Sujet: Le petit bonhomme en mousse } Slave. Lun 31 Oct - 0:49
Le rose. Non, le bleu. Il est bien le bleu, il a un joli collier rouge. Mais le vert est plus grand, et plus mignon, surtout. Il semble dire « prends-moi avec toi », avec ses deux billes noires à la place des yeux. Il ne fait pas négliger le violet, mais il a un trou sur le crâne, tout comme le blanc, c’est embêtant. Le noir a un petit air triste, c’est pourquoi il est toujours pris. Il faut le rendre heureux. Mais en y repensant bien, le rose est le plus cool de tous. Il est, certes, assez petit, mais sa couleur pétante est adorable. C’est décidé, Straw prendra son canard en plastique rose pour le bain. L’enfant s’empare de son sac à dos Pokémon et enfonce le jouet dedans. Son regard d’émeraude balaye la pièce. Que pourrait-elle prendre d’autre ? Sa chambre est une montagne de peluches, un empilement de choses inutiles pour d’autres, mais qui ont une valeur hors du commun pour elle. Il est vrai qu’elle prendrait bien quelques cailloux de sa collection, mais elle n’est pas certaines qu’ils aiment l’eau, et elle a bien trop peur de les abîmer. Elle mord sa lèvre inférieure, plus concentrée que jamais. Le bain, c’est important. Il faut qu’il soit parfait, un petit oubli de rien du tout pourrait bien nuire à sa perfection. Un sourire nait sur ses lèvres roses. Straw se lève et ouvre son coffre à jouets, puis en sort deux petits bateaux qu’elle regarde affectueusement. Sur chacun d’entre eux est gravé barbarement un S. Un petit sur le jaune et un grand sur le bleu. L’enfant met tout ceci dans son sac à dos Pokémon. Satisfaite, elle ajoute juste une peluche zèbre, grenouille et lion, car elles ont bien besoin d’être lavées. Elle claque la porte, son chapeau de pailles sur la tête. En route.
A cette heure-ci, la plupart des orphelins sont dans leur chambre, le couvre-feu est proche. Il y a ici et là des élèves qui chahutent dans les couloirs, le plus grand nombre d’entre eux souriant à Straw, si fière avec son petit sac. Elle croise une grande brune portée par un jeune homme blond. Ils s’embrassent avec excitation et se précipite vers une chambre. La petite fille les regarde, troublée. Toutes ces manifestations de désirs, ces émanations de sexe, lui font peur. Elle s’en va rapidement, priant pour ne pas croiser d’autres couples. Oui, Straw ne supporte pas tout ce qui se rapporte à l’âge adulte, mais ce n’est pas un secret. Grandir, rien ne la terrifie plus. Mais elle ne voit pas pourquoi elle s’inquièterait de cela, elle a des siècles devant elle. Chut, ne lui dîtes pas que dans quelques années elle est dans l’adolescence, elle ne le sait pas et ne veut pas le savoir. Finalement, son pseudonyme aurait dû être Pan, pour le syndrome dont elle souffre. Enfin, tout cela ne la préoccupe pas, elle vit dans son merveilleux petit monde. Monde dans lequel elle va prendre un bain, moment essentiel de la semaine. La particularité de cet instant n’est pas le fait qu’elle va se tremper dans l’eau pendant une heure, s’amuser avec son canard en plastique, se laver et se coucher. Non, elle est toute autre. Si pour elle, ce bain est magique, c’est parce qu’elle va le partager avec Woo, plus connu sous le pseudonyme de Slave depuis son entrée à la Wammy’s House. Il fut en temps où Sasha et Woo prenaient des bains ensemble tous les jours, comme un frère avec sa petite sœur, comme un père avec sa fille. Ils n’avaient pas à se soucier de quelque problème, ils étaient juste dans un appartement londonien, heureux de s’être trouvés, profitant pendant de longues heures de l’eau chaude. La vie fait parfois en sorte que tout change du jour au lendemain. Envoyée à la Wammy’s House suite à la mort de ses parents, l’enfant a été privée de Woo pendant deux trop longues années. Aujourd’hui, réunis, la vie n’est pas aussi simple qu’avant, envers et contre les espérances de l’enfant. Elle ne comprend pas pourquoi il est si compliqué pour elle de prendre un bain avec Slave. Bien sûr, elle ne se rend pas compte qu’elle est élève, et qu’il est surveillant, et que ça serait mal vu.
Straw se dirige donc vers les douches, chantonnant tranquillement. Slave n’est pas encore arrivé, alors elle se laisse glisser doucement le long du mur, et une fois au sol, elle sort de son sac sa peluche grenouille. Elle la regarde fixement, avec un petit sourire. Puis, elle commence à jouer avec, lui faisant faire des bonds gigantesques accompagnés de bruitages incroyablement réalistes, vous n’en doutez pas. Soudain, l’enfant s’arrête. Un bruit ? Non. Ce n’est pas ça qui l’a arrêté dans son jeu. Straw regarde à droite et à gauche, s’assurant qu’elle n’est écoutée de personne. Elle se penche vers la peluche, comme pour être plus intime. Sur un ton confident et gêné, la voix fluette de la petite fille s’élève dans le couloir vide.
▬ Tu sais, si tu es vivante, tu peux me le dire. Je ne le dirai à personne, promis juré craché.
Straw attend. Elle reste bien une minute à fixer la peluche, attendant un signe prouvant qu’elle est belle et bien vivante, cette grenouille. Mais, encore une fois, la peluche ne bouge pas et l’enfant soupire bruyamment. Elle n’a pas besoin qu’on lui dise que ses jouets sont vivants pour le savoir, elle a parfaitement conscience qu’ils sont pourvus d’une âme, d’une pensée. Voyons, ils sont ses amis. Vous pensez vraiment que Straw serait du genre à être amie avec des objets inanimés ? Cependant, elle aimerait bien, qu’un jour, un de ses joujous lui parle, ou se mette tout simplement à marcher. Ce jour viendra, elle le sait de toute manière. Sasha pose sa grenouille par terre et commence à jouer avec ses mains tranquillement. Cette fois, un bruit. Elle vérifie que cela ne vienne pas de sa peluche. Non, elle fait toujours semblant d’être inanimée.
▬ Woo, c’est toi ?
Dernière édition par Straw le Mar 1 Nov - 15:38, édité 1 fois
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Sujet: Re: Le petit bonhomme en mousse } Slave. Lun 31 Oct - 13:28
Il y avait des jours, comme ça, où Slave se sentait vieux. Du haut de ses vingt ans il avait l'impression d'avoir le double, voire le triple. D'être de ses petits vieillards assis sur leurs bancs à voir passer les enfants chahuteurs avec un éternel « De mon temps ! ». A regretter et ressasser les jours passés, et à être toujours, chaque jour, chaque soir, de plus en plus fatigué. Oui, du haut de sa montagne de muscle, Slave était fatigué, épuisé, lessivé. Par physiquement, non non, le jeune homme respectait soigneusement ses huit heures de sommeil par nuit (sauf quand il était de garde, ce qui le mettait toujours d'une humeur de chien). C'était la vie, qui était épuisante. Qui bougeait trop. C'était épuisant. Car derrière ses allures d'ours mal léché et de loup enragé, Slave était un être fondamentalement calme (mais pas doux, ne rêvez pas), et qui, surtout, détestait le changement. Il aimait que tout soit à sa place, en toute logique, sans qu'il ait à faire des pieds et des mains mentaux pour savoir quoi faire. Même s'il utilisait très peu de montre ou de calendrier, son quotidien était réglé avec soin du lever au coucher, du lundi au dimanche et du début à la fin de mois. Il aimait les petits plaisirs quotidiens de la vie, profiter simplement du temps qui passe, et ces derniers mois en avaient été presque totalement dépourvu. Jusqu'à présent, Slave n'avait jamais quitté Londres. Il avait toujours eu ses parents non loin. Avait toujours eu un appartement. Avait toujours détesté l'école. N'avait jamais travaillé comme surveillant. Avait toujours évité les postes à responsabilité. Avait toujours évité de dormir sur son lieu de travail. Avait toujours eu l'habitude de vagabonder sans but dans la capitale. Avait rarement croisé autant de gens en si peu de temps, depuis le collège en vérité, il y a quatre ans. Bref, son arrivée à la Wammy's House était loin d'être un changement progressif, lent, adapté à son caractère qui se sentait gêné de voir un fruit en entrée ou de prendre sa pause une heure en avance. Depuis quelques mois, il cherchait donc désespérément un équilibre dans un lieu qui en manquait totalement. Il se retrouvait en position d'autorité face à ces orphelins turbulents et irrespectueux, lui qui s'était toujours contenté d'obéir à son supérieur, devait même prendre des décisions et surtout, surtout, il devait s'empêcher de les frapper. De les étaler sur le sol. De les mordre. De leur faire cracher des excuses à coup de poing quand ils ne le respectaient pas. Parce que bon, le directeur risquait de ne pas apprécier.
Il y avait des jours, comme ça, où Slave ne se sentait pas à sa place. Où il n'en pouvait plus de vouloir s'adapter, de chercher un ordre et une justice dans ce capharnaüm de débauche et de cri. De bruit continuel. Il y avait des jours où il se demandait sérieusement ce qu'il faisait là. Il n'était pas où il devait être. Ce n'était pas ici le foyer qu'il avait toujours cherché à construire, le foyer qu'il avait réussi à bricoler il n'y avait pas si longtemps. A Londres, dans cet appartement au loyer bien trop cher pour lui, entre les petits boulots à la pelle, entre son lieu de travail et l'école primaire de sa petite sœur, dans leur canapé avec une pizza, dans leur bain gigantesque, dans leur lit de princesse, dans leurs balades nocturnes, à travers ses renvois consécutifs à cause de bagarres. Sasha et Woo, l'enfant et la brute, deux êtres que rien ne semblait relier à part quelques coïncidences et le mariage d'un frère et d'une demie-sœur, avaient jusque là trouvé un équilibre. Mais aujourd'hui, tout devenait compliqué. Et c'était pour cela que Slave se sentait vieux et ne se sentait pas à sa place. Chaque jour, il se retrouvait à réfléchir à des questions bien trop compliquées pour lui, qu'il abandonnait après quelques minutes de torture mentale pour le laisser avec une boule d'incompréhension et de malaise au creux du ventre. Il avait tout quitté pour Sasha, lorsqu'elle s'était retrouvée orpheline et amenée ici il y a deux ans, il avait même passé le bac pour la retrouver. Mais aujourd'hui, ils n'étaient plus frère et sœur, ils étaient surveillant et élève, et tout devenait compliqué.
Dans ces jours-là, où Slave se sentait tellement vieux et fatigué de réfléchir à ces questions trop hautes pour lui de foyer, de place et d'ordre, il se déconnectait souvent. Il passait ainsi des heures à la fenêtre, immobile, à regarder dehors, pensif. Enfin, les passants pensaient qu'il était pensif, alors que justement il ne pensait à rien. Dans ces jours-là, aussi, il laissait passer des choses qu'il n'aurait jamais laissé passer en temps normal : un élève avec une légère odeur de shit dans les cheveux, un couple un peu trop... affectueux dans un lieu public ou une dispute à mains nues entre deux orphelins. Le chien de garde calmait son despotisme habituel. Au moment du repas, il ne prêtait pas attention aux combats de nourriture et ne répondait qu'en mono-syllabe à Greed, qui commençait à en avoir l'habitude. Mais paradoxalement, dans ces jours-là, il était encore plus susceptible. Rien qu'aujourd'hui, le pauvre Panzer avait failli perdre son bras. Quelle idée de 1°) Crier son nom à travers les couloirs, 2°) commencer à parler à toute vitesse sans laisser à Slave le temps de comprendre à qui il avait affaire, 3°) le TOUCHER. Franchement. Et le suicide, il y a pensé ? Le petit garçon (tout adolescent est un petit garçon pour Slave, sauf s'il fait plus d'un mètre quatre-vingt) avait été sauvé par le passage de Take, au loin. Le surveillant se retint donc. Ce sale mioche devait crier fort.
Dans les jours comme ça, Slave retrouvait sa chambre avec un grand soulagement. Enfin il était seul, au calme, juste en tête-à-tête avec sa brosse à dents et son peignoir. Il avait besoin d'un bain. Qui le détendrait de la tête aux pieds. Le bain, c'est sacré. Et obligatoire dans ce genre de journée. Vital. Voire quotidien.
« Woo, c’est toi ? »
Sasha. C'était Sasha. A moitié sourd, il aurait encore reconnu sa voix alors qu'un train passait. Elle s'était encore introduite dans sa chambre pour prendre son bain avec elle. Habitude ancestrale du temps où ils vivaient ensemble à Londres. Il traversa sa chambre à grand pas pour faire irruption dans sa salle de bain. Bien sûr que c'était elle. Avec ses peluches, ses grands yeux verts et son sourire éclatant dès qu'elle l'aperçu.
Il aurait pu crier. Grogner qu'elle n'avait rien à faire ici, qu'elle était une élève, qu'ils ne pouvaient pas vivre comme ils l'avaient toujours vécu, qu'il risquait son poste en prenant un bain avec elle, qu'elle n'avait pas le droit d'être ici, qu'il fallait qu'elle l'arrête de l'appeler Woo, et puis que ça aurait pu être n'importe qui, elle aurait pu faire attention quand même. Si il lui avait passé les clés de sa chambre, c'était en cas d'urgence. Pas pour qu'elle puisse prendre un bain avec lui. Ou pour dormir ensemble lorsqu'elle faisait un cauchemar. Ou qu'il l'aide à faire ses devoirs (qu'il deviendrait bientôt incapable de faire, d'ailleurs). Ou encore pour qu'il joue au papa et à la maman avec elle. Sa chambre n'était pas l'appartement de Londres, ce n'était pas à lui, ou à eux. Il fallait qu'elle comprenne qu'ils devaient devenir plus autonomes, se séparer, grandir l'un comme l'autre et réaliser qu'il peut y avoir des choses plus importantes que leur complicité dans la vie. Et puis qu'un jour elle grandira, qu'elle tombera amoureuse, et que le petit ami n'appréciera pas trop que, à 15 ans, elle prenne encore son bain avec son beau-frère. Et que lui aussi, un jour, il se retrouverait quelqu'un. Oui, même s'il n'arrivait pas à s'imaginer aimer une autre femme que Santana. Oui, même s'il était coincé dans une relation charnelle avec une de ses élèves (mais ça, Sasha n'en savait rien). Bref, la petite fille n'avait rien à faire ici et devait sortir immédiatement.
Mais Slave ne cria pas. Il pensa à peine à ces phrases absurdes de grande personne. Ses yeux quittèrent toute l'agressivité qu'ils avaient accumulé durant la journée pour se teinter de tendresse. Un tout petit sourire se dessina sur ses lèvres, transformant la brute en grand frère. Sa voix rauque résonna, avec son éternel accent coréen.
« Oui. »
Et il se baissa pour accueillir la petite blonde dans ses bras. Comme un enfant qui a trouvé sa place.
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Sujet: Re: Le petit bonhomme en mousse } Slave. Mar 1 Nov - 17:11
L’enfant se blottit contre son grand-frère, serrant ses bras autour de son cou musclé. Straw a quelque part un don, avec Woo. Tout le monde, à la Wammy’s House, connait Slave, le surveillant un peu long à la détente, stricte et avant tout extrêmement sévère. Il est vrai qu’il n’hésite pas à donner de nombreuses heures de colle aux élèves pour un rien. Alors, devant lui, les orphelins évitent de s’embrasser de manière trop passionnée, de s’allumer une clope à l’intérieur, de passer avec les yeux explosés par la drogue, de courir dans les couloirs, de crier trop fort, de martyriser les autres ou carrément de se battre. Sasha et Woo ont un lien si fort que l’enfant arrive, et ce depuis toujours, à calmer la brute. Rien que lors de leur véritable premier contact, la petite, grâce à sa joie de vivre naturelle et à son envie constante de s’amuser, a réussi à lui changer les idées, le jour du mariage de son frère. Et cela a toujours fonctionné de cette manière. Straw n’aime pas la colère, la tristesse, ou tout autre sentiment ne s’approchant pas de l’amour et la joie. Elle a conscience que Slave s’énerve. Beaucoup. Voire même plus que ça – notons quand même ses efforts depuis son arrivée à l’orphelinat pour se contrôler. Mais elle a aussi conscience de l’effet apaisant qu’elle a sur la brute. Ce dont Straw ne se rend pas compte, c’est qu’en plus d’être apaisé à ses côtés, il est un tout autre homme. Elle a toujours connu ce jeune homme affectueux, doux, calme et d’une gentillesse hors du commun avec elle. L’enfant ne peut concevoir qu’il soit quelqu’un d’autre avec le reste du commun des mortels. Sasha n’a pas connu Sin. Sasha n’a pas connu Gang. Sasha connait Woo, et c’est tout.
Straw souffle pour enlever une mèche rebelle qui vient se placer juste devant ses yeux. Puis elle sourit à son grand frère, posant affectueusement son regard vers sur le sien. Slave la dépose doucement sur son lit, et s’en va faire couler l’eau du bain. Pas trop chaud pour ne pas qu’elle se brûle, pas trop froid pour ne pas qu’il râle. Un équilibre parfait et une température parfaite. La petite, excitée comme une puce, comme à son habitude, sautille sur le matelas en souriant. Elle se pose finalement sur le sol pour prendre Woo par la main. Elle lui ordonne de s’asseoir sur le lit, et ouvre son sac à dos Pokémon. Elle en sort tout d’abord son magnifique canard rose qu’elle a mis tant de temps à choisir. Elle s’explique :
▬ Tu vois, Woo, je sais que tu aimes bien le noir, parce qu’il est comme tes cheveux. Mais je me suis dit que le ros devait être triste qu’on le prenne jamais. En plus j’ai un chouchou rose, alors c’est joli. Tu n’es pas d’accord ?
L’enfant trouve que son discours à une grande logique, et admettons que c’est le cas. Elle sort ensuite les quelques peluches qu’elle a emmenées. Enfin, Straw s’empare des deux bateaux, le jaune et le bleu. En arrivant à la Wammy’s House, lorsque Sasha a débarqué pour la première fois dans l’appartement de Slave pour reprendre la cérémonie du bain, elle a pris avec elle ces deux petits jouets. En s’amusant avec, le frère et la sœur ont décidé de graver l’initial de leur pseudonyme sur chacun des bateau. Le petit jaune pour Straw. Le grand bleu pour Slave. Désormais, ils sont donc essentiels à ce cérémonial, comme un symbole du lien qu’ils entretiennent encore, malgré les complications dont Straw n’a pas conscience.
Il est l’heure de se mettre dans le bain. Straw adore se plonger dedans avec ses jouets avant qu’il ne soit rempli, afin de sentir l’eau monter petit à petit et chatouiller sa peau pâle. Elle se lève et prend tous ses compagnons de bain dans ses bras, se dirigeant vers la salle de bain. La blondinette se débarrasse d’eux en les jetant dans la baignoire à moitié pleine d’eau. Puis, elle ôte tout d’abord son chapeau de paille qu’elle pose soigneusement sur une chaise située dans un coin. Et c’est sans aucune pudeur et timidité qu’elle enlève son haut, son pantalon et sa culotte. Elle est parfaitement nue. Il n’y a jamais eu de gêne avec Woo, surtout à ce niveau-là. L’enfant est bien trop petite encore sans sa tête pour imaginer quoi que ce soit, cela serait malsain. Ils sont comme un père et sa fille, il n’y a rien de choquant à cela, selon Straw. Elle ne comprend d’ailleurs pas pourquoi Slave lui interdit d’en parler à qui que ce soit. Elle ne comprend pas que certaines personnes pourraient le considérer comme un dangereux pédophile profitant de l’innocence et de la candeur de la petite blonde. Evidemment, ce n’est pas le cas. Mais il a toujours des gens pour mal interpréter les choses, les déformer, puis dénoncer à tort sans rien saisir.
Elle se glisse dans le bain, la température étant parfaite. L’eau lui arrive en haut de son torse plat, et elle attend qu’elle monte jusqu’à son cou, et elle pourra alors se mettre sur les genoux pour jouer. En effet, Woo est au moins dix fois plus grande qu’elle, il faut qu’il soit également émergé dans le bain, sinon cette cérémonie aucun sens. Straw attend donc en souriant que l’eau monte, et surtout que le jeune homme la rejoigne pour qu’ils commencent à s’amuser. Mais avant toute chose, il faut faire mousser ce bain. Alors l’enfant s’empare de la bouteille de savon liquide, et en verse un peu à l’endroit où l’eau se déverse bruyamment. Et cela fonctionne, une tonne de mousse commence à apparaître. La petite, satisfaite, repose la bouteille et rigole doucement.
▬ Il faut laver mes peluches ! Tu as le savon pour doudou, Woo ?
Non, ils ne vont pas mettre de la lessive dans le bain. Ce que Straw nomme « le savon pour doudou » est simplement une bouteille de savon, mais entièrement rose. L’enfant raffole de la couleur et surtout de l’odeur fleurie que dégage le liquide. Elle ne s’en sert que pour nettoyer ses peluches, et exclusivement à cet usage. Pourquoi ne pas mettre simplement les doudous dans une machine à laver, comme tout le monde ? Premièrement parce que Straw est persuadée que cela leur fait atrocement mal. Ensuite parce que le mouvement circulaire du linge dans la machine lui donne le tournis. Et enfin parce que, étant plus petite, personne ne s’occupait de laver ses peluches, elle devait le faire elle-même. Trop effrayée à l’idée de blesser ses chers compagnons de tissus, elle les nettoyait alors dans son bain, munie de ses petites mains et de ce fameux savon rose. Disons donc qu’il s’agit d’une vieille habitude, perpétuée avec Slave.
Dernière édition par Straw le Dim 4 Déc - 18:22, édité 2 fois
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Sujet: Re: Le petit bonhomme en mousse } Slave. Sam 12 Nov - 11:31
Et la magie opéra de nouveau. Tout comme le jour de leur rencontre, comme le jour de leurs retrouvailles, comme chaque jour de leur vie en commun, comme à son arrivée à la Wammy's House. Au simple contact de la petite fille, tous ses muscles se détendirent. Il ferma les yeux, un instant, tellement apaisé de sentir ce petit corps fragile entre ses bras. Il aurait pu la briser à n'importe quel moment. Il aurait pu l'abandonner des centaines de fois. Il aurait pu prendre peur des milliers de fois, de cette petite fille qui lui mettait inconsciemment tant de problèmes et de responsabilités sur les épaules. Mais non, pour la magie de ce petit coeur qu'il sentait battre contre lui, pour la joie de se savoir nécessaire à sa protection et à son bonheur, pour la paix qu'il ressentait en se faisant emmener loin, si loin, dès qu'elle se mettait à parler de son monde coloré. Les décisions étaient toujours plus faciles à prendre avec Sasha à ses côtés car, dans ses bras, il sentait que tout était logique. Il avait l'impression, un instant, qu'il n'avait pas de choix à faire, juste suivre l'évidence. Suivre l'enfant. En croisant son regard, le petit sourire de Slave s'élargit encore. Puis, hop, il souleva la petite blonde sans aucun effort. En quelques pas, il fut de nouveau dans la chambre et, avec délicatesse, déposa son précieux fardeaux sur son lit pour s'occuper du bain. Sans un mot. Puis revenir. Sans un mot. Avec Straw, il n'y avait aucun besoin de parler, elle le comprenait car elle savait lire ses yeux, ses gestes, ses grognements et ses onomatopées. Presque instinctivement, d'ailleurs. Aucun doute ne semblait prendre l'enfant, jamais elle ne doutait du bonheur de Slave de la voir, jamais elle ne doutait qu'il adorait l'écouter parler, jamais elle ne doutait qu'il veuille jouer avec elle. C'était cette assurance qui charmait autant Slave. Pour une fois, il n'avait pas à se perdre dans des mots dont il ne comprenait qu'à moitié le sens et la nécessité pour expliquer des sentiments qui, dans sa tête, n'étaient pas expliqués par des mots, et qu'il n'arrivait tout simplement pas à exprimer. Il était enfin compris sans avoir besoin d'utiliser le moyen réducteur du langage. Il n'avait plus à s'épuiser à chercher des heures les phrases qui la ferait arrêter de bouder, de crier, ou de se méprendre sur ses sentiments. Il pouvait se taire, enfin.
« Tu vois, Woo, je sais que tu aimes bien le noir, parce qu’il est comme tes cheveux. Mais je me suis dit que le ros devait être triste qu’on le prenne jamais. En plus j’ai un chouchou rose, alors c’est joli. Tu n’es pas d’accord ? -Si. Il doit être très heureux. »
Paradoxalement, c'était avec Sasha qu'il arrivait le mieux à parler. Il lâchait juste ce qu'il pensait, sans se préoccuper d'être compréhensible ou conventionnel. Il était détendu et serein, il n'avait plus peur, et cela lui permettait de s'ouvrir, de se laisser aller, de parler. Enfin, pas de phrases trop longues non plus. Et sans jamais se séparer de cette application à parler, de sa lenteur, de ses pauses importantes entre chaque phrase, de ce ton rauque et de son accent. On ne change pas ce qui ne peut pas être changé, miracle ou non. Il se laissa tranquillement entrainer de nouveau dans la salle de bain. Comme un fidèle chien, il la suivait toujours, sans un mot, sans une question, il lui obéissait parce qu'il la voulait heureuse et sereine, mais aussi parce qu'il devait une des rares personnes au monde à comprendre ce qu'il se passait dans le cerveau de l'enfant. Il avait toujours mieux compris les enfants que les adultes. Et Sasha avant tout, sans avoir jamais compris pourquoi. Tout semblait les séparer. Sauf la solitude, la dévotion, les vagabondages et l'incompréhension des autres, tous les deux solitaires et autonomes, mais avec le besoin compulsif d'être protégé et guidé. Deux âmes abîmées, rafistolées, bancales, qui avaient trouvé dans leurs dérangements une complémentarité que des êtres sains et normaux n'aurait jamais pu trouver.
« Il faut laver mes peluches ! Tu as le savon pour doudou, Woo ? -Oui. »
Il ouvrit un tiroir. Enfin, en vérité, c'était le tiroir de Sasha. Il y avait une brosse, des chouchous, le savon, mais aussi des bricoles qu'elle lui apportait souvent en souriant et dont il ne savait que faire. Sans même prendre la peine de regarder derrière lui, il le lui lança, il savait qu'elle le rattraperait. En se préparant pour la rejoindre, il croisa son reflet dans le miroir. Il vit d'abord ses yeux noirs trop enfoncés, trop sombres, ses sourcils naturellement sévères, sa mâchoire carrée. Puis ses épaules larges, ses muscles, son teint tanné, ses presque deux mètres. Et enfin ses cicatrices. De coup, de coup de couteau, de brûlure, partout. Des cicatrices qui le changeait en monstre, qui accentuait la dureté de son regard, qui rendait ses muscles dangereux. Qui lui rappelait tellement de souvenirs. Et le monstre, devant la glace, sourit. Santana avait-elle fait exprès, en le marquant ainsi, de ne jamais être oubliée ? Dès qu'il se regardait dans un miroir, il pensait à elle. Il n'avait besoin d'aucun objet ou d'héritage, à travers la mort la jeune femme avait laissé à vie sa signature sur le corps de son amant. Ruinant, au passage, presque toute expérience pour lui de trouver de nouveau une femme. Mais il s'en moquait. Il avait Sasha. Il sentit alors le regard de la petite fille et se retourna. Elle aussi le fixait, impatiemment, attendant qu'il la rejoigne. Elle avait un sourire lumineux contrastant avec celui de Slave, doux et mélancolique. Elle l'attendait.
« J'arrive. »
Sans aucune pudeur, il s'installa dans le bain. Il savait que Sasha n'avait pas peur de ces cicatrices. Il se demandait parfois si elle comprenait même ce qu'elles signifiaient. L'enfant avait sûrement juste compris qu'elles étaient un souvenir de Santana. Et cela suffisait. Au moment de s'immerger en face d'elle, il eut tout à cours un sourire étrange. Le genre de sourire qui n'apparait jamais devant quiconque d'autre que Straw. Un sourire malicieux, un sourire d'enfant qui a trouvé quelque chose de drôle à faire. Il s'écroula dans le bain. De toute sa taille et de tout son poids. Dans un énorme PLOUF. Lorsqu'il sortit la tête de l'eau il remarqua avec contentement qu'il y avait assez d'eau pour que son installation ait provoqué un magnifique raz-de-marée.
En voyant le visage trempé de Straw, le monstre éclata de son rire grave. Un rire tranquille, joyeux, simple. Un rire un peu rauque d'être si peu souvent entendu.
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Sujet: Re: Le petit bonhomme en mousse } Slave. Dim 4 Déc - 18:19
C’est sans gêne que Straw regarde son grand-frère se déshabiller devant elle. De ses yeux vers, elle observe sans bruit Slave retirer son haut et le jeter au sol. Son regard se pose sur les nombreuses cicatrices ornant son dos et son torse. Elle penche la tête, toujours souriante. Parfois, elle s’amuse à dessiner de drôles de formes, et quand on lui demande ce dont il s’agit, elle répond simplement « les cicatrices de mon frère ». Parce qu’elle les connait par cœur, elle sait l’emplacement de chacune d’entre elles. Un jour, elle lui a demandé d’où tout cela venait, il lui a simplement répondu que c’était tout ce qu’il lui restait de Santana. Santana, son ancienne petite amie ayant perdu la vie dans un triste accident de moto. Sasha en a beaucoup entendu parler, de cette jeune artiste africaine qui a hébergé et aimé Woo. Suite à sa mort, dévasté, le jeune homme n’avait pu jeter ses affaires. Alors, l’enfant vivait autrefois, lorsqu’elle passait sa vie à scouater chez le grand coréen, au milieu des meubles, habits, toiles et autres objets ayant appartenus au grand amour de sa vie. Cela aurait sûrement pu déranger une personne normale, d’être parmi les effets d’une morte. Sasha, elle, n’y avait vu aucun inconvénient, même si Woo lui interdisait de gribouiller sur ses carnets de croquis. Santana, même si elle représente en quelque sorte le passé, fait partie de la vie du frère et de la sœur, ne serait-ce seulement à cause du fait que, tous les ans, à la Toussaint, ils se rendent sur la tombe de la jeune femme.
Slave ouvre un tiroir et s’empare de la bouteille rose qu’il lance à Straw. L’enfant l’attrape au vol, habituée, un sourire naïf flottant sur ses lèvres. Elle coupe tout d’abord le robinet, l’eau étant à un niveau suffisamment haut. Elle se met sur les genoux, et attrape dans son sac ouvert sa peluche grenouille qu’elle émerge dans le bain moussant. Puis, sans s’y attendre, un raz-de-marée bruyant la submerge, son visage étant entièrement trempé par une monstrueuse vague d’eau. La tempête étant passée, elle se frotte les yeux, et dégage quelques mèches collées à ses joues mouillées. La blondinette voit Slave, face à elle, un sourire amusé aux lèvres. Le ridicule de la situation les fait rire tous les deux. Le gloussement cristallin de la petite retentit dans la pièce, résonnant contre les murs. Le son du ricanement semble colorer les murs d’un gris si triste, colorer le visage froid de Slave, colorer le cœur de cette brute recueillie par une blanche colombe. Elle éclabousse son frère et plissant les yeux, sûrement parce qu’elle s’attend à ce qu’il fasse de même. Lorsque Slave est arrivé à la WH* et que Sasha a commencé à dire à tout le monde qu’il s’agissait de son frère, les orphelins sont restés perplexes. Finalement, au fil du temps, ils ont tous plus ou moins compris la nature de cette relation. Car même si aucun lien de sang ne les unit, c’est un amour fraternel qui brûle entre eux. Il y a bien sûr toujours quelques idiots pour qualifier leur relation « d’anormale ». Parce que les gens ne comprennent pas que deux personnes n’étant pas officiellement de la même famille soient aussi proches. Parce que les gens ne comprennent pas qu’un jeune adulte et qu’une petite fille s’aiment autant et aient autant besoin l’un de l’autre. Parce que leur expliquer serait bien trop ennuyant, on les laisse dans leur bêtise.
▬ Woooo, t’es pas rigolo ! dit-elle en riant de plus belle. Tiens, tu peux m’aider à laver le zèbre ? Moi je lave la grenouillette.
Tout en disant cela, elle tend la peluche au jeune homme. Straw ouvre la bouteille et vers le liquide rose et parfumé sur la tête de la pauvre petite grenouille de tissu. Elle donne le savon à Slave, et commence à répartir le produit sur l’intégralité de la peluche, frottant bien pour qu’elle s’en imprègne complètement. Elle la plonge ensuite dans le bain, afin qu’elle se gorge d’eau, puis l’essore délicatement – il ne faudrait pas lui faire mal, quand même. L’enfant, tout sourire, répète l’action plusieurs fois. Si elle avait pu, elle aurait emmené toutes ses peluches et les aurait toutes lavées. Non pas pour dormir avec des doudous propres, du moins, c’est n’est pas le plus important. Mais surtout pour avoir à passer encore plus de temps avec Slave. Parce qu’il n’y a rien de mieux que d’être là, plongée dans un bain, avec lui. Elle lève ses deux yeux émeraudes vers lui et sourit à celui qui, autrefois, l’a sauvé de la solitude et de l’inconscience de ses défunts parents.
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Sujet: Re: Le petit bonhomme en mousse } Slave. Sam 11 Fév - 22:42
____Woo retombait littéralement en enfance avec Sasha. Personne d'autre qu'elle n'était capable de le faire agir aussi naturellement et en même temps avec autant de précaution. Chaque geste était un trésor avec Sasha. Chaque instant en commun était destiné à leur bonheur, à leurs rires. Ou plutôt, chaque instant avec Sasha était pour Woo une occasion de la rendre heureuse, de la faire sourire, de la faire rire, de recevoir le réconfort de ses bras et la confiance de ses yeux. Il était incapable de marcher droit sans la responsabilité qu'il s'était lui-même assigné : rendre Sasha plus heureuse que quiconque. Sans cet objectif, il serait toujours resté un être brutal et associable, incapable de communiquer avec les autres, enfermé dans son appartement et dans le vide d'une vie absolument banale. Elle lui offrait assez d'adrénaline pour qu'il puisse rester en vie, même s'il aurait pu se jurer à lui-même ne pas avoir besoin des multiples frayeurs que lui offraient sa cohabitation avec Sasha. Woo, du haut de ses vingt ans, était toujours incapable de vivre pour lui-même. ____Après avoir encore noyé quelques fois sa protégée, Slave obéit docilement à la demande de la petite fille. Il lui était impossible d'empêcher le moindre de ses caprices et se retrouvait même facilement embarqué dans ces aventures folles où elle partait à la recherche de la licorne du grenier ou les gâteaux magiques d'Ember (dont il se gardait bien de révéler la véritable teneur). Fidèle à son pseudonyme, il l'avait toujours accompagné dans ses vagabondages, dans ses histoires loufoques et ses initiatives impromptues. Car il est extrêmement difficile pour le jeune coréen de prendre des initiatives, et lorsque c'est le cas c'est de manière souvent réfléchie pendant des jours et des jours. Et ces décisions sont quasiment toujours à son propre égard, étant dans l'impossibilité d'affirmer son opinion face à la décision d'un autre (hormis pour sa survie ou pour le bien-être de Straw).
____Tout en lavant le fameux zèbre, il se mit à observer la petite fille. Du haut de ses dix ans, elle en paraissait facilement moins. Surtout ainsi, frêle enfant nue, concentrée sur sa peluche à laver, chantonnant bientôt quelque comptine, avec son sourire rayonnant et son honnêteté un peu trop naïve. Il était capable de les imaginer ainsi éternellement. Toujours ensemble, tout au long de leur vie. Il l'accompagnerait et la seconderait à chaque étape de sa vie. Quand elle finirait l'école, ils retourneraient à Londres et, grâce à son éducation d'élite, trouverait un travail qui les ferait vivre tranquillement tous les deux. Lui, trainerait de nouveau dans les rues à sa recherche ou l'attendrait comme un chien fidèle chez eux. Ils vieilliraient ensemble, elle le seconderait parfois, il essayerait de comprendre son métier sans trop s'en mêler, il mourrait avec elle pour qu'elle n'ait pas à se sentir seule et qu'il puisse organiser les funérailles, puis se laisserait sûrement mourir dans un coin pour la retrouver. C'était ainsi que Woo voyait son futur, leur futur : un fleuve tranquille et stable, défilant tranquillement au fil des années avec la sérénité de ce moment parfait, au fond de leur bain, à laver des peluches et à se sourire. ____Et puis finalement, il réussit à imaginer réellement la scène. Eux, huit ans plus tard. Lui approchant de la trentaine, elle finissant son adolescence. Elle et la puberté, ne voulant sûrement plus se montrer nue avec ses seins naissants et son épilation mensuelle. Ils allaient sûrement être à l'étroit dans ce petit bain. Et puis les hormones allaient s'éveiller en elle. Elle allait bien finir par grandir. Par tomber amoureuse. Par avoir cette période horrible où elle allait arrêter de voir son cher Woo comme un simple camarade de jeu. Le pire serait qu'elle soit attirée par lui, même un instant. Rien qu'à l'idée d'être désiré par son petit ange, il avait un haut-le-cœur. Mais arriverait-il à la laisser partir ? Arriverait-il à accepter que, à ses quinze ans, elle ne veuille plus dormir avec lui ? Accepterait-il de supporter le fait que son petit ami fasse des crises de jalousie à propos de leur relation ? Encore, aujourd'hui, il pouvait passer pour un grand frère trop protecteur. Mais à quinze ans ? Leur relation paraîtrait particulièrement malsaine. Accepterait-il que le quart de la moitié du huitième des rumeurs circulant sur Honey entache sa petite Straw ? Trouverait-elle un jour l'amour avec un vieillard à ses bottes ? Profiterait-elle de son adolescence en passant ses week-end avec lui ? ____Mais le pire n'était sûrement pas là. Non, la période instable de l'adolescente n'était pas la plus terrifiante. Car tout pouvait arriver : le pire comme le meilleur. Mais après ses études ? Et si elle se mariait ? Et si elle ne se mariait pas ? Elle allait assurément devenir un des piliers de ce pays, d'une manière ou d'une autre. Il n'accepterait pas qu'elle gâche son potentiel. Que deviendrait-il, lui, coréen associable à l'anglais incertain et à la culture inexistant ? Lui et sa violence. Lui et ses silences. Lui et ses injures. Elle aurait honte de lui. Et pas seulement dans une crise de jeunesse. Non, de manière honnête et profonde. Et elle allait bien finir par trouver un homme élégant et intelligent pour la satisfaire. Car il fallait bien qu'elle aime quelqu'un. Il ne voulait pas qu'elle soit célibataire à jamais pour lui. Il était incapable d'offrir l'amour et le désir qu'il avait pu offrir à Santana. Mais était-il capable de se faire abandonner une nouvelle fois ? Il avait être de trop nombreuses fois abandonné, laissé à la rue, dans un petit carton imaginaire sous la pluie. Il avait trop souffert pour garder Sasha près de lui. ____Il se savait incapable de supporter un nouvel abandon. Il était prêt à assumer toutes les fautes. Oui, il allait séquestrer Sasha avec lui. Il ne la laisserait pas s'échapper. Jusqu'à sa mort, il allait rester avec elle, qu'elle le veuille ou non. Quitte à rester allongé sur le paillasson, quitte à devenir son serviteur, son esclave, quitte à devenir son amant, quitte à devenir son pire ennemi. Il était prêt à être méprisé, détesté, rejeté. Il était prêt à sacrifier le bonheur de Sasha juste pour rester à ses conneries. Qu'elle soit donc incapable de trouver un travail et qu'il l'entretienne avec ses petits boulots merdiques, incapable de l'abandonner pour un homme même en le désirant d'amour, incapable de grandir, incapable de se passer de lui, incapable de l'oublier. Il la hanterait s'il mourrait avant elle. Il l'empêcherait de reposer en paix pour qu'elle le hante si elle mourrait avant lui. Ils se hanteraient jusqu'à se retrouver quelque part dans les Limbes. Il refusait de la laisser s'enfuir. ____Sasha était à lui.
____Au fond de son bain, à la Wammy's House, face à la petite Sasha de dix ans, Sin-Woo sursauta. Encore une fois plongé dans ses pensées, il avait perdu contact avec la réalité. Durant cet instant, il avait du laver et relaver le pauvre petit zèbre tandis que son expression enfantine et amusée avait disparu de son visage. Pendant un instant, le visage fermé et brutal du surveillant apathique était de nouveau apparu, les sourcils froncés et le regard sombre, la mâchoire crispé, terrifiant. Il remarqua que son cœur bâtait la chamade et qu'il avait même retenu sa respiration un instant. ____Horrifié par ses propres pensées, il se passa la main sur le visage comme pour les chasser, laissant de la mousse sur sa joue sans qu'il s'en rende compte. Il avait la gorge nouée et un frisson le parcouru en réalisant l'impact de son propre égoïsme. Il avait littéralement peur de lui-même. Peur de faire peur à Sasha, surtout. Et cela arrivait plutôt fréquemment dernièrement. Bien trop fréquemment. Plus le temps passait, plus il s'accrochait à elle, plus il dépendait d'elle, plus elle devenait son refuge. Quand la plupart des gens se détendaient avec le temps, Slave devenait de plus en plus à cran tandis que la blonde grandissait. Et plus le temps passait, plus le souvenir évanescent de Santana le torturait. Plus le temps passait, plus il comprenait l'étrangeté de sa relation avec son frère, petit. Le temps passait et il réalisait que ces liens avaient consumé toute part d'autonomie en lui. Il avait vingt ans. Il n'était plus un adolescent changeant et instable. Son caractère devenait de plus en plus stable de jour en jour et il lui était à présent incapable de changer de style de vie. ____Il était condamné à vivre sa vie par procuration, accroché à quelqu'un, incapable de prendre une décision, incapable de lâcher ce qui le faisait tenir debout.
____Il se racla la gorge. Le bonheur de la pièce lui était devenu, en quelques instants, complètement terrifiant. Il sentait le regard de Sasha posé sur lui. Mais il ne pouvait dire un mot ni la regarder de nouveau en face. Il était sale. Il était impur. Il était atrocement égoïste. Il était dangereux. Toutes les remarques sur l'insanité de leur relation lui venait en tête de plein fouet de manière amplifiée. Il avait peur.
____« Sasha. Nous ne devons plus dormir ensemble. Prendre de bain ensemble. Jouer ensemble. Il faut que tu grandisses. »
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Sujet: Re: Le petit bonhomme en mousse } Slave.
Le petit bonhomme en mousse } Slave.
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