Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Ven 14 Mar - 0:02
Face à la hargne froide de Vergil, Lola éclate de rire, d’un rire éraillé et acide qui lui fait mal à la gorge, qui trouble la douce tranquillité du matin, elle en pleurerait presque tellement elle rit – elle en a pas le temps, en fait, car bien qu’intense ce rire ne tarde pas à se mourir entre ses lèvres. Vraiment il est drôle. Il la rabrouait pas aussi sèchement y’a à peine une dizaine de minutes, il essaye de faire quoi là au juste ? De l’effrayer, de la recadrer ?
« Le vent qui souffle dans mes centre quatre-vingt onze points de Q.I., vous voulez dire ? corrige-t-elle avec un petit sourire vaniteux. »
Pas qu’elle s’enorgueillit de ce chiffre à la con m’enfin si on la traite de teubé, ce nombre impressionnant demeure tout de même son contre-argument le plus pertinent. Puis si, on dirait pas comme ça mais elle ressent parfois ce besoin de rappeler à ceux qui la fréquentent que malgré ses airs de p’tite racaille à peine lettrée, si elle s’en donnait la peine elle parviendrait même à devenir l’un de ces noms dont on apprend l’œuvre, des années plus tard, à l’école – vu comment elle est partie, néanmoins, au mieux on connaîtra son nom dans le milieu du rap, peut-être même qu’en fumant on écoutera ses punchlines, pas le plus grand grandiose des succès somme toute.
« Bah, moi concrètement j’ai pas à faire gaffe, c’pas moi qui prends si ça s’apprend. »
Elle le regarde même pas en balançant cette bombe comme la plus triviale des banalités – ‘‘Wah m’sieur j’ai fait une rime qui pulse sa mère sans même le vouloir j’suis une ouf !’’, qu’elle ose même renchérir –, tout dans son attitude reflète un grand détachement. Comme si elle exagérait sa désinvolture face aux risques encourus par le prof’ dans le seul but de titiller son exaspération ou son inquiétude – sans doute les deux. Elle le rassurerait bien d’un ‘‘Mais non m’sieur, stressez pas, j’ferai gaffe !’’ gouailleur s’il tentait pas depuis tout à l’heure de s’imposer en tant que détenteur de l’autorité ou une autre connerie du genre.
‘Suffit pas de la sauter pour la dompter.
« Accusations fallacieuses que tout ça, m’sieur, le joint c’est le bien – et on voit bien qu’c’est pas vous qu’avez tout pris in da pussy. Et puis, j’suis déjà mignonne, non ? »
Sourire angélique et haussement de sourcil malicieux ponctuent cette question rhétorique qui se veut débile à souhait – l’humour con, elle y résiste pas.
Après quoi Lola, retrouvant un semblant de sérieux, s’affaire à étirer longuement ses membres engourdis ; veste et tee-shirt remontent quelques instants, le temps de faire craquer bras et épaules, dévoilant l’intérieur de ses cuisses parsemé d’ecchymoses qui commencent à devenir violacées. La fraîcheur matinale parvient étrangement à la sortir de sa torpeur, elle se sentirait presque de s’allonger dans l’herbe pour une belle journée de sereine oisiveté. Sauf qu’elle sait très bien que toute envie de somnoler dans la nature la quittera au moment exact où elle s’effondrera dans la chaleur moelleuse de son lit – ou qu’elle rendra tripes et boyaux au dessus de la cuvette des toilettes, dépendant de sa chance.
« Eh oh, soyez pas insultant, c’est de la beuh, pas du shit. J’fume d’la qualité moi. »
Enfin là elle fume surtout rien du tout, mine de rien ça la crispe – tension qu’elle tente plus ou moins efficacement d’évacuer en trépignant avec acharnement. Ce manque, supportable mais lancinant, lui rappelle ses galères de petite collégienne dont le maigre argent de poche peinait à couvrir la consommation de ganja – elle se souvient encore de comment elle enchaînait rageusement clope sur clope afin d’occuper ses mains qui tremblaient de ne pas tenir un joint, sa gorge qui réclamait la brûlure âcre de l’herbe.
... Comme l’impression qu’une fois terrée dans sa chambre, plutôt que de dormir, elle va s’affairer à combler ce manque en fumant joint sur joint telle une boulimique se gavant sans jamais se lasser de bouffer, bouffer, bouffer. Et après sûrement qu’elle badera au fond de son lit.
« J’imagine que si j’vous demande d’avoir sur vous d’quoi me dépan’ un joint ou deux au cas où j’aurais pas d’quoi faire, vous m’dites d’aller m’faire foutre ? ... Encore que y’a moyen d’faire un deal. Vous vous assurez d’toujours avoir d’la beuh sur vous, j’m’assure d’avoir des capotes en rab. Vu qu’visiblement vous êtes du genre prévoyant. »
Lola y croit pas trop mais après tout, qu’est-ce que ça lui coûte de tenter sa chance ? Au pire des cas elle se fait envoyer promener par un Vergil saoulé par ses conneries – c’qui risque sûrement d’arriver si elle continue de le fixer avec son petit air mutin. Une occasion de plus de se taper une barre quoi.
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Ven 14 Mar - 15:35
L'agacement qui commençait à reprendre le contrôle de Vergil aux derniers mots de Lola devint carrément de la colère lorsque cette dernière lui éclata de rire au nez. L'allemand vit passer sur le visage hâve de la jeune fille l'ombre de l'insolence la plus vive, la plus incontrôlable, et serra les dents, des envies de meurtre lui remontant dans la gorge :
« S'il suffit d'un coup de vent pour disperser ces 191 points de QI, c'est plutôt comme si tu étais une surdouée à temps partiel. Et encore. Vu le niveau de maturité de tes réponse, je dirais même que ta pseudo intelligence déserte à chaque fois que tu ouvres ta gueule. » Répondit l'homme, d'un ton cassant
Il hésita à reprendre une cigarette ; s'il se laissait aller à fumer, il serait encore bloqué là pour un bon moment, à échanger des répliques moqueuses avec l'orpheline. Il ne devait surtout pas rentrer dans son petit jeu puéril de « qui arrivera à faire craquer l'autre en premier », mais il ne pouvait pas non plus déclarer forfait, en claquant la porte au nez de la française. Les méthodes pédagogiques qu'on lui avait enseignées à la fac clignotaient dans un coin de son cerveau, d'une lueur agaçante : le bon prof doit remettre l'élève à sa place, sèchement, mais sans trop, inutile de s'engager dans un bras de fer mental, ça ne ferait que convaincre l'enfant qu'il a touché un point sensible, l'honneur de l'adulte auquel il a affaire. Mais dans les faits, s'il se détournait, il aurait jeté l'éponge, reconnu qu'elle était plus forte que lui à ce petit jeu stupide. La réponse suivante de Lola lui glaça le sang et il braqua sur l'adolescente un regard agressif, le genre de regard qui te promet que si tu parles, tu finiras au fond de la Tamise avec un bloc de béton attaché à tes chevilles :
« Mais si tu l'ouvres, on te surveillera de plus près ensuite. Surtout si j'indique que tu m'as provoqué. Finies, les heures de liberté, et plus de joints non plus. Moriarty ne supportera probablement pas d'avoir un tel danger dans les parages. »
Et naturellement, il fallait qu'elle en rajoute. Pourquoi fallait-il toujours que les adolescents ouvrent leur petite gueule le plus largement possible, pour retrouver dans leur sacro-sainte insolence un peu de conscience d'eux-mêmes ? Vergil ne se rappelait pas avoir été aussi tête à claques pendant sa propre adolescence ; il se contentait d'écouter du rock dans son coin, braquant sur le reste de l'univers un regard suprêmement mesquin. Donc, pourquoi, parmi toutes les chairs jeunes disponibles, avait-il fallu qu'il tombe sur la chieuse de service ?
« Épargne-moi la défense ridicule de la merde que tu fumes ; si tu penses que c'est bien, ça ne regarde que toi. »
L'homme ignora royalement le « Et puis, j'suis déjà mignonne, non ? », parce qu'à cet instant précis, il aurait plutôt penché pour l'hypothèse que l'abrutissement juvénile te déforme et te rend aussi dégueulasse que les paroles que tu vomis. Il se demanda surtout ce qu'il avait trouvé à Lola dans l'extase, et ce qu'il ne reconnaissait plus en elle maintenant. Il faut croire qu'une femme mignonne, c'est une femme qui tient sa langue, prude, et seulement langoureuse lorsqu'un homme se pointe. The Little Angel of the house, comme aurait dit cette tarée de Virginia Woolf :
« Ou on fait le contraire. Je prends les capotes, et toi, tu te contentes d'écarter les cuisses. »
Son regard sombre prévenait la jeune fille qu'il ne fallait pas discuter là-dessus. Il imaginait déjà la tête du conseil correctionnel s'il apprenait un jour toute l'ampleur de l'histoire, un prof' qui saute une gamine, c'est grave, déjà, mais un prof' qui se balade avec dans la poche de quoi défoncer ladite jeune fille après coup, ça pouvait lui valoir cinq années de plus de tôle. Détournement de mineures, allait gueuler le conseil, avant de rajouter qu'il devait probablement profiter d'elles lorsqu'elles étaient déchirées. Et baiser Lola ne valait certainement pas ces cinq années de prison qui planeraient gracieusement au dessus de sa tête, à chaque fois qu'il sortirait le matos de sa veste. Mais Vergil reconnut qu'il avait déjà pris son nouveau sort pour acquis. Il trouverait juste le moyen de clore pour de bon les lèvres de Lola, parce qu'une nana qui pense qu'elle a autant de couilles qu'un mec, ça a tout d'un tue l'amour tenace.
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Ven 14 Mar - 22:03
Ah mais il s’accroche, le nazi de la Wammy’s House. Pas mal. Lola en éprouve à la fois un début d’exaspération – jamais été du genre patient, cette meuf, ses adversaires elle les préfère quand il se grouillent de péter leur câble – et un amusement intarissable. Encore un truc de génie compliqué dans sa tête, ça, de désirer un opposant à sa hauteur pour finalement le regretter une fois trouvé, par peur de perdre son statut de best of the best. ... Vergil pourra dire ce qu’il veut, et la blonde se prétendre teubé autant qu’elle veut, il n’empêche que son esprit fonctionne finalement selon les mécanismes trop complexes d’une intelligence supérieure pour peu qu’on la stimule.
« Soyez pas hargneux comme ça, c’est mauvais pour le cœur – vas-y t’as raison, dis encore de la merde – et à vot’ place, à votre âge surtout, j’ferais gaffe à ces trucs-là. »
Le regard que Vergil darde sur elle à l’entente de sa menace faussement innocente la fait frissonner – grande gueule, certes, flippée face à cet air de psychopathe quand même – et elle s’apprête déjà à rétorquer, nonchalante et moqueuse comme toujours, lorsque...
Quoi ?
Il est sérieux là ?
... Mais il se prend pour qui, là, à la narguer comme ça ? On va s’calmer tout de suite, elle joue pas selon ces règles pétées. Elle déconne sur beaucoup de trucs – sur son côté salope, sur son manque de culture évident, sur son absence de seins, même sur la mort de sa mère si t’y tiens, gros – mais pas sur ça. On touche pas à sa liberté – ou à son amour de la beuh, m’au final ses deux concepts se rejoignent tellement qu’on les distingue même plus. Ses poings se serrent dangereusement, déjà prêts à s’abattre sur l’impudent qui ose la défier avec tant de culot ; son corps tout entier se tend de la même manière qu’une lionne se préparant à bondir sur la gazelle dont elle compte faire son quatre heures. Les tremblements d’une colère tout juste réprimée sur sa peau pâle ravivent, l’espace d’un instant, les souvenirs de sa préadolescence dans le 18e, de ces nuits perdues à tabasser des gars parce qu’ils ont eu le malheur de la regarder de travers – rien de plus qu’une excuse foireuse pour exprimer un peu de cette agressivité primaire, animale, qu’on muselle pour mieux vivre en société.
A défaut d’lui coller une bonne droite, Lola saisit le prof’ par le col de sa chemise et l’attire vers elle.
« Ça très honnêtement m’sieur j’vous l’conseille pas. Jouez pas à ça avec moi, vous imaginez même pas comment j’pourrais réagir. Si vous avez le malheur de foutre ma tranquillité en l’air... Faites gaffe. P’tit conseil comme ça entre potes. »
Fixant implacablement la figure de son vis-à-vis, ses prunelles, au vert à présent acide, corrosif, étincellent d’une rage froide. Une de ces rages qui se taisent mais dont on entend les grognements sourds dans le silence. En cet instant précis, la jeune fille a tout du félin courroucé qui feule et qui griffe. ... Putain. Qu’on lui donne un joint, vite, avant qu’elle déconne sévère. Aussi soudainement qu’elle l’a tiré vers elle, elle le lâche, furieuse toujours mais un peu effrayée aussi – bordel, on parle de son prof’, un prof’ baraqué en plus, qui s’il le voulait lui briserait tous les os un par un avant de lui ravager sauvagement l’intérieur.
« J’me contenterai de rien du tout, j’suis pas vot’ pute perso’., crache-t-elle d’une voix acerbe. »
Si Lola a le don d’exaspérer Vergil, il s’avère que ce dernier sait très bien quoi dire pour inspirer la colère dans cette âme à la sensibilité endormie – la capacité à ressentir gâtée par l’étourdissement exquis de l’herbe. Frustrant, cet élan de violence inopiné qu’il faut réprimer, elle s’en mord les lèvres avec acharnement la p’tite, jusqu’à...
« Putain d’ta race, bougonne-t-elle en français. »
Jusqu’à en raviver les plaies béantes, ouais. Aïe. Le goût ferreux du sang dans sa bouche titille la nausée légère qu’elle ignore aisément depuis tout à l’heure et elle se retrouve à cracher par terre comme une dégueulasse – plutôt ça que de béger aux pieds de l’Allemand.
« J’crois qu’en fait j’vous préfère quand vous m’bourrinez. Ça vous empêche d’être un connard fini. »
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Sam 15 Mar - 14:20
Mais c'est qu'elle essaye de rétorquer, la petite chose à l'abondante chevelure. Vergil haussa un sourcil :
« C'est tout ce à quoi tu es réduite ? Insulter un homme sur ses problèmes cardiaques ? Même un chiourme qui voudrait une sucette se débrouillerait mieux. »
Viktor avait toujours eu le goût de l'affrontement ; ça avait probablement à voir avec son caractère sanguin de fou furieux. Il n'avait jamais pu supporter que quelqu'un, surtout une personne qu'il considérait comme techniquement inférieure, puisse s'opposer à lui, comme si c'était, non seulement, une atteinte à son intégrité d'adulte, mais aussi une constante remise en question de ses capacités. L'affrontement avec Lola était purement subjectif ; il n'était pas habitué à ce que les jeunes surdoués de cet orphelinat puissent développer un raisonnement mature et fondé sur la logique – trop de gamins abrutis dans son ancien lycée lui avaient même fait perdre de vue leurs capacités. La blonde lui démontrait, une nouvelle fois, l'inutilité de ce bras de fer qu'ils engageaient, mais, étrangement, il trouvait le plus grand mal à s'en détacher. D'un côté, se faire élever au rang de tyran dégueulasse avait un charme lugubre qui n'était pas pour lui déplaire. Hitler avait sûrement dû ressentir la même chose lorsque les allemands l'avaient porté en triomphe. L'auto consécration dans l'écrasante colère de l'autre, tout en ne remarquant que la vanité, le manque de profondeur, de l'ennemi. Lorsque la jeune fille l'attrapa par le col pour le tirer vers elle, Vergil resta d'un calme glacé. Comme si c'était elle qui avait le plus à perdre dans cette histoire. D'accord, le joint pouvait très bien lui apporter le repos de l'âme, mais ça signifiait qu'ils seraient tous deux perdants si ça venait à se savoir. Un bon point. Et il l'avait probablement cherché ; les contacts physiques poussés en entraînent toujours d'autres, l'effet boule de neige ne semblait plus avoir de fin.
« Nuance, gamine. J'ai dit que c'est ce qui arriverait, probablement, si jamais tu ouvres ta gueule. Mais si tu veux une vraie raison pour me foutre en colère, ça peut s'arranger. »
Pour calmer les gamins hystériques, il y avait une méthode radicale. Vergil hésita quelques instants à s'en servir ; ils étaient toujours bloqués au milieu de la cour, les élèves discutaient paisiblement au loin, mais les arguments de Lola glissaient étrangement sur lui. Comment veux-tu te foutre en colère lorsque l'autre utilise un langage aussi puéril ? « entre potes » ? Hilarant. Lola, le petit caïd de la wh.
L'allemand attrapa la française par le poignet, sans même songer au regard perplexe que lui lanceraient les quelques élèves qui traînaient dehors à cette heure-là. Il retourna Lola dos à lui, et lui claqua le cul. Si elle ne comptait lui opposer que des arguments de bébé hystérique, et son charabia français, cela signifiait qu'il était temps – et même obligatoire - d'utiliser la méthode la plus primaire qui soit pour mettre fin à son immaturité galopante :
« Et maintenant t'arrêtes de faire ta grande gueule, et tu vas te coucher. Je t'ai pas baisée pour avoir le droit d'accéder à tes convictions de gamine qui se croit tout permis. Si j'avais voulu ça, j'aurais plutôt choisi quelqu'un avec un peu plus de jugeote. »
Il la relâcha, sentant le regard des gamines qui avaient entendu la fessée résonner peser sur son odieuse personne. L'homme darda sur elles un œil menaçant, les mettant au défi de retenir cet agression matinale dans leur petit ciboulot. Ach, si vous parlez, mes petites, le grand méchant nazi va vous bouffer demain matin avec son porridge. Ça lui fit remarquer qu'il commençait à avoir sérieusement la dalle ; la tension avait toujours eu l'extrême désavantage d'éveiller en lui un appétit démentiel. Avec un peu de chance, Lola aurait la jugeote d'abandonner les hostilités avant que la cantine ne ferme ses portes, et il pourrait se taper un bon petit bol de flocons d'avoine, avec une bonne dizaine de tartines. La française fume, lui, bouffe comme quatre. Chacun ses vices, hein.
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Dim 16 Mar - 14:52
« J’vous signale que niveau insultes vous êtes pas super créatif non plus à m’tacler sur ma débilité supposée depuis tout à l’heure. J’m’abaisse à vot’ niveau, me le reprocher c’est un peu l’hôpital qui s’fout de la charité quand même. »
Pas drôle. Il veut pas un peu complexer sur son âge, le gars ? Certains de ses potes du tierquar avaient beau traîner tout juste vingt ans de vie derrière eux, ils se prétendaient déjà accablés d’une vieillesse tintinnabulant en eux telles les lugubres cloches d’une église. Il suffisait alors d’un ‘‘Ah, mais t’as une ride là non ?’’ pour les enrager ou, encore mieux, le foutre le complexe. Alors pourquoi il réagit pas, lui là, le vieux con qui prétend lui apprendre la vie – et les déclinaisons ? Malgré toute la patience du monde, Lola commence à s’irriter façon troll de l’internet que personne ne calcule. Comme une sale gamine, ouais – le génie ça fait pas tout et la maturité s’acquiert dans l’expérience de la vie, pas dans les points de Q.I. Sa puérilité ne confère cependant pas le droit à Vergil de la traîner de gamine – de la même manière qu’on a pas tous le culot d’un Churchill torché faisant remarquer à une sale meuf moralisatrice qu’elle, demain, elle se réveillera le lendemain avec la même tronche dégueulasse.
Prof’ ou pas prof’, on s’permet pas de lui parler comme à la première merde venue. Paye ton respect, gros.
Voilà plus ou moins ce que la Française s’apprête à rétorquer lorsque le principal concerné, après l’avoir saisi par le poignet, l’oblige à se retourner pour...
Bordel.
La douleur brève mais cinglante que la fessée lui inflige semble remonter jusqu’à ses joues creuses qui s’empourprent vivement – autant au moins que la sensation au bas mot déplaisante sur son cul, elle ressent nettement la chaleur brûlante de tout le sang qui afflue sous la peau blafarde de son visage. Elle n’a jamais rien vécu d’aussi humiliant. Cet homme auquel elle s’est déjà donnée de la plus basse des manières, qui ose en plus la réduire au statut de gosse sous le regard interloqué de sales petites putes auxquelles elle hurlerait volontiers de baisser les yeux si elles veulent pas prendre son poing sur la gueule. Elle se défait violemment de la poigne de l’Allemand et fait tout aussi violemment volte-face, accablant le coupable de ses yeux brûlant d’une ire si intense qu’elle en tressaille de son être tout entier.
« Espèce de... »
Bloqué. Le flux des insultes qui naissent dans son esprit révolté, bloqué. Se tenir devant lui, le fusiller du regard – malgré la honte qui ravive sa pâleur maladive –, elle le fait sans aucun problème, alors pourquoi les mots ne sortent pas ? ... Parce qu’elle a honte, putain, tellement honte de se faire traiter comme une enfant par celui qui, un peu avant, la sautait comme une femme.
Bien sûr qu’on lui a déjà claqué le cul. Avec les mecs qu’elle fréquentait, quand t’as le malheur d’être une meuf, on s’permet à peu près tout et n’importe quoi avec toi. Elle a toujours supporté ce geste obscène avec une indifférence désabusée – ‘‘Bah ouais gros vas-y fais-toi plais’, tu veux qu’j’te dise quoi ?’’ – parce après tout, nul besoin de déclarer une guerre de plus dans un milieu qui enchaîne les batailles façon production à la chaîne par pur plaisir de taper sur quelque chose. Un mec à cet âge-là, c’est con, on peut rien y faire. Boys will be boys, c’est comme ça qu’on dit dans ce pays pluvieux, non ?
« Plus jamais vous faites ça, m’sieur, fulmine-t-elle d’une voix vibrante d’une colère exacerbée par cette impression cuisante qu’on vient de bafouer son honneur. Plus. Jamais. Pourquoi vous m’avez baisée, ça n’regarde que vous et j’vais pas fermer ma gueule sous prétexte que vous voulez vos meufs dociles et silencieuses. Parce que dans c’cas-là c’qu’il vous faut m’sieur c’est une pute. »
Ou une gosse – sauf que là ça devient glauque. Parce que c’est exactement comme ça qu’elle se sent en ce moment-même, Lola, comme une gosse. Ça la révolte au plus haut point, tellement qu’elle s’en trouve réduite à une pauvre conne rougissante de honte, assez lucide pour refréner le poing qu’elle aurait foutu à n’importe quel autre enculé mais trop scandalisée pour riposter avec sa virtuosité effrontée coutumière.
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Mar 18 Mar - 13:02
«...T'abaisser à mon niveau ? Permets moi d'en rire, c'est hilarant. »
Viktor éclata d'un rire bref, sec comme un aboiement. Remarque, elle n'avait pas tout à fait tort, leur bras de fer n'avait rien du combat que l'on peut retrouver dans les réunions mondaines, mêlées sordides d'universitaires assoiffés de sang ; ils se comportaient tous deux comme des gamins désireux de se houspiller, et, face à la lumière crûe qui éclairait le tableau, Vergil se demanda une nouvelle fois pourquoi il ne partait pas, tout simplement, si Lola l'agaçait autant. Mais c'était surtout parce que ces petits jeux puérils, cette froideur, correspondaient à une partie de sa personnalité qu'il avait longtemps repoussée dans un coin, par souci d'être le plus uniforme, routinier, possible. D'habitude, la sentence s'abattait, il ne discutait pas. Argumenter de façon aussi immature, c'était une habitude qui appartenait aux adolescents, le désir d'ouvrir sa gueule, juste pour le principe, et aussi pour montrer que l'on peut aussi se dresser de toute sa stature face à l'adversité. C'était un comportement que Vergil ne cautionnait pas, mais dans lequel, il pouvait se retrouver, un peu. Il se doutait, qu'au fond, Lola ne devait pas être bien sérieuse ; elle pouvait lui faire vraiment mal – elle en était capable – mais elle se restreignait volontairement à des piques de gamin. Rien de bien offensif, mais malgré tout, ça restait agaçant. Un peu comme si une main sournoise frottait une tranche de citron sur des plaies suppurantes. On peut vivre avec la démangeaison, mais elle irrite, elle pique la chair, jusqu'à la dévorer.
Lorsque la jeune fille se fut dégagée de sa poigne, Viktor lui adressa un mince rictus de satisfaction. enfin, le silence, mais ledit instant de plénitude arriva brusquement à son terme, lorsque l'enfant blonde ébouriffa sa crinière pour feuler de plus belle. L'homme posa sur elle un regard perplexe, ne comprenant pas pourquoi elle revenait encore à la charge. D'habitude, les fessés, ça te calme direct un môme hurlant, mais il fallait croire que, justement, Lola n'était pas qu'une gosse. Et c'était ce genre de détails que Vergil avait tendance à oublier très facilement, parce que ça arrangeait bien sa conscience, de traiter ces adolescents en grands enfants :
« Je te traite comme tu mérites d'être traitée, prends t'en à toi-même. Je traite en gamins les gamines qui se permettent de toujours parler de travers. Et estimes toi heureuse que je ne te traite pas en pute, justement. Tu disais que tu t'abaisses à mon niveau, Lola ? En réalité, c'est moi que tu rabaisses, en te comportant en petite fille capricieuse et manipulatrice. Je n'ai pas besoin d'une pute... »
Sur ces mots-là, Viktor se permit un sourire glacial :
«..J'ai besoin d'une fille qui ne l'ouvre pas à tort et à travers, sous prétexte qu'elle fait partie d'une classe snobinarde d'élus. J'ai besoin d'une fille qui réfléchisse un minimum avant de parler. T'es une word, c'est ça, Lola ? Oh, j'ai connu des idiots qui avaient plus de tact et de jugeote que ça. Ce n'est visiblement pas parce qu'on a une intelligence supérieure et une certaine aisance orale, qu'on est forcément doué du don de la parole. Tu es l'exemple vivant de c'que je raconte. »
S'il avait besoin d'une pute, il n'aurait pas cédé aussi facilement. Ces femelles-là représentaient tout ce que Viktor n'aimait pas dans la femme, et peut-être qu'il n'appréciait pas énormément Lola, mais il lui reconnaissait tout de même certaines qualités, comme la ténacité, ou une langueur qui appartiendrait plus à une nymphette qu'à une salope – savoir séduire sans avoir l'air d'y toucher, bien peu de gens en sont capables. Même cette façon incessante de guerroyer contre lui n'était pas sans lui déplaire. Comment aurait-il pu se sentir bien dans la mollesse insouciante d'une autre femme, une femme qui aurait été incapable de lui répondre ? C'était parfaitement contradictoire, mais l'allemand préférait de loin qu'on lui fasse la guerre. Comme la femme Merteuil à laquelle Valmont vient finalement offrir son allégeance, Viktor aurait pu tordre son visage et répondre « it's war. » Il faut dire que ce n'est que dans l'affrontement que son regard s'allume, qu'il vibre enfin de cette lueur commune aux autres mortels et que les plus poétiques d'entre nous appelleront la vie. Viktor avait dû être un guerrier sanguinaire dans une autre existence, parce que d'une main, il tente d'apaiser – la fameuse fessée -, mais de l'autre, il provoque – déjà, il sort une autre cigarette, une autre atteinte à sa tranquillité. Et, aussi insidieux qu'une tentacule, le désir revint coller de près sa colère. La soif de stupre et de sang des combattants les plus acharnés, la contradiction la plus tortueuse : détester et désirer, après tout, ces mots étaient proches dans leur sonorité agressive, et malgré tout, soyeuse, donnant l'envie tenace d'accomplir les deux choses, l'une après l'autre, ou en même temps. L'allemand alluma sa cigarette, en exhala profondément la fumée, et tourna vers Lola son visage figé :
« Effectivement. Au moins quand je te baise, tu la fermes. »
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Mer 19 Mar - 20:52
Ah ouais quand même.
Lola entend très distinctement, comme s’ils les entouraient, les éclats de rire ébahis de ses potes – oh putain il t’a mis trop cher là ! –, l’ambiance lui évoque étrangement celle d’une rap battle. Même tension dans les mots malgré la légèreté de ton et d’esprit, même désir coriace mais pas trop méchant d’accabler l’autre jusqu’à la soumission la plus totale, rien que par les mots. On fait l’tout sans malveillance, sans véritable envie de blesser l’adversaire, juste la hargne qu’il faut pour lui défoncer verbalement sa rage. La musicalité, la poésie dans la vulgarité manquent, c’est vrai, mais le sentiment et l’intensité y sont. Ils s’affrontent pareil, seuls le cadre et le registre diffèrent – pas besoin de se trouver dans un ghetto insalubre accompagné de tes soss pour mettre K.O. Sauf qu’en l’occurrence, c’est elle qui se bouffe un K.O. assez puissant en fait.
... C’est chaud.
Il paraît que quand on sermonne un gosse, ce dernier tremble d’un amalgame suprêmement frustrant de honte et de colère. En tout cas elle le sent comme ça, elle, génie à la maturité fluctuante indigné – outré – de ce sous-ton paternaliste dans les répliques cinglantes de Vergil. On l’a pas engueulée depuis des années – sa propre mère a fini par y renoncer –, elle conçoit même pas qu’on puisse se permettre de la réduire à l’état de ‘‘petite fille capricieuse et manipulatrice’’. Pourtant quelque chose en elle, sûrement une subsistance distraite, assoupie, de son génie, se reconnaît dans ces affirmations. Pourquoi tu cherches l’embrouille, Lola, contente-toi de rétorquer un ‘‘Ouais ok.’’ indifférent, pourquoi tu te compliques la vie, pourquoi tu fais la gamine ? C’est vrai quoi, au bout de dix-sept ans elle commence à se connaître, sur le moment ça l’enrage et elle s’emporte ; elle rumine ça dans son coin le temps de deux journées ou trois, à grands coups de ‘‘Ah mais quel bâtard.’’ et de ‘‘J’vais tellement lui marave la gueule la prochaine fois.’’ ; elle oublie tout et retrouve son grand ennemi de la veille comme s’il y avait jamais eu de prise de tête. Ça se passera pas autrement avec lui : elle va rétorquer inlassablement, le maudire silencieusement pour à peine quelques jours pour finalement se faufiler dans sa chambre la nuit pour réclamer du cul.
Alors c’est quoi l’intérêt, hein ?
« Capricieuse et manipulatrice ? Vous êtes sérieux là ? La sénilité c’est pas encore d’votre âge pourtant. Hitler il tuait peut-être des Juifs avec beaucoup d’brio mais quand même faudrait penser à sortir de son trip tyranico-machiste un peu. C’pas parce que j’ai les couilles d’vous dire les choses comme j’les pense, moi, que j’suis une sale merdeuse. »
Parce que sinon quel intérêt à tout ça ?
Conclure du cul par une envie sauvage et impitoyable de se bouffer la gueule, ça vaut déjà largement mieux que de se quitter sans même feindre d’espérer revoir l’autre un jour . Y’a un truc. Pas forcément un truc magique à la Titanic, pas besoin non plus d’une touche hollywoodienne à la niaiserie gerbante. Juste un truc, ce truc qui distingue une baise satisfaisante mais automatique d’une bonne baise. C’est ça qui la retient ici, à emmerder Vergil plutôt que de fumer un gros joint de beuh dans l’obscurité de sa chambre.
« Moi j’suis là pour coucher, pas pour flatter votre ego de mâle dominant ; vous prenez la meuf vous prenez la grande gueule qui va avec. Pour quelqu’un qui m’traite de gamine depuis tout à l’heure j’vous trouve un chouïa pourri-gâté sur les bords. »
Et même si les rougeurs de la honte réchauffent son teint coutumièrement blafard, elle s’efforce de jauger son aîné d’un regard fier et infaillible – le reflet de ces âmes farouches qui ne cèdent devant rien, plus par orgueil que par réelle conviction. On dit parfois les Françaises caractérielles – on aime leur prêter cet exotisme d’élégance dans l’indocilité – et Lola saurait pas trop dire si c’est vrai ou pas, m’en tout cas l’Allemand va devoir comprendre qu’elle a rien d’une gentille petite aryenne obéissante.
Bah d’ailleurs.
Agile et preste, la blonde se dresse sur la pointe de pieds, lui subtilise sa clope et s’empresse de la caler entre ses lèvres, le tout en le narguant de son sourire plein d’une effronterie caustique. Elle enchaîne quelques conséquentes bouffées dont elle recrache ensuite la fumée à la figure de son vis-à-vis.
« Quand j’fume aussi. »
Son sourire s’élargit, semblant même piqueter ses prunelles de lueurs taquines – brusquement repassée de la lionne outrée à la chatte nonchalamment joueuse, pas rancunière pour un sou, cette Lola. Parce qu’elle tient à la fois du fauve acharné qui s’opiniâtre à défendre son honneur et du félin alangui qui ne demande qu’à jouer.
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Jeu 20 Mar - 19:42
Il l'attendait au tournant, ce petit clin d’œil à ses origines. Quand ils voyaient son caractère de merde, les gens ne pouvaient jamais s'empêcher de faire le rapprochement avec le plus grand tyran qu'avait connu l'Allemagne. Mais Vergil s'estimait au moins heureux que Lola ne l'ait pas directement lié à l'odieux nazi. Oh, une référence, c'était déjà bien assez ; il avait grandi avec cette honte de la victoire nazie, tous ses pairs en étaient encore alourdis, assommés. C'est ça, gamine, montre que t'as de la culture. Et Viktor songea directement à placer au prochain partiel une analyse approfondie de Mein Kampf, autant pour apprendre à l'autre petite tarlouze de Mello le vrai comportement d'un dictateur, que pour montrer à Lola que Hitler, c'était quand même un peu plus que juste de la tyrannie. Viktor éclata de nouveau de rire, mais plus froidement, comme s'il se retenait de vraiment montrer son amusement :
« Et c'est toi qui oses venir me parler de franchise ? Ne confonds pas honnêteté et impulsivité ; ce s'rait une erreur de t'élever à ce point. La chute te brisera les os, quand tu t'apercevras à quel point tu te surestimes. »
Surtout si c'était seulement pour le tacler sur son âge, allons, fillette, tu peux faire mieux que mettre en valeur un argument que nous savons tous deux vain ; Vergil se fendit d'un sourire moqueur :
« Et c'est justement parce qu'Hitler a instauré un système de dictature unique en son genre, que je suis capable aujourd'hui de te parler sans avoir envie de te foutre une balle dans la tête pour ton insolence. On en a gazé pour moins que ça, chez nous, petite conne. »
Quoi, il aurait dû se sentir vexé, honteux d'avoir eu un tel tyran dans son pays ? En guise de parade, il aurait au moins pu invoquer Pétain, et conseiller à la jeune fille de suivre l'exemple de ce gentil petit collabo' puisqu'elle tenait tant que ça à étaler sa science de petite surdouée. La soumission à l'ennemi teuton, ça avait toujours été dans les gênes des français, remarqua-t-il, en se passant en revue les multiples invasions qu'avait subi le franc pays depuis le début de la civilisation occidentale. La discussion ne manquait de toute façon pas d'enfiévrer son sang de barbare, et l'allemand se pencha légèrement vers Lola, lorsqu'elle lui vola sa clope :
« Je trouve ça plutôt osé de ta part, que tu trouves encore le moyen de répliquer, comme si tu avais des droits autres que ceux d'une simple élève face à son professeur. Enfin. Je suppose que les attentions dont j'ai fait preuve tout à l'heure à ton égard ont dû flatter ton petit goût de la décadence. On est quittes, dans ce cas. »
Et comme pour bien montrer qu'au fond, il s'en foutait, il sortit une nouvelle clope de son paquet, avant de la planter au coin de ses lèvres tordues de ce rictus si particulier, la moue du guerrier qui ne prend son pied qu'au sein des batailles les plus sanglantes. Peut-être qu'il ne regrettait pas énormément d'avoir pris Lola de cette façon, au final ; ça lui permettrait d'avoir un adversaire auquel se confronter au quotidien, lorsque l'abrutissement des autres élèves embraserait son ego. L'ennemi bloqué au cœur même de ses draps, tremblant de jouissance, mais aussi de colère, et levant vers lui un regard aussi acide que ses lèvres seraient fiévreuses. Il ne voulait plus de ces femmes ramollies par une existence routinière, des femelles qui seraient seulement capables de gémir au paroxysme de l'extase, d'une voix qui lui donnerait envie de leur mettre des claques pour les faire taire. Il désirait quelqu'un qui serait aussi sauvage que lui, une personne démentiellement agressive, à l'humour corrosif. Une femme qui le rendrait non seulement fou de désir, mais aussi de colère, bâtissant un équilibre délicat dans sa personnalité empressée. Oh, bien sûr, il prendrait plaisir à déchirer Lola de l'intérieur, pour ensuite l'entendre lâcher ses piques primaires d'une voix nonchalantes. Il la haïrait, parfois, d'être aussi bête, mais il ne l'en désirerait que plus, pour sa ténacité et son bagout qui lui semblaient immortels. Peut-être qu'il enviait les adolescents qui étaient aussi pleins dans leur existence, décidés à brûler jusqu'au bout, même devant le plus dur des remparts.
Mais reconnaître que Lola lui donnait du fil à retordre, maintenant qu'elle avait les clés de son pieu en main ? Jamais. Ne jamais baisser les yeux face à l'ennemi, aussi jeune et séduisant qu'il soit. Toujours écraser, détester, mordre. C'était ça, la clé de l'existence, du feu sacré qui embrasait son esprit, lorsqu'un élève osait élever la voix. La jouissance dans la colère, le désir fiévreux, tout ne formait plus qu'un seul élément : la rage de s'imposer, d'une manière, ou d'une autre.
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Sam 22 Mar - 1:12
Un mince sourire incrédule, voilà tout ce que Lola daigne répondre à la morale fallacieuse de son interlocuteur. ‘‘La chute te brisera les os, quand tu t'apercevras à quel point tu te surestimes’’, allez faîtes-moi rire. Première fois de sa vie qu’on lui reproche, à elle, de se surestimer, ouais, à elle là qui s’amuse jamais autant que quand elle se fait plus conne qu’elle ne l’est réellement – sûrement parce que ça saoule son entourage comme rien d’autre. Un mince sourire incrédule tel un ‘‘Ouais ouais, cause toujours tu m’intéresses...’’ – cette morale recyclable à l’infini dont les adultes usent et abusent ne mérite pas mieux, rien de plus risible et de plus exaspérant à la fois qu’un aîné condescendant prétendant t’apprendre la vie, à toi pauvre jeune abruti et débauché.
« Etant donné qu’vous supportez visiblement pas la moindre critique, c’est pas plutôt vous qui surestimez ? Après j’comprends hein, rien d’plus gratifiant que de martyriser des génies orphelins déjà pas bien dans leur tête, ajoute-t-elle tout de même – c’est plus fort qu’elle – d’une voix hautaine. »
Ses yeux verts, jaugeant Vergil avec une indifférence au sous-ton moqueur – ces contemplations inexpressives dont on perçoit inexplicablement les rieuses intentions –, se plissent d’agacement à l’entente de ce qui suit. Face à qui que ce soit d’autre elle élèverait déjà la voix – Une seconde là sale fils de pute, c’qui qu’tu traites de p’tite conne ? Ouais parce que d’jà j’suis grande puis euh ta gueule en fait. Pas face à lui, cependant, parce qu’en soi il a pas tort ; impossible de nier que comparée à un prof’ diplômé, génie ou pas, elle a rien d’un Einstein. Encore moins quand tu sèches intensément tous tes cours depuis trois ans. Pas cool, ça, de la tailler à un level intellectuel qu’elle a pas les moyens de suivre. Vicieux.
« Ah parce que savoir que si vous m’tuez vous finissez au shtar ça vous suffit pas ? »
Qu’il commence pas à lui parler de ‘‘crime parfait’’, dans un orphelinat qui produit des détectives à la chaîne – tous dressés pour renifler frénétiquement à la suite des plus grands criminels – ces deux mots n’évoquent rien de plus qu’un mythe de séries américaines auquel personne ne croit. Le crime parfait, c’est le Père Noël de la Wammy’s House en fait.
« En même temps après Auschwitz, la gestapo, tout ça, j’imagine que vous l’trou ça vous fait ni chaud ni froid. »
N’empêche qu’au cas où – des fois que l’officier SS pèterait un câble et qu'il la tuerait pour de vrai –, Lola élabore déjà un plan. Il lui suffirait de rédiger une lettre – ou de tenir un journal pour plus de crédibilité – dans laquelle elle accuserait le bonhomme de l’avoir violée, de cacher ça quelque part où la police le trouverait aisément ; il faudrait aussi prévoir quelques témoins – rien de très compliqué... Petite vengeance posthume sans prétention, question de faire chier Vergil jusqu’au bout, qui n’exige pas de réflexion trop poussée – à force de vivre dans l’illégalité, la fomentation de ces plans foireux mais cauteleux en réaction à une menace ressentie en permanence bien que souvent chimérique devient naturelle.
Un génie défoncé vingt-quatre heures sur vingt-quatre est un génie paranoïaque.
« C’qu’il va bien falloir vous mettre dans la tête, m’sieur – du bout de l’index elle lui tapote narquoisement le front –, c’est qu’moi à partir du moment où vous m’sautez j’suis plus votre élève. Ça veut pas dire qu’vous devez me mettre des bêtes de notes ou m’couvrir face aux autres profs – encore que si ça vous fait plaisir, vous gênez surtout pas –, mais faut pas compter sur moi pour jouer les p’tites collégiennes dociles au pieu. Faut arrêter d’passer ses nuits sur YouPorn à s’toucher la nouille m’sieur. »
La blonde conclut cette tirade – déclamée au rythme des lattes tirées sur sa cigarette – par un haussement de sourcil telle une question tacitement posée, un ‘‘C’est compris ?’’ de mafieux qui établit les termes d’un quelconque contrat criminel.
« En dehors des cours j’vous dois absolument rien. »
Inopinément elle l’attrape par le col, le tire vers elle et capture ses lèvres en un baiser succinct mais vif qu’elle ponctue ensuite d’un sourire railleur. Que quelqu’un l’ait vue en passant, elle s’en fout le plus totalement du monde, elle espère même que quelqu’un est passé, que l’Allemand se prenne un coup de pression. Le regard pétillant d’une espièglerie caustique, elle joue avec le feu et n’attend que le moment où la flamme lui calcinera la peau.
« Vous voyez ? En dehors des cours j’fais c’que je veux. »
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Dim 23 Mar - 21:16
Le teuton se contenta de serrer les dents ; cette fois-ci, son agacement se transformait en une rage froide, qui s'accrochait fermement à ses entrailles. S'il s'écoutait, il étranglerait Lola sur le champ – mais ces derniers temps, il s'était déjà trop écouté. Et ça ne lui avait toujours pas porté bonheur -, juste pour avoir l'audace de toujours revenir à la charge, comme si ce n'était pas un génie indomptable qui sommeillait sous sa crinière blonde, mais un esprit qui... qui, et bien, lui rappelait cette atroce chanson de Nirvana, Smells like Teen Spirit. Tel le refrain absolument redondant et tenace, Lola suivait les préceptes de son âge pour heurter la résistance de Vergil. Absolument têtue, la môme. Viktor se demanda s'il n'avait pas demandé ce super poste de prof dans cet orphelinat précisément parce qu'il se doutait qu'il allait tomber sur des cas un peu moins difficiles à manipuler, et bien plus agressifs, que les adolescents qu'il avait croisé avant. Si c'était ça – un côté secrètement masochiste ? -, il ne pouvait s'en prendre qu'à lui-même. Tirant un peu plus nerveusement sur sa clope, l'allemand posa un regard acide sur Lola. Il imagina que son regard plongeait dans le crâne chevelu de la jeune fille, accédant aux vices dénudés qui s'agitaient dans les tréfonds de cet esprit juvénile. Il fallait vite arrêter cette vaine argumentation, parce qu'à force, il se demandait ce qu'ils cherchaient, tous deux, plutôt comme s'ils ne pouvaient prendre du plaisir que dans l'affrontement. Son regard s'assombrit de nouveau :
« Disons qu'entre se surestimer et avoir de l'assurance, il y a encore une large différence. Il semblerait que tu aies tendance à tout confondre, hein. »
La question était de savoir comment il fallait gérer le problème, pas de comment accéder le plus vite possible à son centre nerveux. Mais, très peu pour lui, les crimes passionnels. Il ne détestait pas Lola au point de vouloir la tuer de sang froid – nazi ou pas, il lui restait un peu de logique ; et puis, il n'en avait pas fini, avec cet orphelinat de tarés. Viktor ne cessait surtout pas de se dire, peut être pour se persuader qu'il n'avait pas fui l'Allemagne pour rien, que le défi était à la hauteur de ce que toute son éducation lui avait promis, bien qu'il n'arrivait pas à donner aux élèves la passion des langues qu'il enseignait. Mais ça, c'était accessoire.
« Oh. Il semble que je vais finir en tôle de toute façon. Qu'est ce que j'ai à perdre ? »
Lola le prenait décidément pour un con. Tout ça parce que personne ne l'avait reprise en main, au moment oú il aurait été sain que quelqu'un la choppe par la peau du cou, pour gueuler que, non, ça marchait pas comme ça, la vie. Et la petite merdeuse osa le toucher. Comme ça. Un coup sec contre son front, qui réchauffa son être d'un nouvel accès de colère. Il attrapa sa main au vol, la laissant terminer son odieuse tirade, songeant déjà à lui casser le doigt aussi sèchement que s'il n'avait été qu'une branche :
« Et c'est ce genre de comportement qui est sensé t'apporter du respect ? Tu te fous le doigt dans l'oeil jusqu'au coude, gamine, si tu penses que, moi, j'vais me contenter de te laisser me chier dessus. »
Mais finalement, malgré toute son autorité, Lola lui glissait entre les doigts. Impossible de prévoir ses réactions, car, lorsqu'elle se tendit vers lui pour l'embrasser, Vergil sentit tout son être se tordre dans les affres de l'horreur que lui inspirait le geste de la jeune fille. Mais putain, elle avait quoi dans la tête, si ce n'était le tapioca informe qui était sensé lui servir de cerveau ? Il la repoussa sèchement, soucieux de ne pas attirer l'attention sur leurs deux silhouettes enlacées, avant de tourner la tête vers la cour. Si Lola décidait de jouer à ça, il pourrait effectivement aller jusqu'au meurtre. Le troupeau de gamines ne semblait avoir rien saisi de l'échange, mais Viktor remarqua très vite qu'un élève avait relevé la tête au mauvais moment. Un peu plus loin, cet imbécile de Matt les fixait, un sourire goguenard aux lèvres. J'vous ai vus, semblait-il chuchoter. Vergil recula légèrement, soudain oppressé par le rictus moqueur de Lola, allié au regard du gamer. L'espace d'un instant, il entraperçut tout ce qu'il avait à perdre, si ce petit con ouvrait sa gueule. Non seulement son boulot, mais aussi toute son existence. Il ne revenait pas de l'inconscience de Lola par rapport au problème ; elle pouvait le foutre en tôle, qu'elle ne se sentirait pas pour autant coupable – oh non, qu'est ce que tu paries qu'elle ira le raconter fièrement à tous ses potes ? Vergil tenta de calmer son pouls, se poussant férocement au calme, avant de poser son regard le plus dur sur la jeune fille. Ses lèvres se tordirent d'une moue glaciale, et il murmura :
« Tu me donnes envie de vomir. »
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Lun 24 Mar - 22:46
T’as trop joué, là, Lola, et tu le sais – tu frissonnes de crainte devant le regard que Vergil darde sur toi, à l’entente des mots qu’il te crache à la gueule. Ça suffit maintenant, tu crois pas ? Non, bien sûr que non, l’idée-même du ‘‘trop’’ n’existe pas dans ta façon de vivre, ce qu’on appelle ‘‘trop’’ selon toi ne définit au final qu’une jalousie extérieure, moralisatrice – liberticide – en réaction à ceux qui osent vivre pleinement. Y’a pas de trop. Pas de limites. Pourquoi s’imposer des limites ? Pour le regretter ensuite ? Se maudire, des années plus tard, de ne pas avoir eu les couilles ? Tu veux pas traîner tes regrets, toi, t’en as déjà bien assez – contrairement à ce que tes connaissances pensent – et rien ne t’effraye autant que la possibilité de te réveiller un jour, un jour où tu sauras ta mort proche, et de te dire que oh putain t’as pas vécu comme tu l’aurais voulu – autant que tu l’aurais voulu.
Alors tu continues de jouer.
« Moi j’vous donne envie d’vomir ? »
D’un geste sec, la blonde dégage sa main de l’emprise de son vis-à-vis pour juste après mieux l’attraper par le poignet. Elle tourne vivement la tête, surprend le regard de Matt et lui adresse un sourire doucereux – un de ces sourires mauvais et dangereux qui disent ‘‘T’inquiète pas qu’on va parler toi et moi, t’inquiète pas Fifi Brindacier...’’ –, puis elle se met en marche, astreignant l’enseignant à la suivre. Elle l’emmène jusqu’à un coin un peu secret du parc – un coin qu’elle connaît bien vu qu’elle y fume souvent –, là où elle sait très bien que personne les verra. La preuve ils ont croisé personne sur le chemin. C’est dans sa nature de repérer les endroits parfaits pour enculer discrètement la loi.
« Quoi, vous vous pissez d’ssus parce que la rouquine nous a vus ? rit-elle gouailleusement. Il vous en faut pas beaucoup dites-moi, j’vous croyais un peu moins flippé que ça. »
Elle le jauge d’un air amusé, se mordillant précautionneusement la lèvre – ça la ferait bien chier si ça se remettait à saigner – pour réprimer le sourire qui meurt d’illuminer son visage. Cette situation l’amuse grandement. Elle a beau se dire, entre deux gloussements courageusement étouffés, que si elle continue à chercher la merde, Vergil va finir par vraiment la frapper – au mieux –, tout ce bordel l’éclate. Tu m’étonnes. Elle y risque pas grand’chose, elle. Et en même temps si. Elle parierait toute sa beuh que si elle foutait vraiment le gars dans la merde, il n’hésiterait pas à la tuer – peut-être qu’il construirait une chambre à gaz dans le parc de la Wammy’s House rien que pour elle, Deutsche Qualität attention, ja ja ja. Étrangement elle s’en fout. Est-ce car elle ne se sent pas vraiment menacée par le bonhomme – inconsciente – ou car sa vie, cette vie qu’elle tient tant à savourer pleinement, ne lui importe finalement pas plus que ça ?
« Puis vous pouvez pas me l’reprocher, renchérit-elle avec des faux airs de mignonne petite ingénue, j’suis une gamine inconsciente et stupide. C’pas c’que vous me rabâchez depuis le début ? »
Il a pas tort, d’une certaine façon, la Française l’admet volontiers. Pas pour autant qu’elle changera quoi que ce soit à sa manière de se comporter – s’il faut ça pour tromper l’ennui, pour conférer à un quotidien dont la monotonie la tue à petit feu un quelque chose d’intense, de fiévreux... Car cette putain d’roue tourne, fuck cette putain d’routine. Elle laisse tomber sa clope dans l’herbe et l’écrase de sa pantoufle – hm, à en juger la chaleur vague et brève qu’elle sent sous son pied, c’était visiblement pas un bon plan, à tous les coups que la semelle en plastique prend trop cher –, puis elle se met à tourner autour de son interlocuteur, le pas guilleret et un mince sourire à la fois moqueur et aguicheur ourlant sa fine bouche. S’arrête inopinément devant Vergil.
« Vous m’disiez tout à l’heure que vous comptiez pas m’laisser vous chier d’ssus. J’vous rassure tout d’suite – elle plante alors ses prunelles vertes, intransigeantes mais mutines, dans celles de son interlocuteur –, c’est pareil d’mon côté. D’ailleurs. J’accepte pas qu’un mec me dise que j’lui file la gerbe en sachant qu’il m’a sautée y’a moins d’une heure. »
Lola pousse le vice jusqu’à retracer d’un doigt tendre – trop tendre pour elle, pour eux – la ligne de la mâchoire de l'Allemand d’un air songeur. Encore un jeu. Un de plus. La raillerie dans la douceur, dans la candeur insolente d’une nymphette qui se découvre à peine ces charmes enfantins – ces charmes enfantins qui n’imprègnent plus ses traits tirés par l’épuisement de la débauche depuis longtemps.
Lola n’a rien d’une Lolita, mais il s’avère très distrayant d’en feindre les airs.
« Arrêtez d’faire le mec. Si ça vous saoulait vraiment, vous y auriez mis d’jà mis fin, l’aurait suffi d’pas m’répondre, j’me serais lassée. La vérité c’est qu’vous kiffez qu’on s’mette sur la gueule comme ça. »
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Mar 25 Mar - 17:44
Il s'agissait de savoir si, à force de foncer tête baissée dans toutes les emmerdes qui lui courraient sous le nez, Vergil allait survivre plus de cinq ans dans cet orphelinat. Il fallait aussi se demander s'il serait capable de respecter un élève, un jour, et si, surtout, il n'allait pas appeler le matin maudit oú Lola l'avait sexuellement agressé, le dernier moment de sa vie. Parce que, bien sûr qu'il flippait, comment voudrais-tu qu'il réagisse autrement ? Il aurait pu se contenter de faire le brave, de serrer les dents, et de faire comme si le regard de Matt était aussi léger que le sens commun de ce dernier ; il aurait pu faire... des tas de choses, à commencer par se casser dès que Lola était entrée dans la pièce, apportant avec elle un siècle d'insolence et de libéralisation de la femme. Mais, maintenant qu'il était bel et bien emmêlé dans les conséquences de ses choix pour le moins singuliers, il s'agissait aussi d'arrêter de se voiler la face : le regard de Matt, les lèvres provocatrices de Lola, l'avaient poignardé, adieu l'ego. Il avait beau se prendre pour le plus grand tyran que l'orphelinat ait contenu – et encore, il avait pas mal de concurrence - ; même les dictateurs n'échappent pas à la justice, à un moment ou à un autre. C'était le principe Disney de « les méchants se ramassent toujours ce qu'ils méritent. Ainsi va la vie. ». Aussi, quand la gourgandine prit de nouveau les choses en main, en le traînant à l'écart – c'est ça, n'arrêtons pas de nous exhiber. Ça fera jamais que trois témoins, en comptant l'accusé – sous le regard pour le moins hilare de l'autre rouquin, Vergil sentit que l'Univers tout entier avait décidé de se liguer contre lui. Ça lui rappelait vaguement de comment certains États avaient décidé de tenir les femmes à l'écart des hommes, pour le propre bien de ces derniers. Et quand on voyait l'inconscience avec laquelle Lola prenait les choses, Viktor en venait à regretter que l'Angleterre fut moins arriérée qu'elle n'avait eu l'habitude de l'être. Le progrès féministe, une génération qui évolue plus vite que l'autre, ce genre de conneries modernes poussait les adolescents à devenir incontrôlables, sous le simple prétexte que fu, on est plus au XIXéme siècle. Et dire que lui ne pouvait que grincer des dents infiniment, remplissant sa conscience de cet hideux crissement.
Lorsque Lola eut enfin atteint son but – et Vergil regarda lentement autour de lui, espérant que personne ne les avait vu disparaître dans ce coin sordide de toxico -, elle réitéra son assommante habitude de se comporter comme si elle avait des couilles. Vergil la fixa, de cet œil froid qui avait tant effrayé d'autres gamins. Mais, visiblement, ces gamins-là ne pouvaient pas se vanter de posséder une virilité aussi exacerbée et une gueule aussi large que celles de Lola. Viktor ne manqua pas de remarquer que c'était des connasses comme sa propre mère qui avaient permis que ce genre de créature contre nature soit créé aux dépend de la gent masculine. Il espéra aussi très fort que Sophia ne devienne pas une telle garce, avant de reposer son regard fermé sur l'hideuse création du féminisme :
« C'est vrai que j'avais oublié ce détail, que tu ne possèdes pas assez de conscience de toi-même pour te soucier des autres. Que Matt ait tout vu, tu t'en branles, puisque sa Petite Majesté, elle ne risque pas de finir oú que ce soit, à part dans un centre de désintox'. »
Mais il daigna quand même se fendre d'un rictus, à sa réplique suivante :
« Merci de daigner reconnaître que j'ai raison. Même si c'est pour arborer un air excessivement stupide. Il y a toujours une différence entre être bête et puérile, tu ne le sais donc pas ? »
L'ironie de Lola ne lui avait certes pas échappé, mais sa voix suivait le même chemin, elle s'alourdissait d'un soupçon de mépris sirupeux. Vergil ne bougea pas, cette fois, lorsqu'elle s'approcha de lui. L'index de Lola contre l'axe aigu de sa mâchoire éveilla un frisson solitaire dans son corps :
« J'te demande pas de t'écraser, mais de faire au moins gaffe. Balance encore ma sécurité aux ordures et je t'assure que je ne m'empêcherai pas de t'étrangler. »
Mais il lui fallait bien reconnaître qu'elle avait raison, cette pisseuse. Il le savait depuis le moment oú ils avaient commencé à se chamailler ; le caractère acide de Lola titillait bien trop son ego pour que ce soit sain pour eux deux. Une fossette moqueuse se creusa dans sa joue, lorsque son sourire s'élargit, et Viktor se pencha vers elle, pour murmurer à son oreille :
« Et alors ? Mais il se pourrait bien que tu aies raison. »
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Mar 25 Mar - 22:53
Oh mais déstresse, gros, tout va bien. Regarde comme le ciel est bleu, écoute comme les oiseaux chantent, c’est beau non ? Don’t worry about a thing, ‘cause every little thing gonna be alright, fredonnerait sereinement le Dieu incontesté des ganjamen. Plus ou moins ce que Lola rétorquerait si elle ne savait pas très bien que ça lui vaudrait un regard exaspéré – puis elle se voit mal appeler Vergil ‘‘gros’’, aussi, on va pas se mentir. Alors elle se contente de lever les yeux au ciel à l’évocation du cauchemar de tout tox’ digne de ce nom – le centre de détox’, c’pour les gens accros à des trucs hardcores, m’sieur, genre la coke ou le crack, l’amour de la marie-jeanne n’a jamais envoyé personne dans cet enfer de blanc aveuglant et de substituts à peine satisfaisants. ... Pas vrai ? Oh on s’en fout en fait, don’t worry, be happy, tout ça tout ça.
« Que Matt ait tout vu, j’m’en branle parce que j’suis à peu sûre d’savoir comment l’gérer. J’veux dire. J’suis surdouée à c’qu’on dit. Et j’sais des choses. »
Son sourire se teinte d’une indicible, inquiétante sournoiserie ; elle a la figure énigmatique des génies qui se démarquent dans la connaissance, la manipulation de son semblable, sortes de Sphinx matois et taquins qui n’augurent rien de bon. Une capacité de plus que sa paranoïa au sous-ton de weed l’astreint à exercer et à acérer. Cassedédi aux rageux qui prétendent que la fumette rend bête, sisi.
« Vous r’connaîtrez quand même que les deux vont souvent ensemble. »
Devant n’importe qui la parisienne déballerait avec une assurance indolente son avis sur la question, sa petite philosophie, qu’elle vulgarise par son langage pour le moins familier, de meuf défoncée. Tac tac, les mots s’enchaînent, s’entremêlent, se cognent pour tisser le patchwork rugueux, grossièrement tressé de sa pensée. La défonce lui donne un peu des airs de moine tibétain, un genre de Bouddha enfumé de la tête qui révèle à ses disciples toutes les vérités profondes de la vie. Eh ouais, non seulement elle a une grande gueule mais en plus elle croit te transcender intellectuellement. Sauf que pas devant Vergil – à s’demander si c’est pas plus à l’esprit qu’à la force qu’il l’impressionne. Après tout les gros baracs elle connaît, ça pullulait dans son quartier, ‘suffit d’les dresser – en général ils s’imposent le principe de jamais péta une meuf au pire –, elle flippe si le gars s’apprête à lui en mettre une mais voilà quoi. Par contre ceux qui parviennent à démonter son raisonnement, à la réduire à l’état de pauvre conne sans culture... Pitoyable, cet orgueil trop sensible de petit génie habitué à surpasser son entourage. Elle détournent furtivement le regard.
Regard qui revient brusquement fixer le visage de son vis-à-vis, déconcerté.
« Euh ouais, vous inquiétez pas m’sieur, j’ferai gaffe à l’avenir..., assure la jeune fille d’une voix absente. »
S’agirait-il d’une retraite ? Hmmm... Pas exactement. Plutôt un genre de trêve hargneusement bougonnée en grinçant des dents. Et. Viendrait-il de reconnaître la justesse de son affirmation ? Un faible frisson la parcourt de la tête aux pieds. Si elle ne commençait tout doucement mais sûrement à connaître le personnage, elle se réjouirait déjà d’une victoire qu’elle jugerait proche. Mais encore une fois, elle ressent plutôt ça comme une belliqueuse suspension des hostilités. Un sourire de taquine satisfaction éclot sur ses lèvres meurtries et ses yeux s’illuminent d’un éclat facétieux et enjôleur. Impossible – très peu probable en tout cas – qu’on les surprenne ici, l’arbre derrière lequel ils se trouvent les cache du chemin emprunté par les élèves et ils font face à l’étendue verte les séparant de la forêt, personne ne passe par là à cette heure.
Alors elle fait ce qu’elle veut, non ?
Avec une nonchalance confiante elle pousse l’enseignant contre l’arbre et happe ses lèvres en un baiser qui susurre ironiquement son défi lascif – une sensualité corrosive qui affronte jusque dans sa recherche charnelle de l’autre – tout en promenant distraitement ses mains sur son torse, sentant rouler sous sa main les plis de sa chemise. Après quoi elle plonge audacieusement ses yeux dans ceux de l’Allemand, le sourcil malicieusement arqué.
« J’ai raison, vous voulez dire. »
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Mer 26 Mar - 18:12
C'était quand, la dernière fois qu'il avait eu peur, comme ça ? On ne parlait pas d'une angoisse d'enfant face à l'indéchiffrable, mais plutôt de la terreur sacrée que tout un chacun ressent lorsqu'il a un pied dans le néant, et l'autre sur une terre qui ne cesse de s'éloigner. Et quand est-ce que Lola avait-elle fini par quitter ce fameux statut d'élève, pour atteindre celui, autrement plus mature, de maîtresse, et donc, d'être digne de respect ? Parce que Vergil avait beau ressentir un mépris profond pour tout ce qui portait une chatte et des seins, son dégoût devenait trouble lorsque l'ennemi venait dans son lit. Il l'avait remarqué, des années plus tôt, lorsque c'était Thelma qui lui avait fait franchir ce pas. Il vivait à peu près le même genre d'avancement avec la française, l'ouverture d'un paradoxe béant et dédoublé par le fait qu'elle n'était même pas une femme normale. Enfin, on s'imagine sans cesse que l'on n'a pas le choix, pour s'éviter des réflexions douloureuses ; on s'imagine que l'on est poussé face aux événements qui nous accablent, l'existence devenant alors un maladroit assemblages d'épreuves. Mais si Vergil avait auparavant choisi de venir en Angleterre, maintenant il n'avait plus trop la tête à la révolution. Parce que c'était Lola qui, d'un baiser, l'avait forcé à franchir cette limite délicate, entre le choix, la soumission, le plaisir dans l'illégalité. C'était étrange, comme un baiser – même vide de sens – éveille, ou, au contraire, apaise. Depuis la veille, Vergil l'immuable avait valdingué entre tous ces états. Il avait férocement détesté Lola, ou lui-même, à chaque fois que les lèvres féminines avaient effleuré les siennes. Ces baisers avaient écorché son âme ; certains d'entre eux avaient été bien trop empressés, ou acides. L'homme errait dans l'atroce abrutissement du défaitisme, il s'en rendait compte à présent. La preuve, la jeune blonde recommençait à prendre les choses en main. Il craignait pour son existence, alors elle décidait. Et cette voix moqueuse, bien loin d'apaiser ses craintes, les raviva :
« Je ne suis pas sûr de pouvoir faire confiance à ton sens commun sur cette question ; je m'occuperai de Matt. »
Parce qu'il était l'Homme, quand même. Et le mâle se doit de prendre soin de lui-même, sans aucune lâcheté. Il était majeur, aussi, autant de qualités qui l'opposaient le plus naturellement du monde à la créature chevelue qui lui faisait face. Surtout, il ne pouvait pas supporter qu'elle ait envie de le contrôler, ou, tout du moins, de faire quelque chose pour changer son existence. Vergil avait envie de répliquer, si puérilement, qu'il pouvait prendre soin de lui-même, sans aucune aide extérieure. Lola était le disciple, l'enfant qu'il fallait écarter des grands choix. Elle n'avait pas la maturité nécessaire pour décider, remarqua l'homme, elle était si jeune, si aberrante :
« Non, ça ne va pas toujours ensemble ; n'essaye pas de simplifier les choses. »
Les plus grands génies n'avaient jamais pu grandir, au fond ; Vergil savait que ce n'était pas le meilleur moment pour étaler sa science, et que, surtout, elle ne servirait à rien dans le cas présent – et pourtant, que de grands noms il aurait pu sortir. Mais il ne tenait pas à écraser Lola par l'étendue de ses connaissances ; l'écart entre eux était déjà énorme à la base, et la soumission dans l'étalement ne lui avait jamais apporté de la satisfaction. De plus, ils étaient hors du contexte scolaire ; il ne tenait pas non plus à s'enfoncer dans un discours purement basé sur les faits, alors que leurs actes étaient déjà bien lointains de cette logique à laquelle il s'astreignait au quotidien. Et quand Lola le plaqua contre l'arbre, il se demanda si ce baiser-là était de trop, si, exposé à la lumière du soleil, il ne perdait pas de ce mystère qui avait fait de leurs ébats un instant si complet. Mais si le baiser précèdent avait allumé une vague étincelle de peur, celui-ci lui donna un intense frémissement de plaisir. Il aurait pu le savourer, renverser Lola sur l'herbe, si seulement il n'avait pas saisi tout ce que cet enlacement suggérait, la prise de pouvoir de l'étudiante et le ploiement de sa virilité. Vergil aurait pu être un homme bêtement heureux, s'il n'avait eu autant de choses à prouver, autant à lui même qu'aux autres. C'était peut-être de cette frustration qu'était née sa colère ; il ne pouvait savourer une étreinte, sans l'analyser, sans sentir dans la nonchalance de la jeune fille une insulte à son pouvoir. Leur discussion était comme un jeu d'échec, leurs baisers des pions majeurs, et Lola, dans son geste si naturel, continuait de l’exaspérer. Sans omettre que même s'il avait pu s'oublier entre ses lèvres, elle ponctuait ces attentions de répliques sardoniques. Mais il y avait toujours un écart majeur entre sa volonté et son corps, car ce dernier, une nouvelle fois, choisit de le trahir en répondant à la chaleur qui se pressait contre le fin tracé de sa bouche.
Il en fallait si peu, pour être faible.
Vergil coinça le visage de Lola entre son pouce et son index, lui écrasant les joues pour maintenir son regard au niveau du sien. Il se pencha de nouveau vers elle et frôla ses lèvres, avant de susurrer :
« Tu aurais pu avoir raison, si seulement ça avait été un réel affrontement entre nous. Mais étant donné que ce n'est qu'une vague chamaillerie, je ne considère pas que cela mobilise suffisamment mes capacités pour lui donner le nom de bataille. Je considère que c'est de mon devoir de remettre une élève à sa place, surtout lorsque celle-ci se permet des répliques qui sont bien en dessous du niveau attendu d'une surdouée. »
Sa mauvaise foi était affolante ; pourquoi restait-il là ? Parce que ça l'amusait ? Éventuellement. Mais aussi, parce qu'il y tenait, à cette ébullition de ses sens les plus primitifs.
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Jeu 27 Mar - 0:51
Lola hausse indifféremment les épaules lorsque son aîné lui dit préférer s’occuper lui-même du problème Matt. Ok, vas-y, fais tes bails ; à l’ancienne, quand les gars de sa crew, ces machistes trop possessifs et trop agressifs, s’affairaient opiniâtrement à régler toutes ses affaires pour elle sans jamais se préoccuper de son accord dans l’affaire. Quoi, y’a la bande à Dounya qui t’bolosse ? T’inquiète, j’vais leur causer moi demain, j’vais les calmer moi ces chiennes. Aller jusqu’au 93 pour pécho ? Non non c’est mort, tu vas t’faire violer avec tes p’tits airs de blanche même pas voilée, j’vais aller pécho pour toi, passe l’oseille. Wallah maintenant t’arrêtes la ballantine’s, fume une clope, roule un joint, la teille t’y touches plus, j’te rappelle comment t’as dégueulé la dernière fois ? Ouais j’aime mieux ça. Malgré toute sa masculine fierté, elle garde les mécanismes typiques de la docilité de ces meufs de téci que les mecs acceptent à la fois en reuf qu’on checke comme son compagnon de galère urbaine et en reusse qu’on maîtrise comme une petite go trop inconsciente pour son propre bien – j’te fais tourner l’joint et après j’t’engueule parce que t’as l’air d’une tepu avec ces fringues.
Rien d’étonnant, donc, à ce qu’elle s’accommode sans aucun mal de cette décision vachement insultante quand même – oui elle s’en est bien rendue compte, elle choisit juste de laisser couler.
Peut-être qu’elle le doit à ce traitement de faveur, cette insouciance folichonne pourtant si peu commune aux individus d’une telle intelligence. Sa mère lui faisait pas de cadeaux, non, elle se souviendra toujours des deux-trois gifles gagnées à la réplique de trop ; ses potes en revanche l’ont pourrie-gâtée à force de la traiter façon princesse de la street dans sa prison de macadam. On a voulu faire d’elle une gonzesse irresponsable, elle en a choppé la légèreté d’esprit.
« C’est vous qui compliquez tout inutilement... »
En tout cas c’est toujours comme ça qu’elle a vu les choses – et pour ça qu’elle a jamais trop (un peu quand même, elle l’avoue) regretté tous les cours ratés. Elle gagne quoi à apprendre que Charles Martel repousse les Arabes en 732 – surtout que plus ou moins mille ans plus tard ils sont revenus alors bon, epic fail, Charles – ou à agrémenter sa réflexion de concepts alambiqués tels que l’impératif catégorique de la morale selon Kant ou le cogito cartésien ? Plutôt que d’une intelligence érudite, affinée et raffinée, de beau gosse chicos qui rédige son devoir sur l’animalité des personnages beckettiens dans le Starbucks le plus proche de la fac ; la stoneuse se targue d’une perspicacité brute, purement instinctive que l’on prête à ces marginaux qu’on entend débattre entre eux de sujets dits graves – le racisme, la condition de la femme – avec une rhétorique pitoyable et un ton traînant pas franchement convaincant.
... Elle aura pas tenu bien longtemps, la trêve, constate Lola avec amusement – le contraire l’aurait étonnée, et même déçue. Aucun mal à reprendre les armes, seul le contact – presqu’irréel, si bref que la blonde ne peut s’empêcher de se demander si elle l’a imaginé – des lèvres de Vergil contre les siennes trouble l’imperturbabilité provocante avec laquelle elle affronte son regard.
« Dîtes pas ça, m’sieur, vous allez me vexer. »
L’allégresse amusée de sa voix souligne la fausseté taquine de cette affirmation. Il se foutrait pas un peu de sa gueule le boche par hasard ? Pas qu’elle fasse preuve d’une finesse particulière en psychologie – elle abandonne volontiers cette compétence au John Lennon manqué de l’orphelinat – mais elle sait très bien reconnaître ce mépris que l’on feint pour éviter de donner raison à quelqu’un. Tant de jolis mots, tant de tournures pompeuses pour ce qui revient au final à un ‘‘Ouais mais non parce que j’t’aime pas en fait donc juste non...’’.
Bah, s’il veut jouer à ça.
« J’trouve que vous prenez la masse de risques pour une ‘‘vague chamaillerie’’, fait-elle innocemment remarquer. »
Et la jeune fille le regarde droit dans les yeux tandis que ses doigts jouent oisivement avec les boutons de la chemise de l’adulte, comme s’il ne s’agissait que de s’occuper les mains. Elle se fait tour à tour, en à peine quelques secondes, boudeuse puis joueuse selon que la poigne incommodante de l’enseignant l’exaspère ou l’amuse.
« M’enfin si ça peut vous soulager la conscience, d’vous dire que vous m’remettez à ma place... »
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Jeu 27 Mar - 18:29
Vergil avait toujours été ainsi avec ses femmes ; lorsque Thelma lui montrait un catalogue Ikea en lui demandant s'il allait choisir une table en rotin ou en plastique bleuté, le regard de l'homme s'échouait vaguement sur le papier glacé. Il s'était habitué à décider, même pour les choses les plus insignifiantes ; une mauvaise langue pourrait dire que non content de tyranniser les gens, il les obligeait aussi à suivre ses choix. Étrangement, c'était une première, que Vergil se soit soumis à ce point à une décision extérieure à la sienne, mais c'était aussi, il fallait arrêter de se leurrer là dessus, parce que ça l'arrangeait très bien de céder. On n'a aucun mérite à violer les élèves, paraît-il, mais quand ces dernières prennent les devants, ça apaise l'ego, autant que ça l'allume. Parce que Vergil, dès le début, avait été bloqué dans la routine infernale de la compétition ; il fallait toujours renchérir, saisir l'autre entre son pouce et son index pour le réduire à une infâme pulpe humiliée et vagissante. Lola s'opposait avec un peu trop de force à cette sournoise domination ; mais le combat semblait parfois s'élever à un autre domaine spirituel : l'opposition symbolique entre deux époques différentes, et même, plus basiquement, deux pays. Vergil s'était toujours plaint que les jeunes étaient trop habitués à avoir ce qu'ils voulaient au moindre claquement de doigts – oh, ça ne l'avait pas empêché de céder. Digne morale fallacieuse -, parce que lui-même avait toujours dû se décarcasser pour obtenir quelque chose. Son nazi de grand père ne lui donnait jamais d'argent de poche, et sa mère, cette grosse salope, avait préféré disparaître dans la nature sans marquer son nom sur son testament : ici, à la wh, ces pauuuuvres gamins si maltraités par la société recevaient quand même leur dîme mensuelle. Les choses étaient extrêmement simples pour eux, et Vergil savait qu'il ne les comprendrait jamais. Il en recevait à chaque instant la preuve, dès que Lola ouvrait un peu trop sa gueule :
« C'est pas l'essence même de l'existence de cet orphelinat ? Rendre les choses compliquées juste pour faire chier le monde ? Tu ne m'en voudras certainement pas d'essayer de t'inculquer des choses même maintenant ; autant faire d'une pierre deux coups. »
Comme si elle pouvait réviser ses déclinaisons de latin en le chevauchant. Et c'était vrai, pourquoi ne pas essayer d'éduquer le sens critique si paresseux de la blonde ? L'allemand ne faisait que se bourrer d'excuses, parce que la vérité était vraiment trop moche à assumer. Ça faisait très mauvais scénario de porno, comme si, à l'avenir, il pourrait lui proposer de passer dans son bureau pour lui donner un cours particulier d'allemand, et seulement négliger la langue pour passer à la pratique. Sa sacro sainte morale se détériorait très vite, dans ses moments de faiblesse ; mais au moins il parvenait à s'habituer aux perspectives que lui offrait cette relation. Pourquoi aller chercher de la chair fraîche à l'extérieur, quand ce qu'il y avait d'enfermé dans l'orphelinat était déjà si volontairement décadent ? Viktor resserra ses doigts contre la fine mâchoire féminine, affrontant le regard de l'adolescente :
« Ce n'est pas toi qui a parlé de cette excuse la première, en me disant d'une voix geignarde que je n'avais qu'à m'imaginer que je te remettais à ta place ? Ces excuses sont réutilisables à l'infini, et puisque tu me l'as si sympathiquement servie, je ne vois pas pourquoi cela ne deviendrait pas la raison principale de cette relation. Nous n'aurons qu'à nous mettre tous deux dans des rôles qui nous seront infâmes : toi, dans celui de la petite conne – et tu le joues si bien – et moi, dans celui de l'idiot qui cède. »
Sur ces derniers mots, il la relâcha, comme on repousse une chose qui nous écœure ; toute relation basique impliquait que les gens soient hypocrites. Il était clair que Vergil n'était intéressé que par la chaleur de Lola, et que celle-ci n'en voulait qu'à sa bite. Alors pourquoi perdait-il même son temps ici, bloqué contre cet arbre dont l'écorce rugueuse lui mordait la nuque ? Cette décision lui parut être la plus ferme qu'il avait prise depuis des années ; choisir de ne pas être la victime d'un sort imbécile et assumer même le fait qu'il jouait sa réputation dans l'affaire. Une roulette russe démoniaque. Et puis, il semblait qu'il n'avait pas le choix ; aussi têtue qu'était cette gamine, elle lui était utile. Aspect pratique oblige, il n'avait plus qu'à virer les quelques remords qui lui lacéraient l'esprit, sinon plus personne ne pourrait dire de lui qu'il était implacable et impulsif. Il était aussi latiniste de formation, et la phrase qui avait toujours été l'hymne de l'adolescence revint gambader dans sa tête : Carpe Diem. Si même Horace était pour ce genre de principes, qui était-il pour se refuser un petit plaisir si simple ?
Ses larges mains se refermèrent sur les hanches de Lola, et un rictus tordu se dessina sur les lèvres minces de l'homme. Il ne pourrait naturellement jamais lui sortir un compliment comme ça, mais il fallait avouer que son audace lui plaisait.
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Ven 28 Mar - 2:01
Les mains qui agrippent ses hanches arrachent à Lola un bref frémissement de contentement tandis qu’elle se blottit davantage contre son vis-à-vis, lui mordillant nonchalamment l’oreille. Est-ce qu’elle le doit au froid, au manque de beuh, à la fatigue, aucune idée, peut-être tout, peut-être rien, mais à peine lui semble-t-il percevoir les prémisses plus ou moins paisibles d’un entracte dans leur affrontement qu’elle s’abandonne à la paresse torpide de sa nature.
« Et j’crie pas à qui veut l’entendre que j’le déteste, ce putain d’orphelinat ? murmure-t-elle d’une voix narquoise. Vous pouvez toujours essayer, si ça vous amuse, mais j’vous garantis pas qu’ce soit très efficace. »
Si on les observait de loin, sûrement qu’on croirait à une de ces scènes hors de tout temps et de tout espace entre deux amants dont les membres tressaillent encore d’un trop plein de volupté. C’est vrai que y’a comme une suspension soudaine dans la hargne avec laquelle ils se tournent autour, Lola le perçoit sans véritablement le comprendre et elle s’ajuste aisément – avec un plaisir de chat alangui s’offrant aux faveurs chaleureuses d’un beau soleil d’été – à cette variation de rythme. Si Vergil continue à la traiter avec une certaine condescendance froide, il n’en demeure pas moins qu’il l’avait habituée à largement pire et qu’elle se retient difficilement de lui faire remarquer qu’il en deviendrait presque peace. Sauf qu’elle veut savourer ce moment de relâchement alors pour une fois, elle s’efforce de fermer sa grande gueule.
La jeune fille a toujours aimé se battre. En primaire, il suffisait de s’acharner à prétendre que ‘‘non mais il compte pas ce but d’abord’’ pour qu’elle colle une bonne droite à l’arbitre – qu’il apprenne à arbitrer, cet abruti fini, d’où y’a hors jeu ? – et jusqu’à ce qu’elle atterrisse dans cet orphelinat, elle se satisfaisait amplement d’un regard de travers pour s’avancer vers sa proie malchanceuse et l’interpeller d’un ‘‘Vas-y toi là pourquoi tu r’gardes mal ?’’ menaçant. Néanmoins, rien ne la réjouissait jamais autant que ces bastons organisées avec la précision et la rigueur d’un G20 entre bandes – tout le monde ramène sa batte, les gars, ce soir on met cher à Jordane et ses salopes – parce qu’elles se terminaient toujours par ce simulacre de festin qu’ils improvisaient pour se récompenser de cette bataille, amis comme ennemis. On buvait pour au moins cinq teilles de Ballantine’s et on fumait au moins autant de weed et de shit – festin malsain de jeunes délinquants du 18e. La jeune fille a toujours aimé se battre, ouais, mais limite elle préfère le moment où elle se bat plus pour se délecter de la tension dans ses membres qui se relâchent progressivement, de la méfiance qui s’atténue peu à peu – tout ça sans jamais vraiment baisser ta garde non plus, tu sais jamais des fois que ton adversaire se sentirait de revenir à l’assaut. Tout un truc, cette demi-heure perdue entre l’appréhension et le relâchement. Une ataraxie floue et frêle qu’aucune seconde, aucune minute, aucune heure ne saurait ancrer dans une autre réalité que celle qui lie ceux qui ensemble lui donnent vie.
« Ah oui c’est vrai, z’avez raison, mea culpa. – et elle dépose sur ses lèvres un baiser léger, mutin, sur ses lèvres telle l’aguicheuse promesse de tant d’autres, plus francs et plus osés, conciliante bravade dans une accalmie fragile – Hm oui ok, on fait ça si c’est comme ça qu’vous voulez l’voir. »
Lola se niche dans le creux du cou de l’Allemand, y étouffant son gloussement caustique – ce foutu running gag du destin, là, qui cesse pas de lui refourguer des mecs qui s’empressent direct de l’infantiliser – ainsi que son ‘‘Ah putain, les hommes...’’ murmuré en français avec une tendresse amusée de mère devant la masculine stupidité de ses petits hommes. Amusant de constater que malgré toute sa culture, toute sa finesse d’esprit, tout son latin, Vergil ne s’avère être qu’un homme aux mécanismes de gamin qui ressent le besoin d’affirmer sa virilité.
« N’empêche, merci qui – s’il ose lui sortir une connerie du genre ‘‘Merci Gifi !’’, pour de vrai elle le frappe – ? Si j’étais pas v’nue vous allumer vous en seriez pas là. »
Elle lui décoche un sourire fier. Quoi, c’est faux peut-être ? ... Si elle avait vraiment besoin de le souligner ? Ouais carrément. La quiétude, des personnes hargneuses et opiniâtres comme eux deux ne l’apprécient que si les grondements tout juste audibles de leur désir de dominer, de vaincre la troublent parfois. Ils ne sauraient trouver du plaisir dans une sensualité sereine, doucettement bringuebalée par les lubies d’une passion apaisée – pas encore en tout cas.
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Ven 28 Mar - 16:47
La tendresse, concept d'abruti pour d'autres abrutis. Le principe du plan cul, c'était pas bisous, bye bye, c'était cool, à la revoyure ? Alors pourquoi toute cette histoire prenait des proportions de tragédie grecque ? Vergil, dans toute sa si virile dureté, avait toujours posé sur ses femmes un regard oú la fierté de posséder un tel être rien que pour soi se mélangeait à un autre sentiment, l’agacement quasi permanent que lui apportait la faiblesse sentimentale. Autant dire tout de suite qu'il ne comptait pas s'attacher à Lola, mais que la pression du corps de cette dernière contre le sien avait tendance à réveiller les souvenirs ancestraux qui sommeillent dans le cerveau reptilien de chaque être humain. Ces mêmes chamailleries de gamins qu'ils avaient échangé au dessus des restes fumants de leurs ébats avaient contribué à réveiller la bête. À cet instant précis, Vergil était plus viking qu'homme. Après tout, dans ses veines coulait l'héritage merveilleux des wisigoths, ces sauvages des cavernes qui avaient passé leur temps à piller les villages et à violenter les femmes de l'ennemi. Mais, malheureusement, l'allemand n'était, à certains moments, qu'un homme très simplement attiré par un corps. N'importe quel corps pouvait faire l'affaire, c'était ça, la base de l'attraction qui existait entre tout être humain, savoir immédiatement s'il y avait quelque chose de possible, d'imaginable. Seulement, à cause de son esprit placide, Vergil s'était coupé de ces sentiments pour le moins humains, et quand ce n'était pas la volonté du cœur qui dominait, c'était celle du corps. Viktor était donc un viking du sentiment ; il était assujetti à ses désirs primaires, et plongé dans une terrible vénération du corps de l'Autre. Que l'Autre soit plate, plantureuse, ou blonde, n'y changeait rien ; mais il se trouvait seulement incapable de manifester de la tendresse pour Lola. Au contraire, alors qu'elle se pressait contre lui, langoureuse et sensuelle, mais la langue toujours acérée, le teuton eut immédiatement envie de la malmener, comme pour s'éviter à lui même la douleur qui ne manquerait pas de l'étreindre, plus tard, le jour oú il commencerait à fondre. Parce que ça avait toujours été comme ça ; Thelma était la voix de la majorité, elle l'avait séduit, l'avait laissé décider, l'avait jeté, précisément parce qu'il était froid comme une bouteille de champagne trop longtemps laissée au congél'. La principale différence entre l'âge adulte et l'adolescence était que maintenant, Vergil ne vivait plus dans l'instant, il se plaçait dans un avenir bien défini. Un avenir oú il y aurait visiblement une place – une large place, vu la masse – pour la crinière blonde qui surmontait ce visage de louve affamée.
Mais ce qui avait été bien avec son divorce, c'était que même s'il haïssait la plupart des femmes – sauf Angela Merkel, divine dirigeante qui confirmait que le reste de la masse féminine pesait pour ainsi dire rien dans le domaine de l'intelligence -, il n'avait plus de soucis à se faire pour rien. Lola était donc un problème, un énorme roc balancé sur la trajectoire de sa vie si droite et si parfaite. Le truc avec les rocs, c'est qu'il faut creuser un nouveau chemin pour les contourner. Il faut oser s'écarter du sentier tout tracé, et s’enfoncer dans l'inconnu, un inconnu qui, dans son cas, se révélait extrêmement menaçant. Mais si sa conscience lui sifflait de s'écarter de la sorcière, le corps, lui, se révélait indocile ; Viktor frémit en sentant la bouche sournoise caresser sa chair, et se raidit :
« Arrête de faire ta pauvre petite ado' maltraitée. Tu me saoules. » grogna-t-il, d'un ton acide
Est-ce qu'il s'était plaint, lui, que life sucks ? C'était un autre inconvénient de la jeunesse ; Lola ne daignait même pas soumettre son petit cul à l'existence. Il valait mieux, parfois, être enfermé dans un orphelinat de luxe, que supporter la vie réelle. Viktor savait que quand sa mère s'était cassée, il aurait préféré être placé dans un truc comme la wh, plutôt que de supporter encore pendant dix bonnes longues années son nazi de grand-père. Certes, la vie n'était jamais tendre, mais au moins, ici, ils étaient protégés de cet extérieur sournois qui n'avait jamais épargné personne :
« La preuve que je réussis, c'est que tu parles allemand. Tu viens de rattraper trois mois d'absence en 20 minutes. Continue comme ça et je te mettrai peut être la moyenne. »
Puis, l'allemand grimaça lorsqu'elle lui posa cette absurde question. Oú est-ce qu'il serait ? Mais déjà attablé à la cantine. Naturellement, frustré, mais disposant néanmoins de réserves assez conséquentes de nourriture pour pallier à toutes ses crises de nerfs. Lola était-elle un ajout ou une nouvelle racine dans son emploi du temps ?
« Est-ce que je dois me sentir fier d'avoir rempli un besoin primaire ? Génial. J'aurais eu le même contentement si j'étais allé pisser. »
Et pourtant, il ne s'en décollait pas, cet abruti.
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Sam 29 Mar - 23:43
Difficile de pas remarquer à quel point Vergil, par sa froide retenue, l’oblige à changer ses habitudes – le plus naturellement du monde il inverse les rôles. Vite-fait Lola se le reproche – depuis quand t’ajustes ton comportement à celui d’un plan cul, toi, t’as cru t’étais une petite housewife obéissante du sexe ou quoi ? –, plus pour rassurer son orgueil qu’autre chose, ce bouleversement silencieux dans ses coutumes lui déplaît finalement pas. A une époque – y’a un an de ça, grosso modo –, les mecs avec lesquels elle trompait l’ennui taciturne de ses nuits osaient pour deux la serrer et parfois même lui chuchoter quelques mots d’amour vaseux en lui caressant les cheveux ; et elle kiffait mollement tout en fumant son joint, hein, elle est pas ‘‘frigide du cœur’’ contrairement à ce qu’affirment certains de ses potes, c’est juste qu’elle attend des autres qu’ils établissent ce contact doux et intime, un peu respectueux – le gars te traite pas comme la huitième pétasse qu’il envoie au septième ciel. Puis ils ont grandi, ils ont vieilli au fur et à mesure de l’évolution de ses désirs – plus la jeune fille apprenait à se connaître au travers de sa sexualité et plus elle les voulait âgés, expérimentés, assurés – ; surtout ils ont gagné en indifférence et en cynisme. Choisir des queutards pour se garantir une bonne partie de jambes en l’air, c’est s’offrir en se résignant à la routine je l’ai suivi j’ai joui j’ai fui. Et elle s’y est fait, au fond elle s’en battait un peu les couilles, le mec la saute et après il la regarde même plus, pas de quoi chouiner.
A cet instant précis, la parisienne regrette amèrement de jamais avoir compris comment tchiper – et putain Ambre elle a essayé par tous les moyens de l’initier à cette pratique de reine des niafous – parce que là elle voit rien de plus sec, de plus cinglant et de plus méprisant qu’un tchip de grosse renoi pour témoigner son agacement. Pauvre petite ado’ maltraitée, wallah c’est quoi ça. La loi britannique condamne le malheur maintenant ? La reine elle a dit tout le monde nage dans le bonheur, et les rosbifs ont nagé dans le bonheur ? Non ? Ok, qu’on crache pas sur son spleen – comme Baudelaire, ouais, y’a pas qu’au XIXe que les gens souffraient. Tout ce qu’un tchip aurait si parfaitement condensé, et tout ce qui flamboie rageusement dans le regard dont elle l’accable – feu exacerbé de la frustration de ne pas savoir comment larguer cette bombe sans qu’elle lui pète à la gueule.
« Quand vous arrêterez de faire le vieux con, rétorque-t-elle tout de même, audace adoucie par la désinvolture cotonneuse de sa voix. »
Les non-initiés n’imaginent même pas combien d’embrouilles on oublie par flemme – tu t’indignes intérieurement, tu t’apprêtes à tout déclamer avec la belliqueuse ferveur d’un don Diègue tentant de défendre son honneur bafoué, et là t’abandonnes, tu décides que ça vaut pas la peine de se fatiguer. En fait, il faut un maître flemmard à ce monde pour atteindre enfin l’idéal de paix universelle.
Avec un accent encore fragile et certaines hésitations, ok, mais il manque que quelques connaissances d’argot à sa connaissance de la langue pour qu’elle l’intègre pleinement. Un jour sûrement, elle demandera à Vergil de lui apprendre des gros mots. ... Eh mais il a pas tort en fait. Genre elle se surprend à vouloir perfectionner – à voir ce qu’elle appelle perfectionner m’enfin – son allemand. Voilà putain, c’est exactement ça qui lui plaît pas trop – quand elle relève, that is –, il lui fait faire des trucs franchement chelous et elle comprend tellement pas ce qui, chez-lui plus que chez tout autre homme qu’elle a connu, lui parle – ou parle à ses instincts muselés de meuf – au point qu’elle fasse et se fasse en fonction de lui. Malgré cette constatation ô combien exaspérante, la blonde effleure du bout de ses lèvres celles du prof’ tout en lui caressant distraitement la joue – un genre de geste auquel on pense pas, qu’on fait de façon automatique au même titre qu’allumer sa clope –, murmurant un ‘‘Mais si vous l’prenez comme ça, plus jamais j’lâche un mot d’allemand.’’ revêche.
« ... Ah comme ça ? Ok d’accord. »
Bah ouais Lola, tu t’attendais à quoi ? A ce qu’il te sorte que non mais t’as raison ô divine élève grâce à toi je revis ? Pourquoi ça te révolte qu’il te ramène à cette vérité sale, ignominieuse, que t’assumes complètement ? Les mecs en boîte ils te traitent pareil, après tout, et ils considèrent pareil cette partie de jambes en l’air deuspi dans les chiottes. Alors pourquoi tu t’arraches à ce semblant d’étreinte, et pourquoi tu le scrutes le sourcil légèrement haussé, l’air de dire ‘‘Ça va ça vous dérange pas d’me comparer à vot’ besoin de lever la patte ?’’ ? Fais pas la pute pitoyable qui se gonfle de grands airs de dame digne quand on la traite de pute. T’es une pute c’est tout, espère pas qu’on te traite avec plus de respect que ça.
« La satisfaction des besoins primaires, ‘fin naturels et j’sais plus quoi, c’est pas ça qui mène au bonheur selon Epicure ? crache-t-elle froidement. »
Louison veut pas montrer à Vergil que sa manière d’appréhender la chose la blesse dans son orgueil de grognasse – non parce qu’en vrai elle capte même pas d’où elle sort cette fierté toute féminine –, au mieux il s’en foutrait au pire il se flatterait de l’avoir humiliée. Même si concrètement, sa réplique, son flegme trompent personne ; le ressentiment gorge tant le regard qu’elle darde sur lui qu’il en altère le vert sombre, lui conférant quelque chose de douloureusement acide.
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Dim 30 Mar - 21:44
Le regard que l'homme posait sur l'adolescente s'adoucit légèrement, comme sous l'effet d'une surprenante vague d'humour qui serait passée par là. Lui, un vieux con, il ne se souvenait pas que l'on ait un jour pu lui servir un argument aussi vieux jeu. À se demander si ce qui se trouvait sous ces cheveux blonds n'était pas resté en hibernation depuis le début de l'année – quelle succube idéale cela ferait. Une belle créature écervelée. Adieu le haut QI, laissez passer l'impulsivité primitive de l'adolescent qui devait encore sommeiller là dedans -, pour oser lui sortir un truc de ce genre. Pour tout dire, lui aussi avait dû balancer ça à son grand père, un jour oú celui ci avait refusé de lui filer cinq balles. Comme quoi il y avait des choses qui ne changeront jamais entre chaque génération. Et il était encore trop tôt pour passer d'un simple statut de con à celui de « vieux », eh, il avait un honneur quand même. Surtout, il ne voulait pas que Lola, par manque de figure paternelle, se place dans ce modèle de rejet parental par simple envie de s'opposer à quelque chose de plus puissant qu'elle :
« Je n'accepterais ce genre d'argument que si j'étais ton père, et vu le contexte, ce s'rait un peu malsain pour toi de continuer à utiliser cette parade anti-parentale. Tu traitais ta mère de vieille conne aussi ? »
Un reste de fatigue, la détente musculaire, la sourde chaleur du soleil sur son visage mince, tout complotait contre sa colère ; même si Lola semblait s'échiner à la rallumer, et il devina qu'il l'avait blessée, qu'il avait planté dans son ego un épieu de trop, lorsqu'elle s'écarta de lui, après avoir caressé sa joue de cet air vague qui laisse présager le pire. La douceur avant la rage, il commençait à comprendre que ses relations avec Lola fonctionneraient toujours selon ce principe ; ils étaient tous deux trop fiers pour s'écraser, trop pleins de cet orgueil de combattants acharnés, décidés à vaincre ou à mourir. Décidément, ils ne pourraient bien s'entendre qu'au pieu, et c'était peut-être mieux ainsi. Ce serait si ridicule de s’en amouracher d'une enfant aussi tenace, ce ne serait pas sans lui rappeler l'humiliation d'un certain pédophile notoire, et il ne tenait pas à se transformer en Humbert Humbert allemand. Mais c'était bien beau de se dire que l'on apprenait la vie à ces gosses, si c'était pour mieux les traîner dans la boue collante de l'humiliation, parce qu'ils étaient moins intelligents qu'ils devraient l'être ; ce n'était pas avec ce genre d'idéaux qu'il était devenu professeur – au fond, il aurait voulu leur inspirer quelque chose de supérieur à leur simple existence ; si la déception était déjà profonde maintenant, qu'en serait-il quand il en serait à vingt années d'enseignement ? Et Vergil comprit aussi qu'en tant qu'élève, Lola devrait toujours passer avant lui – toujours cette foutue pédagogie de comptoir -, ça allait de soi, qu'il faudrait arrêter de la blesser pour sauvegarder son honneur – et quelle torture ce serait, aussi, de réussir à admettre qu'elle pouvait avoir raison ; effectivement, il fallait arrêter de jouer au vieux con borné, ça ne ferait qu'alimenter leurs chamailleries. C'était peut-être pour ça aussi, qu'il aurait dû s'empêcher de céder en tout premier lieu, parce qu'il connaissait très bien son caractère, et que jamais, il ne pourrait cesser de se heurter contre quiconque le provoquait. La limite était extrêmement fragile, mais il ne pouvait pas s'empêcher de sourire de cet air moqueur qui consolidait ses colères :
« En effet ; mais qui dit satisfaction de besoins primaires, dit aussi bonheur primaire. Il faut parfois s'élever un peu au dessus de ça. Mais c'est charmant de voir que tu connais au moins un philosophe. »
Il durcit légèrement son expression et avança d'un pas vers la créature blonde, presque menaçant. Lola reculait, il avançait. Elle avançait, il reculait. Mais, pour le coup, il se sentait ridicule à tourmenter une élève qui n'avait fait que s'offrir selon les principes libéraux de son existence, je baise donc je suis :
« Mais je conviens que tes efforts sont appréciables. Et en retour, je devrais aussi dire que ce que tu m'as apporté s'élève un peu au dessus de la satisfaction primaire qu'une femme normale m'apporterait ; dans ton anormalité, tu ne recules jamais. »
Et mine de rien, c'était un bon point.
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Lun 31 Mar - 18:14
A l’évocation de sa mère, les membres de Lola se tendent sensiblement et son regard scrutant la figure de son aîné se durcit, soudainement assombri par quelque chose de menaçant et d’amer. La mère, cette figure aimée ou haïe, parfois aimée et haïe, vénérée et sanctifiée toujours. Jusque dans son coin de rue les mecs se frappaient comme des lions survoltés pour un vulgaire ‘‘Ta mère la pute’’. Ta mère tu lui désobéis, tu la déçois, tu la désespères ; c’est ta fatalité de gentil gamin qu’a mal tourné de tailler sur les visages de tes parents les rides précoces de l’angoisse, d’alourdir leurs regards de nuits perdues à imaginer le pire jusqu’à que tu rentres ; et ta mère, surtout, tu craches sur les neuf mois de ce bonheur oublié en elle, sur tous ses rêves de te voir cartonner dans ta vie, sur tout ce qu’elle a sacrifié pour toi. T’en souffres, t’oses plus la regarder dans les yeux, tu dois ravaler toute la honte du monde dès que tu la sais dans la même pièce que toi ; et puis tu la hais de t’infliger une telle culpabilité, t’as pas le choix toi tu sais pas vivre autrement, t’aimes pas vivre autrement, elle a pas à te le reprocher.
« Vieille conne encore, c’était dans les bons jours. Mais ma mère est morte d’façon, alors on s’en fout de ce que j’ai pu lui balancer, non ? riposte-t-elle avec une froide exaspération. »
L’acerbité de sa voix, la dureté mordante de ses yeux, la rigidité âpre de sa posture, tout trahit la sensibilité hargneuse de sa personne au sujet épineux de sa mère – et surtout des rapports qu’elle entretenait avec elle. Il existe certaines choses dans la vie de chacun desquelles on évite à tout prix de parler, auxquelles on s’interdit même de penser ; ces douloureuses erreurs qui nous marquent et nous blessent pour toujours ; ces fragments de passé qui éveillent trop de souffrances endormies, de regrets étouffés, trop d’émotions pour un esprit déshabitué à toute forme de sentiment fulgurant. Le désenchantement qu’on cause à sa mère, le plus grand remords et la plus grande colère de toutes ces racailles qui sacrifient leur temps à l’oisiveté malsaine du shit et du sky.
Bref on parle pas de la daronne, y’a des mecs qui se sont faits péter les jambes pour des conneries de ce genre.
« Faites attention avec le sujet parents, vous pourriez en briser psychologiquement plus d’un dans le coin. »
La blonde ponctue ce conseil railleur d’un ricanement amer, comme si elle s’accusait moqueusement d’une mauvaise foi incroyable, et elle secoue brièvement la tête, blasée par sa propre connerie. Elle s’emporte vraiment pour des trucs trop cons, c’est bon quoi, le mec parle trois secondes de sa mère et déjà elle se braque, tranquille.
La réponse que Vergil daigne lui accorder lui fait hausser dubitativement le sourcil, ne sachant trop comment interpréter cette sorte de compliment un peu condescendant. Comme s’il lui tendait une croquette pour l’encourager à poursuivre ses efforts, pas ce qu’il y a de plus valorisant au monde. Enfin elle cherche pas à comprendre plus que ça, elle hausse les épaules, davantage préoccupée par le rapprochement furtif de son vis-à-vis – elle jette un coup d’œil rapide derrière elle, s’assurant instinctivement de la possibilité de fuir quand bien même elle se doute qu’elle fuira pas, et jauge l’adulte d’un air méfiant, figée dans l’attente circonspecte de son prochain mouvement.
« Les autres avaient qu’à être aussi simples et aussi pas prises de tête qu’Epicure... »
Yes we Kant, Nietzsche ta mère, tout ça – que des allemands, tiens. Enfin surtout l’absence de troubles, le bonheur dans la simplicité de ses désirs, ça lui parle pas mal, elle se sent un peu épicurienne du XXIe siècle en fait – l’abrutissement apaisant de la beuh, c’est pas ce qui se rapproche le plus de l’ataraxie si chère à cette philosophie de vie ? –, sans doute parce qu’elle résume le personnage d’Epicure à un genre de hippie clochard de l’Antiquité.
« ... Vous avez une manière bien à vous d’complimenter une meuf, dites, que Lola remarque avec un amusement un peu gouailleur. »
Malgré cela elle esquisse un mince sourire, l’un de ces minces sourires sincères et légers – dépourvus de l’amertume indolente inhérente à sa nature – qu’on parvient à lui soutirer au moment le plus inattendu. Elle sait très bien qu’elle aura pas droit à mieux, de toute façon, et que de la part de quelqu’un comme l’Allemand il s’agit déjà de quelque chose d’assez ouf. Puis même un compliment sentencieusement, froidement phrasé, ça s’apprécie quand t’es une meuf comme elle et qu’à force de te considérer comme une paire de jambes à écarter on se fatigue presque plus à te parler.
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Lun 31 Mar - 20:21
Touché, qu'il pense en français, le teuton, en voyant l'odieux visage se plisser d'une moue amère. Mais il n'éprouva pas de pitié face à cette réaction purement adolescente, cette rebuffade face à l'inacceptable qui se laisse soudain déchiffrer, l'absence, et la solitude, loin de ceux qui ont pu nous aimer un jour. Aurait-il pu être curieux par rapport à cette réaction, qu'il n'en aurait pas moins essayé de jeter de l'huile sur le feu ; mais il suffit, il n'était pas venu se terrer dans ce coin de verdure pour balancer sur les frêles épaules de Lola tout le poids d'un monde qui ne cesse de croître dans l'immaturité. Au contraire, il pencha la tête sur le côté, contemplant le créature d'un œil qui ne laissait pas même imaginer qu'il put être compatissant :
«Typique, comme réaction. » se contenta-t-il de lâcher
Aurait-il eu une meilleure réaction s'il avait été à sa place ? Non, probablement. L'empathie, c'était pour les autres, pour les faibles qui n'ont d'autre défense que celle de s'attacher à chaque émotion de leur vis-à-vis. Et tout ce qu'il ressentait face à l'agressivité croissante de la jeune fille était un étrange mélange de mépris et de vague pitié. Effectivement, au sein même de cet orphelinat, comment voulais-tu ne pas devenir fort, si tu t'apitoyais sur ton sort ? Mais il ne se méprenait pas sur les paroles de Lola, elle lui crachait son agacement à la face, lionceau effarouché, et il ne pouvait même pas faire un geste pour elle, éteindre cette colère mesquine qui brûlait tranquillement au cœur même de sa conscience. Pourtant, après ce qu'il avait pu entrevoir d'elle, il se doutait que cette froide conscience de son manque maternel ne devait pas ressembler pas. Blasée qu'elle était, la gamine. Brisée, aussi, songea l'homme, vaguement compréhensif. Dix années en arrière, il aurait pu avoir la même réaction, cracher sur l'héritage maternel, et se dresser du plus haut qu'il aurait pu face à la personne qui l'aurait défié ; dans un sens, grandir devait t'apaiser le cœur :
« Mais être ici, ce n'est pas surmonter ses problèmes pour en sortir plus fort ? »
Et sa voix aurait pu être caressante, s'il n'y avait pas eu cette ombre froide à peine palpable en filigrane. Vergil passa une main dans ses cheveux hérissées et leva distraitement les yeux vers la cime des arbres ; une pensée fugace sembla un instant assombrir son regard, avant qu'il ne daigne le reposer sur la jeune fille. Il ne se reprochait pas d'être cruel, ou froid, il se contentait de son caractère assommant, qui ne connaissait pas le remord. Mais il lui avait fallu énormément de temps pour construire cette barrière qu'il opposait au reste du monde ; il avait développé sa personnalité dans les orties, mais, paradoxalement, cette barrière était si fragile qu'elle explosait au moindre frôlement. Ça lui donnait parfois l'impression qu'il se déplaçait en plein champ de mines, lorsqu'il s'agissait de se contenir :
« En même temps, tu noteras qu'il n'y a que les grecs pour avoir une pensée aussi simpliste. »
Il grimaça, amusé par ce conflit permanent qui avait toujours opposé les hellénistes aux latinistes. On l'avait assez fait chier à la fac avec la supériorité de Rome sur Athènes ; nous, au moins, on défend les bons causeurs :
« Estime toi heureuse que je ne te serve pas le même genre de compliment qu'ont dû te sortir tes anciens coups. »
Aux adolescents, les compliments ébahis devant le féminin. Aux imbéciles heureux, les doucereuses lamentations de l'ego magnifié par les caresses. L'implacable allemand se permit un sourire, si sournois qu'il aurait pu en paraître cruel. Les cours allaient bientôt commencer, et que foutait-il, il s'enlisait dans cette discussion sans fin, aux accents de guerre mondiale. Et vu ce qu'on avait dû lui servir entre chaque baise, Vergil se doutait que ce qu'il lui disait au moins, manquait de cette lasse hypocrisie que les adolescents s'acharnaient à maintenir pour se donner l'impression qu'ils sentaient quelque chose de plus puissant que leur propre égoïsme. Ses doigts se nouèrent de nouveau autour du poignet de Lola et il sentit les fossettes de son sourire se creuser d'un rictus acide :
« J'crois que, de toute façon, tu préfères ce genre de mots à ceux, plus basiques, du premier quidam qui passerait entre tes cuisses. »
Mais pas de sentimentalisme pour les chiennes.
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Lun 31 Mar - 23:32
Pourquoi les adultes s’enorgueillissent d’une prétendue sagesse acquise en même pas une moitié de vie ? Pourquoi ils prétendent t’apprendre la vie, à toi petite ado’ abrutie par les emportements excessif de sa jeunesse, alors qu’eux-mêmes n’en sentent pas encore les premiers épuisements ? Arrêtez de nous juger avec condescendance, arrêtez de nous estimer selon les dogmes stéréotypés d’une adolescence tonitruante de débilité. On est pas tous cons, pas tous paumés dans le vice puéril de l’irresponsabilité, de l’inconscience. La mocheté, elle échappe pas à nos regards rouge weed, elle nous agresse partout avec ses blazes salement taggés au posca, la grisaille inquiétante et glaçante de ses bâtiments ; et nos erreurs, nos conneries, nos excès lancinent nos membres engourdis de leurs impitoyables remords. On est un peu fous, un peu irréfléchis, mais nous au moins on la décence, l’intelligence de pas se voiler la face. Enfin sauf littéralement parfois.
« Faut stopper cette manie de nous croire complètement teubés. Y’a pas d’réaction typique. J’vous fais comprendre que j’veux pas qu’on en parle, taisez-vous et prenez note au lieu d’me psychanalyser avec vos préjugés de... bah de vieux con, justement. »
Oh Louison, petite Louison trop farouche, pourquoi tu fais péter les feux risibles de l’embrouille superflue ? Ton esprit ne garde de ta mère rien de plus que quelques vagues réminiscences – les éclats de voix stridents d’une engueulade, la brûlure honteuse de la gifle contre sa joue pâle... –, des réminiscences à la façon d’une pléthore de petits bouts de verre enfoncée dans la sensibilité métaphysique de son âme, ouais, m’enfin rien d’insupportable, on a vécu largement pire, on s’en remet, ‘suffit d’un joint ou deux pour pas y penser. Pas la peine de se faire plus conne et plus immature qu’elle l’est pour ça. Pourtant ça fait mal, et ça fait mal qu’on renifle d’un dédain paternaliste face aux tressaillements de sa souffrance de déchet.
« Si on arrivait tous à surmonter tous nos problèmes, ça s’saurait j’crois, rétorque-t-elle hargneusement. L’être humain c’est pas comme les maths où y’a un problème et une solution, ou comme la physique où y’a un fait et une conséquence j’sais pas trop quoi. Puis justement l’institut s’occupe pas d’ça. On nous d’mande de devenir des génies, pas des gens heureux. »
Elle-même abasourdie par son audace – elle se permet beaucoup trop, là elle ouvre trop sa gueule, elle tente le Diable –, la Française s’oblige à une profonde inspiration et bougonne un ‘‘Pardon...’’ presque penaud à l’adresse de l’enseignant. Elle s’en veut de s’emballer à ce point et puis limite ça l’effraie, tous ces relents d’une rage – cette bile écœurante que tu craches et recraches vainement – longuement, nonchalamment étouffée dans les nuages capiteux de ses spliffs. Ses prunelles, plongées le plus sincèrement du monde dans celles de Vergil, supplient ce dernier d’avoir la décence de ne pas relancer le sujet.
« Et visiblement ça leur réussissait d’être simples d’esprit, Néron et Caligula ils étaient pas grecs que je sache... »
On imagine même pas, la diversité et la richesse des connaissances qu’on glane par-ci par-là lorsque l’on consacre ses nuits d’insomnie les plus vides, les plus angoissantes, à perdre le cours de ses pensées au fur et à mesure des pages Wikipédia entre lesquelles on navigue distraitement. Manière comme une autre de faire le deuil de son sommeil, rêve lointain et flou auquel on croit plus à force de désillusions. Et une étincelle amusée ravive le vert fatigué de ses yeux, d’un relèvement presqu’imperceptible les commissures de ses lèvres exacerbent confèrent au tracé acéré de son sourire quelque chose de gausseur ; il espère la blesser dans son honneur de salope ou il tente juste de s’assurer, lui, qu’elle vaut pas plus que n’importe quelle autre garce en chien qu’il baiserait dans les mêmes circonstances.
« Mes anciens coups m’faisaient pas d’compliments, vous inaugurez la tendance, ricane-t-elle indolemment, osant à peine jeter un coup d’œil sur cette main qui lui serre le poignet. »
Là-dessus la jeune fille dégage, d’un vif mouvement de la tête, les boucles folles que le doux vent du matin s’amuse à faire voleter devant son regard ; regard qu’elle égare inconsciemment et promptement vers ce qui se trouve derrière elle – craint-elle qu’on les prenne en flag ou que Vergil, ce genre de grand méchant loup, ne fasse qu’une bouchée du petit chaperon frisé ? – avant de daigner fixer avec une indifférence vulgairement feinte son vis-à-vis.
« Quoi, ma vie sexuelle vous intéresse tant qu’ça ? Parce qu’j’vous entends beaucoup parler d’mes coups, m’sieur. »
Privé d’allemand, le vilain prof’. Mais pas de baiser puisqu’elle consent à en coller un, moqueur de pudeur et d’innocence, sur sa joue – de la même manière qu’une niaise aux neurones dégommés par La Petite Maison dans la prairie glousserait de la stupidité de son homme.
Vergil
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Mar 1 Avr - 16:43
Au temps pour la trêve, pour ce qu'elle aura duré, celle-là. À peine de quoi ressourcer ses colères, avant de les relancer dans la bataille. Et tiens donc, c'est qu'elle développerait une théorie presque intéressante dans l'agressivité, la chieuse ; comme quoi un génie au tranchant émoussé, poussé dans ses retranchements, y puisera une force nouvelle. Mais au yeux de Vergil, qui n'avait pas la patience quasi légendaire que tout professeur se devrait de posséder, les mots de Lola recelaient des trésors de menace et d'insolence. Autant dire que sa colère s'embrasa d'une nouvelle vague flamboyante, et ses doigts se crispèrent sur les os fins, comme si, cette fois, la volonté de ses nerfs asphyxiés par sa rage, et celle de son corps, se joignaient pour ne former plus qu'une seule entité. Vergil-le-dictateur était de retour :
« Cette manie ? Mais si vous cessiez de vous comporter comme des animaux au cerveau atrophié par des années d'insolence ô combien crasse et collante, ça nous arrangerait bien que vous arrêtiez de faire du mythe adolescent un fait réel. On pourrait enfin vous traiter en adultes. Et puisque tu proposes que j'arrête de prendre cette fameuse légende au pied de la lettre, tu pourrais aussi, et très simplement, arrêter de réagir comme l'adolescente basse et ridicule que les clichés t'ont appris à être. »
Au passage, il n'en avait très certainement rien à branler, de sa mère – et surtout, il n'avait pas demandé à en entendre davantage sur elle ; alors pourquoi fallait-il que la française recommence à chercher les emmerdes, cette sordide petite créature aux instincts de vie aussi limités que ceux d'un lombric qui se traînerait pitoyablement sur une route ? Il avait déjà essayé la fessée, peut-être que la claque marcherait mieux. Mais l'homme décida de refouler encore une fois ses basses envies de vengeance ; si Lola décidait de criser comme un gosse, il s'agissait de garder un train d'avance et de faire... et bien, l'adulte. Quant à l'éventuelle crise identitaire des orphelins, l'allemand faillit rétorquer que, par essence, l'adolescent est malheureux, alors pourquoi gaspiller de l'argent et du personnel à tenter de lui offrir ce dont il ne voudrait pas :
« Enfin, j'suppose pas que la DASS française aurait été aussi tendre avec ton petit cul que la Wammy's House. »
Ici, au moins, elle pouvait se défoncer autant qu'elle le désirait ; Moriarty faisait souvent office de justice aveugle, et ses professeurs d'épées. Mais dans la plupart des cas, lesdites épées étaient émoussées, ou même, dans son cas, corrompues et couvertes de rouille. Il aurait pu s'abattre sur elle, mettre de côté les instincts humains qui gambadaient follement en lui, devenir une bête ; mais que resterait-il de Lola après ça ?
« Mais ils étaient fous, et non clochards grecs ; c'est ça qui est encore mieux. »
Dans un sens, il valait mieux être fou et roi de la cité – et roi de la cité hétérosexuel, tant qu'à faire -, que saint d'esprit et limité dans ses mouvements ; parce que là oú Néron avait glorieusement brûlé sa ville, Socrate, lui, avait dû se suicider. Le latin était empreint de cette folie sous jascente qui, combinée à la rigueur des déclinaisons, aurait suffi à mettre tout homme à terre, en proie aux délires schizophréniques qu'une telle culture peut produire. Et ces tentatives de diffamation Lolienne ne mettaient certes pas Vergil en joie, mais que voulez-vous, quand on enseigne quelque chose, on aura toujours affaire, à un moment ou à un autre, à de jeunes saboteurs. Elle aura au moins eu la perspicacité de sortir deux grands noms ; elle aurait pu aussi lui servir le cas des Horaces – les égocentriques possessifs -, qu'il n'aurait probablement rien trouvé à répliquer. Comme quoi, ma petite chérie, tu aurais pu assister à mes cours et avoir les moyens de me fermer la gueule. Too bad :
« Pourquoi ne m'intéresserait-elle pas, plutôt ? On m'a souvent dit que j'avais un côté très anthropologue ; ça pourrait être intéressant, d'étudier les mœurs d'une peuplade aussi barbare que la tienne. »
Et lorsque les lèvres de Lola frôlèrent sa joue, il tourna brutalement la tête pour les capturer, animal. Décidément ce dernier moyen restait le plus efficace pour qu'elle la ferme ; il s'en voulut d'avoir une pensée aussi machiste, mais repoussa aussitôt la vague honte qui avait effleuré son esprit.
Lola
Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ] Mar 1 Avr - 21:43
A croire que Vergil fait exprès de pas comprendre à ce point – et s’il s’agissait d’un de ses potes, ces gros teubés orgueilleusement stupides, déjà elle interromprait l’altercation de ses ‘‘Mais allez j’parle même plus avec toi là t’es trop bête ta gueule...’’ méprisants ; c’est pas le cas malheureusement alors elle écoute quand même, elle se résigne à répondre intelligemment – au mieux du possible – plutôt que de tout stopper brutalement. Peut-être aussi sur cette pression inquiétante et inconfortable qui s’exerce sur son poignet frêle. Surtout ce goût qu’elle se redécouvre pour la tension cauteleuse de deux hargnes fiévreuses qui s’affrontent – l’amour du danger, de l’appréhension – ; toujours cette fascination brûlante des grandes gueules face à celui qui, en un claquement de doigts, saurait l’impressionner. La faire taire. A tous les coups que les Mohammed Ali, les Michael Jordan se lassent pareil d’attendre le quelqu’un qui leur rappellera le goût amer, ferreux de la défaite sans jamais y avoir droit. Pas qu’elle se relâcherait – y’a un honneur à tenir – mais le risque menaçant de la défaite l’attire inconsciemment. Puis attends elle défend une cause – une cause, lol, Louison –, elle se doit au moins de tenir au nom de l’honneur de sa génération. Tant qu’à faire, autant héroïser son opiniâtreté de pauvre conne... immature.
« Et quoi, faudrait qu’on arrête d’être tristes ou en colère sous prétexte qu’on se conformerait à un cliché ? Faudrait qu’on s’écrase parce que résister c’est se rebeller comme un gamin ? On vous interdit d’être aigris ou blasés parce que ça serait donner raison au stéréotype du vieux dégoûté de la vie ? Et j’réagis comme je veux – ah bah tiens, on parlait justement de clichés, bien ouej Lola –, j’ai encore l’droit d’m’exprimer que j’sache. »
Pas de Staline moustachu dans les parages pour envoyer au Goulag le premier qui arrêterait d’applaudir – encore que la blonde kifferait bien obliger toute une masse à l’acclamer jusqu’à en crever avec la peur au ventre, elle s’imaginerait parrain imposant d’une mafia qui se pisserait dessus à la seule vue de sa silhouette au loin. Le manque de beuh éveillerait en elle une mégalomanie refoulée ? Oh, l’histoire de ouf que ça ferait. Une jeune fille relativement saine d’esprit, bien que surdouée, pète un câble à la suite de la disparition totale et irrémédiable du cannabis et tue tout le monde – Gamzee style. Bilan, une dizaine d’élèves grièvement blessés – et un enseignant sauvagement assassiné, ajoute-t-elle en fixant d’un air exaspéré le principal concerné.
« Ma tante m’aurait peut-être adopté si la Wammy’s House s’en était pas mêlée..., bougonne-t-elle sans réelle conviction en détournant le regard. »
Tata Clémence, l’adopter ? Quel délire – déjà en plein dans les procédures elle haussait un sourcil dubitatif lorsque la ‘‘meuf conne aux gros eins ma gueule’’ évoquait cette éventualité. Elle méprisait sa mère, cette salope, et craindrait trop la mauvaise influence de ‘‘la petite Louison oui oui, celle qui fume de la drogue et traîne avec des délinquants, ma nièce oui’’ sur sa gentille petite famille pour l’accepter sous son toit. Tant mieux, Lola préfère encore de loin la morne austérité de cet orphelinat à la stricte niaiserie d’une tante frappadingue qui s’acharnerait à la remettre dans le droit chemin – mais ça elle l’avouera jamais, il s’agit d’ouvrir sa gueule pour réduire l’autre au silence, pas de partager rêveusement les lambeaux de son passé difficile après une nuit intense de baise contrairement à ce qu’en disent les Twilight et les Fifty Shades of Gray. Elle aurait bien prétendu qu’elle se serait démerdée pour se faire émanciper si, même pour un génie, à quatorze ans c’était pas hautement improbable. Donc va pour l’adoption très douteusement supposée.
« Les clochards grecs ont osé envoyer chier des mecs comme Alexandre le Grand, vos fous romains, à part faire des consuls de leurs chevaux préférés... »
A la fois hilarant et flippant de constater à quel point certains hommes perdent la boule dès qu’on leur confie le pouvoir. Rien que pour récupérer des anecdotes à la con comme ça, ces petites histoires qui prouvent l’intemporalité, l’universalité du what the fuck dans les agissements de l’espèce humaine, la blonde se motiverait éventuellement à se ramener en cours – elle doute néanmoins que Vergil soit du genre à ponctuer ses discours scolaires de ‘‘Lol, vous saviez que l’empereur Claude était super moche, qu’il bégayait et qu’il bavait ?’’.
« C’est né dans une nation qu’a exterminé des juifs à la chaîne y’a même pas un siècle et ça vient m’parler de barbarie ? cingle-t-elle d’un ton acerbe, un grand sourire incrédule – comme si ce que le gars disait avec le plus grand sérieux tenait plus selon elle d’une bonne blague qu’on essaye vainement de rendre convaincante – fleurissant sur ses lèvres. Vous m’faites marrer. »
Il la prend de court, le nazi pédophile, à la provoquer d’une manière aussi sournoise et aussi ahurissante. Parce que c’est de la pure provocation, non, de l’embrasser avec une telle bestialité après l’avoir méchamment taclée ? Il a pas le droit de faire ça, pas le droit de tout lui faire oublier en un frisson de plaisir, pas le droit de l’obliger à ravaler ses mots pour le délice coupable d’un baiser. Ça se fait pas, d’exploiter les enivrants vertiges de ses faiblesses charnelles.
« Votre truc là c’est une technique de meuf, ricane-t-elle faiblement. Dans ma peuplade de barbares au moins les mecs se conduisent comme des mecs. »
Ouais, et quand ils veulent le silence ils t’éclatent la joue d’une bonne droite, mais rarement besoin d’aller jusque-là, l’instinct de survie devine les situations dans lesquelles on n’a pas spécialement envie de t’entendre. Au pieu, lors d’une embrouille entre mecs... Mais tout ça tu l’oublies, trop occupée que tu es à jauger ton adversaire d’un air condescendant, respectant précautionneusement la mince distance entre vous deux tel un pitoyable semblant de barrière que tu t’interdis de franchir.
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Sujet: Re: Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ]
Meurtre parfait. Meurtre raté [Lola][- 18, les enfants][TERMINÉ]