Il n'y a pas de place pour le doute

EN CAS D'ECHEC OU DE DÉROUTE ON POURRA TOUJOURS S'ADRESSER AUSSI AU CIEL.

Il a posé sa tête contre ton épaule. C'est bizarre. Mais pas désagréable. Ça te ferait même presque sourire. Presque, oui, t'es trop concentré sur ton briquet, sur la flamme qui apparaît et disparaît aussi vite, que tu laisses parfois danser joyeusement quelques secondes avant de la faire disparaître à nouveau, pour mieux l’appeler ensuite. Ou peut-être que tu te forces juste à être concentré sur elle, histoire d'oublier que Shiney est quasiment affalé sur toi. Tu fais ton possible pour ignorer son poids contre ton dos et ses cheveux qui sont passés de ton côté. Ce ne sont que des petits trucs, des petits détails sans importance.

Des détails qui s'effacent sous le silence.
Silence qui s'efface sous le craquement irrégulier de ton briquet.

Et cette flamme est si belle.

« Petit con. »

Tu hausses un sourcil, arraché à ta contemplation par son insulte. Elle te fait sourire d'ailleurs, son insulte. Petit con. Tu trouves ça gentil, comme insulte, surtout comparé à celles que tu te prends dans la face, en général. Ou peut-être N'est-ce que part la façon qu'il l'a lancée, le contexte dans lequel il l'a dite. Dans ce silence considérable comme agréable et cette atmosphère, comment dire. Sereine ? Ouais. Ça fait très Yaoi comme scène en fait. … Oui je retire ce que j'ai dit, pardon Blake.

« Je crèverai pas avant toi. D'ailleurs prépares-toi mentalement. J'ai un plan pour ma nouvelle attaque. »

Tu souris un peu plus. Ah ouais, un plan, vraiment ? T'as hâte de voir ça, tiens. D'ailleurs, faudrait que toi-même tu réfléchisses à un plan. Bon t'as eu pas mal d'occasion d'y réfléchir et d'avoir des idées, certes. Mais elles ont été balayées par l'état de Shiney et ton rôle d'infirmière. Bah, elles vont bien revenir. C'est pas un problème. Ça n'a jamais été un problème. T'as pas une très bonne mémoire, mais t'as une imagination relativement fertile. Et quand t'oublies quelque chose, tu finis toujours par t'en souvenir. Ou par penser à un truc encore mieux. Enfin, là c'est plus une question de persuasion qu'autre chose ; tu peux pas savoir si ta nouvelle idée est mieux que l'ancienne, vu que tu ne te rappelles pas de l'ancienne.

« Silver va défoncer Gold de toute façon. »

Tu pouffes de rire. C'est qu'il s'y croit, le roux. T'aimes ça. Ouais, ça serait pas intéressant, si ton rival baissait les bras pour un oui ou pour un non. D'ailleurs, t'es content et assez fier de toi, parce qu'on dirait bien que tu viens de le faire sortir de sa phase « non laisse moi je veux crever. ». Ça t'arrange. Et puis de toute façon, si il croyait qu'il allait pouvoir se débarrasser de toi aussi facilement qu'en te demandant de le laisser crever, il se mettait le doigt dans l'oeil. Jusqu'au coude même, si ce n'est pas plus loin encore.

« Tu crois franchement que ça va être aussi facile ? Rêves pas trop mec. »

T'attrapes une des mèches rousses qui s'était aventurée sur ton torse et tu joues avec. T'aimes bien jouer avec les cheveux de Shiney en fait, c'est. Étrange. Depuis quand t'aimes jouer avec quelque chose de roux, toi, franchement. Toi, le plus grand raciste des roux. … Bon, le plus grand fake raciste des roux, quand tu repenses à tout les roux qui font ou on fait partie de tes fréquentations. Tu soupires légèrement ; c'est désespérant, y'a trop de roux dans le coin.

Ton briquet tombe sur tes jambes après que tu l'aie lâché, et tu poses ta main en appui sur le lit, sans que l'autre ne lâche ses cheveux. Et tu fermes les yeux, toi aussi ─ même si tu ne sais pas que Shiney a fermé les yeux ─, un vague sourire aux lèvres. Il a un plan pour la prochaine fois, hein ? T'as hâte de voir ça.

« T'as intérêt à vite récupérer tiens. Ça serait bête que t'oublies ton plan entre temps. »

Tu rouvres les yeux et regardes le plafond. Il manque vraiment de rouge pour pouvoir être très beau, ce plafond. Mais t'as la flemme de le repeindre, de toute manière. Et t'es pas très sûr que Green soit d'accord pour que le plafond soit complètement rouge. Vous vous battriez sûrement pour peindre de manière équitable le plafond en rouge et vert. Une peinture en damier tiens ça serait marrant, ça sauterait bien aux yeux. Mais ça serait putain de chiant. Et puis t'as pas que ça à faire.

… Non en fait t'as rien à faire, là. C'en est presque désespérant. T'as plus à t'occuper de Shiney ─ pour l'instant en tout cas ─, t'as. Tu pourrais jouer à Pokemon. Hm, bof, non, t'as pas trop envie là, t'as surtout. Faim. Très, même. Ça creuse, de jouer les infirmières.

« Shiney. »

Tu sais même pas pourquoi tu t'es mis à parler. Enfin, pourquoi t'as dit son nom. Tu l'as dit d'un air tellement neutre que tu pourrais dire n'importe quoi après que ça ne sonnerait pas bizarre. Tu pourrais parler du temps qu'il fait dehors vu que tu vois le ciel à travers la fenêtre, tu pourrais lui demander l'heure, tu pourrais dire des trucs sonnant bizarre, sortis de ta bouche. Tu pourrais parler de tellement de choses en fait, rien que pour rompre le silence. Mais t'es pas sûr d'avoir tant envie que ça de le rompre, ce silence. Il est agréable, ce silence. Du coup, t'hésites un instant à continuer ta phrase.

« … Non, r- »

T'es interrompu par une bruit étrange que tu identifies assez rapidement comme étant. Une manifestation de ton estomac. Il te semblait bien que t'avais faim, tiens.

« … J'ai la dalle, en fait. »

Non, sans blague ?

Par contre, sans moi, je vous l'assure

VOUS MOURREZ DE FAIM POUR LA VIE.

Et il a rit.

Sur le coup, t'as failli rire aussi. Comme ça, sans raisons ; parce que l'entendre rire t'avais donné envie de t'esclaffer à ton tour. On peut considérer que t'es de bonne humeur aujourd'hui, alors ça peut être compréhensible que, pour une fois, tu veuilles laisser paraître ta joie. Même si tu ne ris pour rien. Ce n'est pas un crime, de rire parce qu'on a envie de rire.

Bon d'accord, rire juste par envie de rire, normalement ça t'arrive que quand t'es défoncé. Ce qui n'est actuellement pas le cas. … Normalement.

« Gaëtan. »

Tu hausses les sourcils. Quel copieur, pourquoi il reprend ton idée de dire le prénom, comme ça, d'un coup, sans continuer directement la phrase, hein ? Bon certes toi t'as dit son pseudonyme, alors il innove un peu. Mais il s'appelle comment, lui, Harrison ? Il te semble avoir compris ça, que le Harrison que tu connaissais ne s'appelait en fait pas Harrison, mais Paolo, et que donc le vrai Harrison, c'est Shiney. Tordu, tout ça.

Il a frôlé ton cou en reprenant sa mèche de cheveux. Ça t'as fait une sensation étrange, assez peu habituelle mais au fond pas désagréable. Pourtant d'habitude tu n'aimes pas particulièrement qu'on te touche. Il faut dire, d'habitude, tu vires quiconque ose vouloir pioncer dans ton lit. Faut croire que Shiney a l'air et la manière de les bouleverser, tes habitudes.

Et à force, il n'y a pas que ça qu'il va bouleverser.

Tu tournes la tête vers lui, pour le regarder.

« Moi aussi. »

Et il rit à nouveau. Toi, ça te fait sourire. Il se lève, et tu le suis des yeux, grimaçant à la vision des brûlures sur son dos. Il ouvre ton armoire. Sur le coup, tu réagis pas vraiment, tu comprends pas avec exactitude la scène. Tu comprends pas que Shiney est en train de fouiller dans tes affaires là, les balançant les unes après les autres hors du meuble à la recherche de quelque chose à se mettre. Quelque chose qui se révéla être un de tes sweets. Ton cerveau fait la connexion, là. Y'a quelque chose qui ne va vraiment pas, là. Tu ouvres la bouche et t’apprête à te lever. Effort vain vu que là, actuellement, tu es vraiment trop lent.

« Voilà. Comme ça, j'ai plus froid et on voit pas mes plaies. Susu »

Tu en restes sans voix et te retrouves bêtement assis au bord de ton lit à le regarder, immobile. Qu'est-ce. Qu'il fout. Avec. Tes fringues. Lui ? Tu clignes des yeux. Bon, d'un autre côté, il a pas trop le choix, tu vas pas non plus aller dans ta chambre lui chercher un sweet quand même, et le laisser se balader torse-nu et blessé n'est pas la meilleure des idées pour l'aider à survivre. Le faire aller se chercher des fringues aussi serait une mauvaise idée, des mecs pourraient l'attendre devant sa chambre, une connerie du genre. Non, il a pas d'autre choix que prendre tes fringues. Bon y'a ceux de Green mais. On va éviter de le mêler lui aussi à tout ça quand même. Et puis vu la taille de ce mec, t'oses même pas imaginer à quel point Shiney risque de flotter dans un de ses vêtements. Ça serait marrant, quand même. Mais bon, vous n'avez pas le choix. T'es obligé de faire une exception, toi qui n'aime pas prêter tes fringues, en général. Alors pour cette fois, il peut garder ton sweet. A condition qu'il te le rende après. Il lui va bien mais faut pas abuser non plus. T'es peut-être devenu gentil aujourd'hui, mais sûrement pas généreux.

Blake généreux haha. Ça serait l'apocalypse avant l'heure.

Tu soupires et te relèves, passant une main sur ta nuque pendant que l'autre se glisse dans la poche avant de ton jean.

« Je sais pas quelle heure il est mais ça doit être l'heure de bouffer, ou pas loin. C'est pas une bonne idée que tu sortes, surtout si il faut deux pas pour croiser un mec qui veut te démonter. Pffff. Je sais pas. »

Tu fronces les sourcils et regardes le plafond. Faut vraiment que tu fasses quelque chose pour le rendre moins blanc, ce putain de plafond. Ça commence à te stresser.

« J'peux toujours aller bouffer et te laisser crever de faim ici. »

Tu hoches la tête d'un air quasi-déterminé, avant d'arrêter et de soupirer en esquissant un vague sourire, les yeux fixés au sol. Faudrait que t'y places un tapis rouge, sur le sol, tiens.

« Non après si on trouve ton cadavre ici on va croire que c'est moi qui t'ai butté. C'est pas que ça me dérangerait mais faut que ça soit vrai quoi. »

Tu soupires à nouveau, plus bruyamment, d'un air plus exaspéré cette fois, et recules un peu pour te laisser retomber sur ton lit, assis, avant de t'allonger sur le dos. Cette situation commences à t’enquiquiner quand même. Tu sais même pas combien de temps encore tu vas devoir t'occuper de Shiney. T'espères que ça ne durera pas trop longtemps quand même. Que ça finira avant que tu n'aies le temps de t'habituer, de t'attacher. Tu détestes ça, t'attacher.

Mais peut-être que c'est déjà trop tard.

Tu te redresses et balayes la pièce du regard. Si seulement Green pouvait choisir maintenant pour rentrer, tu l'enverrais vous chercher à bouffer. T'as toujours préféré que le sale boulot soit rempli par des larbins. Oui, il t'arrive de réduire Green, N, ton dieu, au rang de larbin. Parce que t'es trop un rebellz, quoi. N'empêche qu'il fait chier à ne jamais être là quand il faut. Faudrait qu'il lâche l'autre June ─ tu crois qu'il s'appelle June ─ un peu, quand même. A moins que ça ne soit le fameux June qui le colle tout le temps. T'en sais rien et tu t'en fous en fait. Tu voudrais juste que Green soit là quand tu veux qu'il soit là quoi, merde.

Pourquoi les gens ne sont-ils pas à ton service. T'aurais une clochette pour les appeler, ils te donneraient à bouffer des trucs supers et te feraient même de l'air avec d'immenses éventails. La faim te fait délirer, mec.

Tu poses ton regard sur le brun devant toi.

« Sinon j'peux toujours aller nous chercher à bouffer. Tant que tu fais pas le con dans ma piaule ça me va. D'ailleurs tu veux pas ranger les fringues que t'as foutu par terre là t'es pas chez toi hein. »

Si y'a bien une chose que t'aimes pas c'est voir tes fringues en dehors de ton armoire quand elles ne sont pas sur toi. Non mais franchement, c'est ton fric qui t'as permis de les acheter quoi, on touche pas à ton fric. En parlant de ça faudrait que tu retournes t'endetter auprès de quelqu'un toi.

T'as les pensées qui passent leur temps à divaguer aujourd'hui.

« Sauf que... Je sais pas ce que tu voudrais bouffer. Au pire je te prend des trucs dégueulasses, non ? »

Et tu lui fait un grand sourire forcé. Le genre de sourire que font les gosses chiants qui veulent paraître angéliques pour emmerder encore plus leur interlocuteur.

Au moins tu te reconnais plus dans cette attitude que dans celle que tu avais avant de t'endormir.

Mais combien de temps encore avant que ça ne revienne, hein ? Tu commences à te dire que Shiney a peut-être un drôle d'effet sur toi, en fait.

Just stay were you are

IF THERE'S NOTHING TO HIDE.

« Mec, je mange de tout. »

Oh, merde. Tu vas faire comment toi pour le faire chier en lui faisant manger un truc dégueulasse, hein ? … Au pire tu pourrais toujours cuisiner toi-même. Tu es sûr que ça sera tellement immangeable que personne même pas un stupide chien pourrait manger ça. Ben quoi, tu sais pas cuisiner, tu sais pas cuisiner hein. Tu peux pas être le meilleur dresseur du monde et savoir cuisiner, c'est incompatible. T'as trop de qualités, te faut bien quelques défauts quand même, histoire d'équilibrer le tout.

Plongé dans tes pensées de narcissique égocentrique et vantard, t'as pas remarqué que Shiney s'était rapproché de toi. Tu ne l'as remarqué, et n'as remarqué sa main aussi, que lorsqu'il t'as poké la joue. Là y'a eu un gros blanc dans ton esprit, accompagné d'un gros « wtf ? » pendant que tu clignais bêtement des yeux. T'as même pas entendu sa phrase. Enfin, si, mais à peine. Tu l'as pas enregistrée. T'étais trop occupé à te demander, mais wtf, il lui arrive quoi à Shiney pour qu'il vienne te poker la joue ? Ça doit être la faim. Ouais, ça doit être ça.

Après un instant de figé-attitude, t'as tourné les yeux puis la tête vers lui, le regardant, lui qui venait de prendre ta place sur ton lit. T'as une sorte de pressentiment pas forcement très bon, enfin ça dépend du point de vue je suppose. Tu sens, pour une obscure raison, que le roux, là, ben il va souvent squatter ton lit maintenant. Que tu le veuilles ou non. A vrai dire tu le sens même capable de te virer de ton propre lit pour pouvoir s'y installer à ta place, quoi. Et c'est approximativement la seule chose qui te dérange vraiment dans le fait que Shiney squatte ton lit. Le reste, tu t'en fiches un peu, tu râlerais pour la forme mais au fond c'est pas si chiant que ça.

Vous êtes juste passés du statut d'ennemis jurés à celui de rivaux quasiment potes quoi.

« Gaétan, va me chercher un truc. Je m'en fous, je mangerai tout tellement que j'ai la dalle. »

Toi aussi t'as la dalle d'ailleurs. T'avais presque oublié ça, à force, mais ton ventre, non, pas vraiment. Tu sais pas pourquoi, mais tu sens que quand tu vas sortir, il va en profiter pour imiter l'ours affamé en public t'sais. Genre, pour bien te foutre la honte et te donner envie de disparaître pendant 10 minutes, d'être invisible, de ne plus exister, et de vouloir retourner dans ta chambre au plus vite. Même si tu sais pas trop ce qui est mieux entre subir les moqueries des gens que tu connais pas, et de subir celles de Shiney.

« Et plus vite que ça. »

Tu hausses un sourcil. Non mais pour qui il se prend lui, franchement. Il est pas officiellement invité dans ta chambre, et puis même si c'était le cas il aurait pas à te parler comme ça quoi merde. T'es pas son chien ! Mais bon pour le coup tu te contentes d'hausser les épaules. T'as la flemme de répliquer. T'as trop faim. Tu sais même pas qu'est-ce que vous allez pouvoir bouffer. Ni comment tu vas te démerder pour ramener de la bouffe dans ta chambre. Mais c'est pas en restant planté là que tu pourras savoir. Donc tu fais quelques pas à reculons approximativement dans la direction de la porte, avant de finalement te retourner. Et ton regard croise au passage tes vêtements par terre.

« ... »

Tu les fixes un instant, avant de foutre tes mains dans tes poches en soupirant. Et tu te retournes un peu vers Shiney.

« Non sérieux mec tu veux vraiment pas faire quelque chose là genre les foutre en boule au fond de l'armoire je m'en fout mais les laisse pas là quoi. »

Pourcentage de chances qu'il accepte de le faire : très faible. Bah, t'aura tenté au moins. Et puis on dit que l'espoir fait vivre, non ? Bon c'est relativement ridicule, certes. Tu cesses de regarder le roux et te diriges à nouveau vers la porte, que tu ouvres.

« Ah et puis aussi. »

Tu t'es arrêté en plein dans l'encadrement de la porte, mais t'as pas tourné la tête vers Shiney, cette fois.

« T'évites de profiter que je suis pas là pour foutre ma chambre en bordel ok ? »

Tu lui jettes un dernier regard avant de fermer la porte derrière toi.

Et si on pariait sur l'état de ta chambre à ton retour ?

What if what I want makes you sad ?

AND IS IT ALL MY FAULT OR CAN I FIX IT, PLEASE ?

Bouffer. Putain. T'as la dalle. Tu savais que t'aurais pas dû sortir parce que son estomac s'éclaterait à imiter un concert, une fois que tu serais dans les couloirs. T'aurais dû rester dans ta chambre et toi et Shiney, vous auriez crevé de faim ensemble dans la joie et la bonne humeur ─ enfin, dans la limite du possible. Là, t'es juste en train de te taper la Honte Intergalactique. Tu préfèrerais tellement être devant un ordi en train de mater des vidéos plutôt que te balader dans les couloirs en quête de bouffe, sérieux. Et puis tu veux même pas imaginer l'état de ta chambre quoi. Bon après vu l'état de Shiney avec un peu de chance il aura pas la force de foutre le bordel jusqu'au bout. Et vu ton état à toi tu n'auras pas assez de dignité pour avoir le temps de récupérer à manger et retourner dans ta chambre. A la limite tu. … Hé, ouais.

Tu enlèves ta casquette, t'ébouriffe les cheveux ─ c'est systématique ça quand tu enlève ta casquette ─ et tu remets ta casquette... A l'endroit. Bien vissée sur ton crâne, limite façon dresseur de pokémon qui vient de perdre un combat et qui veut pas qu'on voie son visage. Et c'est vrai, tu ne veux pas qu'on voit ton visage, mais ce n'est pas parce que tu as perdu un combat, le grand Blake ne perd jamais ses combats. Non c'est juste que là, comme ça, t'es incognito, méconnaissable. Qui oserait songer que Blake, nous ne parlons pas de n'importe qui hein, mais de Blake, le seul et unique Blake, le mec qui se prend pour Gold de la racine des cheveux aux doigts de pieds approximativement, mettrait sa casquette à l'endroit alors que son modèle la porte toujours à l'envers. Alors non, non, personne ne te reconnaitra.

Même si les mecs qui se baladent en t-shirt avec un carapuce dessus, y'en a pas 15 dans l'orphelinat. A vrai dire tu dois euh. Être approximativement le seul ?

Mais bon l'avantage du pseudo-incognito, c'est que tu penses que personne ne sait que c'est toi, qu'à le ventre en plein concert de. de. gargouillement ventral. Donc t'as pas à ramasser ta dignité à chaque manifestation. C'est plutôt pratique.

Et donc, ne nous attardons pas sur des détails useless, tu as récupéré de quoi bouffer ─ des sandwichs, c'est très bien des sandwichs ─ et t'as même taxé quelques trucs aux orphelins plus jeunes que toi histoire que ça soit facile et que tu rentres pas à moitié tabassé dans ta chambre. C'est pas franchement le moment de te retrouver dans un état proche de celui de Shiney, hein. Même que du coup, en faisant le chemin pour retourner dans ta chambre, tu bouffes une pomme. T'as remis ta casquette correctement parce que, l'anonymat c'est bien, mais la casquette dans le bon sens ça te gène vachement, en fait. C'est parce que t'es pas habitué, sûrement. Mais t'as l'impression de ressembler à rien. En plus ta mèche est à moitié aplatie du coup et ça te fait râler. Non mais franchement. Ta mèche quoi. C'est sacré, ta mèche ! Si ça n'avait pas été pour le bien d'un truc aussi sacré que ta dignité chérie, tu aurais jamais fait ça.

Bref et donc, te voilà de retour dans ta chambre après avoir jeté le trognon de ta pomme dans un endroit random ─ Blake, le respect, ne pas jeter ses déchets n'importe où, tout ça, il connait pas ─, t'as ouvert la porte en te retenant de lancer un banal et cliché « me revoilàààààààà » parce que de toute manière t'avais franchement la flemme de parler ─ partisan du moindre effort Blake au rapport. c'est tellement plus simple de tcheker les gens plutôt que leur dire bonjour ─ et t'es. ben t'es rentré dans ta chambre quoi.

Mais c'est bizarre, t'avais pas le souvenir d'avoir laissé ta chambre comme ça, en partant. T'avais pas non plus le souvenir d'avoir laissé Shiney dans cet état, en partant. Tu savais bien que t'aurais pas du partir, tiens. T'aurais dû appeler quelqu'un pour qu'il vous ramène à bouffer et t'aurais surveillé Shiney, comme ce que tu devrais faire H24 ou presque. Enfin ce n'est pas franchement le moment de s'attarder sur des « j'aurais dû », hein. Tu devrais plutôt t'attarder sur Shiney. Pas sur ta chambre non, qu'est-ce qu'on s'en fout de ta chambre au fond, sur Shiney oui, focalisation.

Tu fermes la porte derrière toi et t'approches du roux, en déposant au passage le sac contenant votre repas du soir sur ton lit. T'es pas très sûr qu'il t'ai remarqué, mais c'est pas grave. Tu regardes les bandages étalés par terre, en plus ou moins bon état selon leur provenance ─ t'arrives pas trop à regarder les bandages que tu devines êtres ceux qui étaient sur les bras de Shiney jusqu'à il y a peu de temps bizarrement ─, puis tu regardes Shiney. Tu vois pas vraiment ses bras, t'y fais pas trop attention non plus en fait, t'essaye de voir son visage, mais il est caché. Alors tu t'accroupis devant lui ; peut-être que comme t'as rien dit en entrant dans la pièce il sait pas que c'est toi et il a peut-être peur de voir que c'est pas toi qui est entré si il lève la tête ? Bah, c'est pas le moment de réfléchir à des conneries pareilles, on s'en fout de pourquoi il t'a pas remarqué et de est-ce qu'il t'a vraiment pas remarqué.

Tu veux juste savoir comment il va, toi.

Bonjour, Blake s'inquiète pour quelqu'un qui n'est ni lui-même, ni sa casquette, ni sa mèche, ni une de ses consoles, ni un de ses jeux pokemon, ni ses clopes ni même son éventuel argent.

T'approches une de tes mains de lui. T'hésites un peu parce que t'as pas trop envie de le surprendre en supposant qu'il ne se doute pas que quelqu'un est relativement près de lui et que cette personne va le toucher, et puis t'as pas trop envie non plus de le toucher sur une de ses blessures ─ parce que déjà rien que niveau hygiène c'est pas génial et si t'essayes de le sauver c'est pas vraiment pour en rajouter une couche aussi bêtement. Alors tu poses ta main... A moitié sur la sienne. Là où il a pas de blessures. A moitié sur ses cheveux aussi, du coup.

« Shiney...? »

Inutile de préciser que cette situation ne te met pas particulièrement à l'aise ?

And what if it makes you laugh now but you cry as you fall asleep?

Tu n'as pas senti sa présence dans la pièce lorsqu'il est entré, disons que t'avais mieux à faire. Les bras toujours devant toi , t'as commencé à paniquer. Même si deux minutes avant, t'aurai vendu ton âme pour que Blake soit devant toi. Avec toi, là. Là, tu flippes juste atrocement, si bien que t'as même du mal à penser concrètement sans vouloir te retourner toutes les cinqs secondes. T'oses pas non plus ouvrit les yeux, relâcher ta respiration saccadée par la paranoïa qu'a pris ton corps.

Mine.
Mine. Comme une putain de possession. Comme un vulgaire objet, comme une chose qui lui appartient.

Il y a les barrières de ta personnalité qui viennent de tomber, là. Au diable ta fierté, ton assurance et ton énorme ego. Au diable ta personnalité de merde, là dans l'instant du veux juste Gaétan. Tu le veux pour sa connerie, pour son ego sans pareil, tu le veux tu sais pas pourquoi mais putain qu'il ramène son cul dans cette putain de chambre. Tu sais pas pourquoi tu le veux. Pour de la protection ? Pour pas faire ou a avoir subir une autre connerie ?

Tu veux de la protection. Là, tout de suite, tu veux que ce putain de rival soit là. Qu'il serve à un truc dans sa vie, merde.

Mais à force de penser à lui, t'as senti sa présence que longtemps après. Quand il a murmuré ton pseudonyme, une main se nichant dans tes cheveux. L'autre sur la tienne. D'ailleurs tu as senti que sa main était étrangement chaude. Tu touches pas souvent des mains alors tu peux pas trop avoir un avis d'expert. C'est pas comme si tu faisais des tcheaks tous les jours à tes potes hein. De un parce que t'aimes pas faire des tcheaks, de deux parce que t'as pas de pote. Bref. Le geste en soit n'avait rien de suspect pour toi. Enfin, tu commences à avoir l'habitude avec Blake des gestes suspects, si bien que tu n'arrives même pas à savoir quels sont ceux à éviter. De toute façon, tu te dis que si t'as une attitude bizarre, Blake sera là pour te le dire.
Je trouve que tu comptes beaucoup sur Blake pour un rival.
Paradoxalement, la présence même de ce debil de rival te rassure. Enfin, tu penses qu'il y a un truc en lui qui fait que tu n'as pas besoin de te cacher pour, tu sais pas toi, péter un cable ou pleurer. Même si la deuxieme option n'est pas quelque chose que tu adores faire. Bref, sa présence te rassure...même si c'est le mec que tu hais le plus au monde...même si c'est cet enfoiré qui t'a piqué Paolo.
Tu ne pourrais pas lui expliquer, tu ne peux même pas te l'expliquer à toi même.

Tu te dis qu'il est spécial. A la limite, « important » mais c'est tout. Point.

T'as relevé la tête, le regard fuyant entre ta frange. Tu fuyais son regard, t'avais besoin de réfléchir. Et en ce moment, le regarder dans les yeux c'est juste pas du tout la bonne chose à faire pour toi quand tu veux réfléchir. Sinon tu te mets à rougir ou sortir des trucs totalement impossible et carrément louche. Parce que tu peux le dire clairement : Tu es ultra bizarre quand Blake est là. Et puis, t'as trop de question dans ta tête, trop de chose et une grande place pour tes réactions. Tes réactions parce que tu accordes une importance majeur à ton image...sauf que là, t'es juste vraiment perdu. Tu ne sais même pas quelle tête lui sortir. Alors fuyant toujours son regard, tu replaces une de tes mèches derrière ton oreille.

« Mes bras...Gaétan, regardes mes bras »

Tu ne t'attends pas à une expression étonnée de sa part. Peut être qu'il lâchera qu'un «  bien fait pour ta gueule Harrison » en rigolant comme un bouffon. Et dans un sens, il n'aurai pas tord. Enfin...t’espère quand même un peu d'attention. Même si t'es son rival. Même si tu le hais à mort. T’espère qu'il comprenne. Ton état, tes yeux dans le flou comme tes mains qui tremblent. Et ta détresse évidente. Ta détresse qui te fait détourner le regard.

T'avales difficilement ta salive, n'osant le regarder dans les yeux deux secondes. Tu n'oses pas non plus penser à ce que tu ressembles à l'instant. Peur. Peut être remplit de peur, et de détresse. La souffrance dans tout ça, ce n'est pas si terrible en fait. T'en oublierai presque les picotements sur tes bras.

« Dis...Tu. »

Tu n'arrives pas à finir ta phrase, le regard tremblant sur le sol. Tes yeux bougent vite, tes poignets se serrent un peu. Toi qui avait l'habitude d'être si confiant, elle est où ton assurance tellement parfaite Harrison ?

Tu soupires enfin profondément, relevant enfin le regard vers lui.
Ce que tu vas lui dire dépasse tes principes.
Ce que tu vas lui dire dépasse même le fondement de ta personnalité.

« Tu me protéges, m'kay ? »

Disons, entrecoupés d'silences

QU'ON EST BIEN SEULS POUR UNE FOIS.

« Mes bras... Gaëtan, regardes mes bras. »

Ses bras. Pourquoi ses bras ? Tu t'en fiches, de ses bras. Tu veux juste savoir comment il va. Essayer de voir la tête qu'il fait. Peut-être voir dans ses yeux qu'il va pas si mal que ça, c'est c'est juste passager, juste la douleur qui le tue presque sur place, mais que ça va finir par passer. Que tu peux peut-être faire quelque chose pour l'aider, pour le réconforter.

Y'a quelque chose qui va pas, quand même, si tu t'inquiètes autant pour lui. Quelque chose de bizarre, de louche, de vraiment étrange et assez improbable. Un truc assez rare dont t'aimerais bien te débarrasser. Tu voudrais juste te comporter avec Shiney comme tu te comportes avec n'importe qui. Avec, comme seule petite différence, le fait que Shiney c'est ton rival. Mais ton comportement va plus loin que la rivalité, t'en es conscient et t'efforces de le nier, comme si en ignorant ça tout redeviendra comme il devrait être.

Ce mec a un drôle d'effet sur toi. Et t'aime pas forcement ça.

Ses bras, ses bras, pourquoi ses bras ? Qu'est-ce qu'ils ont, ses bras ? Intrigué, tu finis par regarder, comme il te l'a demandé. Peut-être que tu n'aurais pas dû.

« Mine ». Rien que ça. « Mine ». Une putain de marque de possession. Et c'est pas ta main qui a écrit ça.

Et maintenant ? C'est quoi, ça ? Cet espèce de bouilli immonde qui s'installe sans aucune gène au fond de ton estomac, qui te tord et te noue le ventre, à la limite de l'envie de gerber. Cette purée pâteuse et amère de. Sentiments ? Cette jalousie qui te noue la gorge et te fait serrer les poings. « Mine ». T'en grognerais presque, tu te mords la langue pour t'en empêcher.

Shiney est à toi, putain.

Mais au fond, c'est quoi tout ça ? Vous vous connaissez pas depuis si longtemps que ça. Vous vous êtes vraiment retrouvés face à face ou presque 3 fois. Trois pauvres fois, et le reste du temps, au mieux vous vous croisez, au pire... Rien. Comment veux-tu oser prétendre qu'un mec que tu connais finalement à peine t'appartient, juste sous prétexte qu'il est ton rival ? La jalousie te fait perdre confiance en toi. Elle est passée où, ta détermination aveugle et bornée, Blake ? De toute façon, tu es sûr que tu connais déjà mieux Shiney que la personne qui a marqué ça. Ouais. Ça reste à voir, mais ouais.

« Dis... Tu. »

Tu relèves la tête et le regard vers lui, vaguement surpris par sa soudaine intervention, légèrement sorti de tes pensées, de ta jalousie, de l'infecte mélange de sentiments qui te noue toujours le ventre et la gorge, pour le moment. Tu le regardes, un peu boudeur, un peu de mauvaise humeur. Et tu croises son regard.

« Tu me protèges, m'kay ? »

… Pardon ?
« Tu me protéges, m'kay ? » « Tu me protéges, m'kay ? » Sa question résonne dans ta tête. Le protéger. Protéger Shiney. En temps normal, une fois le léger choc de la question, aussi inattendue que surprenante, passé, tu aurais rit et lui aurait demandé ce qu'il avait fumé.

Mais non. Non, ce n'est pas drôle, non, tu n'as pas envie de rire. Le protéger. Toi, protéger quelqu'un. C'est tellement peu probable que tu as du mal à l'imaginer. Toi, Blake, foutre ta vie en danger pour que celle de quelqu'un ne soit pas menacée. Ça fait plus d'un an que tu ne penses qu'à ta gueule. Toi, toi, toi, tes affaires à la limite, mais toi, ta poire et ton égo. Les autres, non, les autres ils peuvent mourir que tu t'en fiches. Enfin, tant que ce ne sont pas ceux qui te passent du fric, mais à la limite tu pourrais en trouver d'autres. Il n'y a que toi qui compte.

Alors pourquoi ?

Lentement, tu commences à hocher la tête. Pourquoi lui ? Pourquoi ce mec, alors que vous avez faillit vous entre-tuer dès votre première rencontre, pourquoi tu devrais le protéger ? Pour ton égo, pour ta vengeance, uniquement pour ta poire et ta dignité, ou pour lui ? Tu hoches la tête avec un peu plus de conviction.

Tu sais pas pourquoi. Tu veux pas savoir pourquoi. Mais tu le feras.

« Ouais. Ouais, je le ferais. »

T'es pas totalement convaincu du résultat ; tu sais que finalement, si tu t'en mêles, vous avez surtout des chances de vous retrouver à l'hôpital tout les deux. Mais tant pis. Tu le laisseras pas comme ça. Tu le laisseras pas dans cette merde, tout seul, et tu l'aideras à faire face à l'adversité. Comme deux rivaux qui oublient leur rivalité pour faire face à un ennemi qu'ils ont en commun. Mais finalement, vous n'êtes plus tant que ça des rivaux.

Tu secoues la tête, comme pour la vider de toutes les pensées qui l'envahissent. Tu le regardes, tu regardes ses bras, prenant soin de ne pas faire attention à l'inscription gravée dessus. Elle finira par partir. Tu espères qu'elle finira par partir. Tu montres un de ses bras, le frôlant au passage avec ta main, sans oser l'attraper.

« Ça te fais encore mal ? »

Ton regard dévie sur les bandages étalés par terre, et tu le regardes, à nouveau.

T'es en train de te rendre compte que, finalement, tu serais sûrement capable de beaucoup de choses, pour Shiney.

Il a emprise vraiment étrange sur toi, pour un simple rival.

Well somebody told me
You had a boyfriend
Who looked like a girlfriend

Tu as espéré. Vraiment. Là, il n'y avait plus de combativité entre vous. Enfin, surtout pour toi. Tu le fixais, peut être avec un regard piteux. Mais entre nous, qu'est-ce que ça pouvais te foutre ? Alors t'as espéré son hochement de tête. Qu'il comprenne que là, c'était un cas extrême. Et des cas extrême, t'en as pas eu énormément dans ta vie. Disons que les os cassés, ça peux t'arriver. Mais les marques de possessions écrites sur tes avants-bras....Jamais. Alors t'as soupiré quand tu l'as vu hoché de la tête. Souris tristement aussi.
De la protection. Dire que tu as demandé de la protection au seul mec de la terre qui veut véritablement ta mort. Des fois, t'es assez paradoxale Shiney. T’espère que ça se reproduira pas non plus. Parce qu'entres vous, le délire des rivaux s’émiettent un peu, non ?

Gaëtan Bourgeois, un rival ? Il y a un silence dans ta tête. Tu veux pas répondre. Non. Disons que tu ne sais pas quoi répondre. Tu le fixes, attendant ta réponse que tu connais déjà par ce hochement de tête.

« Ouais. Ouais, je le ferais. »

T'as murmuré un « Merci » à peine audible. T'as pas spécialement de honte en fait, à lui avoir demandé. Enfin, disons que l’atmosphère est beaucoup trop. Bizarre. Enfin, c'est comme si ce n'était pas vous qui parliez ou agissiez. Enfin, t'as toujours eu une figure différente avec Blake qu'avec les autres gens à qui tu parlais. Tu t'es dis que c'est sans doute parce que justement, Gaëtan, c'est Gaëtan et pas un autre. C'est le gars que tu considères comme le pire enculé de la planète. Il est totalement débile, égoïste, faux. Et puis aussi vraiment chiant, trop pokephile à ton goût, même des fois, il te fait flipper quand il gagne la ligue pokemon et qui hurle presque dans sa piaule. Bref, Gaëtan, ça a toujours été le mec..vraiment bizarre que tu regardais tout autant bizarrement. Parce qu'entre nous. On sait tous ça.
On sait que des fois, tu le suivais, les pas légers, longeant les couloirs à en coller ta silhouette contre les murs froids juste pour le regarder. De ce temps, tu disais que c'était parce que tu voulais savoir ce qu'il faisait. En « bon rival que tu étais, tu te devais de savoir ce qu'il faisait ». Mais en y réfléchissant bien, c'était vraiment bizarre non ?

T'as bien une idée, mais comme pour la combattre, t'as hoché négativement de la tête.
Non, tu ne peux pas.

Il a secoué la tête. Tu viens de capter que t'aimes bien quand il secoue la tête. Il y a ses cheveux qui bougent, c'est vachement beau. T'en ai presque à vouloir mettre sa main dedans pour savoir leur douceur mais tu te retiens. Tu as dis que tu ne pouvais pas ! Il baisse son regard sur ton bras droit, le frolant presque des doigts. T'as un vieux frisson qui t'as prit l'échine...Avant de montrer des dents. Il était débile à vouloir te toucher ?! Sauf que t’arrives pas à articuler un mot.
Faut que tu prennes en compte que dés aujourd'hui, il doit te défendre contre l'adversité...donc que tu dois avoir un minimum -un tout petit minimum- de respect pour lui. Mhm.

« Ça te fais encore mal ? »

T'as. Déglutit. Et sans doute rougis. En fait, t'es tellement pas habitué que les gens te portent d'attention que là, c'est presque bizarre. Enfin, bizarre dans le sens plaisant en fait. Mais le pire doit-être que c'est de la bouche de Blake quelle est sortie cette phrase. Donc bizarre². T'as hoché de la tête, positivement comme un débile mental, te mordant la lèvre au passage. Mais arrêtes de hocher cette tête comme un forcené, tu vas finir par avoir mal au crane.

«  Oui. Un peu. Enfin, du moment que j'y vais pas attention et qu'on ne m'appuie pas dessus, ça peut aller. Je pense. »

Même tes phrases prennent une tournures bizarre. Tu regardes les bandages sur le sol. Tu viens de penser que Blake avait du s’emmerder à les faire et toi, tu les as défais à une vitesse assez affriolante. Heureusement qu'il n'y a plus de sang, tout ça. Parce que là, je pense que t'aurais pu crever dans les cinq prochaines minutes en fait. Quelle mort de merde. Saigné à mort. Par un connard dont t'ignores tout.
T'as fermé le poing à cette pensée, plissé les yeux aussi. Ce fumier ne perdrait rien pour attendre. Une fois que tu seras rétablie, tu pourras aller lui casser la gueule vite fait, bien fait. Tch, tu lui en foutrais des «  Mine » sur la gueule.

D'ailleurs t'espère que ça partira. Tu recroises le regard de Blake.

« Hm. Tu penses que ça partira ? »

T'espères vraiment. De un parce que ça te ferait chier qu'un mec que tu connais pas foutre sa marque sur toi comme si t'étais sa propriété. De deux parce que, si cette marque reste, tu sens que Blake va péter un câble pas possible et va vouloir imposer la sienne sur ton corps. Tu le sens venir de lui ça.
Pourquoi ? Parce que tu penses que si t'avais pas les bras totalement vidés de leur force, t'aurai de suite posé ta marque sur Blake.

Histoire d'en faire totalement ta propriété .

And now someone is gonna pay

AND IF YOU CAN'T GET WHAT YOU WANT, WELL IT'S ALL BECAUSE OF ME.

« Oui. Un peu. Enfin, du moment que j'y vais pas attention et qu'on ne m'appuie pas dessus, ça peut aller. Je pense. »

Tu hoches légèrement la tête et retires ta main, histoire de ne pas le toucher. Tu sais que tu ne dois pas le toucher, tu le savais avant même qu'il ne te dise que ça fait mal si on le touche, que tu ne devais pas le toucher. Alors vas savoir pourquoi est-ce que tu le voulais quand même, sachant que ton but n'est absolument pas de le faire souffrir, mais l'inverse, si possible.

Après un instant, tu soupires légèrement. Il faut faire quelque chose, tu vas pas le laisser comme ça, non plus, quand même. Surtout que voir ces « Mine » sur ses bras t'énerve, quand même. T'en sers même les poings. Qui ? Qui peut vouloir oser dire que Shiney est à lui, hein, que tu ailles oublier une fois de plus que tu ne frappes jamais le premier pour aller lui casser la gueule ? C'est vrai d'ailleurs, c'est étrange, il n'y a que pour Shiney que tu oublies que tu ne déclenche jamais une bagarre autrement qu'en énervant un peu trop un gars, uniquement pour lui que tu mets de côté l'évidence que tu vas perdre si tu te bats. Pourquoi ? Pourquoi tu pers ton égocentrisme et ton instinct de survie quand il s'agit du roux, hein ?

Tu dois bien admettre que t'as vraiment envie de le protéger, au moins un peu.

« Hm. Tu penses que ça partira ? »

Tu hausses un sourcil et regardes Shiney. Est-ce que ça partira ? Est-ce que ces putains de « Mine » partiront un jour ? Tu l'espères. Ils ont intérêt à partir. Sinon, tu vas réellement finir par péter un câble si tu les vois trop longtemps. Si Shiney n'est pas à toi, il n'est à personne. Absolument personne.

Tu hausses les épaules et récupères des bandages propres. T'hésites un instant, tu sais pas si il faut systématiquement désinfecter avant de panser des blessures, mais au cas où, tu vas le faire. Voilà, tu vires à nouveau attentionné. Tout ça parce que t'espères que si tu désinfectes bien ça va partir plus vite. Alors tu t'y mets, aussi doucement que possible ; d'ailleurs, niveau douceur, on ne peut pas nier que tu commences à t'améliorer.

« Je pense, y'a pas de raisons que ça parte pas. »

Ça te ferais surtout péter un câble, si ça finissait pas par partir.

« En attendant j'te remet les bandages, comme ça en plus ça les cachera. »

Parce que tu es pertinemment conscient que cette inscription n'est bénéfique ni pour toi, ni pour Shiney.

Alors tu t'occupes de désinfecter et bander son bras, consciencieusement, en t’efforçant à ne pas faire attention à l'inscription dessus. Voilà. Maintenant que ces foutues lettres ont toutes disparues, dissimulées sous les bandes blanches, tu te sens presque mieux. Presque. Tu ne te sentiras vraiment mieux que quand elles auront disparu même sans avoir à être cachée. Ou quand tu auras imposé ta marque par dessus, peut-être.

Une chose est sûre, si Shiney n'avait pas été en si mauvais état, tu aurais déjà marqué ton territoire.

Maintenant que t'as fini, tu te redresses, lâchant à nouveau un énième soupir, et t'approches de ton lit pour récupérer le sac que t'avais posé dessus. Tu observes son contenu d'un air blasé ; ton estomac t'as refait le coup de décréter que maintenant que t'as ta bouffe devant toi et que tu peux manger, il n'a plus faim. Alors qu'il était presque en plein concert de « j'ai faim ! » et de « je suis vide ! », dans sa propre langue évidement, il y a quelque temps.

Ou peut-être que t'as juste l'estomac noué par la jalousie.

Tu sers les poings mais te calme finalement légèrement et tend le sac à Shiney, le lâchant avant même qu'il n'ait pu l'attraper.

« Tiens, tu peux tout bouffer si tu veux, j'ai pas faim. »

Le pire c'est qu'à force ça te fait même plus bizarre de dire que t'as pas faim alors que juste avant, aucun estomac ne pouvait être plus bruyant que le tien.

T'as juste un gros coup de barre, en fait. Ouais, t'es complètement claqué. T'as pas l'habitude de te sentir aussi énervé, possessif et jaloux, ça doit être pour ça que t'es juste crevé comme si tu venais encore de passer une nuit à jouer à Pokemon. Alors tu te laisses tomber sur le ventre sur ton lit ; tu pourrais presque t'endormir dans les secondes qui viennent, là. Tu ramènes tes bras, jusque là étalés devant toi, sous ta tête, et tu fermes les yeux. Ouais, pourquoi pas.

Ou peut-être que tu devrais surveiller Shiney. Ou lui dire de dormir aussi, parce qu'il a besoin de repos vu son état. Ouais, mais t'as la flemme d'ouvrir la bouche, tout comme t'as la flemme de rouvrir les yeux ou même de bouger d'un millimètre. Il fait ce qu'il veut. C'est pas parce qu'il va certainement passer plusieurs jours avec toi, dans ta chambre, que tu dois faire la nounou.

Il va rester avec toi pendant un moment... Le pire c'est que cette idée ne te dérange même pas, finalement. Le fait qu'il reste ici, avec toi, sans que personne à part Green ─ d'ailleurs, il est où Green, il devrait bientôt rentrer, sûrement ─ ne le sache, c'est un peu comme une marque de propriété. Il dort dans ta chambre, donc il est à toi. A toi, à personne d'autre qu'à toi et à toi seul. Ouais, c'est exactement ça. Shiney est tien.

Et tu boufferas quiconque osera prétendre le contraire. Et surtout ce bouffon qui a gravé ces putains de « Mine » sur ses bras. Tu vas lui faire regretter.

C'est beau, de rêver. Mais ça reste sûrement moins beau que tout ce que tu serais capable de faire, quand ça concerne Shiney.