nearly all men can stand adversity,
but if you want to test a man's character, give him power.

Ce bureau était à son image. Vide, poussiéreux, austère. Peu de lumière y parvenait, compte tenu de sa situation au rez-de-chaussée, naturellement dissimulé par des bosquets et artificiellement par des stores boisés. Monsieur Kaplan passait peu de temps à la Wammy's House, veillant toutefois à assurer des heures de permanences régulières. Mais peu d'orphelins usaient de son temps : quelques blagues, quelques moqueries. Mais aussi quelques confessions, par dessus un thé. Ces enfants aux yeux acérés n'étaient pas sans lui rappeler les quelques grands criminels qu'ils avaient interrogé dans sa carrière.

Et l'un d'entre eux lui rappelait terriblement L.

Ce n'était pas leur première conversation. Le garçon veillait à le laisser sur sa faim, comme pour le tester, où, comme si les rôles s'inversaient, attiser la curiosité du superviseur. Cette situation l'indifférait jusqu'à aujourd'hui. Il l'attendait, dans une frustration grandissante, bousculant théire et sucre, veillant à ce que le bureau soit parfaitement insonaurisé, demandant au personnel de bloquer le couloir, et ce dans le plus grand secret.

Tout ça parce que l'héritier officiel rendait visite au superviseur de la Wammy's House.

Finalement, prenant son mal en patience, Kaplan laissa tomber son immense carcasse le fauteuil de bureau, croisant les mains sous son menton, ses yeux gris rivés sur l'horloge au dessus de la porte. Porte qui s'ouvrit à 18h00 précise.

— Bonsoir. Asseyez-vous.

Il designa, d'un bref coup de menton, la tasse fumante et la tartelette, et, à brûle-pourpoint, demanda enfin :

— Un nom ?

Monsieur Kaplan sentait l'agacement le gagner à une plus grande vitesse qu'à l'accoutumée. La posture de l'enfant, jusqu'à sa manie et ses habits immaculés : tout lui évoquait L dans sa jeunesse, et donc la sienne. Monsieur Kaplan était en effet l'unique rival de L à l'époque de l'orphelinat. Chassant ces lointains souvenirs d'un las abaissement de paupières, le superviseur vrilla son regard bleutés dans les yeux distraits de Near. Peine perdu, celui-ci le narguait ouvertement. C'est ainsi qu'avec une pointe de satisfaction qu'il pu répondre :

— Vous aurez les documents une fois que j'aurais un nom.

Il se leva, le grincement de sa chaise de bureau l'accompagnant, et lui tourna le dos, écartant les stores de deux doigts.

— Vous êtes celui qui a besoin de prouver sa supériorité. Inutile de me faire attendre.

Il ne put retenir un sourire en coin, tandis que le coin de ses yeux se plissaient. Near n'était pas le seul à être pourri d'ego. Cette simple dénonciation tournait au défi.

Sans se retourner il murmura :

— Qui ?

Imperceptiblement, l'excitation remplaçait l'agacement premier, une veine inquiète gonflait même sur son large cou. Il parvenait enfin à son but : redorer le blason de la Wammy's House, sa première maison.

Ils restèrent parfaitement silencieux un instant, seulement troublés un moment par deux jeunes qui passaient dans le jardin, à la hauteur de la fenêtre. Leurs rires se perdirent toutefois bien vite. Kaplan avait l'impression de voir fondre toute patience face au jeune adolescent, comme il le faisait si souvent par le passé, en face de L. Il lâcha un soupir, non de vaincu, du moins pas encore, mais qui sonnait comme un appel au calme. Quelle valeur avait-il à s'énerver contre un gamin ?

— J'étais à votre place il y a longtemps de cela. Ces murs furent également ma demeure.

Le superviseur s'appuya contre le mur, tout proche de la fenêtre, son regard se fixant sur le vide.

— Alors je connais bien l'ambiance de compétition qui règne ici. On pourrait même dire que je suis l'un des seuls adultes du coin à vraiment vous comprendre, vous.

Il reposa ses yeux gris sur Near.

— Si vous voulez prouver une fois pour toute que vous êtes le meilleur, vous devez me donner ce nom. Après nous parlerons de vos privilèges.

Un tic nerveux agita sa mâchoire quand il ajouta, plus bas :

— Meilleur que votre ami Mello.