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 Phlegmat : from disgust to silence.

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Invité
Sujet: Phlegmat : from disgust to silence. Phlegmat : from disgust to silence. EmptyDim 27 Déc - 0:31

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    SURNAME : Legmend [lIgm«nd]
    NAME : Phineas [FAiniùs]
    PSEUDONYME : Phlegmat

    Lorsqu'il dut se trouver un surnom, Phineas ne sut pas trop quoi choisir. Cette règle qui avait l'air d'avoir été instaurée depuis bien longtemps l'étonna et le fit sourire. Il se mit alors à écrire sur la petite feuille en papier un « Ph », comme Phyllis. Il bloqua un peu sur la suite. Tout en pensant au flegme dont on l'affublait souvent, le « legm » s'écrit tout seul sur la feuille. Puis soudain, il regarda le morceau de papier comme la pire des atrocités de cette terre. « Phlegm ».
    Le flegme est un mot français qui n'a qu'une seule signification, mais il est vrai qu'en anglais, il a une tout autre définition, bien plus souvent connu et employée que son homonyme. Il définit les fluides corporels visqueux comme le sang, les écoulements nasaux, le sperme et tant d'autres joies de la vie. Le ventre du jeune garçon se noua un instant alors que son esprit définissait le mot comme il devait l'être et un « atic » suivi les précédentes lettres avec frénésie, laissant là un adjectif qui n'avait plus rien d'affreux.
    Phineas regarda le mot avec intérêt. Non, ça ne pouvait pas être un mot qui signifiait quelque chose. Il effaça les deux dernières lettres.

    « Phlegmat », voilà qui était parfait. Il y avait toute l'essence de sa vie dans ce pseudonyme. Il y avait l'horreur du corps, le silence de l'ignorance et la folie du néologisme. Parfait.


    AGE : 19 ans
    DATE OF BIRTH : 24 décembre 1990
    DATE OF ARRIVAL AT WAMMY'S HOUSE : 25 Octobre 1997
    GROUP : Chocolate Rangers

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    IQ : 195
    OBSESSION : « I can't help myself. »

    Avec le temps, les petites choses que Phineas ne supportait pas ont pris beaucoup d'ampleur. Elles ont fini par prendre tellement d'ampleur que c'est devenu une manie pour lui de s'enfuir face à certaines choses qui l'insupportent.
    Ces choses sont, pour la plupart, de simples mots. Mais pour Phineas, les mots ne sont pas de « simples mots ». Les mots ont eux aussi une âme, une existence, un but. Ils ne doivent pas être utilisés à mauvais escients ; certains ne devraient pas être utilisés tout court. Certains lui rappellent de trop mauvais souvenirs.

    Après quelques souvenirs douloureux et pas mal d'années, il est intéressant de voir comme l'esprit d'une personne, même douée d'une intelligence hors norme, efface certaines choses.
    Phineas a ainsi très peu de souvenir de son père et de sa mère. Il y a juste ce mot qui ne pourra jamais s'effacer, ce mot qu'il prononçait chaque matin avec un vice recherché. Il jouait avec les lettres comme avec une arme blanche, qu'il jetait à la figure de sa femme et de son fils. « Hell...o ». Il chuchotait l'enfer en affichant un large sourire. Cynique, froid, terrifiant.

    Heureusement pour Phineas, les jeunes de nos jours écourtent les mots, les banalisent et les transforment. Ainsi, il est plus courant qu'on lui dise « Hi », plutôt que « Hello » et c'est un grand soulagement pour lui. Un simple bonjour pourrait tout simplement bousiller toute sa journée.

    Voilà une légère logo-phobie qui se traduit par une amusante manie de reprendre les mots par des regards soutenus, ou bien des gestes appuyés ; parfois, il s'en ira sans gène en plein milieu de la conversation et ce sans raison apparente. C'est inoffensif, mais assez surprenant et plutôt amusant.


    DREAM, AMBITIONS ABND RELATIONS : « Le temps passe et rien ne change. Seule ma peau se tord sous la pression d'une vie trop étranglée. J'ai vu, je vis. »

    Malgré toutes ces années, malgré toutes ces choses qu'il sait, tous ces points qui pourraient faire de lui un personnage important, Phineas n'a pas vraiment d'ambition, ni même de rêve. Pour lui, les minutes, les heures, les jours se suivent, tous semblables, tous mornes.
    La plupart de ses journées se résument ainsi à une longue question qui vise à comprendre le but de l'existence humaine, le but de son existence, le pourquoi du comment est-il vivant.

    Mello est le seul à pouvoir briser ce terne quotidien.
    Lui, sa vie éclatante et les traces de chocolat sur ses doigts sont arrivés bien avant Phineas, alors même que sa vie avait un semblant de raison. Enfin, c'est ce qu'il s'était dit.
    Il est le genre de personne qu'on ne rencontre pas souvent, une lumière instable qui vous éblouit ; insupportable mais rassurante.
    À vrai dire, Phineas n'a presque jamais interagit avec le jeune Mello. Peut-être est-ce une chance ? C'est du moins ce qu'il s'obstine à penser. Heureux de constater que son arrivée à l'orphelinat ne fit pas de vague, tout cela grâce à l'arrivée, un peu plus tôt, de deux jumeaux antisociaux : Gost et Willow. Ces deux phénomènes auront réussi à porter toute l'attention sur leur personne. Merveilleux.
    Phineas aura ainsi pu observer, analyser, de près, tout son environnement. Il apprit ainsi à apprécier une personne, une seule : Mello et sa lumière exaspérante.

    En 2001, lors de la création des Chocolate Rangers, il rejoint donc le petit groupe. Visible et pourtant invisible, il décida qu'il aiderait le fabuleux fou.
    Bien sûr, son flegme légendaire n'en fut pas terni. Il ne ressent donc rien de particulier contre les dits « ennemis » de la tornade blonde.

    Tout d'abord, il y eut Zero. Ce petit brun n'intrigua que vaguement notre flegmatique. À ce jour, on ne peut pas dire qu'il ne l'aime pas, bien qu'il tente, tant qu'à faire, de ne pas trop s'en approcher. Quand on a tout son temps pour examiner les gens, on remarque facilement ceux qui sont à éviter. Zero fait partie de cette catégorie de gens qu'il vaut mieux, selon Phineas, ne pas fréquenter.
    S'en suivit l'arrivée d'un jeune garçon au potentiel fort intéressant ; Near. Phineas se fit une remarque à l'arrivée de ce jeune homme. L'intelligence exacerbe-t-elle le dédain ? Peut-être est-ce cette conscience accrue, cette perception acerbe de la vie qui les rend inaptes à tout rapport humain ? Peut-être. Il ne fit pas de ce cas une généralité, mais consentit au fait que l'intelligence de Near lui était nettement supérieure, tout comme elle était largement supérieure à celle de Mello. Malheureusement, il s'accorda sur le fait que le petit albinos risquait de ne pas succéder à L, vu son manque d'amabilité et de relations.
    Ensuite il y eut Lust. Cette jolie petite brune aux airs de garçon ne lui inspirait d'abord ni confiance ni mépris. Il la vit arriver quelques années après lui et développer ces relations étranges avec Mello. Des sentiments, elle en était farcie.
    Avec le temps, il finit par la trouver amusante, vivante. Des qualités qui la rapprochaient vaguement de son « ami » Mello. Pour Phineas, leur relation est ce qui pourrait le plus se rapprocher de l'amour. Il sait bien sûr que ce n'est pas le cas, mais s'amuse à les imaginer s'entendre, rire ensemble, s'apprécier.
    Lui qui n'a jamais connu l'amour et la tendresse, les imagine souvent. Il crée, dans son esprit torturé, des scènes dignes de livres pour enfant, où la princesse accepte tendrement la main du prince. Il se moque de lui-même pour être si futile. L'amour, à quoi cela sert-il ? Il se le demande souvent.
    En ce qui concerne Matt, il n'y a pas grand-chose à dire.
    Bien qu'il fut arrivé avant lui, tout comme Mello. Phineas mit un certain temps avant de s'intéresser à lui. À vrai dire, même après s'être penché sur son cas, il n'y aura rien trouvé d'intéressant, peut-être un vague décalage face à la réalité. Il est clair qu'il s'échappe, s'endort grâce à ses fameux jeux vidéo et pourtant, pourtant il colle parfaitement à Mello. Ces deux amis vont très bien ensemble. Si bien que pour Phineas, Matt n'est pas vraiment « Matt », il est seulement l'acolyte de l'ombre, une vie enfermée de par elle-même dans un monde qui ne lui appartient pas.


    PHOBIA : « You feel vulnerable around me. »

    Le cauchemar de Phineas, le seul est unique cauchemar qui occupe son esprit, n'est qu'une pâle théâtralisation de son passé oublié. De ce seul, atroce rêve qui le hante, découle nombre de phobies toutes aussi incompréhensibles les unes que les autres pour les spectateurs de ses comportements inconsciemment désuets.
    Nous ne noterons que les plus flagrantes, mais sachez qu'à celles-là s'ajoutent de nombreuses autres.
    La première, la plus flagrante de toutes, est son aversion pour certains mots. Pour Phineas, certains mots sont une atrocité à entendre. Une phobie assez étrange, je vous l'accorde. Des mots simples comme « Hello », « God », ou encore « Phlegm » lui sont insupportables à entendre. Vous comprendrez ainsi que pour lui, entendre ou bien lire son propre pseudonyme est un réel supplice. Supplice supporté et porté de plein gré. Il a en effet choisi ce pseudonyme pour cette simple est bonne raison, qui est de lui rappeler à quel point sa vie est insupportable. À quel point la contraction de son nom et de son prénom donne un mot horrible, dégoutant, sale et morbide.
    La seconde phobie de Phineas, légèrement moins visible, est cette peur inconsidérée qu'il a des singes. Leur tête affreuse, leurs mines bestiales qui se rapprochent tant de l'homme l'insupportent, non, plus que ça, elles lui donnent envie de vomir, de crier, de s'enfuir le plus loin possible.


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    Il y a des histoires qu'on ne raconte pas. Des histoires qu'on ne lit pas, qu'on ne peut que vivre, enfermer et laisser mourir avec soi. Malheureusement, ce sont ces histoires qui ne meurent jamais et qui, au lieu de s'étouffer avec le temps, restent gravées pour toujours dans l'histoire.

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    Tout commence un lundi matin d'automne, devant les portes d'une école élitiste anglaise bien connue. Oxford, c'est un nom qui sonne bien et qui résonne bien souvent. Parents et grands-parents en parlent dans toute l'Angleterre, du tapis doré de l'éducation internationale, de la vie faite de félicité qui attend les progénitures des naïfs, optimistes et rêveurs qui comptent changer l'histoire de leurs malheureuses familles en s'endettant jusqu'au cou sur du probable. Les enfants, eux, ne demandent rien à personne : ils sont niais, inconscients ; on leur mâche les gros bouts pour leur donner à tous la même bouillie à l'air déroutant qui pourtant mènera inévitablement à leur croissance et bien-être. Alors ils passent leurs vies à travailler pour des raisons obscures, pour des rêves qui ne leur appartiennent pas et ils finissent leurs parcours, complètement perdus, au milieu d'une réalité qu'on ne leur a pas appris.

    Il s'appelle William, c'est loin d'être un prince, mais le portefeuille y est, la Berline aussi. Cette première année à l'Université d'oxford s'annonce pour lui comme le début d'une longue route monotone et sans piquant. Une route qu'il doit choisir, pour faire comme son père, pour faire honneur à sa famille d'heureux bourgeois. Il a une compagnie à reprendre et pourtant il n'entre qu'à peine dans sa majorité, il ne connait rien à la vie et encore moins au monde du travail, alors il doit apprendre. Si tant est qu'il apprenne quoi que ce soit d'utile en fin de compte ; enfin ça, il n'y pense pas. Il est bien trop occupé à faire semblant d'être un jeune homme modèle, pour que l'on ne voit pas qu'il ne s'est jamais intéressé aux jeunes filles de son âge et qu'il passe un dimanche soir sur deux à sillonner les rues de la ville en compagnie d'amis aussi stupides que brutaux, jetant avec eux son dévolu sur la première personne qui aura eu la malchance de passer par là.

    Elle s'appelle Orsane et vous l'aurez compris, elle n'est pas anglaise. C'est une petite catholique française qui a vécu toute son enfance à Paris avec son père, un bourgeois moyen qui a toujours rêvé de vivre en Angleterre. C'est pourquoi elle a travaillé toute son enfance à un rythme robotique et est partie faire ses études à Oxford. Malheureusement, c'est le lendemain de l'obtention de son baccalauréat que son père décède des suites de complications cardiaques. C'est ainsi qu'elle se retrouve seule, en Grande-Bretagne, avec un compte en banque toutefois bien garni grâce à un héritage conséquent. Pour elle, le chemin se présente comme une vague embarcation en mer. Seule face à l'immensité aquatique et brumeuse, elle est perdue et avance sans but précis.

    Admettons-le, leur histoire se fond parmi tant d'autres, au milieu des feuilles mortes d'automne, rougeoyantes, dansantes, qui tournent avec légèreté. C'est bien mielleux, leurs regards se croisent et se recroisent, enfin pour être exact, William se fait scruter encore et encore avec insistance. Il ne sait pas trop quoi faire, il n'est pas doté d'une intelligence qui soulèverait des montagnes, alors il sourit avec une certaine niaiserie qui ressemble à s'y méprendre à du flirt, ou du moins de l'intérêt pour cette jolie brune à la silhouette élancée et aux yeux noisette, mais qui n'en est pas, tellement pas qu'il va s'en approcher avec calme pour lui demander pourquoi elle n'arrête pas de le regarder. Les premiers mots sont échangés, c'est la fin du début.


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    On croit toujours qu'on peut cacher l'évident, alors pourquoi des abrutis se seraient évertués à définir un tel mot ? Aurait-il fallut les lyncher, leur prouver que tout peut être dissimulé. Non, certain ont tenté, mais personne n'y est parvenu, car l'évidence est l'évidence. C'est indéniable.
    Vous pourrez résumer « l'histoire d'amour » qui suit, si vous le désirez, en disant simplement qu'elle n'est que la couverture aux vices d'un homme malsain, tant concerné par son devenir social qu'il dut trouver un moyen pour vivre ses obscures pulsions sans éveiller de soupçons.

    Il arrive un âge où on vous regarde avec intérêt si vous n'avez pas vécu ce que tout le monde aurait dû vivre. Quand William atteint cet âge, il constata bien les regards interrogateurs de son entourage. Comment un beau jeune homme, riche de surcroit, a pu rester sans l'ombre d'une conquête malgré toutes ces années ? Pourquoi ne regarde-t-il pas ces jeunes femmes en tenue légère sur la plage comme le font les autres ? Les questions tournaient dans son cercle de parents, puis d'amis, pour enfin lui revenir aux oreilles. Comme toute réputation, elle fit un tour complet. C'est pourquoi il saisit l'occasion, après tout, qu'avait-il à y perdre ? Il savait qu'il ne voudrait jamais se marier. Les femmes, toutes des imbéciles juste bonnes à vous faire perdre votre sang froid quand vient le moment fatidique du mois, ça, il en était convaincu, elles n'avaient rien d'autre à offrir que quelques hormones et deux trois ovules. Des ovules, ça, peut-être que ça pourrait l'intéresser. Oui, ça l'intéressait et plus qu'un peu.
    Il n'eut pas grand-chose à faire pour la conquérir, après tout, tout le monde avait bien vu qu'elle l'aimait depuis le tout début. Elle le regardait avec des yeux de merlan frit chaque jour que Dieu faisait, un supplice qu'il se devrait de supporter autant de temps qu'il le faudrait, s'il le fallait, il la calmerait de temps en temps pour qu'elle reste à la maison et arrête de le faire chier. C'est ce qu'il s'était dit.

    Tout s'est ainsi fait rapidement. Un baiser et elle rougit, une soirée et elle lui dit qu'elle l'aime, mais très vite, sa vraie personnalité ressort, il a du mal à se contenir du matin jusqu'au soir. Toutefois, comme le dit Hermann Hesse ; La tendresse est plus forte que la dureté, l'eau est plus forte que le rocher, l'amour est plus fort que la violence. Alors, c'est avec les larmes aux yeux et un sourire niais qu'elle lui dit « oui », dans ce restaurant à 76€ le repas avec champagne, quand il lui demande sa main. Pour le meilleur et pour le pire.


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    Les premières années passent et avec elles le temps efface les souvenirs heureux d'une jeune femme pleine d'espoirs, de rêves, d'amour. Le ventre rond, un bras cassé, elle repasse une chemise pour la troisième fois en regardant les flocons de neige tomber doucement sur la vitre. Depuis combien de temps n'est-elle pas sortie de chez elle ? Y a-t-il quelqu'un pour se demander comment elle va ?
    Elle sait qu'elle n'est pas la seule, cette année là, elles sont approximativement 650 dans toute l'Angleterre à vivre l'enfer quotidiennement, 30% d'entre elles sont enceinte.

    Il rentre et les gestes habituels se répètent comme un manège qui tourbillonne et vous donne la gerbe. Elle esquisse un sourire qui reste imperceptible à cause de sa joue gonflée, la douleur lui fait plisser les yeux, il déteste ça.

    Allongée par terre, elle perd les eaux et lance un regard perdu et désolé à son mari. L'homme se dirige lentement vers le téléphone, il regagne son calme, il devra maintenir un ton posé et inquiet lorsque son ami décrochera. Il y a du bon à avoir des médecins dans ses connaissances, on évite les hôpitaux et leurs longs examens qui découvrent trop bien derrière une femme enceinte, tombée malencontreusement du canapé, une épouse battue qui multiplie les bleus.

    Un seau d'eau, des ustensiles stériles et un grand drap sur le canapé. Il est né le divin enfant.
    La sage femme, un vieil ami autant gonflé par la richesse que la solitude, qui n'avait pas grand-chose à faire pour Noël, sourit au mari aimant qui tient gentiment la main de sa femme endormie tout en lui expliquant les raisons logiques et traditionnelles qui les empêchaient de donner naissance à cet enfant dans un hôpital. Il n'a pas l'air très convaincu, mais l'homme au doux sourire l'invite à rester avec eux pour lui expliquer comment prendre soin du nouveau né. Ravi, il s'assied et prend une tasse de thé. William sourit, c'est dans la poche.


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    Il est amusant de constater que dans chaque famille, le père, ou bien la mère, cherche à retrouver quelque chose dans son enfant, quelque chose qui le caractériserait à travers cette nouvelle vie qui n'est pas la sienne, mais seulement celle qu'il a contribué à créer. Bien sûr, il va aussi chercher ces défauts qui le caractérisent, qu'il espèrera ne jamais retrouver dans son enfant. Ceci est une généralité, mais je pense qu'on peut affirmer que c'est le cas pour chaque parent sur cette terre.
    Même si pour William ceci n'était pas d'une importance capitale, il constata ainsi que son fils n'était pas blond, mais bien brun, comme sa mère et que, malgré des petits yeux en amande rappelant son constant regard stoïque, ses pupilles restaient entourées de marron et pas de vert. Bref, ce bébé au nez retroussé et aux petites lèvres efféminées avait tout de sa maman, seul son prénom - « Phineas », typiquement british, aux allures bourgeoises, classiques et indémodables - rappelait à tous qu'il n'était pas que le fruit d'Orsane.
    Déjà né donc, il énervait papa, c'était mal parti.

    Après un an, William ne voyait en son enfant plus qu'une pâle copie de la chose inutile qui lui servait de femme : il se mettait à pleurer pour tout et rien, ne parlait que pour dire des mots incompréhensibles et inesthétiques et, passait ses journées à ne rien faire. Il s'était retrouvé déçu d'avoir eu un enfant. En fait, dès le départ, c'était le fait d'avoir eu un fils plutôt qu'une fille qui l'avait déçu. Tant d'efforts, neuf mois durant lesquels sa femme fut deux fois plus 'une bonne à rien' qu'à son habitude, tout ça pour ne pas avoir le résultat escompté...
    Ça n'allait pas, il lui fallait ce qu'il voulait, il ne pourrait pas en supporter davantage sans un minimum de compensation réelle. Il fallait réessayer, il ferait son possible pour que cette fois, ce soit la bonne.

    L'année qui suivit fut ainsi l'année la plus douce qu'ait jamais vécue Orsane en étant mariée. Son mari, trop occupé entre son travail au bureau et ses déplacements, n'était plus présent qu'un jour sur trois. Conscient, aux vues des conditions physiques de sa femme, qu'il ne pourrait pas faire la même chose que pour Phineas, pour la seconde grossesse il s'était ainsi arrangé pour être le moins souvent possible en contact avec des sources d'énervement et avait engagé une infirmière, le temps de la grossesse.


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    Un homme en blanc sort de la salle d'opération le sourire aux lèvres, content que ce soit pour une fois une bonne nouvelle qu'il ait à annoncer.
    « You've got a wonderful little girl ! »
    L'homme en noir à qui il s'adresse laisse s'échapper un large sourire qu'il ne peut pas contrôler. La victoire aime l'effort, comme dirait Catulle.

    L'histoire qui suit est la source de tous les cauchemars de Phineas. S'il en éprouvait le besoin, il pourrait vous détailler ces cauchemars avec une précision étonnante, pour la simple et bonne raison que ceux-ci se répètent inlassablement chaque soir.
    Les images se suivent sans rythme, elles clignotent dans une pièce lugubre. Le singe grandit et s'anime, ne faisant plus qu'un avec sa petite proie. Il la dévore lentement, il savoure avec un large sourire la viande vivante qui se meut devant lui et laisse le sang glisser le long de ses larges lèvres. Son souffle est fort, si fort que Phineas ne peut plus bouger, coincé derrière d'épais rideaux d'un pourpre pesant. Il ne peut que poser la paume de ses mains sur ses yeux et se replier sur lui-même. Mais plus il ferme les yeux, plus le souffle du singe devient fort, plus les images se multiplient dans sa tête. Alors, il pleure et s'étouffe en empêchant ses sanglots de prendre trop d'ampleur, mais plus il se force, plus il est bruyant. Soudain il se rend compte que ses pleurs sont devenus si forts qu'il n'entend plus le souffle horrible de la bête, il lève alors les yeux et cesse instantanément de pleurer en voyant la bête s'approcher doucement de lui. Son sourire est sanglant et ses grandes mains son gluantes, il fixe avec intérêt le jeune garçon qui sent son estomac se tordre de plus en plus fort, l'envie de vomir monte et monte encore. Quand alors le rideau s'ouvre. Un calme et lent « Hell... O » résonne dans la tête de Phineas qui se réveille enfin de sa torpeur, chaque matin ainsi torturé par son esprit. Une fois réveillé, le mot résonne longtemps dans sa tête, parfois la douleur est si forte qu'il ne peut s'empêcher d'aller vomir dans les minutes qui suivent.

    Cette histoire, c'est celle d'une femme torturée par la vie. Chaque matin, elle passe la main sur son visage déformé. Plus rien ne ressort de ses émotions, ses expressions restent vides et son regard ne sait plus vers qui se tourner.
    Il vient un moment où vous vous résignez, un moment où il ne sert plus à rien de pleurer, de crier, car de toute façon, votre vie s'en est allée, alors à quoi bon lutter. Mais que faire quand ce n'est plus de votre vie qu'il s'agit ? Que faire quand c'est l'espoir d'un monde nouveau qui s'évapore, détruit par un passé écrasant ?

    Caché sous une latte d'un vieux parquet, l'histoire d'une vie est écrite sur un vieux manuscrit dont la première page est signée « Pour mon unique fille, la plus belle princesse de France. Je t'aime ». Les paragraphes s'y suivent sans date ni heure, l'auteur n'a pas vraiment l'air de différencier les jours. Sur la dernière page, on peut y voir une photographie ; un couple et deux enfants, une famille aux airs heureux.


    - -


    Les premiers mots sont écrits d'une main tremblante, les traits sont irréguliers et certaines lettres sont seulement à moitié écrites.
    « Le français est mon refuge.
    […]

    Dieu que mes prières te reviennent.
    En cinq années, mon soulagement fut merveilleux. Je n'ai cure de ses mauvais traitements sur ma personne. On m'avait dit qu'on se faisait à tout, effectivement l'esprit a cette faculté d'adaptation qui m'étonne chaque jour un peu plus. Je fus soulagée en voyant les gestes attentionnés de William. À vrai dire c'était une espérance, un souhait. Je ne fus donc pas étonnée, mais bien soulagée. Sa douceur envers Phyllis m'a rappelé nos premiers mois. Son sourire était radieux[...] »
    Des traces de larme effaces quelques mots. « Malheureusement, mon bonheur inespéré m'a aveuglé. Dois-je me blâmer pour cela seigneur ? Sûrement. Il est clair que ma vie n'a plus aucun sens sans mes doux enfants, dans ce cas j'aurais dû les protéger plus que ma vie elle-même, leur porter plus d'attention qu'à mon propre bonheur. Seigneur, me blâmes-tu pour n'être qu'une pauvre égoïste ? N'est-ce pas humain ? Alors, dans ce cas seigneur ouvre les ailes protectrices qui m'entourent et protège mes enfants avec celles-ci, donne leur toute la protection que je ne mérite pas, donne leur toutes les attentions que je ne peux plus avoir. Aide Phineas à faire face à l'ignorance de son père, aide William dans ses obscures pensées.

    Ce que j'ai vu, j'ai cru l'avoir imaginé.
    Après m'être faite réprimandée par William, je ne m'étais plus approchée des rideaux pourpres qui séparent son bureau du reste de la maison comme convenu. Est-ce que c'est toi Dieu qui a affolé mon instinct maternel, qui m'a fait m'approcher de ces épais rideaux auxquels s'accrochait Phineas en pleurant ?
    Il a tout détruit. Les rideaux sont tombés, tombés sur mon enfant, tombés sur sa frêle petite tête brune. Il n'a rien vu. Il n'a rien vu.
    Pourquoi n'avais-je jusqu'ici jamais entendu les pleurs de ma petite fille agonisante ? Est-ce toi, Dieu, qui attendait que je fasse un pas vers elle ?
    C'est un monstre, un montre horrible, pourquoi ai-je attendu le massacre pour l'arrêter ? Est-ce toi, Dieu, qui m'a punie pour n'être qu'une idiote ?
    Je l'ai prise dans mes bras, comme toute mère aurait dû le faire et j'ai parlé pour la première fois depuis des années. Je lui ai dit que c'était un monstre ; merci, seigneur, pour m'avoir rendu la parole. Mais je t'ai trahi, je ne serais pas de ton rang.

    Elle me regardait avec ses petits yeux bleus, ses cheveux blonds étaient pleins d'un liquide dégoutant. Les larmes coulaient partout sur son visage et il riait, il riait. J'ai voulu couper ce sourire à tout jamais. J'ai coupé ce sourire à tout jamais et je ne m'en veux pas, je ne serais pas des tiens, seigneur. Car mes mains sont salies. J'ai lavé le crime et pour cela, j'ai dû me salir moi-même, y mettre toute mon âme.

    Elle n'aurait pas pu vivre avec un tel souvenir, je l'ai vu dans ses yeux. J'ai tout de suite su ce qu'il fallait que je fasse, il fallait que j'écourte la douleur qui s'affichait partout sur son corps si frêle. Elle n'avait que 5 ans, elle n'avait que 5 ans et depuis combien de temps cela durait-il ? Je n'ai pas voulu savoir.
    Il m'a regardé trancher sa vie avec étonnement, il ne pensait pas que j'étais capable d'être aussi monstrueuse que lui, il ne savait pas que c'était pour la sauver. Il s'est jeté sur moi comme tant de fois auparavant, mais cette fois ne s'est pas passée comme les autres. J'ai tranché sa vie, à lui aussi.

    Seigneur, mes mains sont pleines de sang, je ne suis plus des tiens, je ne sais plus quoi faire, j'ai perdu ma fille, j'ai perdu William, Phineas s'est évaporé.
    Il est temps pour moi de rejoindre les rangs du paria que tu as abandonné, abandonné tout comme moi. Dieu, tu m'as abandonné comment as-tu pu faire ça, qu'ai-je fait pour mériter ça ?
    Je n'aurais jamais l'occasion de te le demander. »
    Le long manuscrit s'arrête sur ces quelques mots.

    Plus tard, Phineas Legmend, l'enfant porté disparu après la mort de son père et de sa sœur et le suicide de sa mère est retrouvé, errant dans les rues d'oxford.
    Il a 6 ans, il est donc admis dans un orphelinat de la ville.

    Le jeune garçon ne sort pas un mot, on présume ainsi qu'il a toujours été muet. Il affiche aussi une légère surdité, des facteurs qui l'évitent de passer des séances normales d'interrogatoire. De toute façon, l'histoire de sa famille est plus qu'évidente, son témoignage n'y apporterait pas grand-chose et la psychologue pour enfant est fondamentalement contre le fait de replonger cet enfant dans des souvenirs aussi douloureux.

    L'année passe ainsi, mais les résultats scolaires du jeune garçon s'avèrent largement au-dessus de la moyenne. Les tests se suivent alors pendant des mois jusqu'à ce qu'un jour, Phineas doivent être transféré dans un orphelinat plus adapté à ses capacités. Nous sommes alors en 1997.


    - -


    Il ouvre le portail, le vent souffle dans ses fins cheveux et lui donne un air triste et résolu. Il a 7 ans, mais ses petits yeux noisette sont perdus dans la perplexité et l'amertume tandis que l'homme qui l'accompagne lui présente l'orphelinat. Il s'emmitoufle dans son écharpe, les larmes ne viendront pas, elles ne viennent plus depuis bien longtemps, a-t-il d'ailleurs déjà pleuré ? Oui, sûrement, comme tous les nouveaux nés, il a bien dû pleurer à ce moment-là. Mais depuis, bien des choses sont arrivées et ce corps fin, peu athlétique, qui marche au ralenti ne fait plus qu'errer, sans qu'aucune larme ou étincelle de joie ne puisse le submerger, l'envahir, lui faire prendre vie.
    Il lève les yeux et fait face à la réalité. « Réalité », le mot lui vient à l'esprit accompagné de nombreux adjectifs, aucun n'est plaisant à vivre. Tout autour de lui, il n'y a que du noir, du blanc, du marron, du gris. De toute façon, il n'aime pas les couleurs. Ainsi il porte des vêtements d'une couleur terne et livide, à l'image du temps et, comme pour ne pas faire tache, ses yeux sont vitreux, laissant toute la gloire à des cheveux malmenés par un vent circulaire, dont le châtain donne un semblant de vie à l'être démesurément grand et pâle qui traverse les allées.


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    Avec le temps - je vous l'accorde : 12 ans s'écoulent bien lentement – on ne peut pas dire que Phineas ait beaucoup changé. On peut tout de même constater que le regard sans vie qu'il abordait alors a su s'estomper avec les années pour laisser place à un semblant d'âme. Ne dit-on pas que le temps soigne toutes les blessures après tout ? Il faut croire que ce proverbe s'approche, disons, de la réalité. « Réalité », un mot que le jeune homme a d'ailleurs toujours autant de mal à apprécier. À celui-là s'ajoute aussi une ribambelle d'autres mots. Il suffit de les compter sur un dictionnaire, mais vous n'y serez jamais, il ne s'évertuerait pas lui-même à les compter. Heureusement, il n'aura plus jamais à les dire.
    C'est ce léger détail, invisible à l'œil nu, qui étonne, surprend, intéresse. Peut-être aurais-je dû mettre l'accent sur ce détail qui n'en est pas un, puisqu'il est toute l'essence des méandres philosophiques de l'esprit du jeune homme, son absence de parole, son isolement sonore. Phineas, dit flegme le flegmatique, l'essence même du calme, ne parle pas : il est muet. Muet comme dans « Privé de parole », mais par qui ? Comment ? Et bien ça, il ne me l'a pas dit. Je ne sais pas vraiment s'il le sait lui-même, toujours est-il qu'aucun mot n'est sorti de sa bouche depuis bien des années.
    Après avoir étonné, surpris, le détail est analysé la plupart du temps. Il en ressort bien souvent comme une qualité. Phlegm ne parle pas pour ne rien dire, il ne parle pas du tout, il est calme, posé, réfléchi et consciencieux. On lui fait alors vite confiance. Plutôt facile et sans risque, vous l'aurez compris, d'aller raconter sa vie à un muet qui vous tend l'oreille.
    De son côté, rien n'a vraiment d'importance, il vit les minutes comme les heures et comme les années, elles passent et voilà tout. Avec le temps, même s'il a su se faire accepter et apprécier, il n'en a pas pour autant changé son point de vue sur l'humanité. Les Hommes ne savent pas ce qu'ils veulent, ils sont dépourvus de sens critique et on ne peut pas leur faire confiance. On ne peut faire confiance qu'à soi-même.


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    YOUR NAME OR PSEUDO ? Mon pseudo, ce sera celui que vous me donnerez.
    HOW DID YOU DISCOVERED THE FORUM ? Je ne crois pas vraiment au hasard, mais vous pouvez lui metttre ça sur le dos.
    WHAT DO YOU THINK AOUT THE FORUM ? Bien pensé. Il ne nécessite à mon goût pas d'améliorations particulières.
    SOMETHING ELSE TO SAY ? Je trouve que « Fin de la partie » sonne bien mieux que son équivalent anglais tellement top souvent utilisé. Mais c'est surtout parce que j'aime faire chier mon monde.

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Phlegmat : from disgust to silence.

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