'écran a un petit surnom simple du nom de Pouchie, mais elle est aussi appelée Lan', Lanie ou par certains membres ici Tepu. Elle parle d'elle à la troisième personne parce que susu tavu. Elle va bientôt atteindre l'âge de trente-six ans en grosse pedobear qu'elle est, même si elle va encore au lycée. Son avatar est Kiyama Hiroto d'Inuzama Eleven, très bien embelli par les fanarts de zerochan, parce que bon sinon dans l'anime ... Ce n'est pas son premier forum, et elle l'a découvert par hasard et on ne sait comment. Et elle keaf WH. That's all.


Dernière édition par Gabriel le Lun 31 Oct - 15:32, édité 4 fois
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Invité
Sujet: Re: GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) EmptyDim 30 Oct - 21:28


ET A TOUS CEUX QUI SE RECONNAISSENT, FUYEZ AVANT QU'ON VOUS BLESSE


GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) 111030060610311628

Chapitre 1 ▬ Insensible.

      — Qu'est-ce que tu fais ? railla-t-elle d'une voix sinistre et peu mesurée. Tu écris, encore ?


    Oui, il écrivait, encore. Ses yeux étaient absorbés par l'encre qui se dissipait sur le papier au fur et à mesure que son stylo glissait dessus. Il aimait être dos à la porte de sa chambre ; il aimait que ses feuilles soient éclairées par la lumière vive et pénétrante du soleil en face de son bureau. Il imaginait cette bulle, cette protection autour de lui, contre le monde, contre le reste de la pièce, le reste de sa maison, contre sa mère sale et souillée à la fois qui lui hurlait dessus de façon démesurée et constante. Sa mère. Il n'aimait pas sa mère. Il la considérait comme inexistante et n'ayant pas le droit de vivre. Et comme c'était réciproque. Si on écartait certains moments. On ne pouvait pas dire que sa mère était schizophrène ; pas vraiment. Elle s'était tout simplement perdue. Elle restait en vie grâce aux médicaments dont elle se gavait de façon absolument excessive, et, paradoxalement, mourrait petit à petit à cause de ceux-ci. Bien-sûr, pour Guillaume, celle qui l'avait mit au monde – et uniquement mit au monde, rien de plus – était déjà morte. Elle était morte de l'intérieur, avant même qu'il n'ait ouvert les yeux. Mais son pauvre corps frêle et rachitique tenait encore, de façon miraculeuse, debout. Elle continuait à vivre, morte, la dame. Qu'il en soit ainsi.

      — Guillaume ! Qu'est-ce que tu fais ! hurla-t-elle de façon frénétique.


    Enfin, il avait brutalement stoppé son stylo, avant de relever d'un air las et presque désolé ses émeraudes sur la vitre qui se dressait en face de lui. Il ne se retournerait pas, non. Il ne voulait pas la voir. Jamais. Lorsque l'on déteste quelqu'un, la moindre de ses actions nous insupporte. La façon dont la personne fait, dit les choses, tout. Il la haïssait. Et il inspire un peu d'air, comme pour s'apaiser. Il faut toujours rester calme avec les enfants, comme avec les personnes un peu folles, non ? C'est ce qui lui avait toujours paru intelligent de faire, afin de ne pas les affoler un peu plus.

      — J'écris.

      — Tu écris ! P-Pourquoi … Pourquoi est-ce que tu écris tout le temps ?! s'horripila-t-elle comme si c'était la pire chose au monde, tout en s'accrochant de façon presque désespérée à l'encadrement de la porte. Pourquoi est-ce que tu ne me parles pas ? Pourquoi ? Tu ne m'aimes pas ! Je t'ai toujours tout donné pourtant, j'ai toujours tout fait pour toi, je t'ai toujours acheté ce dont tu avais besoin malgré notre manque d'argent ! Pourquoi, pourquoi ?! ...


    Immobile, le moineau qui s'était posé sur une des étiques branches envahissant la totalité de l'encadrement de la fenêtre était bien plus captivant que la crise habituelle d'hystérie que sa mère lui faisait à cet instant. Il préférait ignorer, il préférait passer à côté, tout simplement parce qu'elle ne lui faisait que trop pitié. Il attendait, les paroles de celle qu'on identifiait comme sa mère passant comme de l'eau dans ses tympans, de façon fluide mais légèrement désagréable. Elle avait brisé le silence, elle avait brisé son repos. Il préférait les moments où elle restait recroquevillée dans son lit, à pleurer sans raison, jusqu'à ce qu'elle s'endorme et qu'elle ne se réveille qu'une journée entière plus tard. Il préférait ces moments où elle n'existait plus. Il préférait ces moments où, seul, il pouvait ne plus exister à son tour.

      — ...Guillaume...


    Le bruit d'un léger choc entre des genoux et le parquet usé de sa chambre se fit entendre. Il savait qu'elle était tombée. Il ne serait pas étonné si elle s'était évanouie. Etait-elle morte, cette fois-ci ? Il l'espérait, au fond. Ce serait la surprise. Et c'est avec une once d'espoir qu'il posa délicatement son stylo plume avant de lentement se retourner sur sa chaise. En effet, la jeune femme tout à fait misérable, vêtue de ses simples sous-vêtements poisseux, qui peinaient à ne pas s'entre-bailler lorsqu'ils enveloppaient de façon dérisoire son corps meurtri et décharné, s'était pitoyablement écroulée au sol. Pourtant, le visage froid du garçon pâle restait de marbre, car il n'avait aucune pitié pour quelqu'un à qui il en voulait comme jamais. Elle lui faisait pitié, certes, mais il n'en était pas le moins du monde attendri. Mais non, elle n'était définitivement pas morte. Malheureusement.

    Chapitre 2 ▬ Nonchalant.

    Alors, il fût obligé de se rendre à l'évidence : il devait, encore une fois, s'occuper de celle qui lui a volé toute innocence. Car il n'avait jamais réellement eu d'enfance. Il avait été, depuis tout petit, mit devant l'ultimatum de grandir trop vite, sans avoir le choix, sans pouvoir profiter de la moindre parcelle d'innocence que contient l'enfance. Et, au jour d'aujourd'hui, enfermé dans le deuil de sa propre candeur dérobée, il devait prendre soin de la personne coupable, de la personne qu'il haïssait. Il était là, maintenant, à passer ses bras sous les siens afin de la soulever, à la traîner de façon pathétique le long du couloir vide et peu entretenu, jusqu'à la petite pièce au fond qui servait de salle de bain. Misérable pièce en désordre total ; ça passait des dizaines de boîtes de médicaments ouvertes et étalées un peu partout aux vêtements sales et éparpillés.

      — Depuis combien de temps ne t'es-tu pas lavée ? Tu empestes, lui reprocha-t-il en tentant tant bien que mal de la maintenir redressée contre la baignoire.


    Mais l'intéressée n'était pas le moins du monde apte à répondre ; elle peinait à garder les yeux ouverts et n'avait aucun équilibre, se balançant légèrement sur les côtés d'un air épuisé ; ce qu'elle était. Guillaume ne prêtait pas plus gare que ça à celle-ci, s'occupant de repousser le rideau plastifié jaunâtre sur le côté pour ensuite faire couler l'eau de façon à ce que la chaude se manifeste. Il aurait bien pu lui faire couler de l'eau glacée, étant donné qu'il la détestait à un point inimaginable ; mais il n'était pas sans cœur pour autant, bien au contraire.
    Alors, avec nonchalance, il passa encore une fois ses bras sous les siens pour la redresser et l'aider ainsi à venir s'asseoir dans la baignoire non pas sale comme on pourrait le croire mais usée. Son équilibre était absolument médiocre, et il fallait avouer qu'il était exaspéré de devoir l'aider à marcher comme on ferait à une enfant ; mais il ne soupirait pas, ne se plaignait pas. Il restait silencieux, indifférent, tâchant de faire ce qu'il avait à faire. Et puis, ses mains vinrent décrocher son soutient-gorge qu'il retira et posa sur une chaise à côté, avant de faire glisser sa culotte entre ses jambes squelettiques pour la retirer et l'écarter elle aussi. La femme elle, laissait sa tête aller contre ses genoux relevés, toujours aussi peu énergique. Il avait attrapé la pomme afin de verser de l'eau sur la totalité du corps de sa mère, prenant ses cheveux plutôt longs de l'autre main afin d'en mouiller l'intégralité. Puis il attrapa le flacon en plastique qui servait à la fois de savon pour le corps mais aussi de shampooing de façon à lui en verser un peu partout, sans réellement faire attention. Tremblotante, la mère de Guillaume ne disait rien. Elle subissait, survivait. Lui, frottait son dos à l'aide d'un gant maintenant, passant ensuite sur le reste du corps sans broncher. Sa peau n'était séparée de la sienne que par le biais du tissu imbibé d'eau et de savon ; mais ce même tissu était bien trop fin pour qu'il ne sente pas les os pointus et frémissants du corps qu'il lavait. En soi, la nudité de sa mère était quelque chose de gênant, certes ; mais il n'était plus question de gêne vis-à-vis du corps féminin, à cet instant. Elle était pathétique, et rien de plus. Il n'y avait pas de quoi être gêné, pour lui. D'autant plus qu'il était maintenant habitué.

    Il l'avait, plus tard, habillée, puis déposée dans son lit aux draps froissés et puants. Il s'était dit à ce moment-là, qu'il devrait bientôt faire la lessive ; mais c'était quelque chose qu'il détestait faire, et négligeait. Par contre, si Guillaume était doué dans quelconque autre domaine que les tâches ménagères, c'était bien l'écriture. Et c'est immédiatement après avoir refermé la porte de la chambre de sa mère qu'il s'était rendu dans la sienne, heureux de pouvoir retourner écrire à celle qui le faisait vivre, tout en le tuant de l'intérieur. Celle dont il était éperdument amoureux, en somme.

    Chapitre 3 ▬ Abasourdi.

    Quelques semaines plus tôt.

      — Elle est malade. Elle ne reviendra pas à l'école avant un moment.


    Le sac sur le dos, Guillaume eût l'impression d'un instant défaillir. Sa chère amie, sa meilleure amie, la sœur d'Evan — ou celui qui venait de lui annoncer la nouvelle — la jeune fille sans qui ses journées étaient fades et sans aucun sens, celle qui l'appréhendait comme personne ne pouvait le faire, celle avec qui il partageait tout, de ses passions à la lecture qu'il préférait … Elle ne viendrait plus. Elle était malade, avait-il dit.

    Les lèvres de Guillaume s'étaient entre-ouvertes de stupeur, et il resserra un peu plus sa main autour de la sangle de son sac afin de ne pas le laisser tomber. Il devait rester calme, ne pas s'affoler. Il ne l'aimait pas, cette fille. Il n'en était pas amoureux. Il n'avait jamais été amoureux de personne. Mais il l'aimait beaucoup comme on peut aimer une sœur. Et c'était un coup trop dur pour lui, à cet instant.

      — Lucy est … malade ? répéta-t-il, un peu hésitant.
      — Oui, quelque chose qui ressemble à la tuberculose je crois … Mes parents ne veulent pas trop m'en parler. C'est assez grave.


    Guillaume avait détourné les yeux avant de les baisser, se pinçant les lèvres dans un automatisme inquiet. Lucy avait toujours été une fille, comme lui, un peu seule et reculée des autres. Elle était venue lui parler, une fois. Et puis, les points communs en enchaînant d'autres, il s'était ouvert à elle, et avait tout partagé avec. Il avait ainsi rencontré son frère, Evan, qui se trouvait dans la même école — mais il n'y avait jamais prêté attention car Guillaume ne prête pas réellement attention aux autres. Dès lors, en plus d'une très proche amie, il avait bénéficié d'un autre ami, moins proche, mais avec lequel il s'entendait tout aussi bien. Evan n'avait jamais compris la personne refermée qu'était Guillaume ; mais il avait toujours fait avec, et cela ne l'avait pas empêché de le côtoyer, malgré les indignations des autres personnes pour l'intérêt qu'il portait à une personne aussi saugrenue que notre roux. Mais le fait était qu'aujourd'hui, il perdait indirectement la personne qui avait réussit à lui donner légèrement goût à la vie.

      — Guillaume.


    Le ton sérieux d'Evan avait attiré son attention, et il avait donc en conséquence relevé les yeux, la moue indifférente mais le regard mélancolique.

      — Tu aimes ma sœur ? avait-il demandé, ses yeux bruns ne quittant pas ceux de l'intéressé.
      — Je l'aime comme tu peux l'aimer. Comme une sœur. Pourquoi ? l'interrogea-t-il à son tour.


    Le jeune garçon se disait qu'il était normal pour un grand frère de se renseigner sur ces choses là. Il n'avait qu'un an de plus, mais il avait toujours fait très attention à Lucy. C'était son rôle prédestiné, depuis qu'elle était née. Mais Guillaume était sincère dans sa réponse.

      — ...histoire de mesurer les conséquences de ce que je vais dire.


    Ni la douce brise du soir qui soufflait, ni les tons orangés du soleil qui se couchait n'arrivaient à apaiser l'atmosphère tendue qui venait de s'installer. Là, Guillaume était un peu plus interloqué. Certes, le garçon était par moments sérieux, mais rarement de cette façon. C'en était plutôt angoissant, du coup.

      — ...de ce que tu vas dire ? répéta-t-il.
      — Guillaume, commença-t-il en s'approchant d'un pas. Guillaume, je suis amoureux de toi.


    La sensation d'avoir raté un battement. Un léger mouvement de recul. L'incompréhension, la confusion. Le pouffement nerveux et factice. La moue filandreuse, les doigts légèrement tremblants maintenant.

      — Tu … Tu rigoles, tu te fiches de moi Evan ?
      — Non.
      — Mais … Enfin, tu … Tu es un garçon, moi aussi, et … C'est insensé … Pourquoi ?
      — Pourquoi suis-je amoureux de toi ? Ta question est aussi insensée que ma déclaration, Guillaume. Tu sais bien. L'amour ne s'explique pas, dit-on.
      — Je … Je suis désolé, je … Je ne ressens absolument pas la même chose que toi, je …
      — J'en ai conscience. Du moins, je m'en doutais.
      — …
      — Allez, lance-t-il en souriant un peu, déposant sa main sur son épaule en le faisant tressaillir, ce n'est rien. Je ferais comme si de rien n'était, ne t'inquiètes pas, ça ne changera rien. De toute façon, si je devais réellement extérioriser sans complexe cet amour … Je ne pourrais plus jamais remettre un pied chez moi.


    Son regard appuyé dans le sien devenant embarrassant, Guillaume avait finit par baisser les yeux. Son cœur, sous la pression, s'était accéléré en un rien de temps. Il n'avait jamais aimé, n'aimait pas profondément. Les sentiments étaient quelque chose d'abstrait et illusoire, pour lui. Il les fuyait, les repoussait. Car ils n'avaient pas lieu d'être dans sa vie. Il ne voulait pas souffrir. Il ne s'attachait pas. Mais il était dur de recevoir l'amour de quelqu'un du même sexe. Jamais, dans sa vie, il n'aurait pensé que ça arriverait. C'était spécial, un peu inquiétant, et, malgré le fait qu'Evan disait que ça ne changerait rien … Il n'avait qu'une seule envie : fuir à toutes jambes comme un lâche, s'enfermer dans sa chambre et ne plus jamais devoir croiser le regard d'Evan. C'est fou ce que le moindre mot pouvait tout changer en un instant.

      — Hey, Guillaume … dit-il doucement en lui relevant le menton, toujours un peu souriant. Ce n'est rien, te dis-je. Ne me vois pas autrement, d'accord ? Je ferais comme si de rien n'était, répéta-t-il. D'ailleurs, je pense que je vais rentrer, fait-il remarquer en détachant sa main de son épaule afin de jeter un œil à sa montre. Tu sais … Pour Lucy. Elle m'a donné ça, pour toi.


    Et le brun extirpe une petite enveloppe blanche et soigneusement refermée de son sac, en lui tendant. Il la regarde, intrigué, et met quelques secondes avant de la prendre.

      — Comme elle ne peut plus voir personne à cause du risque de contagion … Elle voudrait entretenir une correspondance régulière avec toi, je suppose. Quand tu lui auras répondu, donne-moi la lettre, je lui transmettrai. Oh et, ne t'inquiètes pas, tu ne crains rien, en ce qui concerne la contagion. Pas par lettre, du moins. Voilà, je crois que c'est tout.


    Guillaume relève les yeux, apercevant le sourire chaleureux de son ami. Il y répond brièvement, mais surtout faussement, avant que le brun ne commence à s'en détourner pour rentrer chez lui.

      — Allez, je vais y aller. Oh, et, n'oublie pas … Ne change pas, d'accord ?


    Chapitre 4 ▬ Amoureux.


    Et voilà comment Guillaume avait commencé à écrire régulièrement. Non, enfin, il écrivait déjà beaucoup, mais seul, pour son propre plaisir. Là, il écrivait presque chaque soir une lettre, en réponse à Lucy. Dès que l'un des deux avaient la lettre en main, ils se mettaient à répondre dans la minute. Alors, le matin, lorsqu'Evan lui donnait une lettre de sa sœur, toute la journée, il pensait à ce qu'il allait répondre ; toute la journée, il écrivait en cours. Et le soir, il venait recopier au propre, ou la finir tout simplement. Même manège tous les jours. Il se demandait souvent comment Evan faisait pour rester conciliant à cette correspondance presque exagérée. Mais Guillaume pensait souvent que, s'il l'aimait vraiment comme il lui avait avoué quelques semaines plus tôt, il était content de faire ça pour lui.

    Chaque soir, il courrait vers sa chambre, balançait vulgairement son sac sur le lit avant de se jeter à son bureau pour écrire. De simples lettres quotidiennes contenant l'intégralité de leur vie et les discutions et débats sur leurs passions littéraires, on en était, aujourd'hui, arrivé à quelque chose de plus profond et spécial. Car, oui, depuis qu'ils s'étaient attribués les rôles de plusieurs personnages d'histoires d'amour qu'ils adulaient, et qu'ils parlaient en leur nom par le biais de ces lettres, tout était un peu plus ambigu et passionné. Plongés dans la peau de leurs personnages, pensant comme eux, agissant comme eux et se parlant comme eux, la réalité faisait pale mine à côté. D'autant plus que les parents de Lucy refusaient catégoriquement qu'ils se voient. D'abord, pour la maladie. Mais cette maladie leur servait bien de prétexte ; de ce que disait Lucy dans ses lettres, ils voyaient leur relation fusionnelle comme inquiétante et refusaient de laisser Guillaume pénétrer ne serait-ce que dans le hall de leur maison. Ils voulaient que leur fille cesse de parler de lui constamment, de ne penser que par lui ou plutôt … par le personnage dans lequel elle s'était fondue par le biais de ces lettres.

    Chapitre 5 ▬ Obsession.


    Extrait d'une de leurs conversations, vers la fin de leur correspondance.

    Très chère Juliette,

    Si vous saviez comme le monde est dur, sans votre présence. Peuvent-ils seulement nous comprendre ? Peuvent-ils ressentir la douleur que nous ressentons en étant éloignés ? Serons-nous une fois seulement réunis dans cette vie que juge misérable ? Malgré la distance et l'impossibilité pour moi de vous apercevoir ne serait-ce, qu'une seule fois, je m'en remets à vous. Je le dois. Je dois extérioriser cette passion inattendue qui s'est emparée de moi, par le biais de simples mots.
    Juliette. Comme je souffre de ces paysans aveugles au monde et à notre amour ; car oui, de très chère amie vous êtes passée à amour inconditionnel. Je vous le confie, car je ne peux plus le contenir. Mon personnage a eu raison de moi ; et l'amour illusoire et superficiel que je portais au vôtre s'est transposé sur le mien.
    Lucy, je ne te parle plus en tant que Roméo. J'ai besoin de toi. Tu seras toujours Juliette, pour moi. Lucy n'existe plus. Guillaume non plus. Je suis Roméo, tu es Juliette. Nous ne vivons pas, nous n'appartenons pas à cette époque. Mais je veux que tu comprennes ça. Je t'aime d'un amour réel, et j'ai besoin de toi. J'ai besoin de t'effleurer, de te toucher, de t'embrasser, de te serrer contre moi, de sentir ton cœur battre au rythme du mien, j'en ai besoin. Je me fiche de la maladie. Vivre est déjà une torture. T'aimer me tue. Reviens-moi. Je t'en supplie.


    Chapitre 6 ▬ Indigné.


      — Tu as la lettre ? demanda-t-il, un peu inquiet dans le fond.
      — Elle n'a pas répondu, cette fois-ci. Je crois qu'elle était un peu trop fatiguée. Mais, Guillaume … Est-ce que je peux te poser une question ?
      — Elle n'a pas répondu … répéta-t-il, une mine déçue sur le visage.


    Il n'avait pas ignoré volontairement la demande d'Evan. Le fait que, pour la première fois, ou, au moment où il dévoilait des sentiments qu'il avait tant peiné à rejeter toute sa vie, elle ne répondait pas … Ils étaient si fusionnels avec leurs personnages, ils s'étaient tant oubliés eux-même, ils avaient tant oublié le reste du monde … Pourtant … Pourtant, elle n'avait pas répondu.
    Le banc de bois, sous son arrière-train, lui parût tout d'un coup bien désagréable. Et il avait enfoncé ses mains gelées par le froid de l'hiver qui venait de s'installer dans ses poches, histoire de les réchauffer un peu, lui-même tendu.

      — Vous vous parlez depuis quelques mois par lettres, maintenant. Elle nous parle beaucoup de toi, tu sais, enfin, en tant que Juliette dit-elle …


    Guillaume ne levait pas les yeux du sol fertile et sec, un peu sonné par le fait qu'elle n'ait pas répondu. Il savait tout ça, qu'elle parlait beaucoup de lui, etc, pourquoi lui répétait-il donc ? Il n'avait plus vraiment la tête à penser à autre chose, il était réellement préoccupé à cet instant.

      — Et maintenant … tu es amoureux d'elle, alors ?


    Là, par contre, une réaction se fit sentir. Il releva machinalement la tête, balayant son visage du regard, silencieux. Oui, parce que, la dernière fois, il lui avait répondu que non.

      — Oui.
      — … et pourquoi maintenant, alors que tu ne la vois plus ?


    Oui, pourquoi ? Il ne saurait expliquer tout cela précisément, mais il savait que c'était fort ; que c'était plus de la passion que de l'amour.

      — Ce n'en est que mieux, non ? Je suis tombé amoureux de sa façon d'être. De son esprit, de son âme, de son cœur. Rien de plus. C'est pour moi un amour plus véritable que tout autre. Tu ne crois pas ?
      — ...si.


    Et puis, Guillaume avait de nouveau baissé les yeux sur ses pieds, considérant la conversation comme terminée. Il n'avait rien de plus à ajouter. Cependant, il était visiblement le seul, car pour Evan, ce n'était pas terminé.

      — Je me suis longtemps demandé comment j'allais te dire ça. Je t'aime toujours. Oui, c'est insensé, mais crois-moi, c'est réel. Et je sais que tu peux me rendre cet amour. Tu comprends ce que c'est, maintenant.
      — ...qu'est-ce que ça signifie ? Arrête ça, Evan. Je n'ai pas changé vis-à-vis de toi depuis ce temps-là. S'il-te-plaît, fais comme tu as dit ; fais comme si de rien n'était … S'il-te-plaît.


    Une main froide qui vient se poser sur sa joue, un frisson, un léger mouvement de recul. Une crainte.

      — Guillaume. Tu m'aimes déjà, souffla-t-il.


    Stupeur. Il ne dit rien, ses lèvres violacées par le froid encore une fois entre-ouvertes, son souffle s'accélérant un peu. Il craignait presque Evan. Il avait peur de ce qu'il disait, et de ce qu'il allait dire. Il avait l'impression … qu'il en savait plus que lui. Qu'il avait une longueur d'avance. Qu'est-ce que c'était que ça ? …

      — Je … Arrête. Je n'aime pas ça.
      — Je sais que tu vas le prendre très mal. Mais je n'ai jamais transmis tes lettres à ma sœur. Je répondais à sa place, en son nom. Ou plutôt, au fil des lettres, au nom de Juliette … Je sais que … Que c'est horrible ce que j'ai fais, mais … Je voulais te montrer que tu pouvais m'aimer. Je sais la moindre chose de toi, tu sais la moindre chose de moi. Tu aimes ce qu'elle est, ce que tu as découvert par le biais des lettres ; c'est bien ce que tu as dit, non ? Alors tu aimes la personne que je suis. Peu importe le physique et la constitution de mon corps. Je … je voulais que tu comprennes ça. Te faire réaliser. Ne m'en veux pas. Je t'aime réellement … Que tu sois un garçon, ou une fille. Je serais tombé amoureux de toi dans tous les cas …


    Paniqué. C'était ce qu'il était, au fond. Il ne réagissait plus, semblant avoir perdu pied. Il désirait s'enfuir. Il désirait pleurer, courir, oublier, fuir. Il désirait se faire mal, mal d'avoir cru, mal d'avoir été trompé. Mal d'être tombé amoureux de quelqu'un dont il ne désirait pas tomber amoureux. Non ! Il était tombé amoureux de Lucy, pas d'Evan … S'il avait su qu'il entretenait cette correspondance avec Evan, ça n'aurait pas été … Même si … Sa façon d'écrire, sa compréhension étonnante de la personne compliquée et renfermée qu'était Guillaume … Ses mots doux, romantiques et plaisants, son esprit, son âme …. Il. Pas Elle. Lui. Lui …

      — C'est dégoûtant.


    Il s'était relevé, les mains hors des poches maintenant, les poings serrés, les yeux baissés.

      — Ce que tu as fais. C'est dégoûtant. Ton amour. Il est dégoûtant.


    Puis, il avait fait volte-face vers Evan.

      Tu es dégoûtant.


    Puis, il était partit. Il n'était plus jamais revenu. Plus jamais. Personne ne se souciait de son cas. Parce que personne ne s'était jamais soucié de Guillaume. Pourtant, ils auraient du. Parce qu'à part écrire sa peine et fumer, Guillaume ne faisait plus grand chose, maintenant. Il s'occupait, encore, comme il pouvait, de sa mère. Mais il ne vivait plus vraiment. Il laissait passer le temps, il ignorait les appels de l'école. Le quotidien était fade et bien triste. Mais il n'en demandait pas plus ; il n'en avait jamais demandé plus. Il n'avait plus de nouvelles d'Evan ; plus de nouvelles de Lucy. Il ne s'en souciait plus. Il oubliait, ignorait, étalant sa peine et sa frustration sur le papier rugueux.


    Chapitre 7 ▬ Epuisé.

      — Mange, maman.


    Lassé, il tendait la cuillère contenant de la vulgaire soupe vers elle, lui même peu convaincant dans ses propos. Mais la jeune femme hochait négativement la tête, comme une enfant. Soupir ; le jeune garçon repose la cuillère dans l'assiette et l'attrape, se levant pour aller la jeter dans l'évier.

      — Si tu continue à gâcher l'argent qu'on dépense dans la nourriture, on en aura plus, tu sais. L'aide de la banque n'est pas éternelle.
      — Je sais …


    Toujours aussi nonchalant, il se met à laver l'assiette à l'aide d'une éponge toute effritée, sans lui répondre. La pièce n'était éclairée que par la petite lumière au-dessus des plaques de cuisson ; le reste était plongé dans le noir.

      — Tu dois retourner à l'école, Guillaume … Pour … Pour avoir un travail, une vie, plus tard … Ne fais pas comme ta pauvre mère qui a raté sa vie …
      — C'est sûr que tu t'es pas loupée, commenta-t-il de façon ironique en continuant de frotter l'assiette.
      — Guillaume, je t'en prie, je suis sérieuse …
      — Pourquoi tu t'inquiètes pour moi, tout d'un coup ? Ca ne te ressemble pas. Ah, excuse-moi, c'est peut-être parce que c'est un des rares moments où tu es clean. Quoi que dans quelques instants ce sera sûrement plus le cas.
      — Arrête, je … Si je suis comme ça, c'est justement parce que j'ai raté ma vie … Ne fais pas comme moi …
      — Ne me donne pas de conseils alors que tu n'as jamais été foutue de m'éduquer.
      — Ecoute-moi un peu, s'il-te-plaît ! … Je suis sérieuse ! … Je tiens à toi … Tu es mon fils !


    Là, le fracas de l'assiette contre les parois de l'évier se fait entendre, le roux l'ayant relâchée violemment avant de se retourner, pour une fois peu stoïque : oui, là, il était furieux.

      — Ton fils ? Sérieusement ? D'où tu sors ça ? Tu n'as jamais été ma mère. Tu ne le seras jamais. Je m'occupe de toi parce que tu me fais pitié, humainement. Pas par sentiment. Et parce que ce serait trop chiant de me retrouver dans un orphelinat à la con. Et puis, laisse-moi rire ! Tu tiens à moi ? Ah oui ? Moi, le fils à qui tu as un jour crié quelque chose comme, « je ne t'ai jamais voulu, je te déteste, tu es le fruit de ce que je déteste le plus, le fruit d'un viol et je ne t'aimerais jamais comme j'aurais pu aimer un vrai fils » ? Te fous pas de moi. Laisse-moi rater ma vie comme je veux, d'accord ?
      — …


    Et finalement, le garçon avait laissé le plat comme tel, avant de monter et s'enfermer dans sa chambre. Il pensait, il pensait au futur, au présent, au passé. La pensée pour Lucy et, en même temps, Evan, lui provoqua un pincement au cœur qui l'obligea à y porter sa main dans un réflexe ; et puis, la pensée pour sa mère qui n'en était pas une ne faisait qu'alimenter un peu plus la haine qui le constituait. Il aurait voulu partir, loin, et tout oublier, tout recommencer. Car Guillaume aimait la vie, et ne désirait en aucun cas mourir. Néanmoins, il considérait que la situation dans laquelle il était né ne valait pas la peine d'être vécue. Ou plutôt, vivre dans ces conditions, ne valait pas la peine.


    Chapitre 8 ▬ Impassible.

      — Et vous êtes ?
      — Mademoiselle Stephenson, assistante sociale. Alors, votre mère est-elle là, oui ou non ? On nous a rapporté que vous ne veniez plus à l'école et que votre mère était injoignable.
      — Oui, elle est là.
      — Bien, et maintenant, pourrais-je la voir ?
      — Pour quoi faire ?
      — Monsieur Valauney je vous prierais de ne pas montrer d'opposition, auquel cas je devrais appeler les services de police.
      — Tch.



    Alors il faisait volte-face, sans s'inquiéter de la porte toujours ouverte, levant haut les genoux au-dessus des déchets et autres objets qui encombraient le couloir et la maison entière de façon générale, avançant vers les escaliers pour atteindre rapidement le premier étage. L'assistante sociale elle marchait lentement, évitant avec un regard de dégoût les objets éparpillés qui empêchaient l'accès facile aux différentes pièces, peu satisfaite évidemment. Son bilan n'allait pas être des plus joyeux. Elle n'était pas ici pour rien. Néanmoins, dans cinquante-cinq pour cent des cas elle n'enlevait pas l'enfant aux parents. Que dans cinquante-cinq …

      — Elle est là, lança-t-il en la montrant du menton, appuyé sur l'encadrement de la porte.


    La femme était en effet allongée sur son lit, de façon tout à fait désordonnée, les draps tombant un peu sur la moquette, sa tête au bord du matelas. Elle ne semblait pas tout à fait endormie ; à la voix de Guillaume, elle avait un peu cligné des yeux, semblant épuisée. Elle l'était, encore une fois ; mais était surtout dans un état assez différent à cause des médicaments qu'elle prenait.
    Et la jeune femme se met à accourir vers elle, venant un peu la secouer.

      — Madame ? Madame !
      — Elle a encore une fois prit trop de médicaments.


    Elle se tourne vers le garçon, la mine un peu choquée et paniquée à la fois. Puis, après un instant de blanc, elle sort son portable, compose un numéro et l'apporte à son oreille.

      — Guillaume, j'appelle les pompiers. Quand à toi, je t'emmène.
      — Où ça ?
      — A un orphelinat.
      — …


    Evidemment, vu que son père était inconnu. Il ne dit rien, la regardant appeler des services. Regardant un peu sa mère, aussi. Celle qui lui faisait un peu pitié sur les bords. Celle qui allait finir là où elle n'avait jamais voulu finir ; en hôpital, et sûrement plus tard, en hôpital psychiatrique. Celle qui allait perdre la garde de son fils, ce qu'elle n'avait jamais voulu, mais ce pour quoi elle ne faisait rien pour que ça n'arrive pas. Et puis, il pensait à lui. Un orphelinat, avec tout un tas de gosses de son âge. Ça risquait d'être un peu chiant, en fait. Mais ce serait sûrement mieux que d'être dans cette maison pourrissante et sans vie. Sans parent.

    Chapitre 9 ▬ Indifférent.


    Et il avait bel et bien finit dans cet orphelinat. Malgré lui. Il restait à l'écart, silencieux, écrivant ou lisant plutôt que de parler aux autres. Même si on venait vers lui. Il resta exactement six jours dans ce bâtiment triste et glauque à son goût, avant qu'on ne le convoque une énième fois. A croire que cette fois-ci fût la bonne. Mais peut-être pas dans le sens où il le voulait.

      — Comme tu l'as demandé Guillaume, tu ne resteras pas ici. Nous t'avons trouvé une famille d'accueil.
      — Une famille d'accueil … répéta-t-il, nullement convaincu par cette proposition.
      — Nous avons prit le soin de la sélectionner ; tu t'y sentiras très bien là-bas. Ils ont une fille aînée de ton âge et un petit garçon de sept ans. J'espère que ça te convient. Concernant ta mère … Des analyses ont été menées et, tu l'auras compris, la garde lui a été définitivement retirée. Elle gagnera un hôpital psychiatrique dans les prochains jours.
      — Quand est-ce que je pars ?
      — Pardon ?
      — De l'orphelinat.
      — Ah, euh, oui, eh bien, demain.
      — D'accord. C'est tout ce que je voulais savoir.


    Bien-sûr, le directeur semblait un peu surpris de la façon dont il passait les choses importantes – l'annonce du futur de sa mère, dans ce cas-là. Mais depuis quelques jours où il était là, il avait réussit à cerner un minimum cette personnalité et n'était, d'un côté, pas très étonné. Il semblait avoir vécu beaucoup plus de choses qu'il n'y paraissait ; mais le simple fait d'être né d'un viol et d'une mère droguée qui ne vous aimait pas, ne vous donnait pas d'affection et avait un peu perdu la tête en même temps … L'homme estimait néanmoins Guillaume chanceux de ne pas avoir mal tourné. Bien-sur, ça ne tenait qu'à lui. Mais dans la plupart des cas, les enfants ne tournaient pas bien, ou pas aussi bien que lui. Il devait énormément intérioriser ; c'est ce qu'il se disait. De toute façon, cela se voyait dans ses manières crues, directes, et cet air détaché qu'il avait des gens. Il était très fort, mais le jour où il ouvrirait vraiment son cœur et qu'on le blesserait – si ce n'était pas déjà arrivé – , ce serait un carnage. C'est ce que pensait ce directeur, qui en avait vu passer pourtant, des enfants au destin tragique.

    Chapitre 10 ▬ Prudence.


    [Conversation téléphonique entre le Directeur et le père de la famille d'accueil]

      — Bien-sûr, aucun problème, nous aurons de quoi prendre trois quatre bagages, je pense que c'est suffisant.
      — Oui, c'est parfait, il n'a qu'une valise. Il n'avait pas beaucoup d'affaires, vous savez. Surtout beaucoup de feuilles et d'écrits. C'est un grand littéraire j'ai l'impression.
      — Oh ! Ce n'est pas comme si ça allait nous gêner. Notre fille suit une voie littéraire, aussi. Nous avons, on va dire, l'habitude. [rires]
      — Ah, ça tombe bien alors. Ca l'aidera peut-être à s'ouvrir un peu … C'est quelqu'un de très fermé j'ai l'impression.
      — Vraiment ? A ce point-là ?
      — Vous savez bien, c'est le genre d'enfant qui s'est renfermé afin de ne rien ressentir et de ne pas être blessé. Il peut paraître un peu cru voire choquant des fois, mais ne lui en voulez pas ; expliquez-lui calmement que certaines choses ne se disent pas ainsi. Il est compréhensif lorsqu'il veut, j'ai l'impression.
      — Je vois …
      — J'espère que tout se passera bien. Une fois par mois durant six mois, une de nos assistantes viendra vérifier si c'est le cas. Ce n'est en rien mauvais ou quoi que ce soit de ce genre, ne vous inquiétez pas. Juste pour vérifier si l'enfant s'intègre bien, etc.
      — Oui bien-sûr, je comprends. Ça ne devrait pas poser de problème ; il s'ouvrira peut-être mieux à nous comme vous le dites par le biais de notre fille. Ce n'est pas la plus calme des adolescentes, mais bon, vous savez comment c'est à cet âge-là ! …
      — Haaa oui, c'est sûr. J'espère vraiment que malgré ça, ça se passera bien, et que vous vous entendrez tous très bien.
      — Mais oui, Monsieur, il ne devrait y avoir aucun problème.
      — Très bien, dans ce cas, à demain alors !
      — Bonne soirée Monsieur.


    Chapitre 11 ▬ Cliché.


    Ils étaient là. Une petite famille clichée sans doute. Le plus petit, le garçon brun de sept ans, tenait la main de son père. Un poil timide, on aurait dit. Et puis la mère, très souriante et chaleureuse. Et le père, souriant aussi, gentil sûrement ; on sentait néanmoins cette autorité qui pouvait s'élever lorsqu'il le fallait. Sûrement à cause de son costard qui donnait cet air un peu strict. Et puis l'adolescente, une mine de je-m'en-foutiste sur le visage, un poil rebelle par ses cheveux ébouriffés et sa tenue provocante sans être vulgaire. Oui, c'était, pour Guillaume, un parfait cliché. Rien de bien excitant donc. Tout de même, docilement, il les suivit, mimant un léger sourire lorsqu'il leur disait bonjour, entrant dans la voiture en silence. Quelques questions sur lui, comment ça s'était passé cette semaine à l'orphelinat, etc, etc. Il priait en fait pour que ça se passe le plus vite possible, tout simplement parce que c'était d'un ennui terrible.

    Chapitre 12 ▬ Ennuyé.


    Le bruit des couverts qui se cognent contre les assiettes. Les mastications. Le silence.

      — Jane, la salade, s'il-te-plaît, demanda Rose, la mère, le bras tendu.


    L'adolescente, après avoir prit le temps de finir sa bouchée, attrapa le plat demandé et lui tendit, indifférente à comment celui-ci allait arriver ; pour peu, elle le laisserait presque tomber.
    Celle-ci était située en face du garçon qui, de manière blasée, mangeait comme il le pouvait son vulgaire poulet. Il ne mangeait que par rares et petites bouchées, n'ayant que très peu faim, comme d'habitude. Il trouvait déjà tout cela ennuyant. Certes, une nouvelle famille, une nouvelle maison. Et alors ? Qu'importe ; il avait déjà apprit à vivre sans. Il avait déjà été vidé du peu d'émotions qu'il avait eu ; du moins, c'est comme ça qu'il le voyait. Il en avait un peu extériorisé, et on lui avait violemment renvoyé à la figure avec un amour différent. Il était tombé amoureux d'une fille, qui, en fait, s'avérait être un homme. Ce n'était pas le fait d'avoir indirectement aimé un homme qui l'avait, d'une certaine façon, blessé, mais plutôt qu'on le trompe ainsi sur ses sentiments. Quelque chose qu'il gardait bien au chaud et dont il ne se servait pas. Et voilà que la seule fois où il s'en était servit, il avait été blessé. Intérieurement, il se promit de ne plus jamais faire la même erreur.

      — Alors, Guillaume ? Ca te plaît par ici ? interrogea le père.
      — C'est toujours mieux qu'avant.


    Blanc. Ils fixent tous un peu le garçon, puis se regardent entre eux, gênés, visiblement. Raclement de gorge de la part de la mère, qui affiche soudainement un sourire se voulant apaisant.

      — Nous avons sûrement meilleure ambiance aussi ! lance-t-elle dans un doux rire.
      — Pas vraiment non. C'est assez ennuyeux, en fait.


    Deuxième blanc. Pourtant, Guillaume continue de manger sans aucune gêne. Là, par contre, personne n'essaye de sauver la mise, ou l'ambiance retombée par un adopté effronté et blasé. Le repas continue, dans le silence complet cette fois. Cette fois, Guillaume ne se sent pas à l'aise. En fait … Il aurait préféré finir à la rue qu'ici.

    Chapitre 13 ▬ Attiré.


    Qu''était-ce ? Le manque d'inspiration ? Le manque d'envie ? La passion pour l'écriture perdue ? Etait-ce parce que, pour la première fois, les autres l'influençaient à un point qu'il n'avait plus envie de rien ? … Non. C'était quelque chose comme …

      Le vide.


    Ses mains étaient ouvertes devant lui, et il fixait ses doigts comme si c'était la chose la plus stupéfiante du monde. Ils tremblaient légèrement, sans raison particulière, simplement la tension. Il les bougeait un peu, glissant dans l'air et dans le vide, comme il l'avait si bien murmuré. Il n'était pas malheureux. Il n'était pas désemparé. Non, c'était simplement la situation. Car, comme Alfred Musset a dit, « Il est doux de se croire malheureux, quand on n'est que vide et ennuyé. ». Ce qui résumait fort bien la situation, maintenant. Et que la nuit paraissait si belle et inspirante lorsqu'il était chez lui. Lorsqu'il pouvait s'évader un peu plus loin que tout ça. Lorsqu'il avait encore une distance avec le monde et lui. Mais maintenant c'était fini. Maintenant il n'y avait plus de distance. On l'avait, de force, fait entrer dans le monde réel. Et que l'envolée vers l'imaginaire était douce, auparavant. Improbable, semblant irréalisable. Pourtant, elle l'était. Et maintenant, il avait l'impression de ne plus pouvoir y avoir accès. Il était réduit à cette ennuyeuse et fastidieuse réalité, comme le reste des personnes peuplant cette planète. Dure réalité. Froide et sans pitié, disait-on. La vie, qu'on l'appelait. Et Guillaume n'appelait pas ça la vie. Il l'appelait leur vie.

      — T'as pas des occupations très … divertissantes.


    La demoiselle du nom de Jane s'était appuyée dans l'encadrement de la porte, les bras croisés, l'air un peu blasé tout comme lui l'avait. Il avait un instant posé les yeux sur elle puis, désintéressé, les avaient reposé sur le papier ainsi que sur ses mains. Cependant, sorti un instant de sa vision des choses, il n'arrivait plus à voir ces simples mains aussi profondément qu'à l'instant. Quelque chose de plutôt frustrant en somme. Bien, qu'il en soit ainsi. Il arrêterait l'écriture et ne se consacrerait qu'aux livres, alors.
    Et avant qu'il ne puisse faire un seul mouvement, un coup de vent se fit sentir et un poids de plus fit un creux dans le matelas de sa chambre. Relevant la tête, il détailla la brune sauvage aux yeux bleus de loup, quelque chose d'un peu inhabituel – même s'il n'avait pas vraiment l'habitude de la voir – sur le visage. Un petit sourire. Petit, léger, malicieux. Enfantin, peut-être. Mignon. Doux.

      — Ton prénom, il est français ? C'est pas très beau.
      — Je ne l'ai pas choisi.
      — Je sais.


    Il la détaille encore un peu. Pas mince, pas ronde, de taille moyenne, plus petite que lui évidemment, puisque Guillaume est assez grand à la base. Elle a ce qu'il faut où il faut, comme on dit. Elle est jolie. C'est une louve.

      — T'es pas trop chiant comme demi-frère, tu parles pas beaucoup, soupire-t-elle d'un air distrait en venant fouiller la trousse où une dizaine de stylos différents dépassent. C'est déjà ça.


    Puis ses yeux d'animal sauvage se relèvent encore. Ovales, perçants. Le sourire vient les plisser un peu.

      — Je suis juste venue te dire que ma chambre est à côté, à gauche. A droite, c'est les parents. Fais pas trop de bruit, ils sont chiants. Surtout pour ce qui est de te coucher tard. Mais je suppose qu'ils seront gentils avec toi vu que c'est la première …


    Pause. Elle se lève.

      — Bon, ben. Bonne nuit, alors.


    Elle a vite atteint la porte, et ne lance pas un regard avant de quitter la pièce. Ce fût un coup de vent riche en odeurs sucrées et féminines. Douces épices qu'il dirait de carmines et embrasées par un feu qu'il ne reconnaissait pas. Cela faisait beaucoup, beaucoup de temps qu'il n'avait pas senti ces choses-là. Il n'avait pas approché de fille depuis un bon bout de temps, à vrai dire. Leur présence lui était devenue inconnue. Trop longtemps, en effet.

    Chapitre 14 ▬ Blasé.


    La nuit n'avait pas été dure. Il n'avait pas été angoissé, du tout. Il avait simplement beaucoup réfléchi. Trop, même. Alors il avait peu dormi. Mais de toute façon, cela n'influençait pas son comportement habituel. A table, au petit-déjeuner, il avalait ses céréales en silence, sans vraiment parler. Il était muet, pour tout dire. Il ne jetait même pas un seul regard aux autres membres de la famille, trop concentré à non pas manger – même si c'était, en surface, le cas – mais plutôt à se réveiller, intérieurement et mentalement. Et puis, une fois qu'il eût fini, sans demander l'avis de qui que ce soit, il se leva, laissant tout ce qu'il avait utilisé au même endroit, s'extirpant de la maison pour aller se loger sur la terrasse, au bon soleil matinal. En fait, la mère, au prénom des plus clichés qui soient, voulu l'arrêter en lui faisant remarquer son impolitesse. Mais le père, lui, avait déjà posé sa main sur son bras en signe d'apaisement dans un « ne soyons pas trop durs, c'est son premier jour ».

    Et l'orphelin, si on pouvait l'appeler ainsi, ou l'adopté, s'était mollement laissé tomber sur la balancelle, avant d'extirper une cigarette de son paquet, suivit d'un briquet qu'il utilisa pour l'allumer. La première bouffée fût un soulagement total, comme une seconde respiration. Et quel plaisir immense que d'extirper cette fumée hors de son corps pour en reprendre de nouveau après. Comme si ses nerfs se détendaient un peu sous l'intoxication.

    — Tu vas te faire tuer. Sérieusement.

    Jane avait dit ça d'un air plutôt sérieux. Peut-être un peu effrayant tant il était sérieux. Et elle avait, au dernier moment, esquissé un petit sourire avant de s'approcher et de lui retirer la cigarette des mains. Guillaume n'avait pas bronché, la laissant tirer dessus sans un mot, avant de la reprendre aussitôt puisqu'elle lui tendait. Sa moue malicieuse avait quelque chose de terriblement merveilleux. Mignon, doux, charmant.

    — Jane ? Guillaume ? Qu'est-ce qu- … Oh. Ah non. Non, non. Guillaume, vraiment, je … Je comprends que tu aies eu des problèmes, qui t'ont sûrement poussé à te rebeller et … Défier la loi et autres choses du genre mais il est hors de question que tu consommes du tabac maintenant que tu es ici. Tu comprends ? S'il-te-plaît, écrase-la et jette la.

    … Etait-elle clichée des pieds à la tête, cette femme ? Même dans ses idées et ses paroles ? C'en était réellement frustrant. Quoi qu'il en soit, il n'avait pas envie de créer des problèmes dès le premier jour ; alors, nonchalant, il se leva et s'exécuta. Bien-sûr, il recommencerait. Encore, et encore. Jusqu'à ce qu'il puisse réellement vivre. Vivre.

    Chapitre 15 ▬ Passionné.


    Quelques semaines plus tard.

    L'Ennui. Tout était droit, avec des limites, réglé, contrôlé, classique, sans qu'on ne puisse changer quelque chose. Pas d'erreurs, de faux pas, de « mauvaise éducation ». Qu'avait-elle d'autre à la bouche que « je ne voudrais pas qu'on dise qu'on vous éduque mal mes chéris enfin » la daronne ? Rien, visiblement. Alors c'était le néant, c'était l'ennui, c'était le vide. C'était tout simplement horrible. Cependant. Une petite étincelle, quelque chose, qui égayait un peu sa vie. Peut-être Jane. La louve qui lui faisait voir du pays, qui l'emmenait plus loin, au-delà des limites que leurs parents pouvaient leur imposer. Les virées nocturnes ou les escapades dans les champs dorés d'été avec elle le faisait respirer, souffler, un peu. S'évader. Car sinon, il n'aurait même pas tenu une seule semaine, à vrai dire.

    Et quelle idée de les mettre en face à table. A ce petit-déjeuner, où ils ne faisaient que pouffer de façon peu discrète, enfants qu'ils devenaient lorsqu'ils étaient ensemble, faisant rager une mère incapable de comprendre cette complicité qui s'était installée. Une mère un peu jalouse, peut-être. Parce que ce fils adopté ne leur avait jamais rien rendu. Ni par amour, ni par remerciement. Une mère haineuse et jalouse de sa propre fille. Mais ce n'était pas la première fois. Ça ne faisait qu'empirer la chose.
    Alors la dame regardait avec animosité l'échange de petits regards de ses deux « enfants », ainsi que leurs fou-rires incompréhensifs. Elle se sentait exclue, rejetée, peut-être non aimée. Elle s'acharnait par le biais de ses dents sur la brioche qu'elle mangeait, fuyant leur vue, trop irritée par celle-ci.

      — Les enfants ? On va faire les courses. Si dans une heure votre petit frère n'est pas réveillé, réveillez-le, d'accord ?


    Aucune réponse. Mais les parents, habitués, finirent par attraper leur manteaux et refermer la porte derrière eux sans aucune autre attente de la part des adolescents encore assis à table, accompagnés par le son de la télévision.

      — Avaler une tartine de confiture à la fraise, au beurre, au sucre et au caramel. Cap ? lança Jane, cette étincelle de malice toujours dans les yeux.


    Sourire. Le garçon, sans hésitation, attrape immédiatement une confiture, la remplissant de confiture, de beurre puis de caramel, avant de la saupoudrer de sucre et de croquer dedans. La jeune fille aux cheveux ondulés et ébouriffés affiche un visage dégoûté et amusé à la fois, lâchant un « ewww » en se reculant un peu.

      — Pomme à la moutarde trempée dans le café, lança Guillaume.
      — T'es MALADE, jamais ! s'horrifia l'intéressée.
      — Vraiment ?


    Une cuillère de confiture part, s'écrasant sur la joue de la jeune fille qui se contracte sur elle-même un peu trop tard. Dans un réflexe immédiat, elle se lève après avoir attrapé la pâte à tartiner au chocolat, plongeant sans regret la main dedans et venant se pencher pour lui en étaler sur la figure. Il a beau se secouer pour éviter qu'il la touche, il finit par en avoir un peu partout, dans les cheveux et sur son torse découvert. Dans l'action, il attrape la confiture et se lève sur la table, redescendant de l'autre côté lorsque la jeune fille se met à fuir en explosant de rire. S'en suit un jeu du chat et de la souris, les deux adolescents positionnés aux extrémités de la table, l'un armé, l'autre non. Au bout de plusieurs tentatives, la brune s'élance dans un rire d'un côté, suivie du garçon qui la rattrape aussi vite, venant entourer sa taille de ses bras pour l'emprisonner et ainsi tartiner son visage de confiture sans regret. Vaincue, elle se laisse à moitié faire, venant finalement se retourner et s'appuyer contre le mur, essoufflée. Lui, il a laissé tomber le pot qui, avec une chance énorme, ne s'est pas brisé, puis a appuyé ses mains contre le mur blanc bientôt tâché de confiture à la fraise. Et ils rient, tentant de reprendre peu à peu leur respiration comme ils peuvent, jusqu'à ce que Jane brise les derniers centimètres qui les séparent, venant déposer ses lèvres au goût cacao sur les siennes, l'embrassant doucement et avec amusement, une touche sauvage en plus lorsqu'elle lui mordille la lèvre inférieure avant de le relâcher. Ils rient encore une fois, et le jeune homme vient saisir son visage pour l'embrasser une nouvelle fois, de façon plus passionnée, jusqu'à ce qu'il en arrive à changer de position tout naturellement, se retrouvant là où elle était. Tout d'un coup un peu nerveux, ils se sentent rencontrer la table, et, de plusieurs revers de la main, ils se débarrassent de toute nourriture, tout bol et tout verre, leur baiser rythmé par le bruit incessant et brutal de la rencontre des récipients en verre et du sol. Ses mains, dans des mouvements doux mais pressés, passaient sous les tissus de la jeune fille avec aisance, tandis qu'elle s'accrochait sans trop tirer à ses cheveux rebiqués par endroits afin de prolonger leur baiser désireux de l'un et de l'autre. Pour la première fois, Guillaume connût le feu. La passion.

    Chapitre 16 ▬ Aimé.


    Sa main glissait sur sa joue, attrapant ses mèches brunes, les entortillant autour de son doigt, alors que ses yeux ne la quittait pas. Elle semblait un peu heureuse, peut-être. Quelque chose, comme un doute, passa néanmoins sur son visage. Et, franche comme elle était, elle lui en fit part, évidemment, ne retirant pas sa main de sa joue.

      — Guillaume ? Tu m'aimes ?
      — Si je t'aime ? Oui.
      — Comment ?
      — Franchement ?
      — Franchement.
      — J'aime ton corps. Donc, indirectement, je t'aime toi. Je t'aime énormément.
      — Que mon corps ? s'étonna-t-elle sans vraiment l'être.
      — Bien-sûr, j'aime ta façon d'être, ta personnalité. Mais ce que j'aime le plus chez toi, c'est ton corps.
      — Et pourquoi tu le préfères à ce que je suis ?
      — Ton corps. Je n'ai que quelques années pour l'apprécier. Toi, j'ai l'éternité pour t'aimer.


    Et ça lui convenait. Ca lui décrochait même un sourire. Peu de femmes auraient supporté ça, en fait. Mais non. Elle avait la même vision des choses que lui, et comprenait. Et elle souriait. Elle l'aimait, aussi.

    Chapitre 17 ▬ Le renouveau de la fin.


    Et leur idylle se prolongea durant presque deux mois. Bien-sûr, ils restaient un minimum discrets ; bien qu'ils ne cachaient pas leur complicité exagérée. Jusqu'à ce que ce soit trop évident aux yeux des deux parents ; dès lors, des disputes éclatèrent, jusqu'à ce que le couple décide de se séparer complètement de Guillaume. Dès lors, la police entama une procédure afin de mener une enquête ; rien ne concret n'en résulta, si ce n'est les faits sur un dossier. Retour à la case départ, à l'orphelinat. C'est là qu'on remarqua le QI un peu plus élevé que la moyenne qu'était celui du garçon. Néanmoins il n'en fit rien, continuant de simples études soigneusement suivies, entamant une voie littéraire. A 21 ans, il finit ses études et est engagé avec soin pour son tout premier boulot : assistant bibliothécaire à l'orphelinat de la Wammy's House.


    « Tout enfant, j'ai senti dans mon cœur deux sentiments contradictoires : l'horreur de la vie et l'extase de la vie. » Charles Baudelaire.
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GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) 384660Alter2

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Sujet: Re: GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) EmptyMar 1 Nov - 23:19

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Sujet: Re: GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset) Empty

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GABRIEL ▬ qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse ? (Albert de Musset)

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