Je tourne dans les dortoirs des gars. A part chamailleries, rien à signaler. Je refais une ronde pour m'en assurer. Bien. C'est pas calme, mais avec les mecs c'est jamais calme de toute façon. Toujours à se crier dessus ou à se porter des coups. Mais c'est pas vraiment désagréable. Les mecs ils ont une façon de communiquer différente de celle des filles. Les filles, quand elles s'apprécient elle se font des câlins, les mecs ils se mettent des pins. Les filles, quand elles s'aiment pas elles attaquent discrètement avec une tactique bien recherché et qui va faire mal, les mecs ils se mettent des pins. Moi j'adore ce comportement. Moi j'aime me battre. Ce battre avec ses amis c'est super sympa, se battre avec ses ennemis c'est trop cool! J'aime la bagarre, je trouve que c'est un bon moyen de s'exprimer, d'apprendre à se connaitre.
Je fini ma ronde. Bien, il ne semble pas avoir besoin d'alerte à la bombe. Ni de super-vilains à combattre.

Et maintenant?

Je regarde le sol sans savoir que faire. Quel endroit je pourrai inspecter... Je fixe mes baskets comme ça un moment avec cette réflexion. Et puis... Les dortoirs des filles? Les filles aussi elles peuvent être en danger! Oui, oui, c'est une bonne idée! Aller hop! Je me dirige donc du coté des filles, m’aventure dans leur territoire. C'est marrant. Tout est plus calme de ce coté. Les portes sont fermées aussi. Alors que celles des garçons sont ouvertes. Et aucun bruit, silence... Je le crois pas ça. Tout ne peut pas être silencieux comme ça en pleine journée quand même. Il doit bien avoir des gens à secourir... Alors je tend l'oreille. Je continue à avancer, l'oreille tendu, le regard affuté, pour être sur de ne manquer aux gestes, aucuns cris de détresse.

Une porte est légèrement entre-ouverte. Miracle. Je la pousse légèrement du bout du doigt. Jusqu'à ce que la porte me montre son contenu. La chambre en elle même est un vrai foutoir de tous les cotés. Certains plus que d'autres. Un grand mélange de... De n'importe quoi. Et on dis que les filles sont disciplinées, plus que les gars. Hin, tu parles. Il y a pleins de fringues par terre, pas rangées. Et. Il y a une fille recroquevillée sur elle même.

_ Hé! Ça va?!

Je regarde mes peluches. Bien alignées. Je souris en jetant un œil a mes poupées vaudou et m'approche de l'étagère ou elle sont posées. Je saisis une poupée transpercée de toute part,et attrape l'aiguille qui transperce son bras gauche. Je fais glisser l'aiguille sur mes lèvres, lentement, puis passe ma langue sur la pointe de l'objet. J'appuie l'aiguille sur le coté de ma lèvre du bas qui fait face au reste de mon orifice buccal, légèrement, et je sens le gout du sang envahir lentement ma bouche, mais pas assez vite, j'appuie plus fort, et cette fois le liquide qui coule dans mes veines coule dans ma bouche. J'ai mal, mais je suis satisfaite. Depuis peu,je préfère me faire mal a moi que faire mal aux autres, c'est plus agréable. Pour eux. Je me demande pourquoi je fait ça. Pourquoi je me fait mal pour ne pas gêner des gens que je déteste. Je m'allonge sur mon lit et ferme les yeux. Je suis tellement bien, allongée, tranquille. Enfin tranquille. Il n'y a personne dans la chambre actuellement, et c'est tant mieux! Sans ouvrir les yeux, je cherche avec ma main droite la boite de "médicaments" sur ma table de chevet. Je suis accro a ces trucs. Je mets une pilule dans ma bouche et attrape ma bouteille d'eau, dévisse le bouchon et avale de l'eau, et, par la même occasion, ma drogue. Je ne sais pas ce que c'est mais j'adore ça. En tout cas, je sais ce que ce n'est pas, et ça me suffit. J'ai pas vraiment envie de savoir ce que j'ingurgite depuis trois ans. Je me sens légère. Je n'ai plus de problèmes. Je suis légère, si légère. Je sens a peine les draps sous mes paumes. Je suis détendue. Je vois plus rien a part des couleurs. Puis plus rien du tout. Mais je me sens bien, et c'est cool comme ça. Je me demande ce que ça fait, une overdose, est-ce qu'on souffre, on on crève comme je suis maintenant, dans un monde artificiel généré par les substances illicites et notre cerveau malade? Je ne sais pas, et j'en ai rien a foutre. J'ingurgite une autre pilule. C'est si irréel, le monde, quand on est comme ça. Dans cet état, je me sens bien, et j'ingurgite une autre pilule. Oh,petites choses colorées, vous rendez ma vie plus facile. Un sourire béat apparait sur mon visage, oh putain, je dois avoir l'air conne. Je me sens encore plus légère, et j'entends comme un biiiiiiiiiiiiiiiip permanent.


*biiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiip*

Je suis tombée de mon lit. Je regarde l'heure. Quoi?!! Il y a une heure... J'ai passé une heure dans mon trip? J'ai envie de gerber... Je titube vers la porte, pensant a aller a l'infirmerie. Et la, je me dit que ce serait idiot. Je vais pas y aller et dire "Hé m'dame,je me suis shootée a un truc que je connait pas, et je me sens mal!"... Je m'étale lamentablement, et laisse la porte entrouverte. Je rampe jusqu’à mon lit puis tente de monter dessus. Je déploie un effort qui me parait surhumain pour réussir mon "escalade, et dépose ma tête sur mon oreiller. Le bip semble s'éloigner. Je fais une fixation sur une de mes peluches. Un gros chat rouge. Je ne sais pas pourquoi, mais le mot grenadine me vient a l'esprit. Je veux de la putain de grenadine. Je me rappelle alors que j'ai une bouteille de sirop de grenadine pure sous mon lit, je me demande comment je m'en souvient et ce qu'elle fout la. Je dirige ma main sous mon lit, et sens quelque chose. La bouteille! Je l'attrape avec difficulté, et constate qu'elle était ouverte. J'avale le fond de grenadine que je recrache immédiatement, dégoutée. Beurk... Ne plus boire de grenadine pure... Le bip est revenu, merde. Je frappe ma tête contre le mur le plus proche.

*biiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiip*

Je me réveille. Hmm.. Plus de bip... Je me sens mal, et me recroqueville sur moi même,par réflexe.
J'entends des bruits de pas. Je suis encore un peu shootée. Merde. La porte bouge. Putain... Je me recroqueville encore plus, cachant mon visage. Je tremble,priant pour que ce ne soit pas une balance qui vienne d'entrée.

" Hé! Ça va?!"

Je ne sais pas qui parle et je m'en fout. Le paquet de médocs et posé sur ma table de chevet, visible. Je suis foutue.

"T'es... T'es qui?"

Et voila, je lance une question banale a l'inconnu qui vient de me parler pour détourner l'attention, me tourne brusquement et attrape ma boite de pilules que je cache ensuite précieusement sous mon oreiller. Je jette un regard apeuré a l'individu. Il ne semble pas menaçant. Bon point. Mauvais point, c'est un mec.

"T'a pas a être ici, tu sais? Est-ce que tu sais ce que c'était mes.. Médicaments?"

Idiote... Je me suis tirée une balle dans le pied...

... Sa race.
Genre. Elle a quoi la fille? Putain, elle a pas l'air bien. En fait. On dirait un cadavre. C'est pas bon ça. C'est pas bon du tout.

_ T'es...T'es qui?

... C'est au moins un tantinet inquiétant si un cadavre te parle non? Genre... Genre que c'est un zombie dans ce cas. Les zombies ne s'inscrivent pas dans les écoles. Pas que je sache. Donc... Donc... Comment je dois réagir, qu'est-ce que je dois faire?! J'ai jamais fais face à un zombie encore moi! Sa peau est vachement blanche. Comme un cachet d'aspirine. Le mot est bien trouvé. Elle vient de regarder ce qui semble être sa table de chevet genre "Merde, pièce à conviction" et c'est des espèces de médocs qu'il semble qu'elle ne voulait pas que je remarque. C'est foutue maintenant.

_ T'a pas a être ici, tu sais? Est-ce que tu sais ce que c'était mes.. Médicaments?

... Ah. Je viens de tilter qu'elle me parlait déjà tout à l'heure et attendait une réponse. Mais... Ça dernière phrase est vraiment bizarre... Est-ce que c'est vraiment des médicaments?

_ T'as commis un crime ou quoi? T'as l'air complétement shootée.

Pire. Elle est flippante avec son regard bizarre de shootée. Limite elle me fais peur. C'est quoi ces médocs qu'elle a pris? Oh putain! Elle s'est VRAIMENT shootée?! Oh non non non! Me dites pas que c'était vraiment pas des médicaments!

_ Oh bordel... Tu... Il faut t'emmener à l'infirmerie tout de suite!

C'est pas bon ça! Si ça se trouve elle va mourir! Même si elle a l'air déjà morte. Nan il faut pas! Je vais l'emmener à l'infirmerie, ouais. Qui est assez loin. Je... Ça ira je vais la porter et courir jusque là bas. Putain si elle clamse sur le chemin! Oh non non non non! Putain je flippe trop! Mais raaaaaah! Faut pas qu'elle crève! J'en tremble tellement je suis dépassé par les événements là! Je suis pas contre de sauver des gens et des VIES mais me faites pas flipper à ce point là quand même! Ça ne va pas, se ressaisir. Je dois être apte à faire face à toutes situations. Finalement je réussie à lever une jambe et ainsi m'approcher d'elle.

L'inconnu me regarde bizarrement, il semble avoir peur. Après tout, c'est compréhensible, je pense pas que voir une fille défoncée soit très rassurant... Je ne dis rien, attendant qu'il réponde quelque chose. Je rêve ou il n'a rien compris? Il me fixe avec un air idiot, sérieux, ça se voit que je suis droguée, mais c'est pas dramatique a ce point. Du moins je l'espère...

"T'as commis un crime ou quoi? T'as l'air complétement shootée."

Un crime? Non. Mais quelque chose de pas forcément autorisé... Je sais pas si on peux considérer ça comme un crime, mais mon interlocuteur ne semble pas comprendre grand chose, et heureusement.
Je ne sais pas quoi répondre. Bah,de toute façon, il ne me laisse pas le temps d'y réfléchir. Je vois a l'expression sur son visage qu'il s’apprête a parler. J'attends et il ne dit rien. Il a l'air paniqué, très paniqué.

"Oh bordel... Tu... Il faut t'emmener à l'infirmerie tout de suite!"

Ce qu'il vient de dire ne me plait pas du tout. Aller a l'infirmerie? Il est malade ou quoi? J'y vais je suis morte. Il comprends que je suis shootée? Et puis qu'est-ce qu'il fout la ce con? En tout cas il semble toujours si paniqué, il me ferait presque rire. Ah! Je vois qui c'est finalement! Kid. Ce mec se prends pour un super héros. Cela explique pourquoi il veux m'emmener a l'infirmerie. Il semble tout chamboulé, c'est amusant, car c'est moi qui devrait l’être. Je suis étonnée lorsqu'il commence a s'approcher de moi. Il n'est pas si peureux, mais je ne sais pas si c'est mieux pour moi que le fait qu'il reste éloigné a trembloter. Il n'a pas de mauvaises attentions, okay, mais je n'accepte as qu'on vienne m'emmerder comme ça, je me drogue si je veux, et en plus, je ne veux pas aller a l'infirmerie.

NE-ME-TOU-CHE-PAS. Pigé? Dégage. Tu n'as rien a faire ici. Oublie ce que t'a vu. Casse toi.

Je lui lance un regard noir. Si il n'a pas compris le message, il est totalement débile ou il le fait exprès. C'est pas possible autrement... Quoique... Je prends une autre pilule que j'avale sans eau en le regardant, l'air de dire "je peux recommencer". Et la,t'a compris? Le bip revient. Emmerdeur,dégage. Putain. Il bouge pas. J'avale une autre pilule. Puis une troisième. Je ne sens plus mes membres,mais je crois comprendre que ma tête vient de percuter le sol. Enfin bon, vu que je ne sens plus rien, c'est pas grave, mais dans mes derniers moments de lucidité j'ai le mauvais pressentiment qu'il va m'amener a l'infirmerie. Il le fait, je le bute.

*biiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiip....*

J'avance vers le cadavre. Je pensais avoir du mal, vu que mes jambes tremblent, mais en fait ça va. Elles avancent toutes seules, comme des grandes. Je fais bien de courir tous les jours moi, je vous aime mes jambes, vous savez? Mais là c'est pas le moment de démontré mon amour à ses jambes que si je ne les avaient pas limite je serais mort. Je pourrais pas être handicapé, ce serait trop catastrophique. Je suis arrivé près d'elle plus vite que prévue. Je commence à me baisser quand elle me rergarde et se met à parler.

_ NE-ME-TOU-CHE-PAS. Pigé? Dégage. Tu n'as rien a faire ici. Oublie ce que t'a vu. Casse toi.

... Ah ouais? Et vas-y que je te jette un regard noir en prime au cas ou t'aurais pas compris que t'étais pas le bienvenue.

_ Toi dégage. T'es complétement stupide. C'est ahurissant comme t'es conne quand même!

Je voulais pas lui dire des trucs dégueu comme ça, mais... Elle m'énerve. Elle m'énerve à un point. A un point ou elle a réussie à balayer complétement ma peur. La colère est immense. Elle est arrivée d'un coup. Ça m'énerve de la regarder. De la voir dans cet état. Dans cet état ou elle s'est mise tout seule. Et elle croit que je vais la laisser se bousiller comme ça? Elle a craquée! La vie il faut la chérir. Pourquoi elle fait ça? Qu'elle satisfaction elle retire à devenir un mort-vivant? En quoi cet état est mieux que la vie?
Elle ouvre sa boite à malheur et fourre ses conneries dans son gosier en me fixant d'un air de défi. J'ai bien envie de la frapper sur le coup. Qu'elle se réveille cette idiote.

_ Et alors quoi? Tu cherche quoi? Tu veux mourir c'est ça?

Quand je dis ça elle en est à la troisième pilule. Je lui rend son regard et ne fait rien. Si je devais faire quelque chose ça lui ferais forcément mal. Je suis tellement écœuré que je ne retiendrais pas ma force et se serait violent. Ou je lui enfoncerais les doigts dans la bouche pour qu'elle me recrache tout ça, ou je lui foutrais un poing dans la gueule. Et je finirais par perdre le calme qui me reste et à lui crier dessus. Et c'est pas ce qu'il faut faire maintenant. Mais je jure que je le lui fouterai mon poing dans sa figure quand elle ira mieux. Oui, quand elle ira mieux. Il fit qu'elle aille mieux.

Elle s’effondre. D'un coup. Je m'y attendais pour le coup. Ça m'arrange aussi. Je vais pouvoir la transporter plus facilement comme ça. Je prend sa boite de "médocs" et la fourre dans la poche avant de mon sweat. Puis j’attrape son bras et la remet assis avant de la placer sur mon dos. Je me lève et sort avec ce poids sur moi. Je fais ce geste pour bien la replacer et m'élance. Je cours dans les couloirs. Si je l’emmène à l'infirmerie elle aura surement des problèmes. Mais je ne peux pas faire autrement.